Vu, I, la requête n° 09BX00671, enregistrée au greffe de la cour le 13 mars 2009, présentée pour M. Miah X élisant domicile chez son avocat, Maître Rivière, 30 rue du Languedoc à Toulouse (31000) ;
M. X demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0800978 du 30 décembre 2008 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions implicites de rejet nées du silence gardé par le préfet de la Haute-Garonne sur ses demandes de titre de séjour en date du 29 novembre 2007 et du 26 février 2008, ainsi que sur sa demande d'assignation à résidence ;
2°) d'annuler ces décisions ;
3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale sous astreinte de 100 euros par jour de retard, à défaut, de prendre à son égard une mesure d'assignation à résidence ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son avocat de la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 ;
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Vu, II, la requête n° 09BX00415, enregistrée au greffe de la cour le 13 février 2009, présentée pour M. Miah X élisant domicile chez son avocat, Maître Rivière, 30 rue du Languedoc à Toulouse (31000) ;
M. X demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0804119 du 30 décembre 2008 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 11 septembre 2008 par lequel le préfet de la Haute-Garonne lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ;
2°) d'annuler l'arrêté contesté ;
3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention vie privée et familiale sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros sur le fondement des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 ;
.....................................................................................................................
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 novembre 2009 :
- le rapport de M. Normand, conseiller ;
- et les conclusions de Mme Dupuy, rapporteur public ;
Considérant que les requêtes susvisées concernent la situation d'un même étranger et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour qu'il y soit statué par un seul arrêt ;
Considérant que M. X, de nationalité bangladaise, est entré en France en 2004 ; que ses demandes tendant à bénéficier du statut de réfugié ayant été rejetées, il a fait l'objet, par arrêté du 10 août 2006, d'une mesure de reconduite à la frontière ; que, par un arrêt du 24 janvier 2007, la présente cour a annulé la décision fixant le pays de renvoi contenue dans l'arrêté du 10 août 2006 ; que M. X a sollicité, par une lettre du 29 novembre 2007 adressée au préfet de la Haute-Garonne, la délivrance d'une carte de séjour sur le fondement de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'avant même la naissance d'une décision implicite, il a présenté, par une lettre du 26 février 2008 reçue par la préfecture le 28 février suivant, un recours gracieux contre le rejet implicite de sa demande du 29 novembre 2007 et a également sollicité une demande d'admission exceptionnelle au séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code précité ; que M. X a saisi le tribunal administratif de Toulouse, le 5 mars 2008, d'une demande tendant à l'annulation des rejets implicites de ses demandes du 29 novembre 2007 et du 26 février 2008 ; qu'il a sollicité du préfet, le 5 juin 2008, son assignation à résidence puis, par un mémoire enregistré le 16 septembre 2008, a demandé au tribunal administratif d'annuler également le rejet implicite de cette demande ; que, par un arrêté du 11 septembre 2008, le préfet de la Haute-Garonne a pris à l'encontre de M. X un arrêté lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans le délai d'un mois et fixant le pays de renvoi ; que M. X a demandé au tribunal administratif d'annuler cet arrêté ; que M. X fait appel des deux jugements par lesquels le tribunal administratif de Toulouse a rejeté ses demandes ;
Sur les conclusions dirigées contre le rejet implicite de la demande du 29 novembre 2007 :
Considérant qu'aux termes de l'article R. 311-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : Tout étranger, âgé de plus de dix-huit ans ou qui sollicite un titre de séjour en application de l'article L. 311-3, est tenu de se présenter, à Paris, à la préfecture de police et, dans les autres départements, à la préfecture ou à la sous-préfecture, pour y souscrire une demande de titre de séjour du type correspondant à la catégorie à laquelle il appartient. Toutefois, le préfet peut prescrire que les demandes de titre de séjour soient déposées au commissariat de police ou, à défaut de commissariat, à la mairie de la résidence du requérant. Le préfet peut également prescrire : 1° Que les demandes de titre de séjour appartenant aux catégories qu'il détermine soient adressées par voie postale ; 2° Que la demande de carte de séjour temporaire portant la mention étudiant soit déposée auprès des établissements d'enseignement ayant souscrit à cet effet une convention avec l'Etat. ;
Considérant qu'il est constant que M. X ne s'est pas présenté personnellement à la préfecture de la Haute-Garonne, mais a, par courrier du 29 novembre 2007, présenté une demande de délivrance d'une carte de séjour, qui ne saurait être regardée comme une demande de titre de séjour valablement présentée ; que, dans ces conditions, le préfet n'était pas tenu d'instruire une telle demande ; que, par voie de conséquence, les moyens de M. X fondés sur la méconnaissance des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 et de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sont inopérants ;
Sur les conclusions dirigées contre le rejet implicite de la demande en date du 26 février 2008 :
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que l'arrêté du préfet de la Haute-Garonne du 11 septembre 2008 s'est substitué à la décision rejetant implicitement la demande de M. X en date du 26 février 2008 tendant à la délivrance d'un titre de séjour ; que, par suite, les conclusions à fin d'annulation du rejet implicite de cette demande étaient, à la date à laquelle le tribunal administratif de Toulouse a statué sur ces conclusions par le jugement n° 0800978, devenues sans objet ; que c'est, par suite, à tort que le tribunal administratif de Toulouse n'a pas prononcé un non-lieu à statuer sur les conclusions dirigées contre cette décision ; qu'il convient donc d'annuler sur ce point ledit jugement, de statuer par voie d'évocation sur les conclusions de M. X tendant à l'annulation de cette décision implicite et de décider qu'il n'y a pas lieu d'y statuer ;
Sur les conclusions dirigées contre l'arrêté en date du 11 septembre 2008 :
Considérant, en premier lieu, que l'article 24 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 dispose : Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application des articles 1er et 2 de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public n'interviennent qu'après que la personne intéressée a été mise à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, des observations orales ... ; qu'il résulte des termes mêmes de ces dispositions qu'elles ne peuvent pas être invoquées à l'encontre d'une décision de refus de titre de séjour prise en réponse à une demande formulée par l'intéressé ; qu'ainsi qu'il a été dit précédemment, la décision du 11 septembre 2008 doit être regardée comme statuant sur la demande de M. X formulée le 26 février 2008 et ne méconnaît donc pas les dispositions susvisées ; que, par voie de conséquence, le moyen tiré d'un détournement de procédure qui serait révélé par le délai insuffisant laissé à M. X pour présenter ses observations lors de ses auditions par les services de police ou par l'impossibilité de se faire assister par un avocat doit être écarté ;
Considérant, en deuxième lieu, qu'en estimant que la lettre du 26 février 2008 que lui a adressée M. X constituait une demande de titre de séjour présentée sur le fondement des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 et de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet de la Haute-Garonne n'a pas dénaturé la portée de la demande ;
Considérant, en troisième lieu, que la décision de refus de séjour et l'obligation de quitter le territoire français dont elle est assortie n'emportent pas en elles-mêmes mesure d'éloignement ; qu'ainsi, le moyen tiré de la méconnaissance de l'autorité de la chose jugée qui s'attache à l'arrêt devenu définitif en date du 24 janvier 2007 de la cour administrative d'appel de Bordeaux déjà mentionné annulant la décision fixant le Bangladesh comme pays de destination contenue dans l'arrêté de reconduite à la frontière du 10 août 2006, est inopérant ;
Considérant, en quatrième lieu, que l'annulation, par l'arrêt devenu définitif du 24 janvier 2007 de la cour, de l'arrêté en date du 10 août 2006 du préfet de la Haute-Garonne en tant qu'il désigne le Bangladesh comme pays à destination duquel M. X doit être reconduit, a été prononcée au motif qu'il ressort de pièces judiciaires versées au dossier que M. X a été condamné par la justice bangladaise à une peine de sept ans d'emprisonnement pour avoir participé à un rassemblement de la ligue Awami et utilisé des explosifs, et qu'il est recherché en vue de l'exécution de cette peine de sorte qu'il doit être regardé comme étant exposé, en cas de retour au Bangladesh, à des risques sérieux en raison de ses activités politiques et de son appartenance à un parti d'opposition ; que l'autorité absolue de la chose jugée qui s'attache à cet arrêt et au motif qui en constitue le soutien, fait obstacle à ce que la valeur probante de ces documents puisse être à nouveau contestée et, dès lors qu'il n'est pas établi que les circonstances de fait propres à la situation de l'intéressé aient été modifiées, à ce que puisse être jugée légale une nouvelle décision, même prise à la suite du refus opposé à une nouvelle demande de titre de séjour de M. X, fixant son pays d'origine comme pays de destination ; que, par suite, M. X est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement n° 0804119, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté ses conclusions dirigées contre la décision fixant le pays de renvoi contenue dans l'arrêté du 11 septembre 2008 ;
Sur les conclusions dirigées contre le rejet implicite de la demande du 5 juin 2008 :
Considérant, que, pour rejeter les conclusions de M. X présentées dans un mémoire enregistré au greffe du tribunal administratif le 16 septembre 2008 qui tendaient à l'annulation de la décision implicite de rejet née du silence gardé par l'administration sur sa demande d'assignation à résidence en date du 5 juin 2008, les premiers juges ont relevé que ces conclusions, présentées postérieurement à l'expiration du délai de recours contentieux de deux mois ayant couru à compter de l'introduction de la requête, devaient être regardées comme des conclusions nouvelles irrecevables ;
Considérant, toutefois, que la circonstance que M. X avait saisi le tribunal administratif, le 5 mars 2008, d'une demande à fin d'annulation des rejets implicites de ses demandes du 29 novembre 2007 et du 26 février 2008 ne faisait pas, par elle-même, obstacle à ce que l'intéressé déférât au tribunal administratif, plus de deux mois après l'introduction de ladite demande, une autre décision le concernant ; que, dès lors que les conclusions dirigées contre cette décision, laquelle rejetait implicitement sa demande d'assignation à résidence, présentaient un lien suffisant avec les conclusions dirigées contre les rejets implicites de ses demandes de titres de séjour du 29 novembre 2007 et du 26 février 2008, le requérant a pu présenter ces conclusions dans le cadre de l'instance déjà engagée devant le tribunal administratif ; que, par suite, M. X est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement n° 0800978, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté comme irrecevables ses conclusions dirigées contre le rejet implicite de sa demande d'assignation à résidence ; qu'il y a lieu d'annuler ledit jugement en tant qu'il se prononce sur lesdites conclusions, d'évoquer et de statuer immédiatement sur ces conclusions ;
Considérant qu'aux termes de l'article L. 513-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : L'étranger qui est obligé de quitter le territoire français ou qui doit être reconduit à la frontière et qui justifie être dans l'impossibilité de quitter le territoire français en établissant qu'il ne peut ni regagner son pays d'origine, ni se rendre dans aucun autre pays peut, par dérogation aux dispositions du titre V du présent livre, être astreint à résider dans les lieux qui lui sont fixés, dans lesquels il doit se présenter périodiquement aux services de police et de gendarmerie. (...) ;
Considérant qu'eu égard, d'une part, à ce qui a été dit précédemment au sujet de la décision fixant le Bangladesh comme pays de renvoi, d'autre part, au fait que le requérant justifie avoir effectué des démarches infructueuses auprès des autorités diplomatiques ou consulaires de 16 pays autres que le Bangladesh en vue d'être admis sur leur territoire, enfin, à l'absence de toute observation du préfet de la Haute-Garonne en vue de défendre la légalité de la décision litigieuse, M. X est fondé à demander l'annulation de la décision rejetant implicitement la demande qu'il avait formulée le 5 juin 2008 en vue d'être assigné à résidence sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 513-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que cette annulation implique nécessairement que, comme le demande M. X, il soit fait injonction au préfet de prendre à l'égard de ce dernier une mesure d'assignation à résidence en application desdites dispositions ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
Considérant que le présent arrêt implique seulement que, comme il a été dit ci-dessus, il soit enjoint au préfet de la Haute-Garonne de prendre à l'égard de M. X une mesure d'assignation à résidence ; que le surplus des conclusions à fin d'injonction doit être rejeté ;
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à M. X, au titre de l'instance n° 09BX00671, de la somme de 1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; qu'il y a lieu, au titre de l'instance n° 09BX00415 dans laquelle M. X est bénéficiaire de l'aide juridictionnelle, de mettre à la charge de l'Etat, sur le fondement de ce même article L. 761-1 combiné avec le deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, le versement à Me Rivière, avocat de M. X, de la somme de 1 000 euros sous réserve que Me Rivière renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Toulouse n° 0800978 du 30 décembre 2008 est annulé en tant qu'il se prononce sur les conclusions de M. X tendant à l'annulation du rejet implicite, par le préfet de la Haute-Garonne, de sa demande de titre de séjour en date du 26 février 2008.
Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur la demande de M. X présentée devant le tribunal administratif de Toulouse et dirigée contre la décision du préfet de la Haute-Garonne rejetant implicitement la demande de M. X en date du 26 février 2008.
Article 3 : Le jugement n° 0800978 du 30 décembre 2008 du tribunal administratif de Toulouse est annulé en tant qu'il statue sur les conclusions de M. X tendant à l'annulation de la décision du préfet de la Haute-Garonne rejetant implicitement sa demande d'assignation à résidence en date du 5 juin 2008.
Article 4 : La décision du préfet de la Haute-Garonne rejetant implicitement la demande de M. X à fin d'assignation à résidence est annulée.
Article 5 : Il est enjoint au préfet de la Haute-Garonne de prendre à l'égard de M. X une mesure d'assignation à résidence sur le fondement de l'article L. 513-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Article 6 : L'arrêté du préfet de la Haute- Garonne du 11 septembre 2008 est annulé en tant qu'il désigne le Bangladesh comme pays de renvoi, et le jugement n° 0804119 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent article.
Article 7 : L'Etat versera à M. X la somme de 1 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 8 : L'Etat versera à Me Rivière, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative combiné avec le deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, la somme de 1 000 euros sous réserve que Me Rivière renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat
Article 9 : Le surplus des conclusions des requêtes de M. X est rejeté.
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Nos 09BX00415, 09BX00671