La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

10/07/2020 | FRANCE | N°423901

France | France, Conseil d'État, 7ème - 2ème chambres réunies, 10 juillet 2020, 423901


Vu la procédure suivante :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Lyon, d'une part, d'annuler la délibération n° 2012/4996 du 19 novembre 2012 par laquelle le conseil municipal de Lyon a approuvé l'avenant n° 4 au contrat de concession conclu le 18 février 1993 pour le service de distribution d'énergie électrique et la fourniture de celle-ci au tarif réglementé de vente, ainsi que la décision du premier adjoint au maire de Lyon de signer cet avenant et la décision du 13 mars 2013 par laquelle le maire de Lyon a rejeté son recours gracieux à l'encontre de ce

s actes, d'autre part, d'enjoindre à la commune de procéder à la réso...

Vu la procédure suivante :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Lyon, d'une part, d'annuler la délibération n° 2012/4996 du 19 novembre 2012 par laquelle le conseil municipal de Lyon a approuvé l'avenant n° 4 au contrat de concession conclu le 18 février 1993 pour le service de distribution d'énergie électrique et la fourniture de celle-ci au tarif réglementé de vente, ainsi que la décision du premier adjoint au maire de Lyon de signer cet avenant et la décision du 13 mars 2013 par laquelle le maire de Lyon a rejeté son recours gracieux à l'encontre de ces actes, d'autre part, d'enjoindre à la commune de procéder à la résolution de l'avenant litigieux ou de saisir le juge du contrat afin d'en faire constater la nullité, dans un délai de trente jours à compter de la notification du jugement, sous astreinte de 200 euros par jour de retard. Par un jugement n°s 1300440, 1303542 du 31 décembre 2015, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Par un arrêt n° 16LY00912 du 5 juillet 2018, la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté l'appel formé par Mme A... contre ce jugement.

Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire, un mémoire en réplique et un nouveau mémoire, enregistrés les 5 septembre et 5 décembre 2018 et les 15 mai et 19 juin 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme A... demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;

3°) de mettre à la charge de la métropole de Lyon, de la société Electricité de France (EDF) et de la société Enedis la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ;

- la directive 2004/17/CE du Parlement européen et du Conseil du 31 mars 2004 ;

- la directive 2009/72/CE du Parlement européen et du Conseil du 13 juillet 2009 ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de l'énergie ;

- le code des marchés publics ;

- la loi n° 2004-803 du 9 août 2004 ;

- la loi n° 2014-58 du 27 janvier 2014 ;

- le code de justice administrative et l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Thomas Pez-Lavergne, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de M. Gilles Pellissier, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois, Sebagh, avocat de Mme A..., à la SCP Piwnica, Molinie, avocat de la société Electricité de France, à la SCP Gaschignard, avocat de la Métropole de Lyon, au cabinet Munier-Apaire, avocat de la société Enedis et à la Scp Nicolaÿ, Delanouvelle, Hannotin, avocat de la société Ile de Sein Energie (IDSE) et de l'association ClientEarth ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 23 juin 2020 présentée par Mme A... ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 23 juin 2020, présentée par la société Ile de Sein Energie et l'association ClientEarth ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la ville de Lyon a conclu le 18 février 1993 avec l'établissement public Electricité de France (EDF) une convention de concession pour le service public de la distribution d'énergie électrique, pour une durée de vingt ans. Depuis l'entrée en vigueur de la loi du 9 août 2004 relative au service public de l'électricité et du gaz et aux entreprises électriques et gazières, la société Electricité Réseau Distribution France (ERDF), devenue Enedis, s'est substituée à l'établissement public EDF pour l'exécution du contrat s'agissant de la distribution d'électricité, tandis que la société EDF a pris la suite de l'établissement public pour la fourniture d'électricité au tarif réglementé de vente. La concession venant à expiration alors que la commune avait engagé des réflexions sur un possible transfert de la fonction d'autorité organisatrice de la distribution d'électricité à l'établissement public de coopération intercommunale auquel elle adhérait, le conseil municipal a, par une délibération du 19 novembre 2012, approuvé l'avenant n° 4 au contrat de concession et autorisé le maire à signer cet avenant, prolongeant de cinq ans la durée de la concession avec possibilité de résiliation anticipée en cas de transfert de la compétence d'autorité concédante. Le premier adjoint au maire a signé cet avenant le 26 novembre 2012. Le recours gracieux formé par Mme A..., alors conseillère municipale, à l'encontre de la délibération et de la décision de signer le contrat a été rejeté par le maire de Lyon le 11 mars 2013. En application des dispositions de l'article L. 3641-1 du code général des collectivités territoriales, issu de la loi du 27 janvier 2014 de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles, la compétence en matière de concession de la distribution publique d'électricité et de gaz a été transférée à la métropole de Lyon, qui s'est substituée à la ville en tant qu'autorité concédante pour l'exécution de la concession litigieuse et de son avenant, à compter du 29 janvier 2014. Par un jugement du 31 décembre 2015, le tribunal administratif de Lyon a rejeté la demande de Mme A... tendant à l'annulation de la délibération du 19 novembre 2012 et des décisions des 26 novembre 2012 et 11 mars 2013 et à ce qu'il soit enjoint à la ville de procéder à la résolution de l'avenant litigieux ou de saisir le juge du contrat afin d'en faire constater la nullité. Par un arrêt du 5 juillet 2018, contre lequel Mme A... se pourvoit en cassation, la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté l'appel qu'elle a formé contre ce jugement.

Sur l'intervention présentée par la société Ile de Sein Energie (IDSE) et l'association ClientEarth :

2. La société Ile de Sein Energie (IDSE) et l'association ClientEarth justifient dans les circonstances de l'espèce, eu égard à la nature et à l'objet des questions soulevées par le litige, d'un intérêt suffisant pour intervenir au soutien du pourvoi de Mme A.... Ainsi, leur intervention est recevable.

Sur la régularité de l'arrêt attaqué :

3. Aux termes de l'article L. 2122-17 du code général des collectivités territoriales : " En cas d'absence, de suspension, de révocation ou de tout autre empêchement, le maire est provisoirement remplacé, dans la plénitude de ses fonctions, par un adjoint, dans l'ordre des nominations (...) ".

4. En jugeant, pour écarter le moyen tiré de l'incompétence du premier adjoint au maire de Lyon pour signer l'avenant en litige, que la requérante n'établissait pas que le maire n'était pas empêché, au sens de l'article L. 2122-17 du code général des collectivités territoriales, et en en déduisant que le premier adjoint avait pu, en application de ces dispositions, le remplacer aux fins de signer l'avenant en litige, la cour administrative d'appel a suffisamment motivé sa décision.

Sur le bien-fondé de l'arrêt attaqué :

S'agissant de l'information des membres du conseil municipal :

5. Aux termes de l'article L. 2121-12 du code général des collectivités territoriales : " Dans les communes de 3 500 habitants et plus, une note explicative de synthèse sur les affaires soumises à délibération doit être adressée avec la convocation aux membres du conseil municipal. / Si la délibération concerne un contrat de service public, le projet de contrat ou de marché accompagné de l'ensemble des pièces peut, à sa demande, être consulté à la mairie par tout conseiller municipal dans les conditions fixées par le règlement intérieur (...) ". Selon l'article L. 2121-13 du même code : " Tout membre du conseil municipal a le droit, dans le cadre de sa fonction, d'être informé des affaires de la commune qui font l'objet d'une délibération ".

6. Il résulte de ces dispositions que, dans les communes de 3 500 habitants et plus, la convocation aux réunions du conseil municipal doit être accompagnée d'une note explicative de synthèse portant sur chacun des points de l'ordre du jour. Le défaut d'envoi de cette note ou son insuffisance entache d'irrégularité les délibérations prises, à moins que le maire n'ait fait parvenir aux membres du conseil municipal, en même temps que la convocation, les documents leur permettant de disposer d'une information adéquate pour exercer utilement leur mandat. Cette obligation, qui doit être adaptée à la nature et à l'importance des affaires, doit permettre aux intéressés d'appréhender le contexte ainsi que de comprendre les motifs de fait et de droit des mesures envisagées et de mesurer les implications de leurs décisions. Elle n'impose pas de joindre à la convocation adressée aux intéressés, à qui il est au demeurant loisible de solliciter des précisions ou explications conformément à l'article L. 2121-13 du même code, une justification détaillée du bien-fondé des propositions qui leur sont soumises.

7. Il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué que la cour administrative d'appel a relevé, par une appréciation souveraine exempte de dénaturation, que les membres du conseil municipal ont été convoqués par un courrier du 12 novembre 2012 auquel était joint un projet de délibération de deux pages exposant les motifs ayant conduit le maire à envisager la conclusion de l'avenant en litige et comportant des informations suffisamment détaillées permettant aux conseillers municipaux de décider ou non d'approuver l'avenant n° 4 dont l'objet était précisément défini et d'autoriser le maire à le signer. Elle a également relevé, sans dénaturer les pièces du dossier ni se méprendre sur la portée des écritures de la requérante, que celle-ci n'avait sollicité des documents complémentaires que postérieurement à la date de la délibération en litige. Dès lors, la cour n'a pas commis d'erreur de droit en écartant le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du code général des collectivités territoriales citées au point 5 relatives à l'information des membres du conseil municipal.

S'agissant de la compatibilité des droits exclusifs conférés aux sociétés Enedis et EDF avec le droit de l'Union européenne :

8. Aux termes de l'article 106 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, reprenant l'article 86 du traité instituant la communauté européenne : " 1. Les Etats membres, en ce qui concerne les entreprises publiques et les entreprises auxquelles ils accordent des droits spéciaux ou exclusifs, n'édictent ni ne maintiennent aucune mesure contraire aux règles des traités, notamment à celles prévues aux articles 18 et 101 à 109 inclus. / 2. Les entreprises chargées de la gestion de services d'intérêt économique général ou présentant le caractère d'un monopole fiscal sont soumises aux règles des traités, notamment aux règles de concurrence, dans les limites où l'application de ces règles ne fait pas échec à l'accomplissement en droit ou en fait de la mission particulière qui leur a été impartie. Le développement des échanges ne doit pas être affecté dans une mesure contraire à l'intérêt de l'Union. / 3. La Commission veille à l'application des dispositions du présent article et adresse, en tant que de besoin, les directives ou décisions appropriées aux Etats membres ". Selon le paragraphe 2 de l'article 3 de la directive 2009/72/CE du Parlement européen et du Conseil du 13 juillet 2009 concernant les règles communes pour le marché intérieur de l'électricité et abrogeant la directive 2003/54/CE : " En tenant pleinement compte des dispositions pertinentes du traité, en particulier de son article 86, les Etats membres peuvent imposer aux entreprises du secteur de l'électricité, dans l'intérêt économique général, des obligations de service public qui peuvent porter sur la sécurité, y compris la sécurité d'approvisionnement, la régularité, la qualité et le prix de la fourniture, ainsi que la protection de l'environnement, y compris l'efficacité énergétique, l'énergie produite à partir de sources d'énergie renouvelables et la protection du climat. Ces obligations sont clairement définies, transparentes, non discriminatoires et vérifiables et garantissent aux entreprises d'électricité de la Communauté un égal accès aux consommateurs nationaux. (...) ". Aux termes de l'article 24 de la même directive : " Les Etats membres désignent, ou demandent aux entreprises propriétaires ou responsables de réseaux de distribution de désigner, pour une durée à déterminer par les Etats membres en fonction de considérations d'efficacité et d'équilibre économique, un ou plusieurs gestionnaires de réseau de distribution. Les Etats membres veillent à ce que les gestionnaires de réseau de distribution agissent conformément aux articles 25, 26 et 27 ". Selon le paragraphe 1 de l'article 25 de la même directive : " Le gestionnaire de réseau de distribution est tenu de garantir la capacité à long terme du réseau de répondre à des demandes raisonnables de distribution d'électricité, d'exploiter, d'assurer la maintenance et de développer, dans des conditions économiques acceptables, un réseau de distribution d'électricité sûr, fiable et performant dans la zone qu'il couvre, dans le respect de l'environnement et de l'efficacité énergétique ".

9. Aux termes de l'article L. 121-1 du code de l'énergie, dans sa rédaction alors applicable : " Le service public de l'électricité a pour objet de garantir, dans le respect de l'intérêt général, l'approvisionnement en électricité sur l'ensemble du territoire national. / Dans le cadre de la politique énergétique, il contribue à l'indépendance et à la sécurité d'approvisionnement, à la qualité de l'air et à la lutte contre l'effet de serre, à la gestion optimale et au développement des ressources nationales, à la maîtrise de la demande d'énergie, à la compétitivité de l'activité économique et à la maîtrise des choix technologiques d'avenir, comme à l'utilisation rationnelle de l'énergie. / Il concourt à la cohésion sociale, à la lutte contre les exclusions, au développement équilibré du territoire, dans le respect de l'environnement, à la recherche et au progrès technologique, ainsi qu'à la défense et à la sécurité publique. / Matérialisant le droit de tous à l'électricité, produit de première nécessité, le service public de l'électricité est géré dans le respect des principes d'égalité, de continuité et d'adaptabilité et dans les meilleures conditions de sécurité, de qualité, de coûts, de prix et d'efficacité économique, sociale et énergétique ". Il résulte des dispositions combinées des articles L. 121-2 à L. 121-5 du même code que, conformément aux principes énoncés à l'article L. 100-1 de ce code, le service public de l'électricité assure la mission de développement équilibré de l'approvisionnement en électricité, laquelle consiste notamment à garantir l'approvisionnement des zones du territoire non interconnectées au réseau métropolitain continental, la mission de développement et d'exploitation des réseaux publics de transport et de distribution d'électricité laquelle consiste à assurer " la desserte rationnelle du territoire national par les réseaux publics de transport et de distribution, dans le respect de l'environnement, et l'interconnexion avec les pays voisins " et " le raccordement et l'accès, dans des conditions non discriminatoires, aux réseaux publics de transport et de distribution ", ainsi que la mission de fourniture d'électricité, laquelle consiste " à assurer, en favorisant la maîtrise de la demande, la fourniture d'électricité, sur l'ensemble du territoire, aux clients bénéficiaires des tarifs réglementés de vente " et " concourt à la cohésion sociale, au moyen de la péréquation nationale des tarifs ".

10. Aux termes du troisième alinéa de l'article L. 121-5 du code de l'énergie, la mission de fourniture d'électricité " incombe à Electricité de France ainsi que, dans leur zone de desserte, aux entreprises locales de distribution chargées de la fourniture. Elles l'accomplissent, pour les clients raccordés aux réseaux de distribution, conformément aux dispositions des cahiers des charges de concession ou des règlements de service des régies mentionnés au II de l'article L. 2224-31 du code général des collectivités territoriales ". Selon l'article L. 111-52 du code de l'énergie, dans sa rédaction alors en vigueur : " Les gestionnaires des réseaux publics de distribution d'électricité sont, dans leurs zones de desserte exclusives respectives : / 1° La société gestionnaire des réseaux publics de distribution issue de la séparation entre les activités de gestion de réseau public de distribution et les activités de production ou de fourniture exercées par Electricité de France en application de l'article L. 111-57 ; / 2° Les entreprises locales de distribution définies à l'article L. 111-54 ou les entreprises locales de distribution issues de la séparation entre leurs activités de gestion de réseau public de distribution et leurs activités de production ou de fourniture, en application de l'article L. 111-57 ou de l'article L. 111-58 ; / 3° Le gestionnaire du réseau public de distribution d'électricité est, dans les zones non interconnectées au réseau métropolitain continental, l'entreprise Electricité de France ainsi que la société mentionnée à l'article L. 151-2 ".

11. En premier lieu, il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué que la cour administrative d'appel de Lyon a retenu que si la conclusion de l'avenant en litige est exclue du champ d'application de la directive 2004/17/CE du Parlement européen et du Conseil du 31 mars 2004 portant coordination des procédures de passation des marchés publics dans les secteurs de l'eau, de l'énergie, des transports et des services postaux, alors en vigueur, les autorités adjudicatrices sont néanmoins tenues de respecter les règles fondamentales du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne et, en particulier, le principe de non-discrimination en raison de la nationalité, lequel implique notamment une obligation de transparence pour garantir, à tout soumissionnaire potentiel, un degré de publicité adéquat permettant une ouverture du marché et des services à la concurrence, ainsi que le contrôle de l'impartialité des procédures d'adjudication. La cour n'a pas commis d'erreur de droit en estimant qu'il résulte des stipulations du paragraphe 2 de l'article 106 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne que cette obligation de transparence ne trouve à s'appliquer, s'agissant des entreprises chargées d'un service d'intérêt économique général, que sous réserve qu'elle ne fasse pas échec à l'accomplissement en droit ou en fait de la mission particulière qui leur a été impartie.

12. En deuxième lieu, le moyen tiré de ce que les dispositions des articles L. 111-52 et L. 121-5 du code de l'énergie méconnaîtraient les règles fixées par le paragraphe 2 de l'article 3 de la directive 2009/72/CE n'est pas d'ordre public et n'a pas été soulevé devant la cour administrative d'appel. Il s'ensuit, d'une part, que la cour n'a pas commis d'erreur de droit en ne l'examinant pas d'office et que, d'autre part, présentant le caractère d'un moyen nouveau en cassation, il est inopérant et ne saurait conduire à l'annulation de l'arrêt attaqué.

13. En troisième lieu, il résulte des termes de l'article 24 de la directive 2009/72/CE, cité au point 8, que les Etats membres peuvent désigner un gestionnaire unique du réseau de distribution d'électricité. Le paragraphe 2 de l'article 3 de la même directive permet aux Etats membres, en tenant compte des dispositions pertinentes de l'article 106 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, d'imposer aux entreprises du secteur de l'électricité des obligations de service public dans l'intérêt économique général, qui peuvent notamment porter sur le prix de la fourniture. Dans les zones interconnectées au réseau métropolitain continental ne relevant pas d'une entreprise locale de distribution, les articles L. 111-52 et L. 121-5 du code de l'énergie attribuent à Enedis et EDF des droits exclusifs respectivement pour la gestion des réseaux publics de distribution d'électricité et pour la fourniture d'électricité au tarif réglementé de vente. La cour administrative d'appel a retenu qu'en raison des missions qui leur sont confiées et des sujétions qui leur sont imposées par les dispositions des articles L. 111-52 et L. 121-5 du code de l'énergie, les sociétés Enedis et EDF doivent être regardées comme chargées de la gestion de services d'intérêt économique général au sens du paragraphe 2 de l'article 106 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne. Elle a également considéré que les droits exclusifs conférés à ces sociétés par les mêmes dispositions trouvent leur justification dans les sujétions qui leur sont imposées au titre de leurs missions respectives et que l'application des règles fondamentales du traité ainsi que de l'obligation de transparence, serait de nature à faire échec à l'accomplissement de ces missions conférées à Enedis et EDF. En statuant ainsi, la cour n'a pas entaché son arrêt d'erreur de qualification juridique ni d'erreur de droit.

14. En quatrième lieu, la cour administrative d'appel n'a pas entaché son arrêt d'erreur de droit en retenant qu'il résulte de l'article 24 de la directive 2009/72/CE, qui impose une durée déterminée aux contrats de concession de la distribution d'électricité, que l'autorité concédante, sous le contrôle du juge, doit fixer la durée de la concession accordée à la société Enedis au regard des considérations d'efficacité et d'équilibre économique propres à la justifier et en déduisant qu'eu égard à la nature et à l'importance des investissements prévus par l'avenant en litige, la prolongation de cinq ans de la durée de la concession qu'il prévoit n'était pas excessive et n'impliquait pas de mise en concurrence préalable. Par ailleurs, la cour ne s'est pas prononcée sur la compatibilité avec le droit de l'Union européenne du caractère permanent des droits exclusifs attribués à Enedis et à EDF par les articles L. 111-52 et L. 121-5 du code de l'énergie, contrairement à ce que soutient la requérante, qui n'avait pas soulevé un tel moyen en appel et qui ne peut pas utilement le faire devant le juge de cassation.

15. En cinquième lieu, le moyen tiré de ce que la cour administrative d'appel de Lyon aurait commis une erreur de droit en estimant qu'une procédure de publicité et de mise en concurrence serait de nature à faire échec à l'accomplissement des missions conférées aux sociétés Enedis et EDF " en permettant à des entreprises insusceptibles d'offrir les garanties techniques ou financières nécessaires d'obtenir la concession " est dirigé contre un motif surabondant de l'arrêt attaqué et ne peut donc qu'être écarté.

16. En dernier lieu, la cour n'a pas commis d'erreur de droit en se fondant sur les dispositions de l'article L. 2224-31 du code général des collectivités territoriales, qui permettent aux autorités concédantes de recueillir toute information utile à leur contrôle auprès du concessionnaire, pour écarter le moyen tiré de ce que la convention en litige ne prévoyait pas une information suffisante de la collectivité délégante sur l'inventaire des biens relevant de la concession.

17. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque.

18. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par les sociétés Enedis et EDF et par la métropole de Lyon au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Ces dispositions font, par ailleurs, obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge des sociétés Enedis et EDF et de la métropole de Lyon qui ne sont pas, dans la présente instance, les parties perdantes.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'intervention de la société Ile de Sein Energie (IDSE) et de l'association ClientEarth est admise.

Article 2 : Le pourvoi de Mme A... est rejeté.

Article 3 : Les conclusions des sociétés Enedis et EDF et de la métropole de Lyon présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à Mme B... A..., à la métropole de Lyon, aux sociétés Electricité de France (EDF), Enedis et Ile de Sein Energie (IDSE) et à l'association ClientEarth.


Synthèse
Formation : 7ème - 2ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 423901
Date de la décision : 10/07/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 10 jui. 2020, n° 423901
Inédit au recueil Lebon

Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Thomas Pez-Lavergne
Rapporteur public ?: M. Gilles Pellissier
Avocat(s) : SCP BAUER-VIOLAS, FESCHOTTE-DESBOIS, SEBAGH ; CABINET MUNIER-APAIRE ; SCP PIWNICA, MOLINIE ; SCP GASCHIGNARD ; SCP NICOLAY, DE LANOUVELLE, HANNOTIN

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2020:423901.20200710
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award