Vu la procédure suivante :
M. A... B... a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Rouen, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, d'une part, de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire et, d'autre part, d'enjoindre au préfet de l'Eure d'exécuter la décision rendue par le magistrat désigné du tribunal administratif de Rouen le 24 février 2025 sous le n° 2405338 en organisant par tout moyen son rapatriement et en réservant un vol à destination de la France, dans un délai de 24 heures suivant l'ordonnance à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard. Par une ordonnance n° 2501797 du 16 avril 2025, la juge des référés du tribunal administratif de Rouen a, d'une part, admis M. B... au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire et, d'autre part, rejeté le surplus de sa demande.
Par une requête, enregistrée le 29 avril 2025 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, M. B... demande au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative :
1°) de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire ;
2°) d'annuler l'ordonnance du 16 avril 2025 de la juge des référés du tribunal administratif de Rouen ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Eure d'exécuter la décision rendue par le magistrat désigné du tribunal administratif de Rouen le 24 février 2025 sous le n° 2405338 en lui délivrant un visa de retour ou à défaut, en organisant par tout moyen son retour sur le territoire national et en réservant un vol à destination de la France, dans un délai de 48 heures suivant l'ordonnance à intervenir, sous astreinte de 800 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser Me Dantier au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, ou à titre subsidiaire, en cas de non admission à l'aide juridictionnelle, à lui verser au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la condition d'urgence est satisfaite dès lors que le préfet de l'Eure n'a toujours pas organisé par tout moyen son retour sur le territoire national, le maintenant séparé des membres de sa famille qui résident en France alors que le délai fixé par l'ordonnance du 24 février 2025 est expiré ;
- la carence du préfet de l'Eure dans la mise en œuvre de son retour en France porte une atteinte grave et manifestement illégale à plusieurs libertés fondamentales ;
- il est porté une atteinte grave et manifestement illégale à son droit au recours effectif dès lors que le préfet de l'Eure n'a pas pris les mesures qu'implique le respect de l'ordonnance du 24 février 2025 en l'absence de délivrance d'un visa de retour et de réservation d'un vol à destination de la France ;
- il est porté une atteinte grave et manifestement illégale à son droit de mener une vie familiale normale dès lors qu'il a vécu en France depuis l'âge de 5 ans et est maintenu séparé de l'ensemble des membres de sa famille en situation régulière en France ;
- il est porté une atteinte grave et manifestement illégale à sa liberté d'aller et venir dès lors qu'il ne dispose pas d'un visa de retour alors qu'il bénéficie d'un droit au séjour au titre de l'article 7 bis de l'accord franco-algérien.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour des ressortissants algériens et de leurs familles ;
- le code de justice administrative ;
Considérant ce qui suit :
1. Aux termes de l'article L. 521-2 du code de justice administrative : " Saisi d'une demande en ce sens justifiée par l'urgence, le juge des référés peut ordonner toutes mesures nécessaires à la sauvegarde d'une liberté fondamentale à laquelle une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public aurait porté, dans l'exercice d'un de ses pouvoirs, une atteinte grave et manifestement illégale. (...) ". En vertu de l'article L. 522-3 du même code, le juge des référés peut, par une ordonnance motivée, rejeter une requête sans instruction ni audience notamment lorsque la condition d'urgence n'est pas remplie.
2. Si l'inexécution totale ou partielle d'une décision rendue par une juridiction administrative est régie normalement par les procédures définies respectivement par les articles L. 911-4 et L. 911-5 du code de justice administrative, l'existence de ces procédures ne fait pas, par elle-même, obstacle à ce que la partie intéressée présente au juge des référés une demande tendant à ce qu'il ordonne une mesure d'urgence sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, pour autant qu'il est satisfait à l'intégralité des conditions posées par ce texte pour sa mise en œuvre.
3. Il ressort des termes de l'ordonnance attaquée que par un arrêté du 23 décembre 2024 le préfet de l'Eure a obligé M. A... B..., ressortissant algérien né le 3 août 2005 et entré en France en 2011, à l'âge de 5 ans, dans le cadre du regroupement familial, à quitter le territoire français sans délai, à destination de l'Algérie, et lui a interdit de retourner sur le territoire français pendant une durée de 5 ans. Malgré le recours formé par M. B... contre cet arrêté, le préfet de l'Eure l'a mis à exécution en l'éloignant vers l'Algérie le 3 février 2025. Par un jugement du 24 février 2025, le magistrat désigné du tribunal administratif de Rouen a annulé cet arrêté et enjoint au préfet de " prendre toutes mesures utiles afin de permettre le retour, aux frais de l'Etat, de M. B... en France, dans un délai de huit jours suivant la notification du jugement, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ". M. B... relève appel de l'ordonnance du 16 avril 2025 par laquelle la juge des référés du tribunal administratif de Rouen, statuant sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative, a rejeté sa demande tendant à enjoindre au préfet de l'Eure d'exécuter le jugement du 24 février 2025 en organisant par tout moyen son rapatriement et en réservant un vol à destination de la France, dans un délai de 24 heures suivant l'ordonnance à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard.
4. Pour rejeter la demande présentée par M. B... pour défaut d'urgence, la juge des référés du tribunal administratif de Rouen a relevé que si le préfet de l'Eure n'avait, à ce jour, pas exécuté le jugement rendu le 24 février 2025, malgré l'expiration du délai de huit jours à compter du 4 mars 2025, il n'était pas resté inactif et avait entrepris des démarches auprès des autorités consulaires françaises en Algérie, en invitant le requérant à se rapprocher du consulat de France à Oran afin d'obtenir un visa d'entrée. Elle a également relevé que le requérant, qui se prévaut d'une urgence eu égard à la séparation d'avec sa famille, ne justifie pas, par les pièces qu'il produit, des liens qu'il entretiendrait en France avec celle-ci, sa mère et ses frères et sœurs. Elle a enfin relevé, sans commettre d'erreur de droit, contrairement à ce que soutient le requérant, qu'il n'avait pas mis en œuvre la procédure prévue par l'article L. 911-4 du code de justice administrative pour assurer l'exécution d'une décision de la juridiction administrative. Si M. B... fait valoir devant le juge d'appel que malgré de nombreuses relances, le préfet ne démontre toujours pas avoir commencé d'exécuter le jugement, qu'il n'est âgé que de dix-neuf ans, est dépourvu d'attaches familiales en Algérie et que l'état de santé de sa mère rendrait nécessaire sa présence auprès d'elle, ces circonstances, déjà présentées au juge des référés du tribunal administratif, ne sont pas de nature à remettre en cause l'appréciation portée par ce dernier selon laquelle il ne peut être regardé comme justifiant d'une situation d'urgence particulière rendant nécessaire l'intervention, dans un délai de 48 heures, du juge des référés sur le fondement de l'article L. 521-2 du code de justice administrative.
5. Dès lors, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur l'existence alléguée d'une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale, il y a lieu de rejeter les conclusions de la requête, y compris celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, selon la procédure prévue à l'article L. 522-3 du même code, sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'admission du requérant au bénéfice de l'aide juridictionnelle.
O R D O N N E :
------------------
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à M. A... B....
Copie en sera adressée au préfet de l'Eure.
Fait à Paris, le 13 mai 2025
Signé : Gilles Pellissier