VU LA PROCEDURE SUIVANTE
Procédure contentieuse antérieure
M. B...A...a demandé à la Cour nationale du droit d'asile, d'une part, d'annuler la décision en date du 2 avril 2010 par laquelle le directeur général de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) a de nouveau rejeté sa demande d'asile et, d'autre part, de lui reconnaître la qualité de réfugié ou, à défaut, de lui accorder le bénéfice de la protection subsidiaire.
Par une décision n° 10009266 du 5 février 2013, la Cour nationale du droit d'asile a annulé la décision du 2 avril 2010 et accordé à M. A...le bénéfice de la protection subsidiaire.
Procédure devant le Conseil d'Etat
Par un pourvoi et un mémoire complémentaire, enregistrés les 23 avril et 31 juillet 2013 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'OFPRA, représenté par Me Foussard, demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler la décision n° 10009266 du 5 février 2013 de la Cour nationale du droit d'asile ;
2°) de renvoyer l'affaire devant la Cour nationale du droit d'asile.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. François Loloum, Conseiller d'Etat,
- les conclusions de Mme Delphine Hedary, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à Me Foussard, avocat de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) et à Me Haas, avocat de M. A... ;
CONSIDÉRANT CE QUI SUIT :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond qu'après avoir vu sa première demande d'asile rejetée tant par l'OFPRA en 2003 que par la Cour nationale du droit d'asile en 2006, M. B... A..., de nationalité indienne, a sollicité le réexamen de sa demande. Par une décision du 2 avril 2010, l'OFPRA a de nouveau rejeté sa demande au motif que les faits qu'il alléguait n'étaient pas établis et que les craintes de persécution qu'il faisait valoir n'étaient pas fondées. Par une décision du 5 février 2013, la Cour nationale du droit d'asile a, d'une part, annulé la décision de l'OFPRA et, d'autre part, accordé à M. A...le bénéfice de la protection subsidiaire prévue à l'article L. 712-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, eu égard aux menaces graves de traitements inhumains ou dégradants auxquelles celui-ci serait exposé du fait de sa détention, qui ne ferait aucun doute en cas de retour en Inde, en considérant par ailleurs qu'il n'y avait pas lieu d'exclure l'intéressé du bénéfice de cette protection en application des b) et c) de l'article L. 712-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors qu'il n'y avait pas de " raisons sérieuses de penser " que M. A...avait " commis un crime grave de droit commun " et s'était rendu " coupable d'agissements contraires aux buts et aux principes des Nations unies ".
2. L'OFPRA soutient, en premier lieu, que la décision de la Cour serait entachée d'une contradiction de motifs pour avoir estimé que les poursuites judiciaires dont M. A... faisait l'objet en Inde étaient légitimes et légales et, dans le même temps, jugé qu'il n'existait pas de raisons sérieuses de penser que le requérant se serait rendu coupable d'agissements contraires aux buts et principes des Nations Unies ou qu'il aurait commis un crime grave de droit commun et qu'il ne résultait ni de l'instruction ni des débats en audience publique que l'intéressé aurait été ou soit encore lié au mouvement terroriste séparatiste sikh Babbar Khalsa ou à l'un quelconque de ses dirigeants passés ou actuels. Toutefois, l'appréciation du caractère des poursuites dont M. A...faisait l'objet se rattache à l'examen des conditions dans lesquelles, en application de l'article L. 712-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le bénéfice de la protection subsidiaire peut être octroyé à un demandeur d'asile, et non à l'examen des critères pouvant justifier l'exclusion de cette protection à raison des faits mentionnés à l'article L. 712-2 du même code. Par suite, le moyen tiré d'une contradiction de motifs doit être écarté.
3. En deuxième lieu, la Cour nationale du droit d'asile n'a pas dénaturé les pièces du dossier et les faits de la cause en relevant que les éléments produits et les justifications apportées aux débats ne permettaient pas de retenir l'appartenance de M. A... au Babbar Khalsa et sa participation à la tentative d'assassinat pour laquelle il était recherché. Elle a donc pu en déduire, dans le cadre de son pouvoir souverain d'appréciation, que ni les pièces du dossier ni les faits de la cause n'étaient suffisants pour considérer que les conditions d'application de l'article L. 712-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile étaient réunies. Le moyen doit donc être écarté.
4. En troisième lieu, il résulte de la décision attaquée que la Cour s'est bornée à estimer qu'il n'y avait pas d'éléments suffisants pour penser que M. A...serait impliqué dans les faits pour lesquels il était poursuivi. En jugeant ainsi, elle n'a, contrairement à ce que soutient l'OFPRA, pas exigé que soit établie la réalité de la participation de l'intéressé aux faits qui lui sont reprochés par les autorités indiennes, ni même que soient rapportées des preuves, au sens du procès pénal, d'une telle participation. Elle n'a donc pas commis à ce titre d'erreur de droit.
5. En dernier lieu, en se référant aux " articles de presse produits au dossier " et en relevant, d'une part, les contradictions qu'ils recélaient quant à la participation de l'intéressé aux faits reprochés et, d'autre part, l'incohérence relative à sa présence en Inde au printemps 2010 alors qu'il était en France à cette période, constatations qui étaient de nature à affaiblir la force probatoire de ces articles, la Cour a suffisamment motivé sa décision.
6. Il résulte de tout ce qui précède que l'OFPRA n'est pas fondé à obtenir l'annulation de la décision qu'il attaque.
Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'OFPRA la somme de 3 000 euros à verser à Me Haas, avocat de M.A..., au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi de la loi du 10 juillet 1991.
D E C I D E :
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Article 1er : La requête de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides est rejetée.
Article 2 : L'Office français de protection des réfugiés et apatrides versera à Me Haas, avocat de M.A..., la somme de 3 000 euros, sur le fondement des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et à M. B...A....