Vu la procédure suivante :
La commune du Faou, d'une part, et le comité de lutte contre l'implantation d'une installation de stockage de déchets inertes sur le site du Stum à Rumengol, M. E...N..., M. H...A..., M. B...G..., M. et Mme D...O..., M. K...F..., et M. et Mme C...M..., d'autre part, ont demandé au juge des référés du tribunal administratif de Rennes de suspendre l'exécution de l'arrêté du 11 mars 2013 par lequel le préfet du Finistère a autorisé M. I...L...à exploiter une installation de stockage de déchets inertes au lieu-dit Le Stum situé sur le territoire de la commune du Faou.
Par une ordonnance n°s 1304908, 1304910 du 23 janvier 2014, le juge des référés du tribunal administratif de Rennes, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, a fait droit à ces demandes.
Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et deux autres mémoires enregistrés les 10 février, 24 février, 14 mai 2014 et 10 mars 2015 au secrétariat du contentieux du Conseil d'État, M. L...et la société Ouest Assainissement Environnement demandent au Conseil d'État :
1°) d'annuler cette ordonnance n°s 1304908, 1304910 du 23 janvier 2014 du juge des référés du tribunal administratif de Rennes ;
2°) statuant en référé, de rejeter les demandes de la commune du Faou et du comité de lutte contre l'implantation d'une installation de stockage de déchets inertes sur le site du Stum à Rumengol et autres ;
3°) de mettre à la charge de la commune du Faou et du comité de lutte contre l'implantation d'une installation de stockage de déchets inertes sur le site du Stum à Rumengol et autres la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de l'environnement ;
- le code de justice administrative.
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Guillaume Déderen, maître des requêtes en service extraordinaire,
- les conclusions de Mme Suzanne von Coester, rapporteur public.
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Gatineau, Fattaccini, avocat de M. L...et autre, et à Me Foussard, avocat de la commune du Faou et autres.
1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés que, par un arrêté du 11 mars 2003 pris sur le fondement de l'article L. 541-30-1 du code de l'environnement, le préfet du Finistère a autorisé M. L...et la société Ouest Assainissement Environnement à exploiter une installation de stockage de déchets inertes au lieu-dit Le Stum sur le territoire de la commune du Faou ; que la commune du Faou, d'une part, et le comité de lutte contre l'implantation d'une installation de stockage de déchets inertes sur le site du Stum à Rumengol et plusieurs habitants de la commune, d'autre part, ont demandé la suspension de l'exécution de cet arrêté ; que par une ordonnance du 23 janvier 2014, contre laquelle M. L... et la société Ouest Assainissement Environnement se pourvoient en cassation, le juge des référés du tribunal administratif de Rennes a fait droit à ces demandes en suspendant l'exécution de l'arrêté du 11 mars 2013, jusqu'à ce qu'il soit statué au fond sur la légalité de ce dernier ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision. " ;
3. Considérant que l'urgence justifie que soit prononcée la suspension d'un acte administratif lorsque l'exécution de celui-ci porte atteinte, de manière suffisamment grave et immédiate, à un intérêt public, à la situation du requérant ou aux intérêts qu'il entend défendre ; qu'il appartient au juge des référés d'apprécier concrètement, compte tenu des justifications fournies par le requérant, si les effets de l'acte litigieux sont de nature à caractériser une urgence justifiant que, sans attendre le jugement de la requête au fond, l'exécution de la décision soit suspendue ;
4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés que les travaux d'aménagement du site ont été achevés et que l'exploitation de l'installation a commencé au mois d'octobre 2013 ; que la commune du Faou et autres ont saisi le juge des référés du tribunal administratif de Rennes le 23 décembre suivant ; que l'installation, située dans une zone agricole et forestière faiblement peuplée, est destinée à accueillir de la terre et des déchets de construction ; que son exploitation répond à des besoins locaux en matière de stockage de déchets inertes ; que si la commune du Faou a fait état dans ses écritures devant le juge des référés d'une disparition des éléments linéaires, végétaux et haies d'exploitation, elle n'a fourni aucun élément tendant à établir qu'une telle disparition, au demeurant contestée par le préfet du Finistère ainsi que par M. L...et autres, résultait non de l'aménagement du site, déjà réalisé, mais de son exploitation ; que le comité de lutte contre l'implantation d'une installation de stockage de déchets inertes sur le site du Stum à Rumengol et autres se sont bornés à affirmer dans leurs écritures que l'exploitation en cours porterait atteinte au cadre de vie et à l'environnement des habitants du Stum et que les camions se rendant chaque jour sur le site, dont le nombre moyen était estimé à cinq, devraient emprunter une route connaissant un important trafic ; que, par suite, en jugeant qu'eu égard aux nuisances et aux troubles de jouissance que le centre de stockage de déchets inertes était susceptible de causer aux personnes résidant dans son voisinage, ainsi qu'au risque de dégradation du site, qu'il comporte, la suspension demandée présentait un caractère d'urgence, le juge des référés du tribunal administratif a dénaturé les pièces du dossier ;
5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens des pourvois, que M. L...et la société Ouest Assainissement Environnement sont fondés à demander l'annulation de l'ordonnance qu'ils attaquent ;
6. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de régler l'affaire au titre de la procédure de référé engagée par la commune du Faou et autres, en application des dispositions de l'article L. 821-2 du code de justice administrative ;
7. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit au point 4 qu'en l'état de l'instruction, la condition relative à l'urgence, qui doit s'apprécier objectivement et globalement, n'est pas remplie en l'espèce ; que, par suite, la demande de suspension de l'arrêté du 11 mars 2003 présentée par la commune du Faou et autres devant le juge des référés du tribunal administratif de Rennes ne peut donc qu'être rejetée ;
8. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'État, de M. L... et de la société Ouest Assainissement Environnement qui ne sont pas, dans la présente instance, les parties perdantes ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune du Faou et du comité de lutte contre l'implantation d'une installation de stockage de déchets inertes sur le site du Stum à Rumengol, M.N..., M. A..., M.G..., M. et MmeO..., M.F..., M. M...et MmeJ..., au titre des procédures de première instance et de cassation, une somme globale de 2 000 euros à verser à M. L...et à la société Ouest Assainissement Environnement ;
D E C I D E :
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Article 1er : L'ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Rennes du 23 janvier 2014 est annulée.
Article 2 : La demande présentée par la commune du Faou et autres devant le juge des référés du tribunal administratif de Rennes est rejetée.
Article 3 : La commune du Faou et le comité de lutte contre l'implantation d'une installation de stockage de déchets inertes sur le site du Stum à Rumengol, M.N..., M.A..., M.G..., M. et MmeO..., M.F..., M. M...et Mme J...verseront à M. L...et à la société Ouest Assainissement Environnement une somme globale de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Les conclusions présentées par la commune du Faou et par le comité de lutte contre l'implantation d'une installation de stockage de déchets inertes sur le site du Stum à Rumengol et autres au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. I...L..., à la société Ouest Assainissement Environnement, à la commune du Faou et au comité de lutte contre l'implantation d'une installation de stockage de déchets inertes sur le site du Stum à Rumengol, premier défendeur dénommé. Les autres défendeurs seront informés de la présente décision par Me Foussard, avocat au Conseil d'État et à la Cour de cassation, qui les représente devant le Conseil d'État.
Copie en sera adressée pour information à la ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie.