Vu la procédure suivante :
Mme B...A...a demandé au tribunal administratif de Nantes de condamner le département de la Vendée à lui verser premièrement une indemnité de licenciement sur la base d'une rémunération nette mensuelle d'un temps complet correspondant à l'indice majoré 548, deuxièmement, une indemnité équivalant à 2 ou 3 mois de traitement, complétés des congés payés, au titre du non-respect du délai de préavis et enfin une indemnité équivalant à un an de traitement au titre du préjudice subi en raison de son licenciement intervenu dans des conditions irrégulières.
Par un jugement n° 08-4786 du 29 septembre 2011, le tribunal administratif de Nantes a, d'une part, condamné le département de la Vendée à payer à Mme A...la somme de 4 007,19 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 15 mai 2008, correspondant au préjudice subi du fait du non-respect du délai de préavis de trois mois et, d'autre part, rejeté le surplus des conclusions de sa demande.
Par un arrêt n° 11NT03075 en date du 7 juin 2013, la cour administrative d'appel de Nantes a rejeté l'appel formé par Mme A...contre ce jugement en tant qu'il n'a pas fait entièrement droit à sa demande.
Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 16 décembre 2013 et 14 mars 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme A... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cet arrêt en ce qu'il lui est défavorable ;
2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à ses conclusions d'appel ;
3°) de mettre à la charge du département de la Vendée la somme de 3 000 euros à verser à la SCP Bore et Salve de Bruneton au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Vu :
-les autres pièces du dossier ;
- le code général des collectivités territoriales ;
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;
- la loi n° 2005-843 du 26 juillet 2005 ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Christian Fournier, maître des requêtes,
- les conclusions de M. Vincent Daumas, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Boré, Salve de Bruneton, avocat de Mme A...et à la SCP Coutard, Munier-Apaire, avocat du département de la Vendée ;
1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que Mme A...a été recrutée par le département de la Vendée à compter du 17 décembre 2001 pour être affectée, en application de l'article L. 3121-24 du code général des collectivités territoriales, au groupe des élus socialistes et indépendants, afin d'y exercer les fonctions de secrétaire de ce groupe ; que Mme A...a bénéficié d'un nouveau contrat à compter du 1er avril 2004 pour une durée de trois ans puis d'un troisième contrat, conclu à compter du 1er avril 2007, prolongeant son engagement jusqu'aux élections cantonales de mars 2008 ; que, par lettre du 6 mars 2008, le département de la Vendée a mis fin à ses fonctions à compter du 20 mars 2008 ; que Mme A...se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 7 juin 2013 par lequel la cour administrative d'appel de Nantes a rejeté sa requête d'appel tendant à l'annulation du jugement du tribunal administratif de Nantes du 29 septembre 2011 en tant que, après avoir condamné le département de la Vendée à lui payer la somme de 4 007,19 euros avec intérêts au taux légal à compter du 15 mai 2008 au titre du préjudice qu'elle estime avoir subi du fait du non-respect du délai de préavis de trois mois, il a rejeté le surplus des conclusions de sa demande indemnitaire ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 811-1 du code de justice administrative, dans sa version antérieure au décret du 13 avril 2013 portant modification du code de justice administrative : " Toute partie présente dans une instance devant le tribunal administratif ou qui y a été régulièrement appelée, alors même qu'elle n'aurait produit aucune défense, peut interjeter appel contre toute décision juridictionnelle rendue dans cette instance. /Toutefois, dans les litiges énumérés aux 1°, 4°, 5°, 6°, 7°, 8° et 9° de l'article R. 222-13, le tribunal administratif statue en premier et dernier ressort. (...) " ; que le 7° de l'article R. 222-13 du même code, dans la même version, mentionne : " (...) les actions indemnitaires, lorsque le montant des indemnités demandées est inférieur au montant déterminé par les articles R. 222-14 et R. 222-15 " ; que ces dernières dispositions ne s'appliquent qu'aux actions indemnitaires autres que celles se rapportant aux catégories de litiges énumérées par les autres alinéas de cet article ;
3. Considérant que les conclusions indemnitaires présentées par Mme A...devant le tribunal administratif de Nantes se rapportent à un litige relatif à sa sortie du service ; que le 2° de l'article R. 222-13 du code de justice administrative exclut du champ d'application de cet article les litiges concernant la sortie du service ; que, par suite, les dispositions du 7° de l'article R. 222-13 du code de justice administrative s'appliquaient aux conclusions indemnitaires de Mme A... ; que la somme de 9 239,20 euros demandée par Mme A...était inférieure au seuil fixé par les articles R. 222-14 et R. 222-15 du même code ; qu'il en résulte que le jugement du tribunal administratif de Nantes du 29 septembre 2011, qui a condamné le département de la Vendée à verser à Mme A...la somme de 4 007,19 euros au titre du préjudice qu'elle estime avoir subi du fait du non-respect du délai de préavis de trois mois et rejeté le surplus des conclusions de sa demande indemnitaire, a été rendu en premier et dernier ressort et n'était susceptible que d'un pourvoi en cassation devant le Conseil d'Etat ; que, dès lors, la cour administrative d'appel de Nantes était incompétente pour statuer, en qualité de juge d'appel, sur ce jugement ; que, sans qu'il soit besoin d'examiner les moyens du pourvoi, son arrêt doit donc être annulé ;
4. Considérant qu'il y a lieu de regarder les conclusions présentées par Mme A... devant la cour administrative d'appel de Nantes comme les conclusions d'un pourvoi en cassation contre le jugement du 29 septembre 2011 du tribunal administratif de Nantes ;
5. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes des troisième à cinquième alinéas de l'article 3 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, dans leur rédaction issue de la loi du 26 juillet 2005 portant diverses mesures de transposition du droit communautaire à la fonction publique : " Par dérogation au principe énoncé à l'article 3 du titre Ier du statut général, des emplois permanents peuvent être occupés par des agents contractuels dans les cas suivants : / 1° Lorsqu'il n'existe pas de cadre d'emplois de fonctionnaires susceptibles d'assurer les fonctions correspondantes ; / 2° Pour les emplois du niveau de la catégorie A, lorsque la nature des fonctions ou les besoins des services le justifient. " ; qu'aux termes des septième et huitième alinéas du même article : " Les agents recrutés conformément aux quatrième, cinquième et sixième alinéas sont engagés par des contrats à durée déterminée, d'une durée maximale de trois ans. Ces contrats sont renouvelables, par reconduction expresse. La durée des contrats successifs ne peut excéder six ans. / Si, à l'issue de la période maximale de six ans mentionnée à l'alinéa précédent, ces contrats sont reconduits, ils ne peuvent l'être que par décision expresse et pour une durée indéterminée " ; qu'aux termes du I de l'article 15 de la loi du 26 juillet 2005, dans sa rédaction alors applicable : " I. - Lorsque l'agent, recruté sur un emploi permanent, est en fonction à la date de la publication de la présente loi (...), le renouvellement de son contrat est soumis aux conditions prévues aux septième et huitième alinéas de l'article 3 de la même loi ";
6. Considérant que si les dispositions citées ci-dessus de la loi du 26 janvier 1984, applicables aux agents recrutés sur un emploi permanent en fonction à la date de la publication de la loi du 26 juillet 2005, prévoient que la durée totale de contrats à durée déterminée successifs ne peut excéder six ans et que, si l'autorité compétente entend les reconduire à l'issue d'une telle période, elle doit prendre une décision expresse et ne peut conclure avec l'agent qu'un contrat à durée indéterminée, il ne saurait en résulter qu'un contrat à durée déterminée conclu, en méconnaissance de ces dispositions, pour une durée qui, compte tenu de la durée des contrats successifs précédemment conclus avec le même agent, conduit, en cours d'exécution du contrat, à dépasser la durée maximale d'emploi de six années, serait tacitement transformé en contrat à durée indéterminée ; que, par suite, le tribunal administratif n'a pas commis d'erreur de droit en jugeant qu'il ne résulte pas de l'application combinée du 1er alinéa de l'article 15 de la loi du 26 juillet 2005 et de l'article 3 de la loi du 26 janvier 1984 que l'agent contractuel, titulaire d'un contrat à durée déterminée à la date de publication de la loi du 26 juillet 2005, pourrait se prévaloir d'une transformation de son contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée alors même que son contrat aurait été illégalement conclu pour une durée excessive ;
7. Considérant, en deuxième lieu, que Mme A...a demandé au tribunal administratif la condamnation du département de la Vendée à réparer les préjudices qu'elle estime avoir subis en raison de la faute qu'aurait commise son employeur en prononçant son licenciement ; que le tribunal administratif, qui a jugé que Mme A...n'avait pas été licenciée mais avait fait l'objet d'un refus de son employeur de renouveler son contrat à durée déterminée arrivé à son terme, a pu écarter, sans entacher son jugement de contradiction de motifs, ses demandes indemnitaires tout en relevant que ce contrat à durée déterminée avait été illégalement conclu pour une durée excessive ;
8. Considérant, en troisième lieu, que le tribunal administratif a jugé que Mme A... n'avait pas fait l'objet d'une procédure de licenciement de la part de son employeur et n'était, par suite, pas fondée à soutenir que le département de la Vendée devrait être condamné à lui verser une indemnité destinée à réparer des irrégularités qui auraient entaché une telle procédure ; que, par suite, les moyens tirés de ce que le tribunal administratif aurait jugé à tort que le département de la Vendée n'avait pas à motiver une décision de licenciement et n'était pas tenu de faire précéder une telle décision d'un entretien préalable et de la communication de son dossier personnel ne peuvent qu'être écartés ;
9. Considérant, enfin, que le tribunal administratif de Nantes n'a pas dénaturé les faits qui lui étaient soumis en jugeant que la décision du département de la Vendée de ne pas poursuivre sa collaboration avec Mme A...s'expliquait par des motifs liés à l'organisation du service ;
10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme A...n'est pas fondée à demander l'annulation du jugement qu'elle attaque ;
11. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que les frais exposés par Mme A...soient mis à la charge du département de la Vendée, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par le département de la Vendée au titre du même article ;
D E C I D E :
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Article 1er : L'arrêt du 7 juin 2013 de la cour administrative d'appel de Nantes est annulé.
Article 2 : Les conclusions de Mme A...tendant à l'annulation du jugement du 29 septembre 2011 du tribunal administratif de Nantes sont rejetées.
Article 3 : Les conclusions présentées par Mme A...et par le département de la Vendée au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à Mme B...A...et au département de la Vendée.