Vu la procédure suivante :
Par une requête sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 21 septembre, 17 novembre 2020 et 3 mai 2021, l'association Le Comité d'aménagement du VIIe arrondissement et l'association Les Amis du Champ de Mars demandent au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler pour excès de pouvoir le décret n° 2020-905 du 23 juillet 2020 modifiant le décret n° 2018-379 du 22 mai 2018 pris en application de l'article 10 de la loi n° 2018-202 du 26 mars 2018 relative à l'organisation des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la Constitution ;
- le code civil ;
- le code de la commande publique ;
- le code de l'urbanisme ;
- la loi n° 2018-202 du 26 mars 2018 ;
- le décret n° 2018-379 du 22 mai 2018 ;
- le décret n° 2020-869 du 15 juillet 2020 ;
- le décret n° 2020-877 du 15 juillet 2020 ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Alexis Goin, auditeur,
- les conclusions de Mme Mireille Le Corre, rapporteure publique ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP L. Poulet, Odent, avocat de l'association Le Comité d'aménagement du VIIe arrondissement et l'association Les Amis du Champ de Mars et à la SCP Piwnica, Molinié, avocat de l'établissement public Réunion des musées nationaux et du Grand Palais des Champs-Elysées et de l'association Paris 2024 - Comité d'organisation des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 ;
Considérant ce qui suit :
1. Aux termes de l'article 10 de la loi du 26 mars 2018 relative à l'organisation des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 : " Les constructions, installations et aménagements directement liés à la préparation, à l'organisation ou au déroulement des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 et ayant un caractère temporaire constituent des réalisations dispensées de toute formalité au titre du code de l'urbanisme comme relevant du b de l'article L. 421-5 du même code et sont soumis au régime applicable à celles ci. / En ce qui concerne les constructions, installations et aménagements temporaires utilisés pour les jeux Olympiques et Paralympiques de 2024, la durée d'implantation ne peut être supérieure à dix-huit mois et la durée de remise en état des sites ne peut être supérieure à douze mois à compter de la fin de leur utilisation. Un décret en Conseil d'Etat précise les conditions d'application du présent alinéa, notamment la durée maximale d'implantation en fonction des types de constructions, installations et aménagements ainsi que de leur localisation. / En ce qui concerne les constructions, installations et aménagements temporaires directement liés à des travaux réalisés sur un site accueillant des compétitions pour les jeux Olympiques et Paralympiques de 2024, la durée maximale d'implantation est celle de la durée du chantier. La durée de remise en état du site ne peut être supérieure à douze mois à compter de la fin du chantier. Toutefois, dans le cas où, à l'issue de cette durée d'implantation, ces constructions, installations et aménagements temporaires doivent être maintenus afin d'être réutilisés pour accueillir des manifestations directement liées aux jeux Olympiques et Paralympiques de 2024, ils sont alors soumis aux durées d'implantation et de remise en état prévues au deuxième alinéa du présent article. Un décret fixe la liste des constructions, installations et aménagements concernés ". Aux termes de l'article 1er du décret du 22 mai 2018, pris pour l'application de cette loi : " Les constructions, installations et aménagements temporaires directement liés à des travaux réalisés sur un site accueillant des compétitions pour les jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 figurent au tableau annexé au présent décret ". Selon ce tableau annexé, constitue une construction, installation ou aménagement temporaire visé au troisième alinéa de l'article 10 de la loi relative à l'organisation des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 la " construction provisoire destinée à accueillir les activités du Grand Palais, notamment celles déployées dans la nef, site accueillant les compétitions d'escrime et de taekwondo pour les jeux Olympiques et Paralympiques de 2024, pendant la fermeture de ce site pour la réalisation des travaux préalables à l'accueil de ces compétitions ". Ce tableau décrit les caractéristiques principales de cette installation, notamment la surface occupée, les dimensions maximales et la jauge.
2. Il ressort des pièces du dossier qu'à la suite de l'intervention du décret du 22 mai 2018, l'établissement public de la Réunion des musées nationaux et du Grand Palais des Champs-Elysées, l'association Paris 2024 - Comité d'organisation des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 et les sociétés GL Events Venues et GL Events Live ont conclu le 17 septembre 2019 une concession de travaux publics portant sur la conception, la réalisation, le financement, l'exploitation et le démontage de la construction provisoire destinée à accueillir les activités du Grand Palais. Par un arrêt du 21 juillet 2020, la cour administrative d'appel de Paris, saisie par les associations Le Comité d'aménagement du VIIe arrondissement et Les Amis du Champ de Mars, a enjoint aux parties de ce contrat de régulariser l'annexe III de ce contrat, sauf à ce qu'elles préfèrent résilier ou résoudre le contrat, afin de respecter la jauge de 8 000 personnes fixée par le décret du 22 mai 2018. Par un décret du 23 juillet 2020, les caractéristiques de la construction provisoire destinée à accueillir les activités du Grand Palais, résultant du décret du 22 mai 2018, ont été modifiées, notamment en portant de 8 000 à 9 000 la jauge de cette construction. Par la présente requête, les associations Le comité d'aménagement du VIIe arrondissement et Les Amis du Champ de Mars demandent l'annulation pour excès de pouvoir de ce décret du 23 juillet 2020.
3. En premier lieu, aux termes de l'article 22 de la Constitution, les actes du Premier ministre sont contresignés, le cas échéant, par les ministres chargés de leur exécution. La modification du décret du 22 mai 2018 par le décret du 23 juillet 2020 n'emporte nécessairement aucune mesure réglementaire ou individuelle que les ministres chargés de l'urbanisme ou des sports auraient compétence pour signer ou contresigner. Dans ces conditions, le décret attaqué n'avait pas à être contresigné par ces ministres, qui ne sont pas chargés de son exécution au sens de l'article 22 de la Constitution.
4. En deuxième lieu, les associations requérantes ne peuvent utilement soutenir que le décret attaqué, qui ne modifie pas le contrat du 17 septembre 2019 passé par l'établissement public de la Réunion des musées nationaux et du Grand Palais des Champs-Elysées, l'association Paris 2024 - Comité d'organisation des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 et les sociétés GL Events Venues et GL Events Live, méconnaîtrait les dispositions qui régissent la modification des contrats de la commande publique.
5. En troisième lieu, le rehaussement de la jauge du bâtiment susceptible d'être édifié sans formalités au titre du code de l'urbanisme par le décret attaqué est, par elle-même, sans incidence sur les conditions d'exploitation de l'édifice litigieux. Par suite, le moyen tiré de ce que le Premier ministre aurait commis une erreur manifeste d'appréciation en augmentant la jauge de cette construction, alors que des restrictions ont été apportées aux rassemblements de personnes en 2020 et 2021 en raison de l'épidémie de covid-19, ne peut qu'être écarté.
6. En quatrième lieu, le décret attaqué qui, ainsi qu'il a été dit au point 4 ne modifie pas le contrat du 17 septembre 2019, est entré en vigueur selon les règles fixées à l'article 1er du code civil, n'a pas de portée rétroactive.
7. En dernier lieu, en modifiant le décret du 22 mai 2018 pour porter à 9 000 personnes la jauge de la construction provisoire pour l'adapter à l'évolution de l'édifice projeté pour accueillir provisoirement les activités du Grand Palais puis des événements liés aux jeux Olympiques et Paralympiques, le Premier ministre a poursuivi un but conforme à l'intérêt général qui s'attache à la préparation, à l'organisation ou au déroulement des jeux Olympiques et Paralympiques. La circonstance que cette modification soit intervenue après que la cour administrative d'appel de Paris a enjoint aux parties au contrat du 17 septembre 2019 de prendre des mesures de régularisation pour respecter la jauge antérieure de 8 000 personnes n'est pas de nature à entacher le décret attaqué de détournement de pouvoir.
8. Il résulte de ce qui précède que les associations Le Comité d'aménagement du VIIe arrondissement et Les Amis du Champ de Mars ne sont pas fondées à demander l'annulation pour excès de pouvoir du décret qu'elles attaquent. Leurs conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, en conséquence, qu'être rejetées.
D E C I D E :
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Article 1er : La requête des associations Le Comité d'aménagement du VIIe arrondissement et Les Amis du Champ de Mars est rejetée.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à l'association Le Comité d'aménagement du VIIe arrondissement, à l'association Les Amis du Champ de Mars, à la ministre de la culture et au Premier ministre.
Copie en sera adressée à la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités, à l'établissement public Réunion des musées nationaux et du Grand Palais des Champs-Elysées et de l'association Paris 2024 - Comité d'organisation des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 ;