Vu la procédure suivante :
L'association " Sauvons notre stade " a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 17 décembre 2015 par lequel le maire de Paris a délivré à l'établissement public Paris Habitat OPH un permis de construire. Par un jugement nos 1604574/4-3 et 1609598/4-3 du 12 juillet 2018, le tribunal administratif a rejeté sa requête.
Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 12 septembre et 12 décembre 2018 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'association " Sauvons notre stade " demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler le jugement attaqué ;
2°) de mettre à la charge de la ville de Paris et de Paris Habitat OPH la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la Constitution, notamment son Préambule et son article 61-1 ;
- l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 ;
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Laure Durand-Viel, auditeur,
- les conclusions de M. Louis Dutheillet de Lamothe, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée avant et après les conclusions, à la SCP Capron, avocat de l'association " Sauvons notre stade ", à la SCP Garreau, Bauer-Violas, Feschotte-Desbois, avocat de la société Paris Habitat OPH et à la SCP Foussard, Froger, avocat de la ville de Paris.
Considérant ce qui suit :
1. La ville de Paris a, par délibérations du conseil de Paris des 11 et 12 février 2013, décidé du principe d'aménagement de parcelles dont elle est propriétaire, délimitées par les nos 49-53 du boulevard de Ménilmontant, 7-15 du passage de la Folie-Regnault et 6 de la rue Villermé. Elle a, à cette fin, conclu avec l'établissement public d'habitat Paris Habitat OPH un protocole foncier et une convention de transfert de maîtrise d'ouvrage pour la réalisation des équipements publics, et a cédé à Paris Habitat OPH les volumes et droits à construire attachés pour la réalisation de logements sociaux et d'un local d'activité. Par un arrêté du 17 décembre 2015, la maire de Paris a délivré un permis de construire à Paris Habitat OPH portant sur la création de deux bâtiments comprenant quatre-vingt-cinq logements sociaux, des commerces, des stationnements, un point-relais pour les objets encombrants et un gymnase d'un étage avec toiture aménagée en terrain de sport. L'association " Sauvons notre stade " a demandé au tribunal administratif de Paris l'annulation pour excès de pouvoir de l'arrêté du 17 décembre 2015. Par un jugement du 12 juillet 2018, contre lequel l'association se pourvoit en cassation, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Sur la question prioritaire de constitutionnalité :
2. Aux termes du premier alinéa de l'article 23-5 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel : " Le moyen tiré de ce qu'une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution peut être soulevé (...) à l'occasion d'une instance devant le Conseil d'Etat (...) ". Il résulte des dispositions de ce même article que le Conseil constitutionnel est saisi de la question prioritaire de constitutionnalité à la triple condition que la disposition contestée soit applicable au litige ou à la procédure, qu'elle n'ait pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances, et que la question soit nouvelle ou présente un caractère sérieux.
3. Aux termes de l'article L. 422-1 du code de l'urbanisme : " L'autorité compétente pour délivrer le permis de construire, d'aménager ou de démolir et pour se prononcer sur un projet faisant l'objet d'une déclaration préalable est : / a) Le maire, au nom de la commune, dans les communes qui se sont dotées d'un plan local d'urbanisme ou d'un document d'urbanisme en tenant lieu, ainsi que dans les communes qui se sont dotées d'une carte communale après la date de publication de la loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 pour l'accès au logement et un urbanisme rénové. Dans les communes qui se sont dotées d'une carte communale avant cette date, le maire est compétent, au nom de la commune, après délibération du conseil municipal. En l'absence de décision du conseil municipal, le maire est compétent, au nom de la commune, à compter du 1er janvier 2017. Lorsque le transfert de compétence à la commune est intervenu, il est définitif ; / b) Le préfet ou le maire au nom de l'Etat dans les autres communes (...) ". L'article L. 422-2 du même code énumère les situations dans lesquelles, par exception aux dispositions du a) de l'article L. 422-1, l'autorité administrative de l'Etat est compétente pour se prononcer sur un projet. Aux termes de l'article L. 422-7 du même code : " Si le maire ou le président de l'établissement public de coopération intercommunale est intéressé au projet faisant l'objet de la demande de permis ou de la déclaration préalable, soit en son nom personnel, soit comme mandataire, le conseil municipal de la commune ou l'organe délibérant de l'établissement public désigne un autre de ses membres pour prendre la décision ".
4. Le principe d'impartialité des autorités administratives, découlant de l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, implique que tout organe administratif est soumis à une obligation d'impartialité pour l'examen des affaires qui relèvent de sa compétence et aux règles déontologiques qui en découlent, et a pour objet de garantir que ces organes ne sont pas détournés de leur mission d'intérêt général. La circonstance qu'un projet immobilier répond à un objectif d'intérêt général poursuivi par une commune, tel le développement du logement social, ne révèle pas une situation de défaut d'impartialité. Dès lors, le moyen tiré de ce qu'en prévoyant que le maire dispose d'une compétence pour délivrer les permis de construire sans faire réserve de tels cas, les articles L. 422-1, L. 422-2 et L. 422-7 du code de l'urbanisme méconnaîtraient le principe d'impartialité des autorités administratives découlant de l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen et le principe d'égalité, ne présente pas un caractère sérieux.
5. Il résulte de ce qui précède que la question prioritaire de constitutionnalité invoquée, qui n'est pas nouvelle, ne présente pas un caractère sérieux. Ainsi, il n'y a pas lieu de la renvoyer au Conseil constitutionnel.
Sur les autres moyens du pourvoi :
6. Aux termes de l'article L. 822-1 du code de justice administrative : " Le pourvoi en cassation devant le Conseil d'Etat fait l'objet d'une procédure préalable d'admission. L'admission est refusée par décision juridictionnelle si le pourvoi est irrecevable ou n'est fondé sur aucun moyen sérieux ".
7. Pour demander l'annulation du jugement du tribunal administratif de Paris qu'elle attaque, l'association " Sauvons notre stade " soutient qu'il est entaché :
- d'une insuffisance de motivation, faute d'avoir répondu à son argumentation selon laquelle le permis de construire méconnaît les dispositions de l'article UG 11.1 du règlement du plan local d'urbanisme de la ville de Paris en enclavant la basilique Notre-Dame du perpétuel secours, signalée dans le plan local d'urbanisme pour son intérêt patrimonial et culturel ;
- d'une erreur de droit en ce qu'il juge que le principe d'impartialité des autorités administratives n'a pas été méconnu ;
- d'une erreur de droit dans l'application de l'article L. 621-31 du code du patrimoine et des articles R. 421-28, R. 425-1 et R. 425-30 du code de l'urbanisme, et d'une dénaturation des pièces du dossier en ce qu'il juge que la procédure de consultation de l'architecte des bâtiments de France a été régulière ;
- d'une dénaturation des pièces du dossier en ce qu'il retient que l'architecte des bâtiments de France n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation quant à l'atteinte portée aux monuments historiques dans le champ de visibilité desquels se situe le projet autorisé ;
- d'une erreur de droit en ce qu'il juge que l'association " Sauvons notre stade " ne peut utilement exciper de l'illégalité du plan local d'urbanisme de la ville de Paris en tant qu'il classe les parcelles d'assiette du projet autorisé en zone urbaine générale (UG) et non en zone urbaine verte (UV), dès lors que les terrains en cause étaient déjà classés en zone urbaine générale (UG) avant l'adoption du plan local d'urbanisme ;
- d'une erreur de droit au regard de la définition de la zone UV du règlement du plan local d'urbanisme et d'une dénaturation des pièces du dossier en ce qu'il juge que le terrain d'assiette du projet fait partie d'un îlot urbanisé.
8. Aucun de ces moyens n'est de nature à permettre l'admission du pourvoi.
D E C I D E :
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Article 1er : Il n'y a pas lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par l'association " Sauvons notre stade ".
Article 2 : Le pourvoi de l'association " Sauvons note stade " n'est pas admis.
Article 3 : La présente décision sera notifiée à l'association " Sauvons notre stade ", à la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales, à la ville de Paris et à l'établissement public Paris Habitat OPH.
Copie en sera adressée au Conseil constitutionnel et au Premier ministre.