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28/01/2025 | FRANCE | N°500506

France | France, Conseil d'État, Juge des référés, 28 janvier 2025, 500506


Vu la procédure suivante :

Par une requête, enregistrée les 13 janvier 2025 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme B... A... demande au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative :



1°) de suspendre l'exécution, en premier lieu, de la décision du 30 octobre 2024 par laquelle le garde des sceaux, ministre de la justice ne l'a pas autorisée à poursuivre sa participation aux épreuves du premier concours d'accès à l'Ecole nationale de la magistrat

ure (ENM), session 2024, en deuxième lieu, de la décision implicite par laquelle...

Vu la procédure suivante :

Par une requête, enregistrée les 13 janvier 2025 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme B... A... demande au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative :

1°) de suspendre l'exécution, en premier lieu, de la décision du 30 octobre 2024 par laquelle le garde des sceaux, ministre de la justice ne l'a pas autorisée à poursuivre sa participation aux épreuves du premier concours d'accès à l'Ecole nationale de la magistrature (ENM), session 2024, en deuxième lieu, de la décision implicite par laquelle le même ministre a rejeté son recours gracieux reçu le 8 novembre 2024 contre cette décision, en troisième lieu, de la décision du 6 novembre 2024 par laquelle la présidente du jury a déclaré admis les candidats à l'issue des épreuves du premier concours d'accès à l'ENM, session 2024, en tant que son nom n'y figure pas ou, à titre subsidiaire, dans son intégralité et, en dernier lieu, de l'arrêté du garde des sceaux, ministre de la justice du 17 décembre 2024 portant nomination des auditeurs de justice issus des premier, deuxième et troisième concours d'accès à l'ENM, en tant que son nom n'y figure pas ou, à titre subsidiaire, dans son intégralité ;

2°) d'enjoindre au garde des sceaux, ministre de la justice de l'autoriser à participer aux épreuves d'admission au premier concours d'accès à l'ENM, session 2024 et, par voie de conséquence, d'enjoindre, d'une part, à la présidente du jury de l'inscrire sur la liste des candidats admis et, d'autre part, au garde des sceaux, ministre de la justice de la nommer auditrice de justice issue du premier concours et, à tout le moins, d'enjoindre au garde des sceaux, ministre de la justice de réexaminer sa situation dans un délai de 8 jours à compter de la notification de l'ordonnance à intervenir ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la condition d'urgence est satisfaite dès lors que, en premier lieu, en cas d'annulation des décisions litigieuses postérieurement au 17 février 2025, date de rentrée à l'ENM, elle ne pourra plus devenir auditrice de justice puisque la prestation de serment et l'entrée en formation auront déjà eu lieu, en deuxième lieu, au regard de la motivation de la décision du 30 octobre 2024, elle ne peut plus candidater à un emploi public pour lequel serait posée une condition de bonne moralité ou d'honorabilité et, en dernier lieu, les décisions contestées ont des conséquences financières graves et immédiates sur sa situation puisqu'elle se trouve privée de la possibilité de percevoir un traitement et sa santé est affectée ;

- il existe un doute sérieux quant à la légalité des décisions contestées ;

- la décision du 30 octobre 2024 est entachée d'irrégularité ou d'erreur de droit en ce que le garde des sceaux, ministre de la justice, a consulté le bulletin n° 1 de son casier judiciaire, dont il ne peut, lorsqu'il intervient en tant qu'autorité administrative, recevoir communication en application de l'article 774, alinéa 2 du code de procédure pénale, et dont il ne peut avoir connaissance en consultant le fichier Cassiopée, lequel n'est pas consultable dans le cadre d'une enquête de moralité ;

- la décision est entachée d'une erreur de droit en ce que le garde des sceaux, ministre de la justice, a commis une erreur de droit en se limitant à constater que sa responsabilité pénale a été retenue par la composition pénale pour en déduire qu'elle ne pourrait pas bénéficier de la légitime défense, sans prendre en compte les circonstances particulières de l'espèce ;

- le garde des sceaux, ministre de la justice a commis une erreur d'appréciation et à tout le moins, une erreur manifeste d'appréciation en lui déniant la condition de bonne moralité requise en ce que, en premier lieu, la composition pénale ne constitue pas une condamnation mais une mesure alternative aux poursuites et s'inscrit dans un contexte particulier dans lequel elle a été victime, pendant de longues années, de son compagnon de l'époque, prise au piège dans une relation caractérisée par un degré évident de violence à son encontre et, qu'elle n'a porté un coup à son ex-compagnon que dans le but de s'échapper de son emprise physique, en deuxième lieu, elle n'a pas dévoilé l'existence de la composition pénale, n'y étant pas tenue et craignant que cette mention vienne réduire à néant les nombreux efforts qu'elle a entrepris depuis six années pour reprendre des études universitaires et, en dernier lieu, le ministre s'est inscrit en opposition totale avec l'ensemble des avis favorables recueillis lors de l'enquête de moralité.

Par un mémoire en défense, enregistré le 23 janvier 2025, l'Ecole nationale de la magistrature conclut au rejet de la requête. Elle soutient que la présidente du jury avait compétence liée pour ne pas inclure dans la liste des candidats admis le nom de la requérante, en exécution de la décision du 30 octobre 2024 du garde des sceaux, ministre de la justice, et s'en rapporte par suite aux moyens soulevés en défense par le ministre.

Par un mémoire en défense, enregistré le 24 janvier 2025, le garde des sceaux, ministre de la justice, conclut au non-lieu à statuer. Il fait valoir que la décision du 30 octobre 2024 a été retirée et que les conclusions présentées par la requérante sont devenues sans objet. A titre subsidiaire, sur les conclusions à fin de suspension, il conclut au rejet de la requête en soutenant que la condition d'urgence n'est pas satisfaite.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 ;

- le code de procédure pénale ;

- le décret n° 72-355 du 4 mai 1972 ;

- l'arrêté du 5 mai 1972 fixant les modalités d'inscription des candidats aux concours d'accès à l'Ecole nationale de la magistrature ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir convoqué à une audience publique, d'une part, Mme A... et, d'autre part, le garde des sceaux, ministre de la justice ainsi que l'Ecole nationale de la magistrature ;

Les parties ont été informées de la radiation de l'affaire du rôle de l'audience publique du 28 janvier 2025.

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision ".

2. Lorsque le juge des référés, saisi sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative, a estimé, au vu de la requête dont il est saisi, qu'il y avait lieu d'engager la procédure prévue à l'article L. 522-1 de ce code, il lui incombe de poursuivre cette procédure et, notamment, de tenir une audience publique. Il en va différemment lorsque, après que cette procédure a été engagée, intervient un désistement ou un évènement rendant sans objet la requête. Dans ce cas, le juge des référés peut, dans le cadre de son office, donner acte du désistement ou constater un non-lieu sans tenir d'audience.

3. Il résulte de l'instruction que, postérieurement à l'introduction de la présente requête, le garde des sceaux, ministre de la justice a, par une décision du 24 janvier 2025, retiré la décision litigieuse du 30 octobre 2024 et que, par une décision du 27 janvier 2025, Mme A... a été inscrite par la présidente du jury sur la liste des candidats admis au premier concours d'accès à l'Ecole nationale de la magistrature au titre de la session 2024. Ainsi, les conclusions présentées par Mme A... sur le fondement des dispositions de l'article L. 521-1 du code de justice administrative sont devenues sans objet. Dans ces conditions, sans qu'il soit besoin de tenir une audience publique, il n'y a plus lieu de statuer sur ces conclusions.

4. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros à verser à Mme A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

O R D O N N E :

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Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions présentées par Mme A... sur le fondement des dispositions de l'article L. 521-1 du code de justice administrative.

Article 2 : L'Etat versera la somme de 3 000 euros à Mme A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : La présente ordonnance sera notifiée à Mme B... A... ainsi qu'au garde des sceaux, ministre de la justice et à l'Ecole nationale de la magistrature.

Fait à Paris, le 28 janvier 2025

Signé : Gilles Pellissier


Synthèse
Formation : Juge des référés
Numéro d'arrêt : 500506
Date de la décision : 28/01/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 28 jan. 2025, n° 500506
Composition du Tribunal
Avocat(s) : SCP PIWNICA & MOLINIE ; SCP MARLANGE, DE LA BURGADE

Origine de la décision
Date de l'import : 01/02/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2025:500506.20250128
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