Vu la procédure suivante :
Par une requête, enregistrée le 23 mars 2012, M. B...a demandé au Conseil d'Etat de condamner la SCP Potier de la Varde, Buk Lament à l'indemniser du préjudice qu'il estime avoir subi du fait de la faute commise par cette SCP dans l'exercice de ses fonctions. Par une décision n° 357862 du 7 février 2013, le Conseil d'Etat statuant au contentieux a rejeté cette requête.
Par une requête sommaire, un mémoire complémentaire et un nouveau mémoire, enregistrés les 20 juin et 24 juillet 2013 et le 22 mai 2015 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. B...demande au Conseil d'Etat :
1°) de rectifier cette décision pour erreur matérielle ;
2°) de faire droit à sa demande tendant à la condamnation de la SCP Potier de la Varde, Buk Lament à l'indemniser du préjudice qu'il estime avoir subi de son fait ;
3°) de mettre à la charge de la SCP Potier de la Varde, Buk Lament le versement d'une somme de 4 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- l'ordonnance du 10 septembre 1817 ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Leïla Derouich, maître des requêtes,
- les conclusions de Mme Fabienne Lambolez, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Gatineau, Fattaccini, avocat de M. B...et à la SCP Piwnica, Molinié, avocat de la SCP Potier de la Varde, Buk Lament ;
1. Considérant qu'aux termes de l'article R. 833-1 du code de justice administrative : " Lorsqu'une décision d'une cour administrative d'appel ou du Conseil d'Etat est entachée d'une erreur matérielle susceptible d'avoir exercé une influence sur le jugement de l'affaire, la partie intéressée peut introduire devant la juridiction qui a rendu la décision un recours en rectification. / Ce recours doit être présenté dans les mêmes formes que celles dans lesquelles devait être introduite la requête initiale. Il doit être introduit dans un délai de deux mois qui court du jour de la notification ou de la signification de la décision dont la rectification est demandée (...) " ;
2. Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la décision du Conseil d'Etat du 7 février 2013 dont M. B...demande la rectification pour erreur matérielle lui aurait été notifiée plus de deux mois avant le 20 juin 2013, date d'enregistrement de sa requête ; que la fin de non-recevoir opposée par la SCP Potier de la Varde, Buk Lament doit, par suite être écartée ;
3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. B...a recherché la responsabilité de la SCP Bachellier, Potier de la Varde, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, pour avoir omis de présenter en son nom un pourvoi en cassation contre un arrêt du 28 février 2006 de la cour administrative d'appel de Marseille rendu dans un litige l'opposant à l'administration fiscale ; que, pour estimer, par sa décision du 7 février 2013, que la faute ainsi commise n'avait pas entraîné pour M. B...la perte d'une chance sérieuse d'obtenir la cassation de cet arrêt, le Conseil d'Etat a relevé que le pourvoi qui aurait dû être déposé aurait été identique à quatre pourvois déposés contre quatre arrêts du même jour de la cour administrative d'appel de Marseille présentés par les autres associés de la SCIB..., que le Conseil d'Etat avait décidé de ne pas admettre ; qu'en statuant ainsi, alors que ces quatre arrêts concernaient uniquement les impositions se rapportant aux activités de la SCI au titre des années 1990 et 1991, alors que l'arrêt du 28 février 2006 qui n'a pas fait l'objet d'un pourvoi en cassation était également relatif à l'imposition de M. B...en tant que marchand de biens pour l'année 1989, le Conseil d'Etat a entaché sa décision d'une erreur matérielle susceptible d'avoir exercé une influence sur le jugement de l'affaire ; que, dès lors, la requête en rectification de M. B...est recevable en tant qu'elle concerne la responsabilité de la SCP Bachellier, Potier de la Varde au titre du préjudice ayant résulté pour l'intéressé de l'absence de contestation de l'article 2 de l'arrêt du 28 février 2006 de la cour administrative d'appel de Marseille qui, faisant droit au recours du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, a remis à sa charge les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et les pénalités correspondantes auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 1989 ; qu'il y a lieu, dans cette mesure, de statuer à nouveau sur la requête présentée par M. B...contre la SCP Bachellier, Potier de la Varde ;
4. Considérant qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article 13 de l'ordonnance du 10 septembre 1817 relative à l'ordre des avocats au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation : " Les actions en responsabilité civile professionnelle engagées à l'encontre d'un avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation sont portées, après avis du conseil de l'ordre, devant le Conseil d'Etat, quand les faits ont trait aux fonctions exercées devant le tribunal des conflits et les juridictions de l'ordre administratif, et devant la Cour de cassation dans les autres cas. (...) " ;
5. Considérant qu'il résulte de l'instruction que, par lettre transmise le 29 avril 2006 à la SCP Bachellier, Potier de la Varde, M.B..., par l'intermédiaire de son conseil, MaîtreA..., a donné à la SCP des instructions précises pour déposer en temps utile un pourvoi en cassation tendant à l'annulation de l'arrêt du 28 février 2006 de la cour administrative d'appel de Marseille ; que M. B...soutient qu'en ne déposant pas le pourvoi, la SCP Bachellier, Potier de la Varde a commis une faute professionnelle de nature à engager sa responsabilité à son égard ;
6. Considérant, toutefois, que la responsabilité de la SCP Bachellier, Potier de la Varde ne peut être engagée à l'égard de M. B...que dans la mesure où l'absence de présentation du pourvoi en cassation a entraîné pour lui la perte d'une chance sérieuse d'obtenir la cassation de l'arrêt qu'il entendait attaquer et la décharge de tout ou partie des impositions supplémentaires remises à sa charge au titre de l'année 1989 par l'article 2 de cet arrêt ;
7. Considérant que, pour démontrer que l'article 2 de l'arrêt du 28 février 2006 encourait la cassation, M. B...fait valoir que la cour administrative d'appel de Marseille avait, en premier lieu, omis de répondre à des moyens qu'il avait invoqués en première instance sans les reprendre expressément en appel, commettant ainsi une erreur de droit quant à la portée de l'effet dévolutif de l'appel, en deuxième lieu, commis une erreur de droit et dénaturé les pièces du dossier en estimant que la vente à la SCI B...d'un immeuble au même prix que son prix d'acquisition, qui ne s'était accompagnée d'aucune contrepartie pour M. B..., constituait un acte anormal de gestion, sans accepter de faire jouer un raisonnement fondé sur l'aide de la société mère à sa filiale, alors que ses co-associés dans la SCI avaient consenti des prêts pour l'achat de l'immeuble, en troisième lieu, commis une erreur de droit et dénaturé les pièces du dossier en validant le prix au mètre carré retenu par l'administration fiscale pour l'évaluation de la valeur de l'immeuble en litige et, en quatrième lieu, dénaturé les pièces du dossier en estimant que la superficie retenue par l'administration fiscale était correcte et en n'ordonnant pas à ce titre la réalisation d'une expertise contradictoire ; qu'il ne résulte pas de l'instruction, au vu de ces moyens, que M. B...aurait perdu une chance sérieuse d'obtenir la cassation de l'arrêt du 28 février 2006 ;
8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que les conclusions du requérant tendant à rechercher la responsabilité de la SCP Bachellier, Potier de la Varde sur le fondement du deuxième alinéa de l'article 13 de l'ordonnance du 10 septembre 1817 pour n'avoir pas formé un pourvoi en cassation contre l'article 2 de l'arrêt de la cour administrative d'appel de Marseille du 28 février 2006 doivent être rejetées ;
9. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de la SCP Potier de la Varde, Buk Lament qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante ;
D E C I D E :
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Article 1er : Les motifs de la décision n° 357862 du 7 février 2013 du Conseil d'Etat statuant au contentieux sont complétés par les motifs énoncés au point 7 de la présente décision.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête en rectification d'erreur matérielle de M. B... est rejeté.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à M. C...B...et à la SCP Potier de la Varde, Buk Lament.