Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler les neuf saisies à tiers détenteur émises le 31 octobre 2016 par la direction départementale des finances publiques des Hauts-de-Seine à l'attention de la banque HSBC France, pour un montant total de 131 488,13 euros, ainsi que la décision du 6 janvier 2017 par laquelle le directeur départemental des finances publiques des Hauts-de-Seine a rejeté ses réclamations préalables dirigées contre ces saisies à tiers détenteur, d'ordonner la mainlevée de ces saisies à tiers détenteur, à concurrence de 100 655 euros, et à concurrence des remises qui lui seront accordées s'agissant du surplus et, enfin, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 1702312 du 1er février 2021, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et des mémoires enregistrés respectivement le 30 mars 2021, le 20 janvier 2023 et le 24 octobre 2023, M. B..., représenté par Me Le Doré, avocat, demande à la cour dans le dernier état de ses écritures :
1°) à titre principal, de proposer une médiation à l'administration des finances publiques sur le fondement de l'article R. 213-5 du code de justice administrative ;
2°) à titre subsidiaire, d'annuler ce jugement ;
3°) de déclarer prescrites les saisies à tiers détenteurs portant sur la somme de 64 955 euros et de prononcer la décharge de cette somme ;
4°) d'accorder la remise de tout ou partie des montants de 11 580 euros, de 11 100 euros et de 35 700 euros visés dans les saisies, ainsi que de leurs accessoires et prononcer la décharge à concurrence des remises accordées ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- s'agissant de la somme de 64 955 euros, l'action en recouvrement, qui concerne des produits et redevances du domaine public, est prescrite en application des dispositions de l'article L. 2323-8 du code général de la propriété des personnes publiques, qui prévoient un délai de prescription quadriennale ;
- en refusant de lui accorder une remise de dette à hauteur de tout ou partie des sommes de 11 580 euros, 11 100 euros, 35 700 euros et des frais de poursuite afférents, sur le fondement de l'article 120 du décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique, sans tenir compte de sa bonne foi, le comptable public a commis une erreur manifeste d'appréciation de sa situation.
Par un mémoire en défense, enregistré le 24 octobre 2023, le directeur départemental des finances publiques des Hauts-de-Seine conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens ne sont pas fondés.
Par une ordonnance du 15 décembre 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 20 janvier 2023, en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative.
Par un courrier du 16 octobre 2023, les parties ont été informées, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office tiré de l'irrecevabilité des conclusions présentées par M. B... tendant à ce que la cour prononce la mainlevée des saisies à tiers détenteur émises par le service de la direction départementale des finances publiques des Hauts-de-Seine, dès lors que ces conclusions ne ressortissent pas à la compétence du juge administratif.
Un mémoire et des pièces ont été produits pour M. B... les 14 et 15 novembre 2023, après clôture de l'instruction, et n'ont pas été communiqués.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le livre des procédures fiscales ;
- le code général de la propriété des personnes publiques ;
- le code des procédures civiles d'exécution ;
- la loi n° 91-650 du 9 juillet 1991 ;
- la loi n° 2008-561 du 17 juin 2008 ;
- le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Aventino,
- les conclusions de M. Frémont, rapporteur public,
- et les observations de Me Le Doré représentant M. B....
Une note en délibéré, présentée par M. B..., a été enregistrée le 17 novembre 2023.
Considérant ce qui suit :
1. M. B... a bénéficié d'une autorisation d'occuper temporairement le domaine public maritime au droit de sa propriété située sur le territoire de la commune de Bonifacio, qui a été prorogée jusqu'au 31 décembre 2003, pour un emplacement servant d'assiette à un appontement, une terrasse, un escalier et une cale de mise à l'eau. Par un jugement n° 0400208 du 28 juin 2004, le tribunal administratif de Bastia, saisi d'un procès-verbal de contravention de grande voirie dressé par le préfet de la Corse-du-Sud le 26 janvier 2004, a condamné M. B... à remettre en état primitif cette dépendance du domaine public maritime, occupée sans titre, dans les deux mois suivant la notification du jugement, sous astreinte, passé ce délai, de 75 euros par jour de retard. Par un arrêt n° 04MA01943 du 27 février 2006, devenu définitif, la cour administrative d'appel de Marseille, statuant sur l'appel formé par M. B..., a annulé ce jugement en tant qu'il concernait une terrasse et rejeté le surplus des conclusions. M. B... a été condamné, par jugements successifs du tribunal administratif de Bastia des 28 juillet 2006, 12 avril 2012, 30 janvier 2014, 16 juillet 2014, 18 décembre 2015 et 21 juillet 2016, ainsi que par des arrêts de la cour administrative d'appel de Marseille des 17 janvier 2008, 30 mai 2011, 11 février 2014, 13 octobre 2015 et 8 février 2019 à payer la somme totale de 193 225 euros au titre de la liquidation de l'astreinte de 75 euros par jour pour la période du 2 juin 2005 au 14 janvier 2016. Sur le fondement de ces décisions juridictionnelles, des titres de perception ont été émis à l'encontre de M. B..., le 2 mai 2012, pour un montant de 65 455 euros, le 2 septembre 2013 pour un montant de 11 580 euros, auquel s'ajoute 1 158,13 euros de frais de poursuites, le 24 février 2014, pour un montant de 11 100 euros, auquel s'ajoute 1 110 euros de frais de poursuites, le 26 août 2014, pour un montant de 1 650 euros, auquel s'ajoute 165 euros de frais de poursuites et enfin, le 12 avril 2016, pour un montant de 35 700 euros, auquel s'ajoute 3 570 euros de frais de poursuites. La direction départementale des finances publiques des Hauts-de-Seine a ensuite émis, les 6 octobre 2016 et 31 octobre 2016, seize saisies à tiers détenteur à l'encontre de l'intéressé, à l'attention de sa caisse de retraite, des banques HSBC France et BNP Paribas et de ses locataires d'appartements, pour un montant total de 131 488,13 euros. Par courriers des 8 novembre et 10 novembre 2016, M. B... a formé une réclamation contre ces saisies à tiers détenteur auprès du comptable public chargé du recouvrement, conformément aux dispositions de l'article 118 du décret du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique. En décembre 2016, l'administration a procédé à la mainlevée de ces saisies à tiers détenteur, à l'exception de celles qui ont été adressées à la banque HSBC France. M. B... fait appel du jugement du tribunal administratif de Cergy-Pontoise n° 1702312 du 1er février 2021 qui a rejeté comme portées devant une juridiction incompétente pour en connaître ses conclusions tendant au prononcé de la mainlevée de tout ou partie des saisies à tiers détenteur décernées à la banque HSBC France par le comptable public de la direction départementale des finances publiques des Hauts-de-Seine le 31 octobre 2016 aux fins d'obtenir le paiement de la somme de 131 488,13 euros et rejeté au fond le surplus de ses conclusions tendant à ce qu'il soit déchargé de l'obligation de payer la somme de 131 488,13 euros et à l'annulation de la décision du 6 janvier 2017 rejetant sa réclamation préalable, en tant que celle-ci concerne les saisies à tiers détenteur émises auprès de la banque HSBC France.
Sur la demande de médiation :
2. Aux termes de l'article L. 213-7 du code de justice administrative : " Lorsqu'un tribunal administratif ou une cour administrative d'appel est saisi d'un litige, le président de la formation de jugement peut, après avoir obtenu l'accord des parties, ordonner une médiation pour tenter de parvenir à un accord entre celles-ci " et aux termes de l'article R. 213-5 du même code : " Lorsque le juge estime que le litige dont il est saisi est susceptible de trouver une issue amiable, il peut à tout moment proposer une médiation. Il fixe aux parties un délai pour répondre à cette proposition ". Le directeur général des finances publiques et le directeur départemental des finances publiques des Hauts-de-Seine n'ont pas répondu à la demande du requérant tendant à ce que le président de la formation de jugement ordonne une médiation pour tenter de parvenir à un accord. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de proposer de recourir à une médiation.
Sur les conclusions aux fins d'annulation et de décharge :
3. En premier lieu aux termes de l'article L. 2323-8 du code général de la propriété des personnes publiques : " Les comptables publics chargés de recouvrer les produits, redevances et sommes de toute nature, mentionnés à l'article L. 2321-1, qui n'ont diligenté aucune poursuite contre un débiteur retardataire pendant quatre années consécutives à partir du jour de l'émission du titre de perception mentionné à l'article L. 2323-1, perdent leur recours et sont déchus de tout droit et de toute action contre ce débiteur (...) ". Aux termes de l'article L. 2321-1 du code général de la propriété des personnes publiques : " I. Le recouvrement des produits et redevances du domaine de l'État et en général de toute somme, dont la perception incombe aux comptables publics chargés des recettes domaniales de l'État, s'opère dans les conditions fixées aux articles L. 252 et L. 252 A du livre des procédures fiscales (...) ".
4. D'autre part, aux termes de l'article 3-1 de la loi du 9 juillet 1991 portant réforme des procédures civiles d'exécution, dans sa rédaction issue de la loi du 17 juin 2008 portant réforme de la prescription en matière civile et désormais codifié à l'article L. 111-4 du code des procédures civiles d'exécution, dans sa version applicable au litige : " L'exécution des titres exécutoires mentionnés aux 1° à 3° de l'article 3 ne peut être poursuivie que pendant dix ans, sauf si les actions en recouvrement des créances qui y sont constatées se prescrivent par un délai plus long (...) ". Le 1° de l'article 3 de la même loi, désormais codifié à l'article L. 111-3 du code des procédures civiles d'exécution, mentionne : " Les décisions des juridictions de l'ordre judiciaire ou de l'ordre administratif lorsqu'elles ont force exécutoire (...) ". Enfin, aux termes de l'article L. 11 du code de justice administrative : " Les jugements sont exécutoires ".
5. Il résulte de l'instruction que le paiement de la somme de 64 955 euros à laquelle M. B... a été condamné par la cour administrative d'appel de Marseille le 11 février 2014 et au recouvrement de laquelle procède la saisie à tiers détenteur en litige n'est pas relative à un produit ou une redevance du domaine de l'Etat mais tend à liquider une astreinte consécutivement à la non-exécution d'une décision de justice. Il résulte des dispositions citées au point 4 du présent arrêt que lorsque le comptable public poursuit le recouvrement d'une somme en exécution d'une décision juridictionnelle ayant force exécutoire, un délai de dix ans lui est ouvert commençant à courir à la date de cette décision. Or, ce délai n'était pas expiré le 31 octobre 2016, date de la saisie en litige. M. B... n'est dès lors pas fondé à soutenir que l'action en recouvrement de la somme de 64 955 euros serait prescrite et à demander en conséquence la décharge de l'obligation de payer cette somme.
6. En deuxième lieu, aux termes de l'article 120 du décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique, " Le comptable chargé du recouvrement des titres de perception peut consentir, sur demande du redevable qui est dans l'impossibilité de payer par suite d'une gêne ou d'indigence, des remises sur la somme en principal dans la limite, pour une même créance, d'un montant de 76 000 € (...) ".
7. D'une part, le requérant n'établit ni même n'allègue être dans l'impossibilité de payer par suite de gêne ou d'indigence les astreintes en cause. D'autre part, ainsi que l'ont jugé à bon droit les premiers juges, il résulte de l'instruction que, par un jugement du 28 juin 2004, passé en force de chose jugée, M. B... a été condamné à remettre en leur état primitif les lieux qu'il occupe illégalement sur le domaine public maritime. En outre, les liquidations d'astreinte en vue d'assurer l'exécution de ce jugement ont toutes été prononcées par des décisions juridictionnelles devenues définitives. A cet égard, les circonstances que M. B... n'aurait pas l'usage exclusif du ponton ou qu'il serait confronté à des difficultés pour exécuter le jugement précité sont sans incidence sur le présent litige portant sur la contestation de saisies à tiers détenteurs du comptable public afin de recouvrer la créance liée aux liquidations d'astreintes ainsi prononcées. Par suite, le moyen tiré de l'existence d'une erreur manifeste d'appréciation qui entacherait la décision du comptable public du 6 janvier 2017 refusant de faire droit à son recours administratif ne peut qu'être écarté.
8. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué du 1er février 2021 le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté ses demandes. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que M. B... demande à ce titre.
Sur l'amende pour recours abusif :
9. Aux termes de l'article R. 741-12 du code de justice administrative : " Le juge peut infliger à l'auteur d'une requête qu'il estime abusive une amende dont le montant ne peut excéder 10 000 euros. ".
10. La requête d'appel de M. B..., qui reprend à l'identique ses arguments développés dans de très nombreuses instances devant les juridictions administratives pour contester sa condamnation à remettre en leur état primitif les lieux qu'il occupe illégalement sur le domaine public maritime, qui ont toutes été rejetées, présente un caractère abusif. Il y a lieu, par suite, de le condamner à payer une amende de 5 000 euros.
DÉCIDE :
Article 1er : La demande de médiation et la requête d'appel de M. B... sont rejetées.
Article 2 : M. B... est condamné à payer une amende de 5 000 euros.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B..., au directeur général des finances publiques et au directeur départemental des finances publiques des Hauts-de-Seine.
Délibéré après l'audience du 16 novembre 2023, à laquelle siégeaient :
M. Even, président de chambre,
Mme Aventino, première conseillère,
M. Cozic, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 30 novembre 2023.
La rapporteure,
B. AVENTINOLe président,
B. EVEN
La greffière,
I. SZYMANSKI
La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics, en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 21VE00942