Vu la procédure suivante
Procédure contentieuse antérieure
L'Union des coopératives de fruits et de légumes des Pyrénées-Orientales a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler les titres exécutoires n° 86/2005 du 15 juin 2005 et n° 99/2005 du 22 juin 2005 par lesquels l'Office national interprofessionnel des fruits, des légumes, des vins et de l'horticulture (Oniflhor) lui a demandé le paiement, respectivement, de la somme de 11 419 euros au titre du contrôle des indemnités communautaires de retrait et de la somme de 348 112 euros au titre du contrôle du fonds opérationnel 1997-1998.
Par un jugement n° 0504560 du 21 mars 2008, le tribunal administratif de Montpellier, faisant droit à la demande de l'Union des coopératives de fruits et de légumes des Pyrénées-Orientales, a annulé ces deux titres exécutoires.
Par un premier arrêt n° 08MA02511 du 20 janvier 2011, la cour administrative d'appel de Marseille a rejeté l'appel formé par l'Etablissement national des produits de l'agriculture et de la mer (FranceAgrimer), venant aux droits de l'Oniflhor, contre ce jugement.
Par une décision n° 347500 du 23 décembre 2011, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, faisant droit au pourvoi de FranceAgrimer, a annulé cet arrêt et renvoyé l'affaire à la cour administrative d'appel de Marseille.
Par un second arrêt n° 12MA00275 du 4 novembre 2013, la cour administrative d'appel de Marseille a, d'une part, annulé le jugement du tribunal administratif de Montpellier du 21 mars 2008 en tant seulement qu'il a annulé le titre exécutoire n° 99/2005 du 22 juin 2005 et rejeté la demande de l'Union des coopératives de fruits et de légumes des Pyrénées-Orientales tendant à l'annulation de ce titre exécutoire et, d'autre part, rejeté le surplus de la requête de FranceAgrimer.
Procédure devant le Conseil d'Etat
Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 6 janvier et 7 avril 2014 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la Coopérative de fruits et légumes des Pyrénées-Orientales, venant au droits de l'Union des coopératives de fruits et de légumes des Pyrénées-Orientales, demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler les articles 1er à 3 de ce second arrêt ;
2°) de mettre à la charge de FranceAgrimer la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le règlement (CE) n° 2200/96 du Conseil du 28 octobre 1996 ;
- le règlement (CE) n° 411/97 de la Commission du 3 mars 1997 ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Christophe Pourreau, maître des requêtes,
- les conclusions de Mme Emmanuelle Cortot-Boucher, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Gaschignard, avocat de la Coopérative de fruits et légumes des Pyrénées Orientales et à Me Balat, avocat de l'établissement national des produits de l'agriculture et de la mer ;
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que l'Union des coopératives de fruits et légumes des Pyrénées-Orientales, organisation de producteurs de commercialisation, a mis en oeuvre un programme opérationnel au cours de la période du 1er juillet 1997 au 31 décembre 1998. A l'occasion de contrôles réalisés entre les mois de décembre 1999 et d'août 2002, les services de la direction générale des douanes et droits indirects ont constaté des irrégularités relatives à l'utilisation du fonds opérationnel. Sur la base des conclusions de ces contrôles, l'office national interprofessionnel des fruits, des légumes et de l'horticulture (Oniflhor) a émis, les 15 et 22 juin 2005, deux titres de recettes à l'encontre de l'Union des coopératives de fruits et légumes des Pyrénées-Orientales d'un montant respectif de 11 419 euros et de 348 112 euros. Par un jugement du 21 mars 2008, le tribunal administratif de Montpellier a annulé ces deux titres de recettes. FranceAgrimer, venant aux droits de l'Oniflhor, s'est pourvu en cassation contre l'arrêt du 20 janvier 2011 par lequel la cour administrative d'appel de Marseille a confirmé ce jugement. Par une décision du 23 décembre 2011, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, a annulé cet arrêt et renvoyé l'affaire à la cour administrative d'appel de Marseille. Par un second arrêt du 4 novembre 2013, cette cour a, d'une part, annulé le jugement du tribunal administratif de Montpellier en tant seulement qu'il a annulé le titre exécutoire du 22 juin 2005 et rejeté la demande de l'Union des coopératives de fruits et de légumes des Pyrénées-Orientales tendant à l'annulation de ce titre exécutoire, et, d'autre part, rejeté le surplus des conclusions de la requête de FranceAgriMer. La Coopérative de fruits et légumes des Pyrénées-Orientales, venant aux droits de l'Union des coopératives de fruits et de légumes des Pyrénées-Orientales, se pourvoit en cassation contre cet arrêt en tant qu'il lui est défavorable.
2. Aux termes de l'article 15 du règlement (CE) n° 2200/96 du Conseil du 28 octobre 1996 portant organisation commune des marchés dans le secteur des fruits et légumes : " 1. Dans les conditions définies au présent article, une aide financière communautaire est octroyée aux organisations de producteurs qui constituent un fonds opérationnel. / Ce fonds est alimenté par des contributions financières effectives des producteurs associés, assises sur les quantités ou la valeur des fruits et légumes effectivement commercialisées sur le marché, et par l'aide financière visée au premier alinéa. / 2. Le fonds opérationnel visé au paragraphe 1 est destiné ; / (...) / b) au financement d'un programme opérationnel présenté aux autorités nationales compétentes et approuvé par elles en application de l'article 16 paragraphe 1. / Toutefois, le fonds peut être affecté, en tout ou partie, au financement d'un plan d'action présenté par les organisations de producteurs visées à l'article 13. / (...) 4. Le programme opérationnel mentionné au paragraphe 2 point b) doit : / viser plusieurs des buts à l'article 11 point b) ainsi que d'autres, notamment parmi les suivants ; l'amélioration de la qualité des produits, le développement de leur mise en valeur commerciale, la promotion des produits auprès des consommateurs, la création de lignes de produits biologiques, la promotion de la production intégrée ou autres méthodes destinées à développer l'utilisation de techniques respectueuses de l'environnement par les producteurs associés tant au niveau des pratiques culturales qu'à celui de la gestion des matériels usagés. / (...) / 5. L'aide financière visée au paragraphe 1 est égale au montant des contributions financières, mentionnées au même paragraphe, effectivement versées et est limitée à 50 % du montant des dépenses réelles effectuées en application du paragraphe 2 (...) ". Aux termes de l'article 4, paragraphe 2, du règlement (CE) n° 411/97 de la Commission du 3 mars 1997 portant modalités d'application du règlement (CE) n° 2200/96 du Conseil en ce qui concerne les programmes opérationnels, les fonds opérationnels et l'aide financière communautaire : " Le projet de programme opérationnel ne doit pas porter, notamment, sur : a) des dépenses administratives et des dépenses de gestion, à l'exclusion de celles liées à la réalisation du programme opérationnel (...) ". Aux termes de l'article 9 de ce même règlement : " Les demandes d'aides financières doivent être accompagnées des pièces justificatives attestant : / (...) / c) les dépenses réalisées au titre du programme opérationnel ".
3. Les décisions par lesquelles l'administration déclare éligible à l'aide financière communautaire un fonds opérationnel et agrée les dépenses prévisionnelles qui s'y rattachent ne sont susceptibles de créer un droit au versement de l'aide que dans la mesure où les bénéficiaires de celle-ci justifient que les dépenses qu'ils ont effectivement engagées sont liées aux actions du programme opérationnel ayant reçu l'agrément.
4. En premier lieu, la Coopérative de fruits et légumes des Pyrénées-Orientales soutient que la cour administrative d'appel a omis de répondre aux moyens tirés, d'une part, de ce que l'Oniflhor n'était pas fondé à reprocher à l'Union des coopératives de fruits et légumes des Pyrénées-Orientales de n'avoir pas produit les documents justifiant certaines dépenses effectuées dans le cadre de son programme opérationnel pour 1997/1998 dès lors que la production de ces documents n'était pas exigée lorsqu'elle a présenté à l'administration son projet de programme opérationnel et, d'autre part, de ce l'administration ne pouvait pas, à l'issue du contrôle qu'elle a réalisé entre 1999 et 2002, décider que certaines actions qu'elle avait validées dans le cadre du contrôle d'éligibilité des dépenses lors de l'agrément de son programme opérationnel n'étaient pas éligibles aux fonds européens. Toutefois, en jugeant que les dépenses concernées par le titre de recettes n° 99-2005 du 2 juin 2005 n'avaient pas été engagées conformément aux dispositions du règlement n° 411/987 du 3 mars 1997 et que l'Union des coopératives de fruits et légumes des Pyrénées-Orientales n'avait pas justifié qu'elles étaient effectivement liées aux actions du programme opérationnel pour 1997/1998 ayant reçu l'agrément, la cour administrative d'appel a répondu de façon suffisamment motivée à ces deux moyens.
5. En deuxième lieu, il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que l'Union des coopératives de fruits et légumes des Pyrénées-Orientales s'est contentée d'affirmer, sans le justifier, que les dépenses relatives à l'installation d'un standard téléphonique, d'une climatisation de bureau et de nouveaux bureaux étaient liées au réaménagement de deux stations de conditionnement des coopératives de base et concouraient à la mission de conditionnement, de stockage, de réception et d'expédition prévue par l'action 1.2 de son programme opérationnel 1997/1998. En jugeant qu'il résultait de l'instruction, notamment des faits constatés par le procès-verbal du 2 août 2002, dont la matérialité n'avait pas été valablement contestée devant elle, que l'administration avait pu considérer que ces dépenses n'étaient pas liées à la réalisation de l'action 1.2 du programme opérationnel 1997/1998, la cour administrative d'appel de Marseille a écarté le moyen tiré de ce que les dépenses en cause concouraient effectivement à la mission de conditionnement, de stockage, de réception et d'expédition prévue par son programme opérationnel 1997/1998. En statuant ainsi, la cour administrative d'appel de Marseille n'a ni entaché son arrêt d'une insuffisance de motivation, ni commis d'erreur de droit. Par ailleurs, en relevant dans son arrêt que l'Union des coopératives de fruits et légumes des Pyrénées-Orientales " se borne à faire valoir que ces dépenses ont été approuvées par les contrôleurs de la direction départementale de l'agriculture et de la forêt ", la cour administrative d'appel de Marseille n'a pas dénaturé ses écritures d'appel.
6. En troisième lieu, il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que l'Union des coopératives de fruits et légumes des Pyrénées-Orientales n'a pas produit les documents détaillés permettant d'établir que les dépenses qu'elle a engagées, correspondant à des interventions de techniciens agricoles, pour lesquelles elle a bénéficié d'une aide financière, étaient liées à la réalisation de l'action 1.12 de son programme opérationnel 1997/1998. En jugeant qu'il résultait de l'instruction, notamment des faits constatés par le procès-verbal du 2 août 2002 et non valablement contestés devant elle, que l'administration avait pu considérer que ces dépenses n'étaient pas liées à la réalisation du programme opérationnel 1997/1998, la cour administrative d'appel de Marseille a, par un arrêt suffisamment motivé, écarté le moyen tiré de ce que les documents présentés par l'Union des coopératives de fruits et légumes des Pyrénées-Orientales établissaient que ces dépenses étaient liées à la réalisation de son programme opérationnel 1997/199. Par ailleurs, en relevant dans son arrêt que l'Union des coopératives de fruits et légumes des Pyrénées-Orientales " se borne à faire valoir que ces dépenses avaient été approuvées par les contrôleurs de la direction départementale de l'agriculture et de la forêt ", la cour administrative d'appel de Marseille n'a pas inexactement interprété ses écritures d'appel.
7. En quatrième lieu, il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que l'Union des coopératives de fruits et légumes des Pyrénées-Orientales a obtenu une aide financière, en application de l'action 1.16 de son programme opérationnel 1997/1998, au titre de sommes impayées par quatre de ses débiteurs. Si elle a présenté des pièces comptables établissant le montant des sommes impayées, elle n'a toutefois pas justifié, ni même soutenu, qu'elle avait engagé des dépenses pour recouvrer ces sommes auprès de ses débiteurs. Par suite, la cour administrative d'appel de Marseille a pu juger, sans commettre d'erreur de droit ni dénaturer les écritures de l'Union des coopératives de fruits et légumes des Pyrénées-Orientales, que celle-ci n'avait pu justifier que les dépenses litigieuses avaient été engagées au titre de l'action 1.16 de son programme opérationnel.
8. Il résulte de tout ce qui précède que la Coopérative de fruits et légumes des Pyrénées-Orientales n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêt attaqué.
9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de FranceAgrimer, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante. Il y a lieu, en revanche, en application de ces mêmes dispositions, de mettre à la charge de la Coopérative de fruits et légumes des Pyrénées-Orientales une somme de 3 000 euros à verser à FranceAgriMer.
D E C I D E :
--------------
Article 1er : Le pourvoi de la Coopérative de fruits et légumes des Pyrénées-Orientales est rejeté.
Article 2 : La Coopérative de fruits et légumes des Pyrénées-Orientales versera à FranceAgrimer la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à la Coopérative de fruits et légumes des Pyrénées-Orientales et à l'Etablissement national des produits de l'agriculture et de la mer (FranceAgrimer).