Vu la procédure suivante :
Par une requête, enregistrée le 20 juin 2017 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. A...B...demande au Conseil d'Etat d'annuler pour excès de pouvoir le décret du 28 décembre 2016 qui lui a refusé l'acquisition de la nationalité française.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code civil ;
- le décret n° 93-1362 du 30 décembre 1993 ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. François Weil, conseiller d'Etat,
- les conclusions de M. Guillaume Odinet, rapporteur public ;
1. Considérant qu'aux termes de l'article 21-2 du code civil : " L'étranger ou apatride qui contracte mariage avec un conjoint de nationalité française peut, après un délai de quatre ans à compter du mariage, acquérir la nationalité française par déclaration à condition qu'à la date de cette déclaration la communauté de vie tant affective que matérielle n'ait pas cessé entre les époux depuis le mariage et que le conjoint français ait conservé sa nationalité. / Le délai de communauté de vie est porté à cinq ans lorsque l'étranger, au moment de la déclaration, soit ne justifie pas avoir résidé de manière ininterrompue et régulière pendant au moins trois ans en France à compter du mariage, soit n'est pas en mesure d'apporter la preuve que son conjoint français a été inscrit pendant la durée de leur communauté de vie à l'étranger au registre des Français établis hors de France. En outre, le mariage célébré à l'étranger doit avoir fait l'objet d'une transcription préalable sur les registres de l'état civil français (...) " ; qu'aux termes de l'article 21-4 du même code : " Le Gouvernement peut s'opposer, par décret en Conseil d'Etat, pour indignité ou défaut d'assimilation, autre que linguistique, à l'acquisition de la nationalité française par le conjoint étranger dans un délai d'un an à compter de la date du récépissé prévu au deuxième alinéa de l'article 26 ou, si l'enregistrement a été refusé, à compter du jour où la décision judiciaire admettant la régularité de la déclaration est passée en force de chose jugée (...) " ;
2. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M.B..., ressortissant algérien résidant en Algérie, a épousé le 8 octobre 2008 à Thenia (Algérie) une ressortissante française ; qu'il a souscrit, le 20 septembre 2015, auprès du consulat général de France à Alger une déclaration d'acquisition de la nationalité française à raison de ce mariage ; que le Premier ministre s'est opposé à l'acquisition de la nationalité française par un décret du 28 décembre 2016, au motif qu'il ne pouvait être regardé comme satisfaisant à la condition d'assimilation énoncée à l'article 21-4 du code civil ;
3. Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que le décret attaqué a été pris le 28 décembre 2016, avant l'expiration du délai imparti par les dispositions de l'article 21-4 du code civil ; que la circonstance que le ministre de l'intérieur ait informé l'intéressé moins de deux mois après le dépôt de sa déclaration, par une lettre du 2 novembre 2015 notifiée le 19 novembre 2015, de ce qu'il envisageait de s'opposer à l'acquisition de la nationalité française en mettant en oeuvre les dispositions de l'article 21-4 du code civil, conformément à ce que prévoit l'article 32 du décret du 30 décembre 1993 relatif aux déclarations de nationalité, aux décisions de naturalisation, de réintégration, de perte, de déchéance et de retrait de la nationalité française, n'est constitutive d'aucune irrégularité ;
4. Considérant, en second lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que M. et Mme B...ont eu des entretiens séparés et un entretien commun au consulat général de France à Alger le 20 septembre 2015 après le dépôt de la déclaration d'acquisition de la nationalité française de M.B..., aux fins de vérifier l'assimilation de ce dernier à la communauté française ; que s'il soutient que les dires qui leur sont prêtés par les comptes-rendus de ces entretiens ne reflèteraient pas la teneur de leurs déclarations, aucun élément versé au dossier ne conduit à considérer que la teneur de leurs propos aurait été altérée lors de l'établissement des comptes-rendus ; qu'il résulte des termes de ces documents que M. B...ne partage pas les valeurs essentielles de la société française, en particulier le principe de l'égalité entre les sexes ; qu'il ne peut, par suite, être regardé comme satisfaisant à la condition d'assimilation posée par l'article 21-4 du code civil ; que, dès lors, le Premier ministre a pu légalement se fonder sur ce motif pour s'opposer, par le décret attaqué, à l'acquisition de la nationalité française par M. B... ;
5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par le ministre en défense, que M. B...n'est pas fondé à demander l'annulation pour excès de pouvoir du décret du 28 décembre 2016 lui refusant l'acquisition de la nationalité française ;
D E C I D E :
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Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à M. A...B...et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.