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19/07/2024 | FRANCE | N°496098

France | France, Conseil d'État, Juge des référés, 19 juillet 2024, 496098


Vu la procédure suivante :

Par une requête, enregistrée le 17 juillet 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'association Collectif d'action contre l'enfouissement des déchets radioactifs, l'association Greenpeace France, l'association Réseau "Sortir du nucléaire", l'association Collectif contre l'enfouissement des déchets radioactifs / Haute Marne, l'association Solidaires, l'association Arrêt du nucléaire 26/07, l'association Stop Transport - Halte au Nucléaire, l'association Comité pour la sauvegarde de Fessenheim et de la plaine du Rhin, l'a

ssociation Global Chance, l'association Stop Fessenheim, Mme E......

Vu la procédure suivante :

Par une requête, enregistrée le 17 juillet 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'association Collectif d'action contre l'enfouissement des déchets radioactifs, l'association Greenpeace France, l'association Réseau "Sortir du nucléaire", l'association Collectif contre l'enfouissement des déchets radioactifs / Haute Marne, l'association Solidaires, l'association Arrêt du nucléaire 26/07, l'association Stop Transport - Halte au Nucléaire, l'association Comité pour la sauvegarde de Fessenheim et de la plaine du Rhin, l'association Global Chance, l'association Stop Fessenheim, Mme E... R..., M. J... O..., M. M... S..., Mme AC... F..., M. AA... W..., M. AD... L..., Mme AC... Z..., M. G... P..., Mme V... D..., M. U... C..., M. AK... AB..., Mme AF... N..., M. B... AG..., Mme AE... K..., M. AH... T..., M. X... H..., M. Q... AI..., Mme I... Y..., M. AJ... A... demandent au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative :

1°) de suspendre l'exécution du décret n° 2024-323 du 8 avril 2024 portant autorisation d'un traitement automatisé de données à caractère personnel relatif à la sécurité des établissements, ouvrages, installations et activités nucléaires dénommé " traitement d'optimisation des données et informations d'intérêt nucléaire " ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- la condition d'urgence est satisfaite dès lors que l'exécution du décret contesté porte une atteinte grave et immédiate au droit au respect de la vie privée des personnes concernées eu égard, en premier lieu, au caractère personnel et sensible des données collectées, en deuxième lieu, au périmètre large et imprécis des motifs d'enregistrement dans le traitement, en troisième lieu, au caractère excessif de la durée maximale de conservation de ces données et, en dernier lieu, à l'absence d'impératifs justifiant la mise en œuvre de ce décret ;

- il existe un doute sérieux quant à la légalité du décret contesté ;

- il est entaché d'un vice de procédure dès lors qu'il n'a pas fait l'objet d'une consultation régulière du Conseil d'Etat ;

- le traitement de données litigieux ne répond pas à des finalités déterminées, explicites et légitimes, en méconnaissance des dispositions de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 ;

- il constitue une ingérence dans le droit au respect de la vie privée contraire à l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits l'homme et des libertés fondamentales dès lors que, en premier lieu, l'objet du décret ne répond pas aux exigences d'accessibilité, de clarté et de prévisibilité, en deuxième lieu, l'ampleur de l'ingérence en cause n'est pas justifiée par un intérêt public suffisant et, en dernier lieu, le décret contesté ne prévoit pas de garanties adéquates et suffisantes pour préserver les droits des personnes concernées.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de justice administrative ;

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision ". En vertu de l'article L. 522-3 du même code, le juge des référés peut, par une ordonnance motivée, rejeter une requête sans instruction ni audience lorsque la condition d'urgence n'est pas remplie ou lorsqu'il apparaît manifeste, au vu de la demande, que celle-ci ne relève pas de la compétence de la juridiction administrative, qu'elle est irrecevable ou qu'elle est mal fondée.

2. Le collectif d'action contre l'enfouissement des déchets radioactifs et 28 autres requérants demandent au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, de suspendre l'exécution du décret du 8 avril 2024 portant autorisation d'un traitement automatisé de données à caractère personnel relatif à la sécurité des établissements, ouvrages, installations et activités nucléaires dénommé " traitement d'optimisation des données et informations d'intérêt nucléaire ".

3. L'urgence justifie que soit prononcée la suspension de l'exécution d'un acte administratif, en application des dispositions de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, lorsque cette exécution porte atteinte, de manière suffisamment grave et immédiate, à un intérêt public, à la situation du requérant ou aux intérêts qu'il entend défendre. Il appartient au juge des référés d'apprécier concrètement, compte tenu des justifications apportées par le requérant, si les effets de l'acte en litige sont de nature à caractériser une urgence justifiant que, sans attendre le jugement au fond, l'exécution de la décision soit suspendue.

4. Pour justifier de l'urgence à prononcer la suspension demandée du décret du 8 avril 2024, les requérants soutiennent que toute mise en œuvre d'un traitement de données à caractère personnel, dans la mesure où elle constitue une ingérence dans la vie privée des personnes concernées, est de nature à caractériser l'urgence de la suspension de son exécution. Ils se prévalent par ailleurs de l'illégalité de l'atteinte portée par le décret contesté au droit au respect de la vie privée eu égard au caractère personnel et sensible des données collectées, au périmètre large et imprécis des motifs de leur enregistrement, au caractère excessif de la durée de leur conservation et à l'absence d'impératifs justifiant la mise en œuvre d'un tel traitement. Toutefois, alors que le décret contesté a pour objet de permettre la collecte et le traitement des informations nécessaires à la prévention des atteintes à la sécurité nucléaire, les considérations générales invoquées par les requérants ne sauraient caractériser une atteinte grave et immédiate à leurs intérêts personnels ou à ceux qu'ils défendent. Par ailleurs, l'illégalité d'un traitement de données personnelles résultant de la méconnaissance du droit au respect de la vie privée, à la supposer établie, n'est pas constitutive d'une situation d'urgence justifiant, par elle-même, la suspension d'un acte administratif.

5. Il résulte de ce qui précède que la condition d'urgence posée par l'article L. 521-1 du code de justice administrative n'est pas en l'espèce satisfaite. Par suite, la requête de l'association Collectif d'action contre l'enfouissement des déchets radioactifs et des 28 autres requérants doit être rejetée selon la procédure prévue à l'article L. 522-3 du code de justice administrative, y compris les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

O R D O N N E :

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Article 1er : La requête de l'association Collectif d'action contre l'enfouissement des déchets radioactifs et autres est rejetée.

Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à l'association Collectif d'action contre l'enfouissement des déchets radioactifs, première dénommée pour l'ensemble des requérants. Copie en sera adressée au Premier ministre.

Fait à Paris, le 19 juillet 2024

Signé : Nathalie Escaut

Pour expédition conforme,

La secrétaire,

Agnès Micalowa


Synthèse
Formation : Juge des référés
Numéro d'arrêt : 496098
Date de la décision : 19/07/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 19 jui. 2024, n° 496098
Composition du Tribunal
Avocat(s) : SCP ZRIBI, TEXIER

Origine de la décision
Date de l'import : 04/08/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2024:496098.20240719
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