Vu la procédure suivante
La présidente de l'université Pierre et Marie Curie a porté plainte contre M. A... B... devant la section disciplinaire du conseil académique de l'établissement Sorbonne Université. Par une décision du 25 avril 2017, la section disciplinaire a infligé à M. B... la sanction de l'exclusion définitive de cette université.
Par une décision du 10 décembre 2020, le Conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche, statuant en matière disciplinaire, a rejeté l'appel formé par M. B... contre cette décision.
Par un pourvoi sommaire, un mémoire complémentaire et un mémoire en réplique, enregistrés les 4 mars et 4 juin 2021 et le 28 mars 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. B... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cette décision ;
2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel ;
3°) de mettre à la charge de l'établissement Sorbonne Université la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code de l'éducation ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de Mme Françoise Tomé, conseillère d'Etat ;
- les conclusions de M. Frédéric Dieu, rapporteur public ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Lyon-Caen, Thiriez, avocat de M. B... et à la SCP Thouvenin, Coudray, Grevy, avocat de Sorbonne Université ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que, par une décision du 25 avril 2017, la section disciplinaire du conseil académique de l'établissement Sorbonne Université a infligé à M. B..., étudiant en troisième année de licence, la sanction de l'exclusion définitive de cette université, anciennement dénommée université Pierre et Marie Curie. M. B... se pourvoit en cassation contre la décision du 10 décembre 2020 par laquelle le Conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche (CNESER), statuant en formation disciplinaire, a rejeté son appel formé contre cette décision.
2. En premier lieu, il ressort des termes mêmes de la décision attaquée que le CNESER, après avoir relevé que M. B... invoquait que la procédure suivie en première instance avait été irrégulière en raison de l'incompétence de l'auteur de la décision engageant les poursuites disciplinaires, de l'irrégularité des convocations lui ayant été adressées devant la commission d'instruction et la formation de jugement, du défaut d'impartialité de la formation de jugement, de la mention erronée dans la décision de première instance selon laquelle il était présent à l'audience alors qu'il ne l'était pas, et de l'absence d'examen du caractère sérieux de sa question prioritaire de constitutionnalité, s'est borné à juger que " les membres de la formation de jugement, après examen attentif des griefs soulevés par M. A... B... ne relèvent aucun manquement de la procédure de première instance ". En statuant ainsi, le CNESER a entaché sa décision d'insuffisance de motivation, le juge de cassation n'étant pas en mesure d'exercer le contrôle qui lui incombe sur le bien-fondé de cette appréciation.
3. En second lieu, le CNESER, après avoir relevé la teneur injurieuse, insultante et diffamatoire des courriels que le requérant a adressés aux juridictions de première instance et d'appel durant l'instruction de son affaire, a jugé que " ces courriels s'inscri[vent] dans la continuité du comportement qui lui était reproché par le président de l'Université Pierre et Marie Curie qui ne fait dès lors aucun doute ". En se fondant sur ces seuls courriels pour estimer que les faits de propos injurieux et menaçants commis à l'encontre d'un enseignant et d'un agent de direction, respectivement en 2016 et 2017, étaient constitués, le CNESER a méconnu son office et entaché sa décision d'insuffisance de motivation.
4. Il résulte des motifs qui précèdent, dont chacun justifie à lui seul l'annulation de la décision du 10 décembre 2020, que celle-ci doit être annulée, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens du pourvoi.
5. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'établissement Sorbonne Université la somme que demande M. B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Ces mêmes dispositions font obstacle à ce qu'une somme soit mise, à ce titre, à la charge de M. B... qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante.
D E C I D E :
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Article 1er : La décision du 10 décembre 2020 du Conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche, statuant en matière disciplinaire, est annulée.
Article 2 : L'affaire est renvoyée au Conseil national de l'enseignement supérieur et de la recherche, statuant en matière disciplinaire.
Article 3 : Les conclusions de M. B... présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Les conclusions de l'établissement Sorbonne Université présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 5 : La présente décision sera notifiée à M. A... B... et à l'établissement Sorbonne Université
Copie en sera adressée à la ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche.
Délibéré à l'issue de la séance du 31 mars 2022 où siégeaient : Mme Maud Vialettes, présidente de chambre, présidant ; Mme Carine Soulay, conseillère d'Etat et Mme Françoise Tomé, conseillère d'Etat-rapporteure.
Rendu le 30 mai 2022.
La présidente :
Signé : Mme Maud Vialettes
La rapporteure :
Signé : Mme Françoise Tomé
La secrétaire :
Signé : Mme Romy Raquil