Vu la procédure suivante :
Mme C... B... a demandé au tribunal administratif de Limoges, d'une part, d'annuler la décision du 14 février 2017 par laquelle le président du conseil départemental de la Creuse a, sur son recours, confirmé la décision du 27 octobre 2016 de la caisse d'allocations familiales de la Creuse mettant fin à ses droits au revenu de solidarité active ainsi que la décision du 9 janvier 2017 de la caisse d'allocations familiales de la Creuse de récupérer un indu de revenu de solidarité active d'un montant global de 11 712,44 euros pour la période du 1er juillet 2015 au 30 septembre 2016 et de la décharger du solde de cet indu, d'autre part, d'enjoindre au département et à la caisse d'allocations familiales de reverser les sommes déjà retenues dans le cadre de la procédure de recouvrement. Par un jugement n° 1701282 du 26 décembre 2019, le tribunal administratif de Limoges a rejeté cette demande.
Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 21 juillet et 13 octobre 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme B... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à sa demande ;
3°) de mettre à la charge du département de la Creuse, de la caisse d'allocations familiales de la Creuse et de l'Etat la somme de 3 000 euros à verser à la SCP Delamarre et Jéhannin, son avocat, au titre des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le décret du 19 décembre 1991 ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme A... D..., auditrice,
- les conclusions de M. Vincent Villette, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Delamarre, Jéhannin, avocat de Mme B... et à la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle, Hannotin, avocat du département de la Creuse ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, le 27 octobre 2016, la caisse d'allocations familiales de la Creuse a mis fin aux droits de Mme B... au bénéfice du revenu de solidarité active. Le 9 janvier 2017, cette caisse a réclamé à l'intéressée le remboursement d'un indu de revenu de solidarité active d'un montant de 11 712,44 euros. Par une décision du 14 février 2017, notifiée le 21 février 2017 à Mme B..., le président du conseil départemental de la Creuse a, sur le recours préalable de l'intéressée, confirmé ces deux décisions. Le 16 septembre 2017, Mme B... a contesté la décision du 14 février 2017 et le rejet de son recours gracieux devant le tribunal administratif de Limoges, qui a rejeté sa demande par un jugement du 26 décembre 2019 contre lequel Mme B... se pourvoit en cassation.
2. D'une part, aux termes de l'article R. 421-1 du code de justice administrative, dans sa version alors applicable : " (...) la juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée ".
3. D'autre part, aux termes de l'article 38 du décret du 19 décembre 1991 portant application de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique : " Lorsqu'une action en justice ou un recours doit être intenté avant l'expiration d'un délai devant les juridictions de première instance ou d'appel, l'action ou le recours est réputé avoir été intenté dans le délai si la demande d'aide juridictionnelle s'y rapportant est adressée au bureau d'aide juridictionnelle avant l'expiration dudit délai et si la demande en justice ou le recours est introduit dans un nouveau délai de même durée à compter : (...) c) De la date à laquelle le demandeur à l'aide juridictionnelle ne peut plus contester la décision d'admission ou de rejet de sa demande en application du premier alinéa de l'article 56 et de l'article 160 ou, en cas de recours de ce demandeur, de la date à laquelle la décision relative à ce recours lui a été notifiée ".
4. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que Mme B... a formé le 22 mars 2017 une demande d'aide juridictionnelle, dans le délai de deux mois dont elle disposait pour contester la décision litigieuse, puis formé un recours contre la décision la lui refusant, prise le 12 juin 2017 par le bureau d'aide juridictionnelle du tribunal de grande instance de Limoges, sans qu'il ressorte des pièces du dossier soumis aux juges du fond qu'elle ait exercé ce recours au-delà du délai de quinze jours qui lui était ouvert par l'article 56 du décret du 19 décembre 1991. Ce recours ayant été rejeté par une ordonnance du 27 août 2017 du président de la cour administrative d'appel de Bordeaux, le tribunal administratif de Limoges ne pouvait, sans entacher son jugement d'erreur de droit, rejeter comme tardive la demande de Mme B..., enregistrée le 16 septembre 2017.
5. Il résulte de ce qui précède que Mme B... est fondée à demander l'annulation du jugement qu'elle attaque.
6. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de Mme B..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du département de la Creuse la somme que Mme B... demande au titre de ces mêmes dispositions et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
D E C I D E :
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Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Limoges du 26 décembre 2019 est annulé.
Article 2 : L'affaire est renvoyée au tribunal administratif de Limoges.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 4 : Les conclusions présentées par le département de la Creuse au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à Mme C... B... et au département de la Creuse.