Vu la procédure suivante :
Par une requête, enregistrée le 17 janvier 2025 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'association " C'est assez ! " et l'association " Code animal " demandent au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative :
1°) de suspendre l'exécution de la note du 2 janvier 2025 de la ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche portant instruction relative à la transition vers le nouveau site du fichier national d'identification de la faune sauvage protégée, dit fichier i-fap, et ses conséquences dans le contrôle des établissements détenant de la faune sauvage captive ;
2°) d'enjoindre à la ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche de rétablir les services du fichier i-fap, notamment le plein accès aux données en téléservice et aux enregistrements dématérialisés des déclarations de marquage, sous astreinte de 10 000 euros par jour de retard à compter de la décision à intervenir ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros pour chacune des associations requérantes au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elles soutiennent que :
- la condition d'urgence est satisfaite dès lors que la note attaquée, d'une part, est d'application immédiate et est effective depuis le 1er janvier 2025 et, d'autre part, porte préjudice de manière grave et immédiate aux intérêts qu'elles défendent en ce que la suspension des enregistrements sur le fichier i-fap aura pour conséquence une intensification des vols et du trafic de la faune sauvage, une perte inévitable de données et une absence de suivi des animaux d'espèces non domestiques détenus dans les établissements itinérants ;
- il existe un doute sérieux quant à la légalité de la décision contestée ;
- la note attaquée est entachée d'incompétence dès lors que ni la ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche, ni le gestionnaire du fichier i-fap n'étaient compétents pour adopter une telle note d'instruction alors que le fichier ayant été créé par décret du Premier ministre, le parallélisme des formes, aurait dû conduire à ce qu'il soit réformé ou suspendu par un texte de même niveau ;
- elle a été adoptée à l'issue d'une procédure irrégulière faute d'avoir fait l'objet de la consultation publique prévue par les dispositions du code de l'environnement ;
- elle contrevient également aux dispositions du code de l'environnement en ce que, d'une part, elle compromet la traçabilité des animaux d'espèces non domestiques soumis à déclaration et, d'autre part, prévoit que ne seront pas verbalisés les propriétaires d'animaux sauvages qui ne seront pas en règle avec les obligations déclaratives imposées par la loi ;
- elle méconnaît les principes de non-régression, de précaution et de gestion durable consacrés par la charte de l'environnement.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la Charte de l'environnement ;
- le code de l'environnement ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- l'arrêté du 8 octobre 2018 fixant les règles générales de détention d'animaux d'espèces non domestiques ;
- le code de justice administrative ;
Considérant ce qui suit :
1. Aux termes de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision ". En vertu de l'article L. 522-3 du même code, le juge des référés peut, par une ordonnance motivée, rejeter une requête sans instruction ni audience lorsque la condition d'urgence n'est pas remplie ou lorsqu'il apparaît manifeste, au vu de la demande, que celle-ci ne relève pas de la compétence de la juridiction administrative, qu'elle est irrecevable ou qu'elle est mal fondée.
2. L'association " C'est assez ! " et l'association " Code animal " demandent au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, de suspendre l'exécution de la note du 2 janvier 2025 de la ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche portant instruction relative à la transition vers le nouveau site du fichier national d'identification de la faune sauvage protégée et ses conséquences dans le contrôle des établissements détenant de la faune sauvage captive.
3. En vertu des dispositions de l'article L. 413-6 du code de l'environnement, les mammifères, oiseaux, reptiles et amphibiens d'espèces non domestiques figurant sur les listes établies en application des articles L. 411-1, L. 411-2 et L. 412-1 détenus en captivité doivent être identifiés individuellement dans les conditions précisées par arrêté conjoint des ministres chargés de l'environnement et de l'agriculture. Pour assurer un suivi statistique et administratif de ces animaux, les données relatives à leur identification ainsi que celle de leurs propriétaires respectifs sont enregistrées au sein d'un fichier national dont les caractéristiques sont précisées par décret en Conseil d'Etat, pris après avis de la Commission nationale de l'informatique et des libertés, et dont la gestion peut être confiée à des personnes agréées. Les articles R. 413-23-5 à R. 413-23-10 du même code, relatifs au fichier national d'identification des animaux d'espèces non domestiques détenus en captivité et aux règles d'agrément, ont été pris pour l'application de ces dispositions. Enfin, l'article 7 de l'arrêté du 8 octobre 2018 fixant les règles générales de détention d'animaux d'espèces non domestiques précise les modalités d'inscription et de mise à jour des données enregistrées dans le fichier.
4. Par une note du 2 janvier 2025, la ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche annonce la fermeture le 16 février 2025 de l'actuel site internet du fichier national d'identification des animaux d'espèces non domestiques détenus en captivité, dénommé i-fap (pour " identification de la faune sauvage protégée "), et précise la procédure de transition vers le nouveau site, qui devrait être mis en service au printemps. Elle indique à ce titre que les enregistrements dans le fichier i-fap sont suspendus à compter du 1er janvier 2025 et que, jusqu'au 15 février suivant, le site ne permettra plus que la consultation, en lecture seule, des données déjà enregistrées. Elle demande en conséquence aux services compétents de ne pas sanctionner durant la période de transition les propriétaires d'animaux sauvages, qui ne sont pas responsables de l'indisponibilité du fichier, à raison du non-enregistrement d'un animal dans le fichier i-fap ou de l'absence de mise à jour des données d'un animal enregistré.
5. L'urgence justifie que soit prononcée la suspension d'un acte administratif lorsque l'exécution de celui-ci porte atteinte, de manière suffisamment grave et immédiate, à un intérêt public, à la situation du requérant ou aux intérêts qu'il entend défendre. Il appartient au juge des référés d'apprécier concrètement, compte tenu des justifications fournies par le requérant, si les effets de l'acte litigieux sont de nature à caractériser une urgence justifiant que, sans attendre le jugement de la requête au fond, l'exécution de la décision soit suspendue. L'urgence doit être appréciée objectivement et compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce.
6. Pour justifier d'une situation d'urgence à suspendre la note du 2 janvier 2025 litigieuse, les associations requérantes font valoir que son application qui est immédiate aura nécessairement, du fait de la non-verbalisation des propriétaires qui ne seraient pas en règle en raison de l'indisponibilité du fichier i-fap, pour conséquence une intensification des vols et du trafic de la faune sauvage, une perte inévitable de données et une absence de suivi des animaux d'espèces non domestiques détenus dans les établissements itinérants. Toutefois, elles n'apportent à l'appui de leurs allégations aucun élément de nature à apprécier concrètement les risques qu'elles invoquent alors, d'une part, que la suspension de l'usage du site et notamment de sa fonctionnalité permettant de procéder aux enregistrements obligatoires mentionnés au point 3 n'est que temporaire et que, d'autre part, les contraintes techniques qui expliquent cette mesure exceptionnelle ne remettent pas par elles-mêmes en cause l'exercice par les autorités compétentes de leur pouvoir de contrôle, ni pour les propriétaires leurs obligations déclaratives qu'ils devront seulement différer et effectuer à la réouverture du nouveau site. Ainsi, les risques et inconvénients qui peuvent résulter de l'exécution de la note en litige n'apparaissent pas, en l'état du dossier, au regard des éléments produits, de nature à porter une atteinte grave et immédiate aux intérêts qu'elles entendent défendre ou à l'intérêt public de protection des animaux sauvages. Par suite, la condition d'urgence, requise par les dispositions de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, ne peut être regardée comme étant remplie.
7. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur l'autre condition tenant à l'existence de moyens sérieux, que la requête des associations " C'est assez ! " et " Code animal " doit être rejetée selon la procédure prévue par l'article L. 522-3 du code de justice administrative, y compris leurs conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du même code.
Article 1er : La requête de l'association " C'est assez ! " et de l'association " Code animal " est rejetée.
Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à l'association " C'est assez ! " et à l'association " Code animal ".
Copie en sera adressée à la ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche.
Fait à Paris, le 27 janvier 2025
Signé : Olivier Yeznikian