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02/07/2019 | FRANCE | N°18BX03812

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 1ère chambre, 02 juillet 2019, 18BX03812


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... E...a demandé au tribunal administratif de Toulouse, d'une part, d'annuler l'arrêté du 18 décembre 2017 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français sans délai et a fixé le pays de destination et, d'autre part, d'enjoindre au préfet de la Haute-Garonne, sous astreinte, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et de réexaminer sa situation.

Par un jugement n° 1800153 du 17 mai 2018, le t

ribunal administratif de Toulouse a rejeté la demande de M.E....

Procédure devant la ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... E...a demandé au tribunal administratif de Toulouse, d'une part, d'annuler l'arrêté du 18 décembre 2017 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français sans délai et a fixé le pays de destination et, d'autre part, d'enjoindre au préfet de la Haute-Garonne, sous astreinte, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et de réexaminer sa situation.

Par un jugement n° 1800153 du 17 mai 2018, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté la demande de M.E....

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 4 novembre 2018, et un mémoire en production de pièces, enregistré le 21 janvier 2019, M.E..., représenté par MeD..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulouse du 17 mai 2018 ;

2°) d'annuler l'arrêté en date du 18 décembre 2017 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a rejeté sa demande de délivrance de titre de séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire sans délai et a fixé le pays de destination ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Garonne, sous astreinte de 200 euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, de lui délivrer un titre de séjour sur le fondement des dispositions combinées des articles L.313-11-7° et L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ou, à défaut, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans l'attente du réexamen de sa situation ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat, au profit de MeD..., outre les entiers dépens, la somme de 1 800 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

S'agissant de la décision de refus de séjour :

-elle est entachée d'un défaut de motivation au regard de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration ;

-elle viole les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

S'agissant de la mesure d'éloignement :

-elle est entachée d'un défaut de motivation au regard de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration ;

-elle est entachée d'un vice de procédure, son édiction n'ayant pas été précédée de la procédure contradictoire prévue par les dispositions de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 ;

-elle méconnaît les stipulations de l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

-elle est entachée d'un défaut d'examen de sa situation ;

-elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation, car elle peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur sa situation personnelle et familiale ;

-elle méconnaît les dispositions de l'article L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

-elle méconnaît les articles 13 et 6.1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

S'agissant de la décision de refus d'octroi d'un délai de départ volontaire :

-la motivation de la décision montre que le préfet n'a pas procédé à un examen particulier de sa situation ;

-elle est entachée d'un vice de procédure, son édiction n'ayant pas été précédée de la procédure contradictoire prévue par les dispositions de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 ;

-elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle ;

S'agissant de la décision fixant le pays de renvoi :

-elle est entachée d'un défaut de motivation en l'absence d'indication des risques encourus en cas de retour dans son pays d'origine ;

-elle est entachée d'un défaut d'examen et d'une erreur manifeste d'appréciation.

Par un mémoire en défense, enregistré le 11 mars 2019, le préfet de la Haute-Garonne conclut au rejet de la requête comme non fondée.

M. E...a produit un bordereau de pièces complémentaires, enregistré le 6 juin 2019, qui n'a pas été communiqué.

Par une décision en date du 4 octobre 2018, l'aide juridictionnelle totale a été accordée à M.E....

Vu :

- les autres pièces du dossier ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la charte de l'Union européenne des droits fondamentaux ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Florence Rey-Gabriac,

Par décision du 1er septembre 2018, le président de la cour a désigné M. F...de la Taille Lolainville pour exercer temporairement les fonctions de rapporteur public en application des articles R. 222-24 et R. 222-32 du code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Considérant ce qui suit :

1. ChokriE..., ressortissant tunisien, né le 2 février 1984 à Tunis (Tunisie), fait appel du jugement du tribunal administratif de Toulouse du 17 mai 2018, qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 18 décembre 2017 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a rejeté sa demande d'admission exceptionnelle au séjour au titre de la vie privée et familiale, l'a obligé à quitter le territoire français sans délai et a fixé le pays de destination.

2. En premier lieu, les décisions contestées comportent l'énoncé des considérations de droit et de fait sur lesquelles elles se fondent. Elles sont, par suite, suffisamment motivées au regard des dispositions de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration.

3. En deuxième lieu, M. E...soutient que le préfet ne l'a pas mis à même de présenter ses observations préalablement à l'édiction des décisions contestées, en méconnaissance de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000, de l'article 41 de la Charte de l'Union européenne et de son droit d'être entendu garanti par le principe général des droits de la défense de l'Union européenne. Cependant, d'une part, il ne saurait utilement invoquer les dispositions de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000, lesquelles sont abrogées depuis le 1er janvier 2016 et étaient au demeurant inopérantes à l'encontre des décisions contestées. D'autre part, il résulte de la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne (arrêt C-141/12 et C-372/12 du 17 juillet 2014), que l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne s'adresse non pas aux Etats membres mais uniquement aux institutions, organes et organismes de l'Union. Ainsi, le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions par une autorité d'un Etat membre est inopérant. Enfin, une atteinte au droit d'être entendu garanti par les principes généraux du droit de l'Union européenne n'est susceptible d'affecter la régularité de la procédure à l'issue de laquelle une décision faisant grief est prise que si la personne concernée a été privée de la possibilité de présenter des éléments pertinents qui auraient pu influer sur le contenu de la décision. Le requérant ne précise pas en quoi il disposait d'informations pertinentes tenant à sa situation personnelle qu'il aurait été empêché de porter à la connaissance de l'administration avant que ne soient prises les décisions en litige et qui, si elles avaient pu être communiquées à temps, auraient été de nature à y faire obstacle. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance du principe général du droit de l'Union européenne garantissant à toute personne le droit d'être entendue préalablement à l'adoption d'une mesure individuelle l'affectant défavorablement, ne peut qu'être écarté.

4. En troisième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier et notamment de la motivation des décisions contenues dans l'arrêté contesté que le préfet se serait abstenu de se livrer à un examen attentif de la situation particulière de l'intéressé.

5. En quatrième lieu, M. E...se prévaut de ce qu'il est entré régulièrement sur le territoire français le 12 septembre 2013 à la suite d'un mariage contracté le 8 mars 2013 avec MmeB..., ressortissante de nationalité française née le 27 août 1969. Toutefois, en l'absence de communauté de vie effective entre les époux, M. E...a fait l'objet le 21 juillet 2015 d'un arrêté devenu définitif portant refus de renouvellement de titre de séjour assorti d'une obligation de quitter le territoire français. Si M. E...se prévaut également d'une nouvelle relation avec MmeA..., ressortissante française née le 12 février 1969, qui aurait débuté en 2015, il n'apporte aucun élément suffisamment probant établissant l'existence d'une communauté de vie avant le mois de juillet 2017. Par ailleurs M.E..., qui n'établit pas être dépourv u d'attaches familiales dans son pays d'origine où il a vécu jusqu'à l'âge de 29 ans, qui est arrivé récemment sur le territoire français et qui s'y est maintenu irrégulièrement malgré une mesure d'éloignement, ne justifie pas d'une intégration particulière dans la société française. Dans ces conditions, les décisions litigieuses n'ont pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elles ont été prises et par suite, n'ont méconnu ni les dispositions des articles L. 313-14 et L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Le préfet de la Haute-Garonne n'a pas non plus commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences des mesures qu'il a prises sur la situation personnelle de M.E....

6. En cinquième lieu, aux termes du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Toutefois, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français : / (...) 3° S'il existe un risque que l'étranger se soustraie à cette obligation. Ce risque peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : / (...) d) Si l'étranger s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement ; (...) ".

7. Il ressort des pièces du dossier que M. E...s'est soustrait à une précédente mesure d'éloignement qu'il ne pouvait ignorer. Par suite, il se trouvait dans la situation où en application du 3° d) du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet pouvait refuser un délai de départ volontaire. Par ailleurs, M. E...ne justifie pas de circonstances particulières tenant à sa situation personnelle, propres à justifier qu'un délai lui soit accordé à titre exceptionnel pour quitter volontairement le territoire français. Dans ces conditions, M. E...n'est pas fondé à soutenir que le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation en ne lui accordant pas un délai de départ volontaire.

8. En sixième lieu, eu égard à la possibilité pour M.E..., soit de se faire représenter par un conseil lors des procédures juridictionnelles en cours, notamment relatives à son divorce, soit d'obtenir auprès des autorités consulaires un visa de court séjour, que celles-ci seraient tenues de lui accorder dans l'hypothèse où il devrait comparaître personnellement à une audience à la demande de la juridiction statuant sur le fond du litige auquel il est partie, les décisions contestées n'ont pas méconnu les garanties relatives au droit à un procès équitable résultant des articles 6 et 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

9. En dernier lieu, le moyen tiré de ce que la décision fixant le pays de destination serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation est dénué de toutes précisions permettant d'en apprécier le bien fondé.

10. Il résulte de ce qui précède que M. E...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Haute-Garonne du 18 décembre 2017. Il y a lieu de rejeter, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction, ainsi que celles présentées sur le fondement des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. E...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...E..., et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de la Haute-Garonne.

Délibéré après l'audience du 12 juin 2019 à laquelle siégeaient :

Mme Marianne Pouget, président,

M. Paul-André Braud, président-assesseur,

Mme Florence Rey-Gabriac, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 2 juillet 2019.

Le rapporteur,

Florence Rey-GabriacLe président,

Marianne Pouget

Le greffier,

Florence Faure

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

18BX03812 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 18BX03812
Date de la décision : 02/07/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335 Étrangers.


Composition du Tribunal
Président : Mme POUGET M.
Rapporteur ?: Mme Florence REY-GABRIAC
Rapporteur public ?: M. de la TAILLE LOLAINVILLE
Avocat(s) : DERKAOUI

Origine de la décision
Date de l'import : 13/08/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2019-07-02;18bx03812 ?
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