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20/03/2025 | FRANCE | N°474853

France | France, Conseil d'État, 5ème - 6ème chambres réunies, 20 mars 2025, 474853


Vu la procédure suivante :



M. A... D... et Mme C... B... ont demandé au tribunal administratif de Lyon de condamner les Hospices civils de Lyon (HCL) et la société d'assurances mutuelles (SHAM), son assureur, à verser à M. D... la somme de 321 971,59 euros et à Mme B... celle de 85 158,54 euros en réparation de leurs préjudices.



Par un jugement n° 1508155 du 30 novembre 2018, le tribunal administratif de Lyon a condamné les HCL et la SHAM à leur verser respectivement les sommes de 17 672,94 et 2 000 euros et a rejeté les c

onclusions des HCL et de la SHAM dirigées contre la caisse primaire d'assurance mala...

Vu la procédure suivante :

M. A... D... et Mme C... B... ont demandé au tribunal administratif de Lyon de condamner les Hospices civils de Lyon (HCL) et la société d'assurances mutuelles (SHAM), son assureur, à verser à M. D... la somme de 321 971,59 euros et à Mme B... celle de 85 158,54 euros en réparation de leurs préjudices.

Par un jugement n° 1508155 du 30 novembre 2018, le tribunal administratif de Lyon a condamné les HCL et la SHAM à leur verser respectivement les sommes de 17 672,94 et 2 000 euros et a rejeté les conclusions des HCL et de la SHAM dirigées contre la caisse primaire d'assurance maladie du Puy-de-Dôme.

Par un arrêt n° 19LY00442, 19LY00443 et 19LY00504 du 17 décembre 2020, la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté les conclusions des HCL et de la SHAM dirigées contre la caisse primaire d'assurance maladie du Puy-de-Dôme comme portées devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître.

Par une décision n° 449789 du 21 juillet 2022, le Conseil d'Etat statuant au contentieux a annulé cet arrêt en tant que la cour s'est déclarée incompétente pour connaître des conclusions des HCL et de la SHAM dirigées contre la CPAM du Puy-de-Dôme et a renvoyé l'affaire à la cour dans la limite de la cassation ainsi prononcée.

Par un arrêt n° 22LY02247 du 6 avril 2023, la cour administrative d'appel de Lyon a condamné la CPAM du Puy-de-Dôme à rembourser à la SHAM la somme de 420 504,81 euros et a rejeté le surplus des conclusions des parties.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 6 juin et 1er septembre 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la caisse primaire d'assurance-maladie du Puy-de-Dôme demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cet arrêt ;

2°) réglant l'affaire au fond, de faire droit à son appel et de rejeter les conclusions d'appel des HCL et de la SHAM ;

3°) de mettre à la charge de la société Relyens Mutual Insurance et des Hospices civils de Lyon la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code civil ;

- le code de la santé publique ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de M. Pascal Trouilly, conseiller d'Etat,

- les conclusions de M. Florian Roussel, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Foussard, Froger, avocat de la caisse primaire d'assurance maladie du Puy-de-Dôme et à la SARL Le Prado - Gilbert, avocat de la société Relyens Mutual Insurance et de la Hospices civils de Lyon ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond qu'à la suite d'un avis rendu par la commission de conciliation et d'indemnisation de Rhône-Alpes, retenant la responsabilité des Hospices civils de Lyon (HCL) à l'égard de M. D... au titre de fautes commises en 2009 dans sa prise en charge, la société hospitalière d'assurances mutuelles (SHAM), agissant en qualité d'assureur des HCL, a adressé une offre transactionnelle à M. D... et Mme B..., qui l'ont refusée, et a versé au régime social des indépendants (RSI), aux droits duquel vient la caisse primaire d'assurance-maladie du Puy-de-Dôme une somme de 552 462,81 euros au titre des débours exposés pour M. D.... Au vu de l'expertise médicale ordonnée à la demande de M. D... et Mme B... par le tribunal administratif de Lyon, les HCL et la SHAM, estimant que les fautes imputables à l'hôpital n'avaient occasionné qu'une fraction des débours exposés par RSI ont demandé à celui-ci le remboursement de la somme de 420 504,81 euros. Par un jugement du 30 novembre 2018, le tribunal administratif de Lyon, saisi par M. D... et Mme B..., a condamné les HCL et la SHAM à leur verser respectivement les sommes de 17 672,94 euros et 2 000 euros en principal et a rejeté les conclusions par lesquelles les HCL et SHAM demandaient la condamnation de la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) du Puy-de-Dôme à leur rembourser la somme de 420 504,81 euros, en estimant que ces conclusions étaient irrecevables, en application du principe selon lequel une personne publique est irrecevable à demander au juge de prononcer une mesure qu'il lui appartient de prendre elle-même. Par un arrêt du 17 décembre 2020, la cour administrative d'appel de Lyon a réformé ce jugement s'agissant des indemnisations dues à M. D... et Mme B... et a rejeté les conclusions des HCL et de la SHAM dirigées contre la CPAM du Puy-de-Dôme comme portées devant une juridiction incompétente pour en connaître. Par une décision du 21 juillet 2022, le Conseil d'Etat statuant au contentieux a annulé cet arrêt en tant qu'il a rejeté les conclusions dirigées contre la CPAM du Puy de Dôme comme portées devant une juridiction incompétente pour en connaître et a renvoyé l'affaire à la cour administrative d'appel, dans la limite de la cassation prononcée. La cour administrative d'appel de Lyon, par un arrêt du 6 avril 2023, a condamné la CPAM du Puy-de-Dôme à rembourser à la SHAM, aux droits de laquelle vient la société Relyens Mutual Insurance, la somme de 420 504,81 euros. La CPAM du Puy-de-Dôme se pourvoit en cassation contre cet arrêt.

2. En premier lieu, pour écarter la fin de non-recevoir opposée devant elle par la CPAM du Puy-de-Dôme, tirée de ce que le principe selon lequel une personne morale de droit public est irrecevable à demander au juge administratif de prononcer une mesure qu'elle peut prendre elle-même faisait obstacle à la demande des HCL, la cour administrative d'appel s'est fondée sur ce que la SHAM, dont il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond et il n'est pas contesté qu'elle est la seule à avoir versé les sommes dont le remboursement est en litige, n'est pas une personne publique. Ni la circonstance que la SHAM ait procédé au paiement en cause en qualité de subrogée dans les droits des HCL ni celle que la demande de restitution d'indu ait été présentée ensuite conjointement par les HCL et par son assureur, n'ont pour effet de rendre applicable à la SHAM le principe selon lequel une personne morale de droit public est irrecevable à demander au juge administratif de prononcer une mesure qu'elle peut prendre elle-même. Il en résulte qu'en écartant la fin de non-recevoir dont elle était saisie pour ce motif, la cour administrative d'appel n'a en tout état de cause pas commis d'erreur de droit.

3. En second lieu, aux termes de l'article L. 1142-14 du code de la santé publique :" Lorsque la commission régionale de conciliation et d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales estime qu'un dommage relevant du premier alinéa de l'article L. 1142-8 engage la responsabilité d'un professionnel de santé, d'un établissement de santé, d'un service de santé ou d'un organisme mentionné à l'article L. 1142-1 ou d'un producteur d'un produit de santé mentionné à l'article L. 1142-2, l'assureur qui garantit la responsabilité civile ou administrative de la personne considérée comme responsable par la commission adresse à la victime ou à ses ayants droit, dans un délai de quatre mois suivant la réception de l'avis, une offre d'indemnisation visant à la réparation intégrale des préjudices subis dans la limite des plafonds de garantie des contrats d'assurance./ Cette offre indique l'évaluation retenue, le cas échéant à titre provisionnel, pour chaque chef de préjudice ainsi que le montant des indemnités qui reviennent à la victime, ou à ses ayants droit, déduction faite des prestations énumérées à l'article 29 de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985 tendant à l'amélioration de la situation des victimes d'accidents de la circulation et à l'accélération des procédures d'indemnisation, et plus généralement des indemnités de toute nature reçues ou à recevoir d'autres débiteurs du chef du même préjudice. Les prestations et indemnités qui font l'objet d'une déduction du montant de l'offre sont remboursées directement par l'assureur du responsable du dommage aux débiteurs concernés. (...) L'acceptation de l'offre de l'assureur vaut transaction au sens de l'article 2044 du code civil (...) ". Aux termes de l'article 2044 du code civil : " La transaction est un contrat par lequel les parties, par des concessions réciproques, terminent une contestation née, ou préviennent une contestation à naître./ Ce contrat doit être rédigé par écrit ".

4. D'une part, les dispositions précitées de l'article L. 1142-14 du code de la santé publique organisent l'indemnisation des préjudices de la victime par l'assureur de l'établissement de santé reconnu par la commission comme responsable d'un dommage et prévoient que l'acceptation, par la victime, de l'offre de l'assureur vaut transaction au sens de l'article 2044 du code civil. Elles ne prévoient en revanche pas que le remboursement, par l'assureur d'un établissement de santé, des sommes versées à des tiers payeurs, vaut également transaction. La circonstance qu'en vertu de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, les caisses de sécurité sociale sont subrogées dans les droits de la victime du dommage ne permet pas davantage de les regarder comme visées, au même titre que celle-ci, par les dispositions précitées du sixième alinéa de l'article L.1142-14 du code de la santé publique.

5. D'autre part, il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond qu'à la suite de l'avis rendu par la commission de conciliation et d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales, la SHAM a versé au RSI d'Auvergne la somme demandée par celui-ci au titre des frais médicaux exposés pour la victime. La cour administrative d'appel a porté sur les pièces du dossier qui lui était soumis une appréciation souveraine exempte de dénaturation en estimant que n le RSI d'Auvergne avait ainsi bénéficié, hors tout engagement contractuel, d'une indemnisation amiable au titre de ses débours exposés et n'a entaché son arrêt ni d'erreur de droit ni d'inexacte qualification juridique en en déduisant que la CPAM du Puy-de-Dôme, venue aux droits du RSI d'Auvergne, ne pouvait se fonder sur l'existence d'une transaction déjà conclue pour s'opposer à la demande de restitution de l'indu engagée à son encontre par la SHAM.

6. Il résulte de tout ce qui précède que la CPAM du Puy-de-Dôme n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font dès lors obstacle à ce qu'une somme soit mise, à ce titre, à la charge des HCL de Lyon et de la société Relyens Mutual Insurance, qui ne sont pas les parties perdantes dans la présente instance. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la CPAM du Puy-de-Dôme, au titre des mêmes dispositions, le versement d'une somme de 1500 euros d'une part à la société Relyens Mutual Insurance et, d'autre part, aux Hospices civils de Lyon.

D E C I D E :

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Article 1er : Le pourvoi de la caisse primaire d'assurance-maladie du Puy-de-Dôme est rejeté.

Article 2 : La caisse primaire d'assurance-maladie du Puy-de-Dôme versera la somme de 1500 euros d'une part à la société Relyens Mutual Insurance et, d'autre part, aux Hospices civils de Lyon.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à la caisse primaire d'assurance-maladie du Puy-de-Dôme, à la société Relyens Mutual Insurance et aux Hospices civils de Lyon.


Synthèse
Formation : 5ème - 6ème chambres réunies
Numéro d'arrêt : 474853
Date de la décision : 20/03/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

JURIDICTIONS ADMINISTRATIVES ET JUDICIAIRES - INDEMNISATION PAR L’ASSUREUR DE L’ÉTABLISSEMENT DE SANTÉ RESPONSABLE D’UN DOMMAGE – ACCEPTATION PAR LA VICTIME DE L’OFFRE DE L’ASSUREUR VALANT TRANSACTION (6E AL - DE L’ART - L - 1142-14 DU CSP) – PORTÉE – REMBOURSEMENT PAR L’ASSUREUR À UN TIERS PAYEUR DE SOMMES VERSÉES PAR CE DERNIER AU PROFIT DE LA VICTIME VALANT ÉGALEMENT TRANSACTION – ABSENCE.

37-07-01 Les dispositions de l’article L. 1142-14 du code de la santé publique (CSP) organisent l’indemnisation des préjudices de la victime par l’assureur de l’établissement de santé reconnu par la commission de conciliation et d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (CRCI) comme responsable d’un dommage et prévoient que l’acceptation, par la victime, de l’offre de l’assureur vaut transaction au sens de l’article 2044 du code civil. Elles ne prévoient en revanche pas que le remboursement, par l’assureur d’un établissement de santé, des sommes versées à des tiers payeurs, vaut également transaction. La circonstance qu’en vertu de l’article L. 376-1 du code de la sécurité sociale (CSS), les caisses de sécurité sociale sont subrogées dans les droits de la victime du dommage ne permet pas davantage de les regarder comme visées, au même titre que celle-ci, par les dispositions du sixième alinéa de l’article L.1142-14 du CSP.

RESPONSABILITÉ DE LA PUISSANCE PUBLIQUE - RESPONSABILITÉ EN RAISON DES DIFFÉRENTES ACTIVITÉS DES SERVICES PUBLICS - SERVICE PUBLIC DE SANTÉ - INDEMNISATION PAR L’ASSUREUR DE L’ÉTABLISSEMENT DE SANTÉ RESPONSABLE D’UN DOMMAGE – ACCEPTATION PAR LA VICTIME DE L’OFFRE DE L’ASSUREUR VALANT TRANSACTION (6E AL - DE L’ART - L - 1142-14 DU CSP) – PORTÉE – REMBOURSEMENT PAR L’ASSUREUR À UN TIERS PAYEUR DE SOMMES VERSÉES PAR CE DERNIER AU PROFIT DE LA VICTIME VALANT ÉGALEMENT TRANSACTION – ABSENCE.

60-02-01 Les dispositions de l’article L. 1142-14 du code de la santé publique (CSP) organisent l’indemnisation des préjudices de la victime par l’assureur de l’établissement de santé reconnu par la commission de conciliation et d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (CRCI) comme responsable d’un dommage et prévoient que l’acceptation, par la victime, de l’offre de l’assureur vaut transaction au sens de l’article 2044 du code civil. Elles ne prévoient en revanche pas que le remboursement, par l’assureur d’un établissement de santé, des sommes versées à des tiers payeurs, vaut également transaction. La circonstance qu’en vertu de l’article L. 376-1 du code de la sécurité sociale (CSS), les caisses de sécurité sociale sont subrogées dans les droits de la victime du dommage ne permet pas davantage de les regarder comme visées, au même titre que celle-ci, par les dispositions du sixième alinéa de l’article L.1142-14 du CSP.

SANTÉ PUBLIQUE - ÉTABLISSEMENTS PUBLICS DE SANTÉ - INDEMNISATION PAR L’ASSUREUR DE L’ÉTABLISSEMENT DE SANTÉ RESPONSABLE D’UN DOMMAGE – ACCEPTATION PAR LA VICTIME DE L’OFFRE DE L’ASSUREUR VALANT TRANSACTION (6E AL - DE L’ART - L - 1142-14 DU CSP) – PORTÉE – REMBOURSEMENT PAR L’ASSUREUR À UN TIERS PAYEUR DE SOMMES VERSÉES PAR CE DERNIER AU PROFIT DE LA VICTIME VALANT ÉGALEMENT TRANSACTION – ABSENCE.

61-06 Les dispositions de l’article L. 1142-14 du code de la santé publique (CSP) organisent l’indemnisation des préjudices de la victime par l’assureur de l’établissement de santé reconnu par la commission de conciliation et d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (CRCI) comme responsable d’un dommage et prévoient que l’acceptation, par la victime, de l’offre de l’assureur vaut transaction au sens de l’article 2044 du code civil. Elles ne prévoient en revanche pas que le remboursement, par l’assureur d’un établissement de santé, des sommes versées à des tiers payeurs, vaut également transaction. La circonstance qu’en vertu de l’article L. 376-1 du code de la sécurité sociale (CSS), les caisses de sécurité sociale sont subrogées dans les droits de la victime du dommage ne permet pas davantage de les regarder comme visées, au même titre que celle-ci, par les dispositions du sixième alinéa de l’article L.1142-14 du CSP.


Publications
Proposition de citation : CE, 20 mar. 2025, n° 474853
Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Pascal Trouilly
Rapporteur public ?: M. Florian Roussel
Avocat(s) : SARL LE PRADO – GILBERT ; SCP FOUSSARD, FROGER

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2025:474853.20250320
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