Vu la requête, enregistrée le 24 mai 2011, présentée pour M. Louanh A, demeurant ..., par Me Laydeker, avocat ;
M. A demande à la cour :
1°) de réformer le jugement n° 0900487 du 24 mars 2011 du tribunal administratif de Cayenne en tant qu'il a limité la responsabilité du centre hospitalier de Cayenne à concurrence de la somme de 16.000 euros et rejeté le surplus de ses demandes ;
2°) d'annuler la décision du directeur général du centre hospitalier de Cayenne du 8 novembre 2007 lui refusant le paiement des 211 jours de congé non pris de 1995 à 2001 et des 160 jours figurant sur son compte épargne temps ;
3°) de condamner le centre hospitalier de Cayenne à lui verser les sommes de 161 360,63 euros à titre d'indemnité compensatrice des 371 jours de congé non pris et de 65 416,44 euros à titre de dommages-intérêts ;
4°) de mettre à la charge du centre hospitalier de Cayenne une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu l'ordonnance fixant en dernier lieu la clôture de l'instruction au 6 octobre 2011à 12H00.
Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu le décret n° 200-788 du 3 mai 2002 relatif au compte épargne temps dans la fonction publique hospitalière ;
Vu le décret n° 2008-454 du 14 mai 2008 relatif aux modalités d'indemnisation des jours accumulés sur le compte épargne temps des agents de la fonction publique hospitalière ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 mars 2012:
- le rapport de Mme Frédérique Munoz-Pauziès, premier conseiller ;
- les conclusions de M. Olivier Gosselin, rapporteur public ;
- les observations de Me Laydeker, avocat de M.A ;
Considérant que M. A a été recruté en qualité de gynécologue obstétricien contractuel au sein du centre hospitalier de Cayenne à compter de 1995, puis nommé praticien hospitalier associé en juillet 1998 ; qu'il a été radié des cadres le 7 novembre 2003, mais a poursuivi son activité en qualité de praticien contractuel jusqu'au 31 août 2007, date à laquelle il a été admis à faire valoir ses droits à la retraite ; qu'au cours de l'année 2007, il a demandé la liquidation des congés non pris entre 1995 et 2001, ainsi que l'établissement d'un contrat de septembre 2007 à août 2008 afin de solder les 160 jours accumulés sur son compte épargne-temps depuis 2002 ; que par courrier du 10 juillet 2007, le directeur général du centre hospitalier de Cayenne a décidé qu'il lui serait versé " une indemnité pour congé non pris d'un montant de 161 360,63 euros " ; que, par décision du 8 novembre 2007, le directeur général a informé l'intéressé de son refus de lui verser les sommes ainsi promises ; que M. A relève appel du jugement du tribunal administratif de Cayenne en tant qu'il a limité les sommes mises à la charge du centre hospitalier de Cayenne à concurrence de 16 000 euros ;
Sur la régularité du jugement :
Considérant qu'en soulevant d'office le moyen tiré d'une faute partiellement exonératoire imputable à M. A pour atténuer la responsabilité du centre hospitalier de Cayenne, sans en informer préalablement les parties comme il était tenu de le faire en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, le tribunal administratif de Cayenne a méconnu le principe du caractère contradictoire de la procédure et a entaché son jugement d'irrégularité ; qu'il y a lieu, dès lors, d'annuler jugement attaqué et de statuer par la voie de l'évocation ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
Considérant qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs : " (...) doivent être motivées les décisions qui : / (...) -retirent ou abrogent une décision créatrice de droits " ;
Considérant que, par courrier du 10 juillet 2007, le directeur général du centre hospitalier de Cayenne a décidé qu'il serait versé à M. A " une indemnité pour congé non pris d'un montant de 161 360,63 euros " ; que, par décision du 8 novembre 2007, le directeur général a informé l'intéressé de son refus de lui verser les sommes ainsi promises ; que cette décision, qui doit être regardée comme procédant au retrait dans le délai de quatre mois d'une décision créatrice de droit, devait être motivée en application des dispositions rappelées ci-dessus ; que ladite décision, qui se borne à affirmer qu'" au regard des textes qui régissent le statut des médecins, il ressort que le paiement de ces différents congés est totalement illégal " est insuffisamment motivée et doit, par suite, être annulée ;
Sur les conclusions tendant au paiement de la somme de 161 360,63 euros :
Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article R. 6152-35 du code de la santé publique, relatif aux praticiens hospitaliers, dans sa rédaction applicable à l'espèce : " " Les praticiens régis par la présente section ont droit : / 1° A un congé annuel de vingt-cinq jours ouvrés " ; qu'aux termes de l'article R. 6152-702 du même code : " Les personnels médicaux (...) bénéficient d'un compte épargne-temps (...) " ; que l'article R. 6152-705 dispose : " Le compte épargne-temps est ouvert pour une durée de dix ans. / Toutefois, pour les praticiens âgés de cinquante-cinq ans à la date d'ouverture du compte, cette durée est prolongée jusqu'à la date de départ à la retraite. / Les droits à congés acquis par le praticien au titre du compte épargne-temps sont, au choix ce celui-ci : /- soit exercés en une seule fois et en totalité à compter de l'expiration du délai mentionné au premier alinéa du présent article ; /- soit exercés progressivement ; dans ce cas, les droits acquis au titre du compte épargne-temps au cours d'une année sont soldés avant l'expiration d'un délai de dix ans à compter de leur année d'acquisition. / En cas de cessation définitive des fonctions, l'intéressé est tenu au préalable de solder son compte épargne-temps. A défaut il perd ses droits. " ;
Considérant qu'aucune disposition législative ou réglementaire n'autorise le rachat des congés annuels d'un praticien hospitalier ; qu'il en allait de même, à la date du départ en retraite de M. A, s'agissant des droits acquis au titre du compte épargne-temps, dont, en application des dispositions rappelées ci-dessus de l'article R. 6152-705 du code de la santé publique, l'intéressé perd le bénéfice s'il ne l'a pas soldé lors de la cessation définitive de ses fonctions ; que peu importe à cet égard que l'intéressé n'ait pas été averti par le centre hospitalier de la nécessité de solder ses droits avant son départ ; que M. A ne peut se prévaloir des dispositions du décret susvisé du 14 mai 2008 relatif aux modalités d'indemnisation des jours accumulés sur le compte épargne-temps des agents de la fonction publique hospitalière, dès lors que, lors de l'entrée en vigueur de ce texte et du fait de la cessation de ses fonctions le 31 août 2007, il avait perdu le bénéfice des droits acquis au titre de son compte épargne temps ; qu'ainsi M. A ne peut prétendre au paiement de la somme de 161 360,63 euros ;
Sur la responsabilité du centre hospitalier de Cayenne :
Considérant, en premier lieu, que si M. A fait état de la promesse que, par décision du 10 juillet 2007, le directeur général du centre hospitalier de Cayenne lui a faite de lui verser une indemnité pour congé non pris d'un montant de 161 360,63 euro, il ne fait état d'aucun préjudice distinct du non versement de ladite somme de nature à lui ouvrir droit à réparation, à laquelle, comme il a été rappelé ci-dessus, il n'avait pas droit ;
Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article R. 6152-707 du code de la santé publique, dans sa rédaction applicable à l'espèce : " La demande d'exercice de tout ou partie du congé acquis au titre du compte épargne-temps ne peut être rejetée qu'en raison des nécessités du service. / Ce refus ne peut toutefois priver l'intéressé de ses droits au bénéfice du temps épargné. En particulier, aucun refus ne peut être opposé lorsque le temps épargné est égal ou supérieur au temps de service restant à courir avant la date du départ à la retraite sans que l'utilisation des droits puisse entraîner le report de la date de cessation des fonctions. " ; que ces dispositions interdisent que l'utilisation des droits épargnés par le praticien sur un compte épargne-temps entraîne le report de la date de cessation de fonction ; que, par suite, M. A ne peut demander que le centre hospitalier de Cayenne soit condamné à l'indemniser du préjudice que lui a causé le refus de prolonger son contrat au-delà du 31 août 2007 pour solder les 160 jours figurant sur son compte épargne temps ;
Considérant, cependant, qu'il résulte de l'instruction qu'eu égard au manque de personnel et à l'impossibilité de recruter un gynécologue obstétricien, le centre hospitalier de Cayenne n'a pas mis M. B en mesure de prendre ses congés annuels de 1995 à 2007, soit pendant plus de douze ans ; que cette faute est de nature à engager sa responsabilité ; qu'il sera fait une juste appréciation du préjudice ainsi subi par l'intéressé en condamnant le centre hospitalier de Cayenne à lui verser la somme de 65 416 euros correspondant à six mois de traitement brut ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du centre hospitalier de Cayenne la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. B et non compris dans les dépens ;
DECIDE
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Cayenne du 24 mars 2011 est annulé.
Article 2 : La décision du directeur général du centre hospitalier de Cayenne du 8 novembre 2007 est annulée.
Article 3 : Le centre hospitalier de Cayenne est condamné à verser à M. B la somme de 65 416 euros.
Article 4 : Le centre hospitalier de Cayenne versera à M. B la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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No 11BX01256