Vu la requête, enregistrée le 2 février 2010, présentée pour le SYNDICAT INTERCOMMUNAL D'ALIMENTATION EN EAU POTABLE DE LA REGION DE FLEURANCE, dont le siège est à l'hôtel de ville, place de la République à Fleurance (32500), représenté par son président, par Me Cloix ;
Le SYNDICAT INTERCOMMUNAL D'ALIMENTATION EN EAU POTABLE (SIAEP) DE LA REGION DE FLEURANCE demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 0700397 du tribunal administratif de Pau en date du 1er décembre 2009 annulant la délibération du 22 décembre 2006 par laquelle son comité syndical a approuvé le projet de contrat de délégation par affermage de la gestion de distribution d'eau potable négocié avec la société Lyonnaise des eaux et autorisé son président à signer ce contrat et lui enjoignant, à défaut d'avoir obtenu la résolution amiable de ce contrat, de saisir, dans un délai de six mois à compter de la notification du jugement, le juge du contrat afin d'en faire constater la nullité ;
2°) de rejeter la demande de la société Saur ;
3°) à titre subsidiaire, d'annuler l'article 2 dudit jugement prononçant l'injonction ;
4°) à titre infiniment subsidiaire, de différer à la date de résiliation du contrat les effets de l'annulation de la délibération du 22 décembre 2006 ;
5°) à titre subsidiaire, de lui enjoindre d'obtenir la résiliation de ce contrat de délégation dans le délai de six mois à compter de la notification du présent arrêt ;
6°) de condamner la société Saur à lui verser la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la note en délibéré, enregistrée le 13 janvier 2012, présentée pour le SYNDICAT INTERCOMMUNAL D'ALIMENTATION EN EAU POTABLE DE LA REGION DE FLEURANCE ;
Vu le code général des collectivités territoriales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 12 janvier 2012 :
- le rapport de M. Braud, premier conseiller,
- les conclusions de M. Normand, rapporteur public ;
- les observations de Me Neveu, pour la société Saur,
Considérant que le SYNDICAT INTERCOMMUNAL D'ALIMENTATION EN EAU POTABLE DE LA REGION DE FLEURANCE a engagé le 24 mai 2006 une procédure de mise en concurrence afin de renouveler la délégation de la gestion du service d'alimentation en eau potable exploité par voie d'affermage ; qu'à l'issue de cette procédure, le comité syndical, approuvant le choix de son président, a, par une délibération en date du 22 décembre 2006, décidé de confier l'affermage de ce service à la société Lyonnaise des eaux et a donc autorisé son président à signer le contrat y afférent ; que, par un jugement en date du 1er décembre 2009, le tribunal administratif de Pau a accueilli la demande de la société Saur, candidate à la délégation de service public dont l'offre n'a pas été retenue, tendant à l'annulation de cette délibération et à ce qu'il soit enjoint au syndicat, à défaut de résolution amiable, de saisir le juge du contrat afin de faire constater la nullité de cette convention ; que le SYNDICAT INTERCOMMUNAL D'ALIMENTATION EN EAU POTABLE DE LA REGION DE FLEURANCE relève appel de ce jugement ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant qu'aux termes de l'article R. 611-1 du code de justice administrative : (...) La requête, le mémoire complémentaire annoncé dans la requête et le premier mémoire de chaque défendeur sont communiqués aux parties avec les pièces jointes (...) ;
Considérant que le tribunal administratif était tenu, dans le cadre de l'instruction de l'affaire dont il était saisi, d'appeler comme partie à l'instance la société Lyonnaise des eaux, dès lors que celle-ci était signataire de la convention de délégation de service public dont la régularité a été mise en cause par la société Saur ; qu'ainsi, cette société avait droit, en application des dispositions précitées de l'article R. 611-1 du code de justice administrative, à recevoir communication de la demande de cette dernière ; qu'il est constant qu'elle n'a pas été appelée à l'instance et que cette demande ne lui a pas été communiquée ; qu'il y a lieu, en conséquence, d'en prononcer l'annulation et de statuer, par voie d'évocation, sur la demande présentée par la société Saur devant le tribunal administratif ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
Considérant qu'aux termes de l'article L. 5211-17 du code général des collectivités territoriales dans sa rédaction alors en vigueur : Les communes membres d'un établissement public de coopération intercommunale peuvent à tout moment transférer, en tout ou partie, à ce dernier, certaines de leurs compétences dont le transfert n'est pas prévu par la loi ou par la décision institutive ainsi que les biens, équipements ou services publics nécessaires à leur exercice. Ces transferts sont décidés par délibérations concordantes de l'organe délibérant et des conseils municipaux se prononçant dans les conditions de majorité requise pour la création de l'établissement public de coopération intercommunale. Le conseil municipal de chaque commune membre dispose d'un délai de trois mois, à compter de la notification au maire de la commune de la délibération de l'organe délibérant de l'établissement public de coopération intercommunale, pour se prononcer sur les transferts proposés. A défaut de délibération dans ce délai, sa décision est réputée favorable. Le transfert de compétences est prononcé par arrêté du ou des représentants de l'Etat dans le ou les départements intéressés (...) ;
Considérant que les premiers juges ont relevé que l'objet du SYNDICAT INTERCOMMUNAL D'ALIMENTATION EN EAU POTABLE DE LA REGION DE FLEURANCE, tel que défini par l'arrêté du préfet du Gers du 13 juillet 1957 qui en a autorisé la création, consiste en la réalisation d'un projet d'alimentation en eau potable ; qu'ils ont indiqué que les opérations de distribution d'eau constituent une extension de cette mission qui excède le cadre de ladite mission telle qu'ont entendu la définir les communes ayant constitué entre elles ce syndicat ; que les premiers juges ont ajouté qu'en admettant même que la commune de Fleurance a, par délibération du 30 octobre 1956, décidé d'adhérer au syndicat pour l'entretien et l'exploitation des ouvrages restant à la charge du syndicat et a accepté durant de nombreuses années de participer sans réserves à l'activité du syndicat étendue à la distribution d'eau, cette circonstance, dès lors qu'aucune modification de la mission du syndicat n'était régulièrement intervenue dans les formes prévues à l'article L. 5211-17 du code général des collectivités territoriales, n'était pas de nature à conférer cette compétence au syndicat ; que le syndicat requérant n'apporte pas en appel d'élément de nature à infirmer l'analyse des premiers juges ; qu'il y a lieu, dans ces conditions, d'accueillir ce moyen par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens invoqués, que la société Saur est fondée à demander l'annulation de la délibération en date du 22 décembre 2006 par laquelle le comité syndical du SYNDICAT INTERCOMMUNAL D'ALIMENTATION EN EAU POTABLE DE LA REGION DE FLEURANCE a approuvé le contrat de délégation par affermage de la gestion de distribution d'eau potable négocié avec la société Lyonnaise des eaux et autorisé le président à signer le contrat ;
Sur les conséquences de l'illégalité de la délibération attaquée :
Considérant que l'annulation d'un acte administratif implique, en principe, que cet acte est réputé n'être jamais intervenu ; que, toutefois, s'il apparaît que cet effet rétroactif de l'annulation est de nature à emporter des conséquences manifestement excessives en raison tant des effets que cet acte a produits et des situations qui ont pu se constituer lorsqu'il était en vigueur que de l'intérêt général pouvant s'attacher à un maintien temporaire de ses effets, il appartient au juge administratif - après avoir recueilli sur ce point les observations des parties et examiné l'ensemble des moyens, d'ordre public ou invoqués devant lui, pouvant affecter la légalité de l'acte en cause - de prendre en considération, d'une part, les conséquences de la rétroactivité de l'annulation pour les divers intérêts publics ou privés en présence et, d'autre part, les inconvénients que présenterait, au regard du principe de légalité et du droit des justiciables à un recours effectif, une limitation dans le temps des effets de l'annulation ; qu'il lui revient d'apprécier, en rapprochant ces éléments, s'ils peuvent justifier qu'il soit dérogé à titre exceptionnel au principe de l'effet rétroactif des annulations contentieuses et, dans l'affirmative, de prévoir dans sa décision d'annulation que tout ou partie des effets de cet acte antérieurs à l'annulation devront être regardés comme définitifs ou même, le cas échéant, que l'annulation ne prendra effet qu'à une date ultérieure qu'il détermine ;
Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la disparition rétroactive de l'acte détachable annulé par la présente décision emporte des conséquences manifestement excessives de nature à justifier une limitation dans le temps des effets de son annulation ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
Considérant que l'annulation d'un acte détachable d'un contrat n'implique pas nécessairement la nullité dudit contrat ; qu'il appartient au juge de l'exécution, après avoir pris en considération la nature de l'illégalité commise, soit de décider que la poursuite de l'exécution du contrat est possible, éventuellement sous réserve de mesures de régularisation prises par la personne publique ou convenues entre les parties, soit, après avoir vérifié que sa décision ne portera pas une atteinte excessive à l'intérêt général, d'enjoindre à la personne publique de résilier le contrat, le cas échéant avec un effet différé, soit, eu égard à une illégalité d'une particulière gravité, d'inviter les parties à résoudre leurs relations contractuelles ou, à défaut d'entente sur cette résolution, à saisir le juge du contrat afin qu'il en règle les modalités s'il estime que la résolution peut être une solution appropriée ;
Considérant que l'illégalité entachant la délibération approuvant le choix du délégataire du service public tirée de ce que le SYNDICAT INTERCOMMUNAL D'ALIMENTATION EN EAU POTABLE DE LA REGION DE FLEURANCE ne disposait pas de la compétence pour décider la délégation de service public envisagée justifie en raison de sa gravité qu'il lui soit enjoint d'obtenir de son cocontractant la résolution du contrat, ou, à défaut d'entente sur cette résolution, de saisir le juge du contrat pour qu'il en règle les modalités s'il estime que la résolution peut être une solution appropriée ; que contrairement aux allégations du syndicat requérant et de la société Lyonnaise des eaux, il ne résulte de l'instruction aucune circonstance de nature à démontrer une atteinte excessive à l'intérêt général dans la mesure où l'annulation d'un acte détachable n'interdit ni la poursuite temporaire du contrat ni que les communes membres du syndicat concluent elles-mêmes des conventions de délégation de service public ou modifient les statuts du syndicat pour l'avenir ;
Considérant que le SYNDICAT INTERCOMMUNAL D'ALIMENTATION EN EAU POTABLE DE LA REGION DE FLEURANCE demande à titre subsidiaire, d'enjoindre la résiliation du contrat au lieu de sa résolution ; qu'il résulte toutefois de ce qui précède que l'illégalité entachant la délibération litigieuse est d'une particulière gravité de nature à justifier la résolution du contrat ; que ces conclusions subsidiaires doivent dès lors être rejetées ;
Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, l'annulation de la délibération du 22 décembre 2006 implique que le SYNDICAT INTERCOMMUNAL D'ALIMENTATION EN EAU POTABLE DE LA REGION DE FLEURANCE, s'il ne peut obtenir de son cocontractant qu'il accepte la résolution de la délégation de service public en cause, de solliciter du juge du contrat cette résolution dans le délai de six mois à compter de la notification de la présente décision ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant, d'une part, que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la société Saur, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, verse au SYNDICAT INTERCOMMUNAL D'ALIMENTATION EN EAU POTABLE DE LA REGION DE FLEURANCE et à la société Lyonnaise des eaux les sommes qu'ils demandent sur ce fondement ;
Considérant, d'autre part, qu'il y a lieu de faire droit aux conclusions de la société Saur présentées sur le même fondement en mettant à la charge du SYNDICAT INTERCOMMUNAL D'ALIMENTATION EN EAU POTABLE DE LA REGION DE FLEURANCE une somme de 1 500 euros ;
DECIDE :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Pau en date du 1er décembre 2009 est annulé.
Article 2 : La délibération du comité syndical du SYNDICAT INTERCOMMUNAL D'ALIMENTATION EN EAU POTABLE DE LA REGION DE FLEURANCE en date du 22 décembre 2006 est annulée.
Article 3 : Il est enjoint au SYNDICAT INTERCOMMUNAL D'ALIMENTATION EN EAU POTABLE DE LA REGION DE FLEURANCE, s'il ne peut obtenir de son cocontractant qu'il accepte la résolution de la délégation de service public en cause, de solliciter du juge du contrat cette résolution dans le délai de six mois à compter de la notification de la présente décision.
Article 4 : Le SYNDICAT INTERCOMMUNAL D'ALIMENTATION EN EAU POTABLE DE LA REGION DE FLEURANCE versera à la société Saur une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Les conclusions du SYNDICAT INTERCOMMUNAL D'ALIMENTATION EN EAU POTABLE DE LA REGION DE FLEURANCE et de la société Lyonnaise des eaux présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
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N° 10BX00257