Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise, à titre principal, d'annuler l'arrêté du 13 mars 2023 par lequel la préfète du Val-de-Marne a fait obligation à M. C... de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de trois ans, à titre subsidiaire, d'annuler l'interdiction de retour sur le territoire français et, en tout état de cause, d'enjoindre à la préfète du Val-de-Marne de procéder à un nouvel examen de sa situation et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 2303437 du 22 mai 2023, le président du tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé cet arrêté et enjoint à la préfète du Val-de-Marne de réexaminer la situation de M. B... A... dans un délai de deux mois suivant la notification de ce jugement.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 22 juin 2023, la préfète du Val-de-Marne, représentée par Me Termeau, avocat, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. B... A... devant le tribunal administratif de Cergy-Pontoise.
Elle soutient que l'intéressé a communiqué, lors de son interpellation, de fausses informations sur son identité et qu'ainsi, l'administration ne disposait, à la date de l'édiction de l'arrêté en litige, d'aucune information permettant de l'identifier sous le nom de B... A... ; par suite, l'arrêté attaqué a été pris au terme d'un examen particulier de la situation de M. A....
Par un mémoire en défense, enregistré le 28 septembre 2023, M. A..., représenté par la SAS Itra Consulting, avocats, demande à la cour :
1°) à titre principal, de rejeter la requête ;
2°) à titre subsidiaire, d'annuler l'interdiction de retour d'une durée de trois ans ;
3°) d'enjoindre à la préfète de réexaminer sa situation ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la préfète n'a pas engagé toutes les diligences nécessaires à la vérification de son identité ;
- la préfète n'a pas procédé à un examen particulier de sa situation, sauf à ce qu'elle se soit sentie liée par le procès-verbal d'audition ;
- il renvoie à ses écritures de première instance.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Houllier.
Considérant ce qui suit :
1. La préfète du Val-de-Marne fait appel du jugement du 22 mai 2023 par lequel le président du tribunal administratif de Cergy-Pontoise a, à la demande de M. B... A..., annulé son arrêté du 13 mars 2023 faisant obligation à M. C... de quitter le territoire français sans délai, fixant son pays de destination et lui faisant interdiction de retourner sur le territoire français pour une durée de trois ans
2. Le juge de première instance a annulé l'arrêté en litige, qui a été notifié à M. B... A..., ressortissant tunisien né le 19 avril 2001, au motif que cet arrêté n'a pas été précédé d'un examen particulier de sa situation dès lors qu'il concerne M. C..., ressortissant algérien né à Annaba, en Algérie, le 19 août 2004, identité qui ne correspond ni aux nom, prénom, date de naissance ou à la nationalité de M. A....
3. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que M. B... A..., qui a été interpelé par les services de police, le 12 mars 2023, pour des faits de violation de domicile et a été placé en garde à vue, s'est spontanément présenté, lors de son audition, sous l'identité de M. C..., ressortissant algérien né le 19 août 2004 à Annaba en Algérie. Il ressort, en outre, des pièces du dossier, et notamment de son dossier d'ouverture de compte bancaire, que M. A... utilisait, à des fins administratives, une adresse email formée des mots " Momen " et " Belkhiter ". Ainsi, il ne saurait être sérieusement contesté que M. A... s'est présenté, lors de son audition par les services de police, sous un nom d'emprunt, ni soutenu que l'arrêté attaqué aurait été pris à l'encontre de la mauvaise personne. La circonstance que les recherches par consultation décadactylaire, sous l'identité de M. C..., ont donné un résultat négatif ne saurait suffire à établir le défaut d'examen particulier de sa situation alors, d'une part, que M. A..., qui n'allègue pas avoir sollicité sa régularisation, n'était pas connu de l'administration et, d'autre part, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier, ni n'est même allégué, que les autres faits mentionnés lors de son audition, relatifs notamment à sa situation familiale et personnelle ainsi qu'à son droit au séjour, seraient erronés. Dans ces conditions, la préfète du Val-de-Marne, qui ne disposait à la date de sa décision que des déclarations de M. A... lors de son audition par les services de police, n'a pas entaché son arrêté d'un défaut d'examen particulier, ni d'une erreur de fait quant à la personne qu'il vise.
4. Il résulte de ce qui précède que la préfète du Val-de-Marne est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a annulé l'arrêté du 13 mars 2023 pour ce motif.
5. Il appartient toutefois à la cour administrative d'appel, saisie par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. A... devant le tribunal administratif de Cergy-Pontoise.
Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :
6. En premier lieu, l'arrêté attaqué, qui comporte les considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la mesure d'éloignement, est suffisamment motivé.
7. En deuxième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que la préfète du Val-de-Marne, qui s'est bornée à reprendre le contenu des déclarations de l'intéressé pour porter sur ces dernières une appréciation particulière quant aux conséquences juridiques à en tirer, se serait estimée liée par le contenu du procès-verbal d'audition du 12 mars 2023 pour édicter une obligation de quitter le territoire français.
8. Enfin, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ".
9. Si M. A... soutient que la décision lui faisant obligation de quitter le territoire méconnaît ces stipulations, il ressort de ses propres déclarations qu'il n'est entré en France qu'en novembre 2020 et qu'il n'y exerce aucune activité professionnelle alors que toute sa famille réside encore en Tunisie. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance de ces stipulations doit être écarté.
Sur la légalité de l'interdiction de retour sur le territoire français :
10. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de ce que la décision portant interdiction de retour pour une durée de trois ans doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation de la mesure d'éloignement doit être écarté.
11. En second lieu, si M. A..., qui se borne à citer les textes applicables du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, allègue que l'interdiction de retour est entachée d'illégalité, il n'apporte aucun élément de nature à apprécier le bien-fondé de ce moyen. En tout état de cause, il résulte de ce qui a été exposé au point 9 que M. A... est dépourvu d'attaches personnelles en France et ne se prévaut d'aucun motif exceptionnel qui ferait obstacle à l'exécution de cette interdiction de retour.
12. Il résulte de tout ce qui précède que la préfète du Val-de-Marne est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal a annulé son arrêté du 13 mars 2023 et lui a enjoint de réexaminer la situation de M. A.... Par voie de conséquence, les conclusions de M. A... à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n°2303437 du tribunal administratif de Cergy-Pontoise du 22 mai 2023 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. A... devant le tribunal administratif de Cergy-Pontoise ainsi que ses conclusions présentées en appel sur le fondement des articles L. 911-1 et L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer. Copie en sera adressée à la préfète du Val-de-Marne
Délibéré après l'audience du 23 novembre 2023, à laquelle siégeaient :
Mme Signerin-Icre, présidente,
M. Camenen, président-assesseur,
Mme Houllier, première conseillère,
Rendu public par mise à disposition au greffe le 5 décembre 2023.
La rapporteure,
S. HoullierLa présidente,
C. Signerin-IcreLa greffière,
T. René-Louis-Arthur
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme
La greffière,
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N° 23VE01381