Vu la procédure suivante :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler le titre exécutoire n° 2 du 15 mars 2016 par lequel le maire de Boynes (Loiret) a mis à sa charge le paiement d'une somme de 16 024 euros au titre de la participation pour le financement de l'assainissement collectif à raison de quatre habitations situées rue de la Petite Tombelle, ainsi que la décision du maire du 31 mai 2016 rejetant son recours gracieux contre ce titre exécutoire. Par un jugement n° 1602048 du 28 novembre 2017, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande.
Par un arrêt n° 18NT00119 du 2 juillet 2019, la cour administrative d'appel de Nantes a, sur appel de M. A..., annulé ce jugement, le titre exécutoire du 15 mars 2016 et la décision du 31 mai 2016 et déchargé M. A... de l'obligation de payer la somme de 16 024 euros mise à sa charge par ce titre exécutoire.
Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 28 août et 27 novembre 2019 et le 26 mai 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la commune de Boynes demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cet arrêt ;
2°) de mettre à la charge de M. A... la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de la santé publique ;
- le code de l'urbanisme ;
- la loi n° 2012-354 du 14 mars 2012 ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Rose-Marie Abel, maître des requêtes en service extraordinaire,
- les conclusions de M. Laurent Cytermann, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Waquet, Farge, Hazan, avocat de la commune de Boynes et à la SARL Didier-Pinet, avocat de M. A... ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que le maire de Boynes (Loiret) a délivré à M. B... A..., le 3 octobre 2011, un permis de construire dont l'article 3 mettait à sa charge le versement d'une participation pour raccordement à l'égout d'un montant de 9 800 euros. Pour obtenir le paiement de cette somme, le maire a émis un titre exécutoire n° 35 du 1er octobre 2012 pour un montant de 2 450 euros hors taxes et un titre exécutoire n° 8 du 20 novembre 2014 pour un montant de 7 350 euros hors taxes. Toutefois, à la suite d'une contestation soulevée par M. A... à l'encontre de son obligation de payer la participation pour raccordement à l'égout, le maire a émis le 15 mars 2016, d'une part, deux mandats de paiement annulant ces deux titres et ordonnant le remboursement des sommes correspondantes, d'autre part, un titre exécutoire n° 2 mettant à la charge de M. A... une somme de 16 024 euros au titre de la participation pour le financement de l'assainissement collectif. Par décision du 31 mai 2016, le maire de Boynes a rejeté le recours gracieux formé par M. A... contre ce dernier titre exécutoire. Par jugement du 28 novembre 2017, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté la demande de M. A... tendant à l'annulation de ce titre et de cette décision. Toutefois, sur appel de M. A..., la cour administrative d'appel de Nantes a, par l'article 1er de son arrêt du 2 juillet 2019, annulé ce jugement, le titre exécutoire n° 2 du 15 mars 2016, ainsi que la décision du maire de Boynes du 31 mai 2016 rejetant le recours gracieux de M. A... et, par l'article 2 de son arrêt, déchargé ce dernier de l'obligation de payer la somme de 16 024 euros. La commune de Boynes demande l'annulation de cet arrêt, par un pourvoi qui doit être regardé comme dirigé contre ses articles 1er et 2 et contre son article 4, en tant que ce dernier rejette ses conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
2. Aux termes de l'article L. 1331-7 du code de la santé publique, dans sa rédaction issue du I de l'article 30 de la loi du 14 mars 2012 de finances rectificative pour 2012 : " Les propriétaires des immeubles soumis à l'obligation de raccordement au réseau public de collecte des eaux usées en application de l'article L. 1331-1 peuvent être astreints par la commune, (...) pour tenir compte de l'économie par eux réalisée en évitant une installation d'évacuation ou d'épuration individuelle réglementaire ou la mise aux normes d'une telle installation, à verser une participation pour le financement de l'assainissement collectif. / Cette participation s'élève au maximum à 80 % du coût de fourniture et de pose de l'installation mentionnée au premier alinéa du présent article, diminué, le cas échéant, du montant du remboursement dû par le même propriétaire en application de l'article L. 1331-2. / La participation prévue au présent article est exigible à compter de la date du raccordement au réseau public de collecte des eaux usées de l'immeuble, de l'extension de l'immeuble ou de la partie réaménagée de l'immeuble, dès lors que ce raccordement génère des eaux usées supplémentaires. / Une délibération du conseil municipal (...) détermine les modalités de calcul de cette participation ". Aux termes du II du même article 30 : " Le I est applicable aux immeubles qui ont été raccordés au réseau public de collecte des eaux usées à compter du 1er juillet 2012. Il ne s'applique pas aux immeubles pour lesquels les propriétaires ont été astreints à verser la participation prévue à l'article L. 1331-7 du code de la santé publique, dans sa rédaction antérieure à la publication de la présente loi ". Aux termes de l'article L. 1331-7 du code de la santé publique, dans sa rédaction antérieure à la loi du 14 mars 2012 : " Les propriétaires des immeubles édifiés postérieurement à la mise en service du réseau public de collecte auquel ces immeubles doivent être raccordés peuvent être astreints par la commune, pour tenir compte de l'économie par eux réalisée en évitant une installation d'évacuation ou d'épuration individuelle réglementaire, à verser une participation s'élevant au maximum à 80 % du coût de fourniture et de pose d'une telle installation. / Une délibération du conseil municipal détermine les conditions de perception de cette participation ". Par ailleurs, en application des dispositions combinées des articles L. 332-28 et L. 332-6-1 du code de l'urbanisme, dans leur rédaction antérieure à la loi du 14 mars 2012, le fait générateur de la participation pour raccordement à l'égout mentionnée à l'article L. 1331-7 du code de la santé publique, dans sa rédaction antérieure à cette même loi, était constitué, selon le cas, par le permis de construire, le permis d'aménager, les prescriptions faites par l'autorité compétente à l'occasion de la déclaration préalable ou l'acte approuvant un plan de remembrement.
3. Il résulte de la combinaison de ces dispositions que la participation pour le financement de l'assainissement collectif, instituée par le I de l'article 30 de la loi du 14 mars 2012, n'est pas applicable aux immeubles pour lesquels leurs propriétaires ont été astreints, par une prescription figurant dans un permis de construire relatif à ces immeubles, délivré à la suite d'une demande déposée avant le 1er juillet 2012, à verser la participation pour raccordement à l'égout. Ne sont pas au nombre de ces propriétaires ceux qui, bien qu'initialement astreints à verser une telle participation par une prescription figurant dans un permis de construire, ont été entièrement déchargés de cette obligation postérieurement à la délivrance du permis.
4. Pour juger que la commune de Boynes ne pouvait mettre à sa charge la participation pour le financement de l'assainissement collectif instituée par la loi du 14 mars 2012, alors même que les immeubles avaient été raccordés au réseau d'assainissement après le 1er juillet 2012, la cour administrative d'appel a relevé que M. A... avait été astreint, par l'article 3 du permis de construire délivré le 3 octobre 2011, à la participation pour raccordement à l'égout. En statuant ainsi, sans rechercher, comme la commune l'y invitait, si M. A... n'avait pas été déchargé de cette obligation postérieurement à la délivrance du permis, la cour administrative d'appel a commis une erreur de droit. La commune de Boynes est dès lors fondée à demander l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque, dans la mesure indiquée au point 1.
5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. A... une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Les dispositions de cet article font obstacle, en revanche, à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de la commune de Boynes, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.
D E C I D E :
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Article 1er : Les articles 1er et 2 de l'arrêt du 2 juillet 2019 de la cour administrative d'appel de Nantes, ainsi que son article 4 en tant qu'il rejette les conclusions de la commune de Boynes au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sont annulés.
Article 2 : L'affaire est renvoyée, dans la mesure de la cassation prononcée à l'article 1er, à la cour administrative d'appel de Nantes.
Article 3 : M. A... versera à la commune de Boynes une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Les conclusions de M. A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à la commune de Boynes et à M. B... A....
Délibéré à l'issue de la séance du 18 novembre 2021 où siégeaient : M. Guillaume Goulard, président de chambre, présidant ; M. Stéphane Verclytte, conseiller d'Etat et Mme Rose-Marie Abel, maître des requêtes en service extraordinaire-rapporteure.
Rendu le 14 décembre 2021.
Le Président :
Signé : M. Guillaume Goulard
La rapporteure :
Signé : Mme Rose-Marie Abel
La secrétaire :
Signé : Mme C... D...