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15/01/2025 | FRANCE | N°476885

France | France, Conseil d'État, 9ème - 10ème chambres réunies, 15 janvier 2025, 476885


Vu la procédure suivante :



M. et Mme C... et B... A... ont demandé au tribunal administratif de Lille de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2011 à 2014 ainsi que des pénalités correspondantes, et, à titre subsidiaire, la réduction de ces impositions. Par un jugement n° 1808510 du 11 juin 2021, ce tribunal a prononcé la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle M. et Mme A... ont été assujettis au titre de l'année 2011

ainsi que des pénalités correspondantes, prononcé la décharge partielle de la cot...

Vu la procédure suivante :

M. et Mme C... et B... A... ont demandé au tribunal administratif de Lille de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2011 à 2014 ainsi que des pénalités correspondantes, et, à titre subsidiaire, la réduction de ces impositions. Par un jugement n° 1808510 du 11 juin 2021, ce tribunal a prononcé la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle M. et Mme A... ont été assujettis au titre de l'année 2011 ainsi que des pénalités correspondantes, prononcé la décharge partielle de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2012, ainsi que, dans la même mesure, des pénalités correspondantes, et rejeté le surplus de leurs conclusions.

Par un arrêt nos 21DA01746, 21DA01852 du 1er juin 2023, la cour administrative d'appel de Douai a, d'une part, sur appel du ministre de l'économie, des finances et de la relance, annulé les articles 1er à 3 de ce jugement, remis à la charge de M. et Mme A... la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2011 ainsi que les pénalités correspondantes, et prononcé une majoration du déficit agricole de l'année 2012 d'un montant de 8 000 euros, et, d'autre part, rejeté l'appel formé par M. et Mme A... contre ce jugement.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les

1er août et 31 octobre 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. et Mme A... demandent au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Cyril Martin de Lagarde, maître des requêtes en service extraordinaire,

- les conclusions de Mme Céline Guibé, rapporteure publique ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SARL cabinet Briard, Bonichot et Associés, avocat de M. et Mme A... ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond qu'à l'issue du contrôle sur pièces portant sur l'année 2011 et de la vérification de comptabilité portant sur les années 2012 à 2014 dont a fait l'objet la société Calival, qui est une société à responsabilité limitée de famille ayant opté pour le régime d'imposition personnelle des associés en application des dispositions de l'article 239 bis AA du code général des impôts, l'administration a notifié à M. et Mme A..., qui détiennent l'intégralité des parts de cette société, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu au titre des années 2011, 2012 et 2014. Par un jugement du 11 juin 2021, le tribunal administratif de Lille a prononcé la décharge totale de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu au titre de l'année 2011 ainsi que des pénalités correspondantes, et la décharge partielle de la cotisation supplémentaire au titre de l'année 2012 à hauteur d'une réduction en base de 8 000 euros dans la catégorie des bénéficies agricoles ainsi que, dans la même mesure, des pénalités correspondantes. Par un arrêt du 1er juin 2023, la cour administrative d'appel de Douai a, d'une part, annulé les articles 1er à 3 de ce jugement, remis à la charge de M. et Mme A... le supplément d'impôt sur le revenu auquel ils avaient été assujettis au titre de l'année 2011, ainsi que les pénalités correspondantes, et prononcé une majoration du déficit agricole de l'année 2012 d'un montant de 8 000 euros et, d'autre part, rejeté l'appel formé par M. et Mme A... contre ce jugement. M. et Mme A... se pourvoient en cassation contre cet arrêt.

2. Aux termes des premier et quatrième alinéas de l'article 63 du code général des impôts : " Sont considérés comme bénéfices de l'exploitation agricole pour l'application de l'impôt sur le revenu, les revenus que l'exploitation de biens ruraux procure soit aux fermiers, métayers, soit aux propriétaires exploitant eux-mêmes. / (...) / Sont aussi considérés comme bénéfices de l'exploitation agricole les revenus qui proviennent des activités de préparation et d'entraînement des équidés domestiques, en vue de leur exploitation dans les activités autres que celles du spectacle. "

3. Il résulte des dispositions du premier alinéa de l'article 63 du code général des impôts citées au point 2 que lorsque l'activité exercée s'insère dans le cycle biologique de la production de végétaux ou de l'élevage d'animaux, les revenus tirés de cette activité doivent être considérés comme des bénéfices de l'exploitation agricole pour l'application de l'impôt sur le revenu. A cet égard, le cycle biologique de développement du cheval ne se limite pas à la phase de croissance de l'animal mais peut se prolonger à l'âge adulte, par des opérations visant à améliorer sa condition physique et à renforcer ses aptitudes naturelles pour le rendre conforme à sa destination, c'est-à-dire apte au dressage qui sera choisi. En vertu du quatrième alinéa de ce même article, également cité au point 2, sont aussi considérés comme bénéfices de l'exploitation agricole les revenus qui proviennent des activités de préparation et d'entraînement des équidés domestiques, en vue de leur exploitation dans les activités autres que celles du spectacle. En revanche, les revenus tirés de la seule activité de gardiennage de chevaux ne constituent pas des bénéfices de l'exploitation agricole au sens de ces dispositions.

4. Il ressort des énonciations de l'arrêt attaqué que la cour a jugé, au titre de l'année 2011, que l'ensemble de l'activité de prise en pension de chevaux relève de la catégorie des bénéfices agricoles dès lors qu'elle vise à améliorer la condition physique du cheval et à renforcer ses aptitudes naturelles pour le rendre conforme à sa destination, sans vérifier si, en l'espèce, cette activité visait à de telles fins. Elle a par ailleurs jugé, au titre de l'année 2012, que sont imposables dans cette catégorie les revenus provenant d'une activité de prise en pension de chevaux, " même lorsqu'elle ne s'inscrit pas dans le prolongement de l'exploitation d'un centre équestre ou d'une activité d'entraîneur mais relève d'un simple gardiennage se situant hors du cycle de l'élevage et de la compétition ". Il résulte de ce qui a été dit au point 3 qu'en statuant ainsi, la cour a, dans l'un et l'autre cas, commis une erreur de droit.

5. Par suite, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi,

M. et Mme A... sont fondés à demander l'annulation de l'arrêt qu'ils attaquent, sauf en tant qu'il statue, par des motifs non contestés en cassation, sur le rehaussement des bénéfices industriels et commerciaux consécutif à la limitation des amortissements des biens donnés en location.

6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros à verser à M. et Mme A... au titre des dispositions de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : L'arrêt du 1er juin 2023 de la cour administrative d'appel de Douai est annulé sauf en tant qu'il statue sur le rehaussement des bénéfices industriels et commerciaux consécutif à la limitation des amortissements des biens donnés en location.

Article 2 : L'affaire est renvoyée, dans la mesure de l'annulation prononcée à l'article 1er, à la cour administrative d'appel de Douai.

Article 3 : L'Etat versera à M. et Mme A... la somme de 3 000 euros au titre de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. et Mme C... et B... A... et à la ministre chargée des comptes publics.

Délibéré à l'issue de la séance du 18 décembre 2024 où siégeaient : M. Rémy Schwartz, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; M. Bertrand Dacosta,

Mme Anne Egerszegi, présidents de chambre ; M. Nicolas Polge, M. Vincent Daumas,

M. Olivier Yeznikian, Mme Rozen Noguellou, conseillers d'Etat, M. Jérôme Goldenberg, conseiller d'Etat en service extraordinaire et M. Cyril Martin de Lagarde, maître des requêtes en service extraordinaire-rapporteur.

Rendu le 15 janvier 2025.

Le président :

Signé : M. Rémy Schwartz

Le rapporteur :

Signé : M. Cyril Martin de Lagarde

La secrétaire :

Signé : Mme Nathalie Planchette

La République mande et ordonne à la ministre chargée des comptes publics en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Pour la secrétaire du contentieux, par délégation :


Synthèse
Formation : 9ème - 10ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 476885
Date de la décision : 15/01/2025
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-02-04 CONTRIBUTIONS ET TAXES. - IMPÔTS SUR LES REVENUS ET BÉNÉFICES. - REVENUS ET BÉNÉFICES IMPOSABLES - RÈGLES PARTICULIÈRES. - BÉNÉFICES AGRICOLES. - REVENUS TIRÉS DE LA PRISE EN PENSION DE CHEVAUX – 1) PAR NATURE (1ER AL. DE L’ART. 63 DU CGI) – CONDITION – REVENUS LIÉS AU CYCLE BIOLOGIQUE DE DÉVELOPPEMENT DU CHEVAL – PORTÉE [RJ1] – 2) PAR DÉTERMINATION DE LA LOI (4ÈME AL. DE L’ART. 63) – EXCLUSION – REVENUS TIRÉS D’UNE SIMPLE ACTIVITÉ DE GARDIENNAGE.

19-04-02-04 Litige portant sur la catégorie d’imposition de revenus tirés d’une activité de prise en pension de chevaux. ...1) Il résulte du premier alinéa de l’article 63 du code général des impôts (CGI) que lorsque l'activité exercée s'insère dans le cycle biologique de la production de végétaux ou de l'élevage d'animaux, les revenus tirés de cette activité doivent être considérés comme des bénéfices de l’exploitation agricole pour l’application de l’impôt sur le revenu. ...A cet égard, le cycle biologique de développement du cheval ne se limite pas à la phase de croissance de l'animal mais peut se prolonger à l'âge adulte, par des opérations visant à améliorer sa condition physique et à renforcer ses aptitudes naturelles pour le rendre conforme à sa destination, c'est-à-dire apte au dressage qui sera choisi. ...2) En vertu du quatrième alinéa de ce même article, sont aussi considérés comme bénéfices de l'exploitation agricole les revenus qui proviennent des activités de préparation et d'entraînement des équidés domestiques, en vue de leur exploitation dans les activités autres que celles du spectacle. ...Les revenus tirés de la seule activité de gardiennage de chevaux ne constituent pas des bénéfices de l’exploitation agricole au sens de cet alinéa.


Publications
Proposition de citation : CE, 15 jan. 2025, n° 476885
Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Cyril Martin de Lagarde
Rapporteur public ?: Mme Céline Guibé
Avocat(s) : SARL CABINET BRIARD, BONICHOT ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 18/01/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2025:476885.20250115
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