Vu, enregistrés au greffe de la Cour les 26 mars et 6 avril 2009, la requête et le mémoire complémentaire présentés pour l'EARL LAHARMINA, exploitation agricole à responsabilité limitée, dont le siège est Paxkonina à Luxe Sumberraute (64120), représentée par son gérant en exercice, par Me Coudeville ; l'EARL LAHARMINA demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0600913 du 3 février 2009 par lequel le Tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 29 novembre 2005 du préfet des Pyrénées-Atlantiques prononçant la déchéance partielle de ses droits au titre du contrat territorial d'exploitation conclu avec l'Etat le 27 septembre 2001 et de la décision implicite de rejet opposée à son recours hiérarchique ;
2°) d'annuler lesdites décisions ;
3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
..........................................................................................................
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le règlement (CE) n° 1257/1999 du Conseil du 17 mai 1999 concernant le soutien au développement rural par le Fonds européen d'orientation et de garantie agricole (FEOGA) et modifiant ou abrogeant certains règlements ;
Vu le règlement (CE) n° 817/2004 portant modalités d'application du règlement n° 1257/1999 ;
Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
Vu la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 modifiée, notamment son article 24 ;
Vu le code rural ;
Vu l'arrêté du 8 novembre 1999 modifié relatif aux aides accordées aux titulaires de contrats territoriaux d'exploitation par le fonds de financement des contrats territoriaux d'exploitation ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 avril 2010 :
- le rapport de Mme Viard, président-assesseur ;
- les observations de Me Coudeville, pour l'EARL LAHARMINA ;
- et les conclusions de M. Lerner, rapporteur public ;
La parole ayant à nouveau été donnée aux parties ;
Considérant que l'EARL LAHARMINA a signé un contrat territorial d'exploitation, qui a pris effet le 1er octobre 2001 pour une durée de cinq ans, par lequel elle s'engageait notamment à une gestion extensive des prairies pour améliorer le bien-être des animaux ; qu'à la suite d'un contrôle sur place effectué le 13 octobre 2005, le préfet des Pyrénées-Atlantiques, estimant que l'EARL LAHARMINA ne respectait pas ses engagements, a, par une décision du 29 novembre 2005, prononcé une déchéance partielle des droits dont elle bénéficiait en vertu de ce contrat ; que l'EARL LAHARMINA a demandé au Tribunal administratif de Pau l'annulation de cette décision ainsi que de la décision implicite de rejet opposée à son recours hiérarchique ; qu'elle fait appel du jugement qui a rejeté sa demande ;
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 22 du règlement (CE) n° 1257/1999 du 17 mai 1999 modifié : Un soutien est accordé aux méthodes de production agricole conçues pour protéger l'environnement, préserver l'espace naturel (agroenvironnement) ou améliorer le bien-être des animaux afin de contribuer à la réalisation des objectifs communautaires en matière d'agriculture, d'environnement et de bien-être des animaux d'élevage. Ce soutien est destiné à encourager : (...) f/ l'amélioration du bien-être des animaux ; qu'aux termes de l'article 23 du même règlement : I. Un soutien est accordé aux agriculteurs qui souscrivent des engagements agro-environnementaux ou concernant le bien-être des animaux pour une durée minimale de cinq ans.(...) ; qu'aux termes de l'article 72 du règlement n° 817/2004 de la Commission pris pour l'application du règlement (CE) n° 1257/1999 du 17 mai 1999 modifié concernant le soutien au développement rural par le Fonds européen d'orientation et de garantie agricole (FEOGA), alors en vigueur : 1. En cas de constatation d'une fausse déclaration faite par négligence grave, le bénéficiaire en cause est exclu pour l'année civile considérée de toutes les mesures de développement rural prises au titre du chapitre concerné du règlement (CE) n° 1257/1999. En cas de fausse déclaration faite délibérément, il en est exclu également pour l'année qui suit. 2. Les sanctions prévues au paragraphe 1 s'appliquent sans préjudice de sanctions supplémentaires prévues au niveau national ; qu'aux termes de l'article 73 du même règlement : Les États membres déterminent le régime des sanctions applicables aux violations des dispositions du présent règlement, et prennent toute mesure nécessaire pour en assurer la mise en oeuvre. Les sanctions ainsi prévues doivent être effectives, proportionnées et dissuasives ; qu'aux termes de l'article R. 311-1 du code rural alors en vigueur : Le contrat territorial d'exploitation (...) comprend nécessairement deux parties, décrivant respectivement : (...) 2°/ les engagements de l'exploitant dans le domaine de l'aménagement et du développement de l'espace rural et de l'environnement (...) ; qu'aux termes de l'article R. 341-15 du même code : L'exploitant est tenu de respecter ses engagements pendant la totalité de la durée du contrat (...). Lorsque le titulaire d'un contrat territorial d'exploitation ne se conforme pas à l'un de ses engagements (...), les subventions prévues au contrat sont suspendues, réduites ou supprimées (...) ; qu'aux termes de l'article 6 de l'arrêté du 8 novembre 1999 modifié relatif aux aides accordées aux titulaires de contrats territoriaux d'exploitation par le fonds de financement des contrats territoriaux d'exploitation : En cas de constatation d'une fausse déclaration faite par négligence grave, le bénéficiaire en cause est exclu pour l'année civile considérée des soutiens prévus dans le cadre du contrat (...). Dans les autres cas de non-respect des engagements, les pénalités sont calculées de façon indépendante pour chaque mesure. Si la cohérence du contrat territorial d'exploitation est remise en cause du fait de l'importance des engagements non respectés, le préfet peut le résilier après avoir recueilli l'avis de la commission départementale de l'orientation de l'agriculture. L'exploitant est préalablement mis en mesure de présenter ses observations. Les cas de force majeure doivent être notifiés (...) La constatation de la force majeure libère les co-contractants de leurs obligations respectives. Les contrôles (...) sont sanctionnés suivant l'écart constaté : (...) l'écart majeur correspond à un écart supérieur à 20 %, entre la superficie déterminée (les UGB décomptées) et la superficie déclarée (les UGB déclarées) ; l'agriculteur rembourse la totalité de l'aide correspondant aux mesures types non respectées pour les années auxquelles le manquement a été établi, augmentée des intérêts au taux légal ;
Considérant qu'il résulte des dispositions précitées que lorsque l'autorité administrative constate le non-respect par l'exploitant des engagements qu'il a pris dans le cadre du contrat territorial d'exploitation, elle est amenée, pour décider dans quelle mesure il y a lieu de sanctionner l'écart constaté, à en apprécier l'importance, à mesurer sa portée et à examiner si, le cas échéant, cet écart peut être justifié par un cas de force majeure ; que l'appréciation de fait portée dans chaque cas d'espèce exclut que l'administration puisse se trouver en compétence liée rendant inopérants devant le juge les moyens de procédure invoqués à l'encontre de la décision sanctionnant l'exploitant ; qu'en conséquence, c'est à tort que les premiers juges, après avoir estimé que la sanction prononcée était justifiée, ont écarté les moyens de légalité externe dont ils étaient saisis comme inopérants ;
Considérant qu'aux termes de l'article 24 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 : Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application des articles 1er et 2 de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public n'interviennent qu'après que la personne intéressée a été mise à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, des observations orales (...) ; qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public : Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. A cet effet, doivent être motivées les décisions qui (...) infligent une sanction (...) ;
Considérant que la décision en litige, qui a prononcé la déchéance partielle pour l'année 2004 des droits afférents au contrat territorial d'exploitation dont l'EARL LAHARMINA bénéficiait au motif du non-respect de son engagement de gestion extensive des prairies, a privé celle-ci de la totalité de l'aide correspondant à cette mesure pour l'année 2004 ; que, par suite, cette décision, qui réduit ses droits de manière plus que proportionnelle à l'écart constaté, lequel consistait en un taux de chargement par hectare de surface fourragère de 1,87 unités de gros bétail (UGB) au lieu du taux de chargement de 1,80 UGB prévu par le cahier des charges afférent à son contrat territorial d'exploitation, constitue une sanction ; qu'elle doit dès lors être motivée et précédée de la procédure contradictoire prévue par les dispositions précitées de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000, nonobstant la circonstance que les dispositions de l'arrêté précité du 8 novembre 1999 ne le prévoient pas expressément dans un tel cas ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que si, à l'issue du contrôle sur place effectué le 13 octobre 2005, les gérants de l'EARL LAHARMINA ont signé le compte-rendu du contrôle, lequel indiquait qu'ils disposaient d'un délai de dix jours pour faire valoir leurs observations, ce compte-rendu se bornait à mentionner que la situation était conforme sous réserve de la prise en compte par la direction départementale de l'agriculture et de la forêt des 17 hectares de culture de maïs d'ensilage ; que l'EARL LAHARMINA ne peut ainsi être regardée comme ayant été mise à même, à l'issue de ce contrôle, de présenter ses observations sur une décision dont le sens n'était pas encore connu ; qu'il est constant que l'administration, après avoir estimé que la situation n'était pas conforme au cahier des charges, n'a pas invité l'EARL LAHARMINA à présenter ses observations sur la sanction envisagée ; qu'ainsi, la décision en litige est intervenue en méconnaissance des dispositions précitées de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 ; qu'elle est dès lors affectée d'un vice de procédure de nature à l'entacher d'illégalité ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens, que l'EARL LAHARMINA est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande ;
Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat la somme de 500 euros que demande l'EARL LAHARMINA en remboursement des frais exposés et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Pau du 3 février 2009 et la décision du 29 novembre 2005 du préfet des Pyrénées-Atlantiques, ensemble la décision implicite de rejet du recours hiérarchique dirigé contre ladite décision, sont annulés.
Article 2 : L'Etat versera à l'EARL LAHARMINA la somme de 500 euros en remboursement des frais exposés et non compris dans les dépens.
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N° 09BX00780