Vu le pourvoi sommaire et le mémoire complémentaire, enregistrés les 30 avril et 30 juillet 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, présentés pour la commune de Montardon, représentée par son maire ; la commune de Montardon demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement n° 1001369 du 29 décembre 2011 par lequel le tribunal administratif de Pau, à la demande de M. B...A..., a annulé l'arrêté du 9 juin 2010 par lequel le maire de Montardon a décidé de s'opposer à la déclaration préalable de travaux déposée, le 12 mai 2010, par M. A...en vue du remplacement de la clôture de sa propriété sise au 1 chemin des Prés Verts à Montardon ;
2°) réglant l'affaire au fond, de rejeter la demande de M. A...;
3°) de mettre à la charge de M. A...une somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Didier Ribes, Maître des Requêtes,
- les conclusions de Mme Suzanne von Coester, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Baraduc, Duhamel, avocat de la commune de Montardon et à la SCP Barthélemy, Matuchansky, Vexliard, avocat de M. A...;
1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M.A..., propriétaire d'une maison d'habitation située sur le territoire de la commune de Montardon, dans le département des Pyrénées Atlantiques, a déposé une déclaration préalable tendant à régulariser le remplacement de la clôture grillagée existante de sa propriété par une clôture en PVC blanche ; que, par un arrêté du 9 juin 2010, le maire de Montardon s'est opposé à cette déclaration préalable au motif que le projet ne s'insérait pas dans la continuité des clôtures voisines et portait ainsi atteinte au paysage urbain ; que par un jugement du 29 décembre 2011 contre lequel la commune de Montardon se pourvoit en cassation, le tribunal administratif de Pau a annulé, à la demande de M.A..., l'arrêté du 9 juin 2010 ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article R. 611-7 du code de justice administrative : " Lorsque la décision lui paraît susceptible d'être fondée sur un moyen relevé d'office, le président de la formation de jugement ou, au Conseil d'Etat, la sous-section chargée de l'instruction en informe les parties avant la séance de jugement et fixe le délai dans lequel elles peuvent, sans qu'y fasse obstacle la clôture éventuelle de l'instruction, présenter leurs observations sur le moyen communiqué. " ; que ces dispositions impliquent que, pour permettre aux parties de présenter utilement leurs observations, un délai suffisant doit leur être laissé ;
3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au Conseil d'Etat que, par lettre du 14 novembre 2011, le tribunal administratif de Pau a informé les parties, en application de l'article R. 611-7 cité ci-dessus, que sa décision était susceptible d'être fondée sur un moyen relevé d'office et donné aux parties un délai de dix jours pour présenter d'éventuelles observations ; que la commune n'est pas fondée à soutenir qu'un tel délai aurait été insuffisant pour lui permettre de présenter des observations ; qu'au surplus, celle-ci a adressé au tribunal administratif un mémoire en réponse deux jours seulement après avoir été informée du moyen susceptible d'être relevé d'office ;
4. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article R. 711-3 du code de justice administrative : " Si le jugement de l'affaire doit intervenir après le prononcé de conclusions du rapporteur public, les parties ou leurs mandataires sont mis en mesure de connaître, avant la tenue de l'audience, le sens de ces conclusions sur l'affaire qui les concerne. " ; que ces dispositions n'imposent pas au rapporteur public, à peine d'irrégularité de la décision, de mentionner, lorsqu'il conclut à l'annulation d'une décision, les moyens qu'il propose d'accueillir ; que par suite, la commune requérante ne saurait utilement invoquer, à l'encontre du jugement qu'elle attaque, la circonstance que le rapporteur public n'a pas préalablement communiqué aux parties le moyen d'annulation qu'il a proposé au tribunal administratif d'accueillir ;
5. Considérant, en dernier lieu, que si la requérante fait valoir que le jugement attaqué a omis de mentionner dans ses visas les deux mémoires produits par les parties en réponse au courrier du tribunal les informant de ce que sa décision était susceptible d'être fondée sur un moyen relevé d'office, cette circonstance n'est, par elle-même, pas de nature à vicier la régularité du jugement attaqué dès lors qu'en l'espèce, il n'est établi, ni même allégué, que ces mémoires apportaient un élément nouveau auquel il n'aurait pas été répondu dans les motifs du jugement attaqué ;
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
6. Considérant qu'aux termes de l'article R. 421-2 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable à la date de la décision contestée : " Sont dispensées de toute formalité au titre du présent code, en raison de leur nature ou de leur très faible importance, sauf lorsqu'ils sont implantés dans un secteur sauvegardé dont le périmètre a été délimité ou dans un site classé : / (...) / g) Les clôtures, en dehors des cas prévus à l'article R. 421-12, ainsi que les clôtures nécessaires à l'activité agricole ou forestière " ; qu'aux termes de l'article R. 421-12 du code de l'urbanisme : " Doit être précédée d'une déclaration préalable l'édification d'une clôture située : / (...) / d) Dans une commune ou partie de commune où le conseil municipal ou l'organe délibérant de l'établissement public de coopération intercommunale compétent en matière de plan local d'urbanisme a décidé de soumettre les clôtures à déclaration " ;
7. Considérant, en premier lieu, que pour annuler l'arrêté du 9 juin 2010, le tribunal administratif de Pau s'est fondé sur le moyen, qu'il a relevé d'office, tiré de ce que la mise en oeuvre le 1er octobre 2007 des nouvelles dispositions d'urbanisme citées au point précédent, qui ont eu pour effet de dispenser de toute autorisation d'urbanisme, sauf exceptions limitativement prévues par l'article R. 421-12 du code de l'urbanisme, l'édification et, par voie de conséquence, les remplacements de clôture, ont rendu caduque la disposition du règlement du plan d'occupation des sols de la commune de Montardon prévoyant que l'édification des clôtures est soumise à déclaration, ce qui autorisait M. A...à procéder librement au remplacement de la clôture limitant sa propriété ; que, contrairement à ce que soutient la requérante, le tribunal était tenu, à peine de méconnaissance du champ d'application de la loi, de soulever d'office ce moyen, qui est d'ordre public ; que si la requérante fait valoir que, par délibération du 10 décembre 2007, le conseil municipal a décidé de soumettre l'édification de clôture à déclaration préalable et si elle soutient que le tribunal aurait dû s'interroger d'office sur l'existence d'une telle délibération, il lui appartenait de produire cette délibération, ce qu'elle a omis de faire devant les juges du fond ; que, par suite, en fondant sa décision sur le moyen évoqué, le tribunal administratif n'a pas commis d'erreur de droit ;
8. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article UC 1 du règlement du plan d'occupation des sols de la commune de Montardon applicable à la date de la décision litigieuse : " 1. Rappels : / (...) / l'édification des clôtures est soumise à déclaration " ; [que cette disposition constituait un simple rappel de l'article L. 441-2 du code de l'urbanisme qui était entré en vigueur le 7 octobre 1999, date à laquelle le plan d'occupation des sols de la commune de Montardon a été adopté, et aux termes duquel, dans les communes dotées d'un plan d'occupation des sols rendu public ou approuvé], " l'édification des clôtures est subordonnée à une déclaration préalable dans les conditions prévues à l'article L. 422-2 " ; qu'elle ne peut être regardée comme la mise en oeuvre des nouvelles dispositions d'urbanisme en vigueur le 1er octobre 2007, qui ont abrogé ces dispositions de l'article L. 441-2, et confèrent au conseil municipal la faculté de soumettre à autorisation l'édification d'une clôture ; que, par suite, en estimant que la mention précitée de l'article UC 1 du plan d'occupation des sols n'avait pas pour effet de soumettre à déclaration préalable l'édification et, par voie de conséquence, le remplacement de clôture dans la commune, le tribunal n'a commis aucune erreur de droit ;
9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la commune de Montardon n'est pas fondée à demander l'annulation du jugement du tribunal administratif de Pau du 29 décembre 2011 ;
Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
10. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de M.A..., qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante ; qu'en revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Montardon une somme de 2 000 euros au titre des mêmes dispositions ;
D E C I D E :
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Article 1er : La requête de la commune de Montardon est rejetée.
Article 2 : La commune de Montardon versera à M. A...une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à la commune de Montardon et à M. B...A.... Copie en sera adressée pour information à la ministre de l'égalité des territoires et du logement.