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13/12/2023 | FRANCE | N°23DA00405

France | France, Cour administrative d'appel, 2ème chambre, 13 décembre 2023, 23DA00405


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Mme C... G... a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler l'arrêté du 3 mai 2022 par lequel le préfet du Nord a refusé de lui renouveler son titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement.



Par un jugement n° 2205702 du 12 décembre 2022, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.





Procédure de

vant la Cour :



Par une requête, enregistrée le 3 mars 2023, Mme G..., représentée par Me Bilel Laïd, demande à...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... G... a demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler l'arrêté du 3 mai 2022 par lequel le préfet du Nord a refusé de lui renouveler son titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement.

Par un jugement n° 2205702 du 12 décembre 2022, le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 3 mars 2023, Mme G..., représentée par Me Bilel Laïd, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler l'arrêté du 3 mai 2022 ;

3°) d'enjoindre à l'administration de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", et à défaut de réexaminer sa situation, sous astreinte de 155 euros par jour de retard, et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour l'autorisation à travailler ;

4°) et de mettre à la charge de l'Etat le paiement d'une somme de 1500 euros au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement est entaché d'une omission à statuer sur le moyen tiré de l'erreur de droit ;

- le refus de renouvellement du titre de séjour méconnaît les dispositions de l'article L. 423-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entaché d'une erreur de droit et d'une erreur manifeste d'appréciation ; la filiation demeure établie à l'état civil, et la fraude alléguée par le préfet n'est pas établie ;

- la décision est entachée d'une erreur de fait ;

- la décision méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;

- l'obligation de quitter le territoire français méconnaît les dispositions de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant.

Par un mémoire en défense, enregistré le 23 juin 2023, le préfet du Nord conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés, et s'en rapporte à ses écritures de première instance.

Mme G... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 31 janvier 2023 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Douai.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Marc Baronnet, président-assesseur, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme C... G..., ressortissante serbe née le 17 janvier 1997 à Stuttgart (Allemagne), est entrée en France le 30 août 2016 selon ses déclarations. Elle s'est vu délivrer le 2 août 2019, en qualité de mère d'un enfant français né le 20 janvier 2017 à Grande-Synthe, une carte de séjour temporaire valable du 22 juillet 2020 au 21 juillet 2021. Le 30 septembre 2021, elle a sollicité le renouvellement de son titre de séjour. Par un arrêté du 3 mai 2022, le préfet du Nord lui a refusé le renouvellement de son titre de séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français sous trente jours et a fixé le pays de sa destination. Mme G... relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté sa demande d'annuler cet arrêté.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. À l'appui de sa demande, Mme G... soutenait, notamment que le refus de renouvellement de son titre de séjour est entaché d'une erreur de droit. Le tribunal ne s'est pas prononcé sur ce moyen, qui n'était pas inopérant. Par suite, son jugement doit être annulé.

3. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par Mme G... devant le tribunal.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne les moyens communs aux différentes décisions :

4. Par un arrêté du 30 septembre 2021, publié le même jour au recueil spécial n° 225 des actes administratifs de la préfecture, le préfet du Nord a donné délégation à Mme E... I..., cheffe du bureau de la lutte contre l'immigration irrégulière, à l'effet de signer, notamment, les décisions portant refus de séjour. Le moyen tiré de l'incompétence de la signataire des décisions attaquées doit, dès lors, être écarté.

5. Il ressort des termes de l'arrêté attaqué qu'il comporte les considérations de droit et de fait sur lesquelles reposent les décisions en litige, alors même qu'il ne reprend pas tous les éléments relatifs à la situation personnelle de l'intéressée. Les moyens tirés du défaut de motivation de cet arrêté et du défaut d'examen de sa situation personnelle doivent donc être écartés.

En ce qui concerne la décision portant refus de titre de séjour :

6. S'il ressort de la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne que le droit d'être entendu, qui fait partie intégrante du respect des droits de la défense, principe général du droit de l'Union, implique que l'autorité préfectorale, avant de prendre à l'encontre d'un étranger une décision portant obligation de quitter le territoire français, mette l'intéressé à même de présenter ses observations écrites et lui permette, sur sa demande, de faire valoir des observations orales, de telle sorte qu'il puisse faire connaître, de manière utile et effective, son point de vue sur la mesure envisagée avant qu'elle n'intervienne, ce moyen est sans incidence sur la légalité du refus de titre de séjour.

7. Aux termes de l'article L. 423-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France et qui établit contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil, depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1 ". Aux termes de l'article L. 423-8 du même code : " Pour la délivrance de la carte de séjour prévue à l'article L. 423-7, lorsque la filiation est établie à l'égard d'un parent en application de l'article 316 du code civil, le demandeur, s'il n'est pas l'auteur de la reconnaissance de paternité ou de maternité, doit justifier que celui-ci contribue effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant, dans les conditions prévues à l'article 371-2 du code civil, ou produire une décision de justice relative à la contribution à l'éducation et à l'entretien de l'enfant. Lorsque le lien de filiation est établi mais que la preuve de la contribution n'est pas rapportée ou qu'aucune décision de justice n'est intervenue, le droit au séjour du demandeur s'apprécie au regard du respect de sa vie privée et familiale et au regard de l'intérêt supérieur de l'enfant ".

8. Si un acte de droit privé opposable aux tiers est en principe opposable dans les mêmes conditions à l'administration tant qu'il n'a pas été déclaré nul par le juge judiciaire, il appartient cependant à l'administration, lorsque se révèle une fraude commise en vue d'obtenir l'application de dispositions de droit public, d'y faire échec même dans le cas où cette fraude revêt la forme d'un acte de droit privé. Ce principe peut conduire l'administration, qui doit exercer ses compétences sans pouvoir renvoyer une question préjudicielle à l'autorité judiciaire, à ne pas tenir compte, dans l'exercice de ces compétences, d'actes de droit privé opposables aux tiers. Tel est le cas pour la mise en œuvre des dispositions de l'article L. 423-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui n'ont pas entendu écarter l'application des principes ci-dessus rappelés. Par conséquent, si la reconnaissance d'un enfant est opposable aux tiers, en tant qu'elle établit un lien de filiation et, le cas échéant, en tant qu'elle permet l'acquisition par l'enfant de la nationalité française, dès lors que cette reconnaissance a été effectuée conformément aux conditions prévues par le code civil, et s'impose donc en principe à l'administration tant qu'une action en contestation de filiation n'a pas abouti, il appartient néanmoins au préfet, s'il est établi, lors de l'examen d'une demande de titre de séjour présentée sur le fondement de l'article L. 423-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, que la reconnaissance de paternité a été souscrite dans le but de faciliter l'obtention de la nationalité française ou d'un titre de séjour, de faire échec à cette fraude et de refuser, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, tant que la prescription prévue par les articles 321 et 335 du code civil n'est pas acquise, la délivrance de la carte de séjour temporaire sollicitée par la personne se présentant comme père ou mère d'un enfant français.

9. En l'espèce, pour refuser de renouveler la carte de séjour de Mme G... sur le fondement des dispositions de l'article L. 423-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet du Nord s'est fondé sur le motif tiré de ce que la reconnaissance de paternité de l'enfant de la requérante présente un caractère frauduleux. Il ressort des pièces du dossier que la requérante est la mère de A... H..., née le 20 janvier 2017 à Grande-Synthe, et reconnue le 23 janvier 2017 par M. D... H..., ressortissant français. Il ressort des pièces du dossier que d'une part, les déclarations de Mme G... sur sa date d'entrée en France ont varié, puisque si sa première demande de titre de séjour, déposée à la sous-préfecture de Dunkerque, indiquait une entrée en France le 2 décembre 2015, la requérante déclare désormais être entrée sur le territoire le 30 août 2016, à la même date que son concubin, M. F..., né le 13 janvier 1994 en Serbie, titulaire d'une carte de résident en qualité de réfugié valable du 22 juin 2020 au 21 juin 2030, la date du 30 août 2016 étant postérieure à la date de conception de sa fille A.... D'autre part, il ressort des pièces du dossier, et notamment du compte-rendu de l'enquête de la police aux frontières du 12 juin 2018, que M. H... indique qu'il aurait rencontré la mère chez un ami à Roubaix avant le 6 juin 2016 et aurait entretenu une relation de deux semaines avec elle, mais répond de façon erronée sur la date de naissance de sa prétendue fille et le nom de la mère de celle-ci, et s'il pense être le père de l'enfant, il indique ne pas en avoir la certitude et avoir l'intention de recourir à un test de paternité. Enfin, aucun justificatif de la contribution alléguée de M. H... à l'entretien de l'enfant n'est apporté. En outre, il ne ressort pas des pièces du dossier que M. H... aurait quitté le territoire français pour retrouver Mme G... et il n'est pas établi que cette dernière était à Roubaix au mois d'avril ou de mai 2016. Enfin, il ressort des pièces du dossier que, par un courrier du 23 juillet 2018, Mme G... et M. H... ont été convoqués à la préfecture du Nord le 13 août 2018 en vue du retrait des documents d'identité français de A... H... mais ne se sont pas présentés, de sorte qu'un procès-verbal de carence de restitution du passeport et de la carte d'identité a été établi le 17 août 2018. Dans ces conditions, alors même qu'il ne ressort pas des pièces du dossier qu'une action en contestation de la filiation diligentée à l'encontre des intéressés aurait été engagée par le ministère public à la date de la décision en litige à la suite du signalement au procureur de la République du 12 mai 2021, le préfet disposait d'éléments précis et concordants de nature à établir que la reconnaissance de paternité a été souscrite dans le but de faciliter l'obtention de la nationalité française ou d'un titre de séjour. Par suite, le préfet du Nord n'a pas méconnu les dispositions de l'article L. 423-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en refusant le titre de séjour sollicité.

10. Il ressort des motifs de la décision que le préfet du Nord n'a pas fondé celle-ci sur une simple suspicion de fraude, mais a considéré pour refuser la délivrance du titre de séjour qu'un acte obtenu par fraude ne crée pas de droit. Par suite, le moyen tiré de l'erreur de droit qu'aurait commis le préfet en fondant sa décision non sur une fraude mais sur une simple suspicion de fraude ne peut qu'être écarté.

11. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

12. En l'espèce, Mme G..., qui était âgée de dix-neuf ans à la date de son entrée en France le 30 août 2016, déclare être en concubinage depuis juillet 2016 avec M. B... F..., ressortissant serbe titulaire d'une carte de résident valable du 22 juin 2020 au 21 juin 2030. Il ressort des pièces du dossier qu'elle vit à Lille et est mère d'une enfant née le 20 janvier 2017 à Grande-Synthe, scolarisée à Lille en moyenne section de maternelle pour l'année scolaire 2021/2022. S'il ressort des pièces du dossier que la mère de Mme G..., titulaire d'une carte de séjour pluriannuelle au titre de la protection subsidiaire, réside régulièrement en France au moins depuis le 6 février 2020, l'attestation qu'elle produit ne comporte pas d'élément de nature à établir l'intensité de leur relation. S'il ressort également des pièces du dossier que son demi-frère réside en Allemagne et sa demi-sœur en Bosnie-Herzégovine, elle n'établit pas ni même n'allègue être dépourvue de liens privés et familiaux dans son pays d'origine où elle ne conteste pas avoir vécu jusqu'à l'âge de dix-neuf ans. De plus, elle ne justifie ni de ressources ni d'une intégration sociale ou professionnelle d'une particulière intensité en France. Compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, et notamment de la durée et des conditions du séjour de Mme G... en France, le préfet n'a pas porté au droit au respect de la vie privée et familiale de la requérante une atteinte disproportionnée au regard des buts poursuivis et n'a, dès lors, pas méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

13. Aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ".

14. La décision du préfet du Nord refusant le renouvellement du titre de séjour n'étant pas une mesure d'éloignement, les stipulations du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention relative aux droits de l'enfant sont sans incidence sur sa légalité.

15. Le préfet du Nord n'a pas entaché sa décision d'une erreur de fait en indiquant dans ses motifs que les frère et sœur de Mme G... " résident en Serbie selon les déclarations de sa mère Vesna G... du 9 novembre 2019 ", puisque ces éléments ressortent de la déclaration effectuée le 9 novembre 2019 et produite au dossier, alors même que le demi-frère et la demi-sœur de la requérante résideraient désormais respectivement en Allemagne et en Bosnie-Herzégovine.

16. Au vu de l'ensemble de la situation de l'intéressée, le préfet du Nord n'a pas non plus entaché sa décision d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressée.

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

17. Aux termes de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : / (...) / 5° L'étranger qui est père ou mère d'une enfant français mineur résidant en France, à condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans ; / (...) ".

18. Il ressort du procès-verbal de carence du 17 août 2018 produit par le préfet que les titres d'identité de A... G... ont été invalidés, le lien de filiation avec M. H... n'étant pas établi. Mme G..., qui soutient que sa fille A... est de nationalité française, ne l'établit pas. Par suite, elle n'est pas fondée à se prévaloir des dispositions précitées de l'article L. 611-3.

19. Pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 12, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

20. Il résulte des stipulations déjà citées de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant. Elles sont applicables non seulement aux décisions qui ont pour objet de régler la situation personnelle d'enfants mineurs mais aussi à celles qui ont pour effet d'affecter, de manière suffisamment directe et certaine, leur situation.

21. Si Mme G... fait valoir la scolarisation de sa fille et les attaches de celle-ci avec son concubin M. F..., elle ne produit aucun élément de nature à justifier que celui-ci contribue effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant, ni même l'existence de liens entre l'enfant et M. F.... Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant doit être écarté.

22. Au vu de l'ensemble de la situation de l'intéressée, le préfet du Nord n'a pas non plus entaché sa décision d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressée.

En ce qui concerne la décision fixant un délai de départ volontaire :

23. En premier lieu, il résulte de ce qui a été exposé précédemment que le moyen tiré, par la voie de l'exception, de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire doit être écarté.

24. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 612-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger faisant l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français dispose d'un délai de départ volontaire de trente jours à compter de la notification de cette décision. / L'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours s'il apparaît nécessaire de tenir compte de circonstances propres à chaque cas. (...) ".

25. Le délai de départ volontaire de droit commun dont est assortie une obligation de quitter le territoire français, est fixé à une durée de trente jours, en application des dispositions de l'article L. 612-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Le préfet n'est donc pas tenu de motiver spécialement une telle décision, autrement qu'en visant les textes qui en constituent le fondement, ce qui est le cas en l'espèce. Mme G... n'est donc pas fondée à soutenir que la décision lui octroyant un délai de départ volontaire de trente jours est insuffisamment motivée.

26. En troisième lieu, Mme G... ne démontre pas être dans une situation exceptionnelle justifiant que lui soit accordé un délai de départ volontaire supérieur à trente jours. Dans ces conditions, le préfet n'a ni méconnu les dispositions précitées de l'article L. 612-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ni commis d'erreur manifeste d'appréciation en lui accordant un délai de départ volontaire limité à trente jours.

En ce qui concerne la décision portant fixation du pays de sa destination :

27. En premier lieu, il résulte de ce qui a été exposé précédemment que le moyen tiré, par la voie de l'exception, de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire doit être écarté.

28. Aux termes des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ".

29. Mme G... n'apporte aucun élément de nature à justifier les risques de traitements inhumains et dégradants qu'elle allègue, sans autre précision, en cas de retour dans son pays d'origine.

30. Il résulte de tout ce qui précède que les conclusions présentées par Mme G... tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet du Nord en date du 3 mai 2022 doivent être rejetées ainsi que, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte, de même que celles relatives aux frais de l'instance.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 2205702 du tribunal administratif de Lille du 12 décembre 2022 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par Mme G... devant le tribunal administratif de Lille et le surplus des conclusions de sa requête sont rejetés.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... G... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Copie sera adressée au préfet du Nord.

Délibéré après l'audience du 1er décembre 2023 à laquelle siégeaient :

- M. Thierry Sorin, président de chambre,

- M. Marc Baronnet, président-assesseur,

- M. Guillaume Toutias, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 13 décembre 2023.

Le président-rapporteur,

Signé : M. BaronnetLe président de chambre,

Signé : T. Sorin

La greffière,

Signé : A.S. Villette

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme,

Pour la greffière en chef,

par délégation,

La greffière

Anne-Sophie VILLETTE

2

N°23DA00405


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de DOUAI
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 23DA00405
Date de la décision : 13/12/2023
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. Sorin
Rapporteur ?: M. Marc Baronnet
Rapporteur public ?: Mme Regnier
Avocat(s) : LAID

Origine de la décision
Date de l'import : 12/01/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2023-12-13;23da00405 ?
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