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20/02/2019 | FRANCE | N°421212

France | France, Conseil d'État, 10ème chambre, 20 février 2019, 421212


Vu la procédure suivante :

M. A...C...B...a demandé à la Cour nationale du droit d'asile d'annuler la décision du 8 août 2016 par laquelle l'Office français de protection des réfugiés et apatrides lui a retiré, sur le fondement de l'article L. 711-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la qualité de réfugié qui lui avait été reconnue le 6 juillet 2010.

Par une décision n° 16040613 du 4 avril 2018, la Cour nationale du droit d'asile a fait droit à sa demande.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregist

rés les 4 juin et 4 septembre 2018 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'O...

Vu la procédure suivante :

M. A...C...B...a demandé à la Cour nationale du droit d'asile d'annuler la décision du 8 août 2016 par laquelle l'Office français de protection des réfugiés et apatrides lui a retiré, sur le fondement de l'article L. 711-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la qualité de réfugié qui lui avait été reconnue le 6 juillet 2010.

Par une décision n° 16040613 du 4 avril 2018, la Cour nationale du droit d'asile a fait droit à sa demande.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 4 juin et 4 septembre 2018 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'Office français de protection des réfugiés et apatrides demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cette décision ;

2°) de renvoyer l'affaire devant la Cour nationale du droit d'asile.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention de Genève du 28 juillet 1951 et le protocole signé à New York le 31 janvier 1967 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Pierre Ramain, maître des requêtes,

- les conclusions de Mme Aurélie Bretonneau, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Foussard, Froger, avocat de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et à la SCP Fabiani, Luc-Thaler, Pinatel, avocat de M. B...;

Considérant ce qui suit :

1. L'article L. 711-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que : " Le statut de réfugié peut être refusé ou il peut être mis fin à ce statut lorsque : / 1° Il y a des raisons sérieuses de considérer que la présence en France de la personne concernée constitue une menace grave pour la sûreté de l'Etat ".

2. Il ressort des pièces du dossier soumis à la Cour nationale du droit d'asile que, pour retirer à M.B..., de nationalité russe et d'origine tchétchène, la qualité de réfugié qui lui avait été reconnue en 2010, l'Office français de protection des réfugiés et apatrides a fait application du 1° de l'article L. 711-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, au motif qu'il existait des raisons sérieuses de considérer que sa présence en France constituait une menace grave pour la sûreté de l'Etat compte tenu de son engagement dans la cause djihadiste, de son implication dans une filière de recrutement en vue de mener le djihad en Syrie et, plus particulièrement, de ses liens avec un combattant djihadiste qu'il aurait contribué à conduire sur la zone de combat syro-irakienne. Par une décision du 4 avril 2018, contre laquelle l'Office français de protection des réfugiés et apatrides se pourvoit en cassation, la Cour nationale du droit d'asile, faisant droit à la demande de M.B..., a annulé cette décision de l'Office et rétabli M. B...dans sa qualité de réfugié.

3. Alors qu'une note blanche des services de renseignement versée au débat contradictoire fait mention de l'engagement de M. B...dans le recrutement de tchéchènes en vue de mener le djihad et, en particulier, de son implication dans le départ en zone syro-irakienne de son compatriote Rivzan Tsymkhaev, qu'il a conduit jusqu'en Turquie, la Cour a considéré qu'il ne résultait pas de l'instruction qu'il existait des raisons sérieuses de penser que la présence en France de M. B...constituait une menace grave pour la sûreté de l'Etat, au motif que les faits rapportés dans la note blanche n'étaient pas établis et qu'en particulier ce document n'apportait pas de renseignement suffisamment précis et tangible sur la filière de recrutement à laquelle il serait affilié ni sur les actions qu'il y aurait menées. En se fondant sur le seul contenu de la note blanche pour juger que la condition posée par le 1° de l'article L. 711-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'était pas remplie, sans recueillir, pour se forger sa conviction, aucune autre information pertinente, notamment en appelant dans l'instance le ministre de l'intérieur, la Cour a méconnu son office de juge de pleine juridiction et entaché sa décision d'erreur de droit.

4. Il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, l'Office français de protection des réfugiés et apatrides est fondé à demander l'annulation de la décision qu'il attaque.

5. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.

D E C I D E :

--------------

Article 1er: La décision de la Cour nationale du droit d'asile du 4 avril 2018 est annulée.

Article 2 : L'affaire est renvoyée à la Cour nationale du droit d'asile.

Article 3 : Les conclusions de M. B...présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4: La présente décision sera notifiée à l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et à M. A...C...B....


Synthèse
Formation : 10ème chambre
Numéro d'arrêt : 421212
Date de la décision : 20/02/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 20 fév. 2019, n° 421212
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Pierre Ramain
Rapporteur public ?: Mme Aurélie Bretonneau
Avocat(s) : SCP FOUSSARD, FROGER ; SCP FABIANI, LUC-THALER, PINATEL

Origine de la décision
Date de l'import : 26/02/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2019:421212.20190220
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