Vu la procédure suivante :
M. C... A... B... a demandé à la Cour nationale du droit d'asile d'annuler la décision du 14 septembre 2020 par laquelle le directeur général de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) a mis fin à la protection subsidiaire dont il bénéficiait.
Par une décision n° 20034390 du 8 décembre 2021, la Cour nationale du droit d'asile a annulé cette décision et accordé à M. A... B... la qualité de réfugié.
Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 8 février et 9 mai 2022 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'OFPRA demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cette décision ;
2°) de renvoyer l'affaire à la Cour nationale du droit d'asile.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention de Genève du 28 juillet 1951 et le protocole signé à New York le 31 janvier 1967 relatifs au statut des réfugiés ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Paul Bernard, maître des requêtes,
- les conclusions de M. Philippe Ranquet, rapporteur public,
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Foussard, Froger, avocat de l'OFPRA, et à la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat de M. A... B... ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. A... B..., de nationalité afghane, s'est vu reconnaître le bénéfice de la protection subsidiaire par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) du 20 avril 2016. Par une décision du 14 décembre 2020, prise sur le fondement des dispositions du 3° de l'article L. 712-3 et du b) et du c) de l'article L. 712-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, reprises au 3° de l'article L. 512-3 et aux 2° et 4° de l'article L. 512-2 du même code, l'OFPRA a mis fin à la protection dont bénéficiait M. A... B..., aux motifs que l'intéressé avait commis un crime grave et que son activité sur le territoire constitue une menace grave pour l'ordre public, la sécurité publique ou la sûreté de l'Etat. Par une décision du 8 décembre 2021, contre laquelle l'OFPRA se pourvoit en cassation, la Cour nationale du droit d'asile a annulé cette décision et reconnu à M. A... B... la qualité de réfugié.
2. Aux termes de l'article L. 512-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La protection subsidiaire n'est pas accordée à une personne s'il existe des raisons sérieuses de penser : / (...) / 2° Qu'elle a commis un crime grave ; / (...) 4° Que son activité sur le territoire constitue une menace grave pour l'ordre public, la sécurité publique ou la sûreté de l'Etat ; (...) ". Aux termes de l'article L. 512-3 du code : " (...) L'office met également fin à tout moment, de sa propre initiative ou à la demande de l'autorité administrative, au bénéfice de la protection subsidiaire dans les cas suivants : / ( ...) 3° Le bénéficiaire de la protection subsidiaire doit, à raison de faits commis après l'octroi de la protection, en être exclu pour l'un des motifs prévus à l'article L. 512-2 ".
3. Il ressort des pièces du dossier soumis à la Cour nationale du droit d'asile que par un jugement du tribunal correctionnel de Paris du 7 février 2019, M. A... B... a été condamné à une peine de trois ans d'emprisonnement pour des faits d'aide à l'entrée et à la circulation ou au séjour irrégulier d'un étranger en France, commis en bande organisée. S'il n'a pas été condamné à la peine maximale encourue, il ressort des énonciations de ce jugement correctionnel que l'intéressé avait un rôle prépondérant dans l'organisation d'une filière de passages de migrants à destination de l'Angleterre, contre rémunération, selon un mode opératoire bien établi et impliquant de nombreuses personnes. Par ailleurs, pour éviter tout renouvellement des faits, le juge pénal a estimé devoir assortir sa condamnation d'une peine complémentaire d'interdiction définitive du territoire français. Dans ces conditions, la Cour, qui n'est pas liée dans son appréciation par la qualification donnée aux faits par le droit français et alors qu'elle relevait, dans les motifs de sa décision, la gravité des faits commis a entaché sa décision d'erreur de qualification juridique des faits en jugeant qu'il n'existait pas de raisons sérieuses de penser que M. A... B... se serait rendu coupable d'un crime grave de droit commun au sens du 2° de l'article L. 512-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
4. Il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens du pourvoi, l'OFPRA est fondé à demander l'annulation de la décision qu'il attaque. Les conclusions présentées par M. A... B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent dès lors qu'être rejetées.
D E C I D E :
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Article 1er : La décision du 8 décembre 2021 de la Cour nationale du droit d'asile est annulée.
Article 2 : L'affaire est renvoyée à la Cour nationale du droit d'asile.
Article 3 : Les conclusions présentées par M. A... B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et à M. C... A... B....