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13/06/2025 | FRANCE | N°504609

France | France, Conseil d'État, Juge des référés, 13 juin 2025, 504609


Vu la procédure suivante :



Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 22 mai et 2 juin 2025 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Paris Saint-Germain Judo (PSG Judo) et l'association Etoile sportive du Blanc-Mesnil Judo (ESBM Judo) demandent au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative :



1°) de suspendre l'exécution, en premier lieu, de la décision du 14 mars 2025 par laquelle le conseil d'administration de la

fédération française de judo, jujitsu, kendo et disciplines associées (FFJDA) s'est p...

Vu la procédure suivante :

Par une requête et un mémoire en réplique, enregistrés les 22 mai et 2 juin 2025 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, la société Paris Saint-Germain Judo (PSG Judo) et l'association Etoile sportive du Blanc-Mesnil Judo (ESBM Judo) demandent au juge des référés du Conseil d'Etat, statuant sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative :

1°) de suspendre l'exécution, en premier lieu, de la décision du 14 mars 2025 par laquelle le conseil d'administration de la fédération française de judo, jujitsu, kendo et disciplines associées (FFJDA) s'est prononcé en faveur de la réforme des championnats par équipes de clubs, en deuxième lieu, de la délibération du 13 avril 2025 par laquelle l'assemblée générale de la FFJDA, sur proposition du conseil d'administration, a approuvé l'évolution du championnat de France de 1ère division par équipes mixtes et, en dernier lieu, de la décision du 20 mai 2025 de la FFJDA prise à la suite de la proposition de conciliation formulée le même jour par le Comité national olympique et sportif français (CNOSF) ;

2°) de mettre à la charge de la FFJDA la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elles soutiennent que :

- la condition d'urgence est satisfaite dès lors que les décisions attaquées, en premier lieu, évincent les clubs qui ne sont pas issus de l'ancienne Judo Pro League (JPL) de la nouvelle compétition et les privent de la seule voie d'accès à la Champions League, en l'absence de toute considération liée au mérite sportif, portant ainsi atteinte à l'intérêt public tenant à l'équité et au bon déroulement des compétitions, en deuxième lieu, les privent de plusieurs sources de revenus importantes et nuisent considérablement à leur attractivité auprès des sponsors, en troisième lieu, bouleversent leur organisation et nuisent à leur attractivité auprès des judokas, en quatrième lieu, engendrent des risques de blessure pour les judokas en raison de l'augmentation des jours de compétition à quelques semaines des championnats de France et du monde de judo et, en dernier lieu, prévoient une phase de qualification à très brève échéance le 24 mai 2025, rendant leurs effets difficilement réversibles ;

- il existe un doute sérieux quant à la légalité des décisions contestées ;

- la FFJDA ne démontre pas que les décisions contestées sont signées, en méconnaissance de l'article L. 212-1 du code des relations entre le public et l'administration ;

- la décision du 14 mars 2025 du conseil d'administration de la FFJDA est entachée d'incompétence dès lors que les statuts de la FFJDA prévoient que seule l'assemblée générale est compétente pour adopter et modifier le règlement sportif ;

- il ne saurait leur être reproché de ne pas avoir formé de recours à l'encontre de la décision du 14 mars 2025 dès lors que, d'une part, elle n'a pas été notifiée ni publiée par la FFJDA, de sorte que les délais de recours n'ont pas couru et, d'autre part, la recevabilité d'un recours contre une décision de portée réglementaire n'est pas subordonnée à la saisine préalable du CNOSF ;

- la décision du 20 mai 2025 de la FFJDA est entachée d'incompétence en ce qu'aucune disposition légale, statutaire ou réglementaire n'habilite le président de la FFJDA à refuser la proposition formulée par le conciliateur du CNOSF et à fixer la date de commencement de la compétition ;

- les décisions contestées ont été adoptées en méconnaissance des principes d'égalité et d'équité des compétitions eu égard à la prééminence accordée aux clubs membres de l'ancienne JPL dans la nouvelle compétition ;

- elles instaurent un format de compétition incompatible avec le développement des judokas au plus haut niveau et la préservation de la santé des sportifs, en méconnaissance des articles L. 231-5, R. 131-26 et R. 231-2 du code du sport ;

- elles méconnaissent le principe de sécurité juridique, les articles R. 231-2 et R. 131-26 du code du sport ainsi que l'article L. 221-5 du code des relations entre le public et l'administration dès lors qu'elles modifient les règles régissant l'organisation des compétitions en cours de saison, sans période transitoire et à quelques semaines des championnats de France et du monde de judo.

Par un mémoire en défense, enregistré le 30 mai 2025, la FFJDA conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de la société PSG Judo et de l'association ESBM Judo la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que la condition d'urgence n'est pas satisfaite, et que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

La requête a été communiquée à la ministre des sports, de la jeunesse et de la vie associative qui n'a pas produit d'observations.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code du sport ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir convoqué à une audience publique, d'une part, la société PSG Judo et l'association ESBM Judo, et d'autre part, la FFJDA ;

Ont été entendus lors de l'audience publique du 3 juin 2025, à 15 heures :

- Me Sebagh, avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocat de la société PSG Judo et de l'association ESBM Judo ;

- les représentants de la société PSG Judo et de l'association ESBM Judo ;

- Me Gougeon, avocate au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, avocate de la FFJDA ;

- les représentants de la FFJDA ;

à l'issue de laquelle le juge des référés a clôt l'instruction ;

Considérant ce qui suit :

1. Aux termes de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision ".

2. Il résulte de l'instruction que par une décision de son conseil d'administration du 14 mars 2025, la fédération française de judo, jujitsu, kendo et disciplines associées (FFJDA) s'est prononcée en faveur d'une réforme des championnats nationaux par équipes de clubs par l'organisation d'un championnat de France par équipes mixtes, lequel constituera la voie d'accès à la Champions League, compétition organisée chaque année sous l'égide de l'European Judo Union. Cette réforme a été approuvée par une délibération du 13 avril 2025 de l'assemblée générale de la FFJDA, qui a précisé que le championnat de 1ère division mixte débutera le 24 septembre 2025, et sera ouvert aux clubs de la Judo Pro League, mais également aux clubs sélectionnés dans le cadre du championnat de France par équipes mixtes de 2ème division organisé le 24 mai 2025. La société Paris Saint-Germain Judo (PSG Judo) et l'association Etoile sportive du Blanc-Mesnil Judo (ESBM Judo) ont contesté cette délibération et formé une demande de conciliation auprès du Comité national olympique et sportif français sur le fondement des articles L. 141-4 et R. 141-5 du code du sport. A la suite de la décision de la FFJDA du 20 mai confirmant le maintien des épreuves de sélection par équipes mixtes de 2ème division prévues le 24 mai 2025, la société PSG Judo et autre ont saisi le juge des référés du Conseil d'Etat sur le fondement de l'article L. 521-1 du code de justice administrative d'une requête tendant à la suspension de la décision de conseil d'administration de la FFJDA du 14 mars 2025, de la délibération du 13 avril 2025 par laquelle l'assemblée générale de la FFJDA a approuvé la création du championnat de France de 1ère division par équipes mixtes et de la décision du 20 mai 2025 de la FFJDA confirmant le maintien des épreuves de sélection prévues le 24 mai 2025.

3. L'urgence justifie la suspension de l'exécution d'un acte administratif lorsque celui-ci porte atteinte de manière suffisamment grave et immédiate à un intérêt public, à la situation du requérant ou aux intérêts qu'il entend défendre. Il appartient au juge des référés d'apprécier concrètement, compte tenu des justifications fournies par le requérant, si les effets de l'acte contesté sont de nature à caractériser une urgence justifiant que, sans attendre le jugement de la requête au fond, l'exécution de la décision soit suspendue. L'urgence doit être appréciée objectivement et compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'affaire.

Sur les conclusions de la requête tendant à la suspension de la décision du 20 mai 2025 de la FFJDA confirmant le maintien des épreuves de sélection prévues le 24 mai 2025 :

4. Cette date du 24 mai 2025 étant échue à la date de la présente ordonnance, il n'y a plus lieu de statuer sur les conclusions de la requête de la société PSG Judo et autre tendant à la suspension de la décision du 20 mai 2025 par laquelle la FFJDA a maintenu les épreuves de sélection du championnat de France par équipes mixtes de 2ème division prévues le 24 mai 2025.

Sur les conclusions de la requête tendant à la suspension de la décision du 14 mars 2025 du conseil d'administration de la FFJDA et de la délibération du 13 avril 2025 de l'assemblée générale cette fédération sportive :

5. Pour justifier de l'urgence qui s'attache, selon eux, à la suspension des décisions par lesquelles la FFJDA a institué le championnat de France de 1ère division par équipes mixtes, la société PSG Judo et autre soutiennent en premier lieu qu'elles auraient pour effet de les évincer de la compétition ayant vocation à regrouper en France l'élite du judo par équipes de clubs et de les priver de la seule voie d'accès à la Champions League. Toutefois, il résulte de l'instruction et des débats au cours de l'audience qu'alors que la société PSG Judo et l'association ESBM Judo étaient qualifiées pour participer aux épreuves de sélection du championnat de France par équipes mixtes de 2ème division organisées le 24 mai 2025, ces deux clubs ont, de leur propre initiative, renoncé à prendre part à cette phase de sélection en vue du championnat de France de 1ère division mixte qui débutera le 24 septembre 2025. Elles soutiennent en outre que l'exécution des délibérations en litige porterait atteinte à leurs intérêts économiques, bouleverserait l'organisation des clubs, notamment s'agissant de leur capacité à recruter les meilleurs sportifs de cette discipline, et induirait des risques graves pour la santé des judokas en raison de l'instauration de nouvelles épreuves par équipes mixtes en parallèle de celles du championnat de France masculin et féminin, sans toutefois produire d'éléments circonstanciés à l'appui de leur argumentation. Dans ces conditions, dès lors que le recours pour excès de pouvoir introduit par les requérants sera appelé à une audience dans les prochaines semaines au rapport de la 2ème chambre de la section du contentieux du Conseil d'Etat et qu'il n'apparaît pas, au vu des éléments apportés par ceux-ci, que la mise en œuvre de la délibération contestée caractériserait une situation d'urgence telle qu'elle justifie la suspension de son exécution sans attendre le jugement de l'affaire au fond, les conclusions de la requête de la société PSG Judo et autre tendant à la suspension des décisions de la FFJDA en litige ne peuvent qu'être rejetées, sans qu'il soit besoin d'examiner la condition tenant à l'existence d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité des décisions contestées.

6. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions présentées sur leur fondement par la société PSG Judo et autre, partie perdante dans la présente instance. Il n'y a toutefois pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société PSG Judo et autre une somme au titre de ces mêmes dispositions à verser à la FFJDA.

O R D O N N E :

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Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de la société PSG Judo et autre tendant à la suspension de la décision du 20 mai 2025 par laquelle la FFJDA a maintenu les épreuves de sélection du championnat de France par équipes mixtes de 2ème division prévues le 24 mai 2025.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de la société PSG Judo et autre et les conclusions des parties présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetés.

Article 3 : La présente ordonnance sera notifiée à la société Paris Saint-Germain Judo, à l'association Etoile sportive du Blanc-Mesnil Judo et à la fédération française de judo, jujitsu, kendo et disciplines associées.

Copie en sera adressée à la ministre des sports, de la jeunesse et de la vie associative.

Fait à Paris, le 13 juin 2025

Signé : Benoît Bohnert


Synthèse
Formation : Juge des référés
Numéro d'arrêt : 504609
Date de la décision : 13/06/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Publications
Proposition de citation : CE, 13 jui. 2025, n° 504609
Composition du Tribunal
Avocat(s) : SCP GUÉRIN - GOUGEON ; SCP BAUER-VIOLAS - FESCHOTTE-DESBOIS - SEBAGH

Origine de la décision
Date de l'import : 15/06/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2025:504609.20250613
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