Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. E...B...a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 23 août 2017 par lequel le préfet de la Dordogne a refusé de renouveler son titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.
Par une ordonnance n° 1703781 du 2 février 2018, le président de la 1ère chambre du tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et des pièces complémentaires, enregistrées respectivement le 2 mai et le 10 septembre 2018, M.B..., représenté par MeC..., demande à la cour :
1°) d'annuler cette ordonnance du 2 février 2018 du président de la 1ère chambre du tribunal administratif de Bordeaux ;
2°) d'annuler l'arrêté du 23 août 2017 du préfet de la Dordogne ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Dordogne de lui délivrer un certificat de résidence portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir ou, à défaut, de réexaminer sa situation dans le même délai ;
4°) de mettre à la charge la somme de 1 000 euros à lui verser au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- un certificat de résident " vie privée et familiale " doit lui être délivré sur le fondement de l'article 6 de l'accord franco-algérien dès lors que, entré régulièrement sur le territoire français et marié avec une ressortissante française, il justifie de la réalité de leur communauté de vie. Il produit notamment diverses pièces démontrant que le couple dispose d'une adresse commune. Si, à la suite d'une dispute, son épouse a envisagé d'engager une procédure de divorce, elle s'est ensuite désistée après leur réconciliation en regrettant d'avoir formulé contre lui des accusations erronées ;
- le refus de renouvellement de son titre de séjour porte une atteinte excessive à son droit au respect de sa vie privée et familiale, garanti par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Il a noué des liens affectifs avec sa future femme depuis l'année 2011, ils résident ensemble depuis plus de quatre ans et sont mariés depuis près de deux ans. Il a exercé une activité professionnelle dès qu'il s'est trouvé en situation régulière, a suivi la formation civique et le stage républicain et n'a jamais troublé l'ordre public.
Par un mémoire en défense, enregistré le 9 janvier 2019, le préfet de la Dordogne conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que :
- il ressort des propres déclarations de l'épouse de M. B...que la communauté de vie a cessé. Ce fait est conforté par le dépôt d'une main-courante le 28 février 2017 et par la circonstance qu'un courrier adressé à M. B...le 1er mars 2017 est revenu avec la mention " destinataire inconnu à l'adresse " ;
- M. B...n'est pas dépourvu d'attaches familiales en Algérie où résident ses parents. Le refus de titre de séjour ne porte donc pas une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale.
Un courrier adressé par Mme D...a été enregistré le 20 mai 2019.
M. B...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 5 avril 2018.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Par décision du 1er septembre 2018, le président de la cour a désigné Mme Sabrina Ladoire pour exercer temporairement les fonctions de rapporteur public en application des articles R. 222-24 et R. 222-32 du code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. A...a été entendu au cours de l'audience publique :
Considérant ce qui suit :
1. M. E...B..., ressortissant algérien né le 13 juin 1975, est entré en France le 15 mars 2014 sous couvert d'un passeport revêtu d'un visa de court séjour. A la suite de son mariage avec une ressortissante française, le 23 juillet 2016, il s'est vu délivrer un certificat de résidence algérien valable jusqu'au 30 août 2017. Le 17 juillet 2017, il a sollicité le renouvellement de son titre de séjour en qualité de conjoint de Français. Par un arrêté du 23 août 2017, le préfet de la Dordogne a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai d'un mois en fixant le pays de renvoi. M. B...relève appel de l'ordonnance du 2 février 2018 par laquelle le président de la 1ère chambre du tribunal administratif de Bordeaux, statuant sur le fondement du 7° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la légalité de l'arrêté du 23 août 2017 :
2. Aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 2°) Au ressortissant algérien, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que son entrée sur le territoire français ait été régulière, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français(...) Le premier renouvellement du certificat de résidence délivré au titre du 2° ci-dessus est subordonné à une communauté de vie effective entre les époux. ".
3. M. B...soutient que le préfet de la Dordogne ne pouvait se fonder sur des démarches entreprises par son épouse à la suite d'une dispute pour estimer qu'il ne justifiait pas d'une communauté de vie avec celle-ci. L'intéressé fait valoir qu'il s'est réconcilié avec son épouse, qu'il établit être domicilié.... Toutefois, il ressort des pièces du dossier que, pour prendre l'arrêté contesté, le préfet de la Dordogne s'est fondé sur les courriers de MmeD..., épouseB..., datés des 13 janvier et 21 février 2017 adressés aux services préfectoraux et faisant état de l'absence de communauté de vie entre les époux, sur une main-courante qu'elle a déposée le 28 février 2017 au commissariat de police de Périgueux dans laquelle elle atteste que son mari n'a vécu qu'une semaine avec elle depuis leur mariage dans le but unique de se voir délivrer des papiers pour rester en France, et fait état de menaces proférées à son encontre par son conjoint, sur une requête en divorce auprès du tribunal de grande instance de Périgueux en date du 17 juillet 2017 et sur la circonstance que deux correspondances envoyées en recommandé au requérant par les services de la préfecture de la Marne le 24 octobre 2016 et de la préfecture de la Dordogne le 3 mars 2017 à l'adresse du couple sont revenues avec la mention "destinataire inconnu à l'adresse indiquée ". Les divers documents antérieurs à la date du refus de titre de séjour ou se rattachant à des faits antérieurs à l'arrêté produits par le requérant, lesquels consistent en des attestations et divers courriers concernant M. B...adressés au domicile de son épouse, ne sont pas suffisants, compte tenu de leur nature et leur teneur, pour démontrer le caractère effectif de la communauté de vie entre époux. Le courrier de Mme D...au juge aux affaires familiales du 18 août 2017 ainsi que le document rédigé par cette dernière, non daté, dans lequel elle signale souhaiter se désister de la procédure de divorce, la lettre de M. B...du 9 septembre 2017 précisant " je me suis remis avec mon épouse et je vis avec elle " ainsi que l'attestation du 26 février 2018 de son épouse relative à une domiciliation commune avec son mari, s'ils tendent à démontrer une reprise de la vie commune postérieurement à l'arrêté litigieux, ne permettent pas d'établir l'existence d'une communauté de vie à la date de l'arrêté. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance du 2° de l'article 6 de l'accord franco-algérien doit être écarté.
4. L'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales stipule que : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
5. M. B...soutient que le centre de ses intérêts privés et familiaux se trouve désormais en France où il réside depuis le 15 mars 2014. Toutefois, s'il soutient vivre aux côtés de sa compagne, devenue son épouse, depuis l'année 2014 et avoir constitué une famille stable, il résulte de ce qui est indiqué qu'au point 3 qu'il ne justifie pas de l'effectivité de la communauté de vie à la date de l'arrêté litigieux. Sans enfant, il ne fait pas davantage état d'autre lien privé et familial en France. S'il se prévaut de son intégration professionnelle, il n'établit avoir travaillé qu'à compter de juillet 2017. En outre, il n'est pas dépourvu de toutes attaches dans son pays d'origine où résident à tout le moins ses parents et où il a vécu jusqu'à l'âge de vingt-huit ans. Par suite, la décision portant refus de renouvellement de son titre de séjour n'a pas porté au droit de M. B...au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels elle a été prise. Le préfet de la Dordogne n'a donc pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
6. Il résulte de ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le président de la 1ère chambre du tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de la Dordogne du 23 août 2017.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
7. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par le requérant, n'appelle aucune mesure d'exécution. Par suite, les conclusions à fin d'injonction ne peuvent être accueillies.
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l' article L. 761-1 du code de justice administrative :
8. L'Etat n'étant pas la partie perdante dans la présente instance, les conclusions présentées par M. B...au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. E...B...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de la Dordogne.
Délibéré après l'audience du 17 avril 2019 à laquelle siégeaient :
Mme Marianne Pouget, président,
M. Paul-André Braud, premier conseiller,
M. Manuel Bourgeois, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 29 juillet 2019
Le rapporteur,
Paul-André A... Le président,
Marianne Pouget Le greffier,
Florence Faure
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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18BX01782