Vu le pourvoi du ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat, porte-parole du gouvernement enregistré le 9 février 2011 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat ; le ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat, porte-parole du gouvernement demande au Conseil d'Etat :
1° d'annuler l'arrêt n° 09VE00639 du 13 décembre 2010 par lequel la cour administrative d'appel de Versailles, faisant partiellement droit à l'appel de la société anonyme Eiffage et réformant le jugement du 22 janvier 2009 du tribunal administratif de Versailles, a, d'une part, réduit les bases d'imposition de la contribution de 10 % sur l'impôt sur les sociétés à laquelle la société Eiffage a été assujettie au titre de l'exercice clos au cours de l'année 1995 d'une somme de 320 274,04 euros pour ce qui est des résultats de la société anonyme NORELEC et a , d'autre part, déchargé la société anonyme Eiffage des cotisations supplémentaires à la contribution de 10 % sur l'impôt sur les sociétés correspondant à la réduction de base prononcée précédemment ;
2° réglant l'affaire au fond, de rejeter dans cette mesure les conclusions présentées par la société Eiffage devant la cour administrative d'appel de Versailles;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Michel Bart, Conseiller d'Etat,
- les conclusions de M. Edouard Crépey, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Monod, Colin, avocat de la société Eiffage ;
1. Considérant qu'aux termes de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales : " Pour l'impôt sur le revenu et l'impôt sur les sociétés, le droit de reprise de l'administration des impôts s'exerce jusqu'à la fin de la troisième année qui suit celle au titre de laquelle l'imposition est due " ; qu'aux termes de l'article L. 189 du même livre : " La prescription est interrompue par la notification d'une proposition de redressement (...) " ; qu'en application de ces dispositions, le délai dont dispose l'administration fiscale pour vérifier l'existence et la quotité d'un déficit court de l'exercice sur les résultats duquel le déficit a été imputé à titre de charge et non de l'exercice au cours duquel il a pris naissance ;
2. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la SA Norelec qui fait partie d'un groupe fiscal intégré à la tête duquel se trouve la SA Eiffage, a fait l'objet d'une notification de redressements en date du 6 février 1998 au titre de l'exercice clos au cours de l'année 1995 ; qu'une nouvelle notification de redressement adressée à la SA Norelec le 27 janvier 1999 a augmenté les redressements initialement notifiés en tirant les conséquences d'un redressement portant sur l'exercice clos au cours de l'année 1993, qui a augmenté un déficit antérieur imputé sur les résultats de l'exercice clos au cours de l'année 1994 ;
3. Considérant qu'il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué que pour faire droit aux prétentions de la SA Norelec, la cour a estimé que l'administration ayant, dans la notification de redressement du 27 janvier 1999, augmenté les redressements en cause, en rehaussant les bases imposables de cette société, dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux, cette circonstance a privé la notification en date du 6 février 1998 de son effet interruptif de prescription dès lors que les bases ayant servi à l'établissement des bases d'imposition en litige n'ont pas été limitées aux montants initialement notifiés ; que, par suite le délai dont disposait l'administration fiscale sur le fondement de l'article L 169, et qui courait à compter de l'exercice 1994 était clos ; qu'en statuant ainsi, alors que l'administration s'est bornée à invoquer le caractère récapitulatif de la notification de redressement du 27 janvier 1999 en produisant pour la première fois devant le juge de cassation une notification antérieure en date du 12 mars 1998, la cour n'a commis ni erreur de droit ni dénaturation des faits de l'espèce ; que, dès lors, le ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat, porte-parole du gouvernement n'est pas fondé à demander l'annulation de l'arrêt attaqué ;
4. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à la société Eiffage de la somme de 3000 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
D E C I D E :
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Article 1er Le pourvoi du Ministre du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat, porte-parole du gouvernement, est rejeté.
Article 2 L'Etat versera à la société Eiffage la somme de 3000 euros au titre de l'article L 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : La présente décision sera notifiée au ministre de l'économie et des finances et à la société Eiffage.