Vu la procédure suivante :
Par une décision du 30 mars 2018, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, a prononcé l'admission des conclusions du pourvoi de M. B...A...dirigées contre l'arrêt n° 14BX02822 du 3 janvier 2017 de la cour administrative d'appel de Bordeaux en tant que cet arrêt s'est prononcé, au titre des préjudices patrimoniaux, sur la perte de chance d'évolution de l'intéressé dans sa carrière et en tant qu'il a omis de se prononcer, au titre des préjudices non-patrimoniaux, sur le déficit fonctionnel permanent autre que psychologique, le préjudice esthétique temporaire, le préjudice d'établissement ainsi que le préjudice sexuel.
Par un mémoire en défense, enregistré le 13 août 2018 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'Institut national de la recherche agronomique (INRA) conclut au rejet du pourvoi de M.A.... Il soutient qu'aucun des moyens du pourvoi n'est fondé et demande que soit mise à la charge de M. A...la somme de 4 800 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un mémoire en réplique, enregistré le 27 septembre 2018, M. A... reprend ses précédentes conclusions et ses précédents moyens.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Géraud Sajust de Bergues, conseiller d'Etat,
- les conclusions de M. Laurent Cytermann, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Thouvenin, Coudray, Grevy, avocat de M. A...et à la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocat de l'Institut national de la recherche agronomique ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. A... a été victime le 16 mai 2006, alors qu'il était en fonction à l'INRA, d'un accident reconnu imputable au service qui a conduit à l'amputation des deuxième et troisième phalanges du majeur et de l'annulaire de sa main droite. Par un jugement du 26 juin 2014, le tribunal administratif de la Guadeloupe a condamné cet institut à verser à M. A...une indemnité de 5 500 euros, dont devait être déduite la provision de 5 000 euros qui lui avait été accordée par une ordonnance du 1er juin 2017 du juge des référés. M. A...se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 3 janvier 2017 par lequel la cour administrative d'appel de Bordeaux, sur son appel tendant à la condamnation de l'INRA à lui verser une indemnité de 588 790 euros, a condamné cet établissement public à lui verser une indemnité de 21 200 euros, a réformé le jugement en ce sens et a rejeté le surplus de ses conclusions. Par une décision du 30 mars 2018, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, a prononcé l'admission des conclusions du pourvoi de M. A...dirigées contre cet arrêt en tant qu'il s'est prononcé, au titre des préjudices patrimoniaux, sur la perte de chance d'évolution de l'intéressé dans sa carrière et qu'il a omis de se prononcer, au titre des préjudices non-patrimoniaux, sur le déficit fonctionnel permanent autre que psychologique, le préjudice esthétique temporaire, le préjudice d'établissement ainsi que le préjudice sexuel.
2. Compte tenu des conditions posées à son octroi et de son mode de calcul, l'allocation temporaire d'invalidité doit être regardée comme ayant pour objet de réparer les pertes de revenus et l'incidence professionnelle résultant de l'incapacité physique causée par un accident de service ou une maladie professionnelle. Les dispositions qui instituent cette prestation déterminent forfaitairement la réparation à laquelle les fonctionnaires concernés peuvent prétendre, au titre de ces chefs de préjudice, dans le cadre de l'obligation qui incombe aux collectivités publiques de garantir leurs agents contre les risques qu'ils peuvent courir dans l'exercice de leurs fonctions. Elles ne font, en revanche, pas obstacle à ce que le fonctionnaire qui subit, du fait de l'invalidité ou de la maladie, des préjudices patrimoniaux d'une autre nature ou des préjudices personnels, obtienne de la personne publique qui l'emploie, même en l'absence de faute de celle-ci, une indemnité complémentaire réparant ces chefs de préjudice. Elles ne font pas non plus obstacle à ce qu'une action de droit commun pouvant aboutir à la réparation intégrale de l'ensemble du dommage soit engagée contre la personne publique, dans le cas notamment où l'accident ou la maladie serait imputable à une faute de nature à engager la responsabilité de cette personne.
3. L'appréciation du bien-fondé des conclusions de M. A...tendant à la réparation du préjudice qu'il invoque de privation d'une chance d'évolution dans sa carrière suppose qu'il ait été préalablement statué, au vu des preuves produites par les parties, sur l'existence ou non du versement à la victime d'une allocation temporaire d'invalidité entre la date de son accident et la date de sa mise à la retraite pour invalidité imputable au service en novembre 2010 à compter de laquelle lui a été servie une rente d'invalidité. Or, il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. A...a explicitement soutenu devant la cour, dans son mémoire en réplique enregistré le 30 novembre 2016, qu'il n'avait jamais obtenu une quelconque allocation temporaire d'invalidité. Par suite, en jugeant que M. A...ne contredisait pas les écritures en défense de l'INRA indiquant qu'il avait perçu cette allocation temporaire d'invalidité jusqu'à sa mise à la retraite, la cour s'est méprise sur la portée des écritures du requérant. Dès lors, son arrêt doit être annulé en tant qu'il s'est prononcé, au titre des préjudices patrimoniaux, sur la perte de chance d'évolution de l'intéressé dans sa carrière.
4. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. A... a soutenu, tant en première instance qu'en appel, qu'il devait être indemnisé, au titre des préjudices non-patrimoniaux subis du fait de l'accident reconnu imputable au service dont il a été victime, notamment de ses préjudices de déficits fonctionnels temporaire et permanent, de ses préjudices esthétiques temporaire et permanent, de son préjudice causé par les souffrances endurées, de son préjudice d'agrément, de son préjudice sexuel et de son préjudice d'établissement. Il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué que la cour ne s'est pas prononcée, au titre des préjudices non patrimoniaux, sur le déficit fonctionnel permanent autre que psychologique, le préjudice esthétique temporaire, le préjudice d'établissement et le préjudice sexuel. Dès lors, l'arrêt doit être annulé, dans cette mesure.
5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'INRA la somme de 2 000 euros à verser à M.A..., au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Les mêmes dispositions font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de M. A...qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.
D E C I D E :
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Article 1er : L'arrêt du 3 janvier 2017 de la cour administrative d'appel de Bordeaux est annulé seulement en tant qu'il se prononce, au titre des préjudices patrimoniaux, sur la perte de chance d'évolution de M. A...dans sa carrière et en tant qu'il a omis de se prononcer, au titre des préjudices non-patrimoniaux, sur le déficit fonctionnel permanent autre que psychologique, le préjudice esthétique temporaire, le préjudice d'établissement ainsi que le préjudice sexuel.
Article 2 : L'affaire est renvoyée, dans cette mesure, à la cour administrative d'appel de Bordeaux.
Article 3 : L'Institut national de la recherche agronomique versera à M. A...la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Les conclusions de l'Institut national de la recherche agronomique présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. B... A...et à l'Institut national de recherche agronomique.
Copie en sera adressée à la caisse générale de sécurité sociale de la Guadeloupe.