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06/02/2020 | FRANCE | N°17BX03824

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 4ème chambre, 06 février 2020, 17BX03824


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... P..., Mme D... P..., M. L... P..., Mme B... P..., Mme A... P..., M. K... P..., M. J... P... et Mme O... P... ont demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 30 septembre 2014, par lequel le maire de la commune de Laguiole a délivré un permis de construire à Mme C... F... et M. G... H... en vue de la construction d'un garage sur une parcelle cadastrée L n° 1567 située rue de la Pépinière, et la décision du 25 mars 2015 rejetant leur recours gracieux.

Par un jugemen

t n° 1502460 du 3 octobre 2017 le tribunal administratif de Toulouse a annulé ce...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... P..., Mme D... P..., M. L... P..., Mme B... P..., Mme A... P..., M. K... P..., M. J... P... et Mme O... P... ont demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 30 septembre 2014, par lequel le maire de la commune de Laguiole a délivré un permis de construire à Mme C... F... et M. G... H... en vue de la construction d'un garage sur une parcelle cadastrée L n° 1567 située rue de la Pépinière, et la décision du 25 mars 2015 rejetant leur recours gracieux.

Par un jugement n° 1502460 du 3 octobre 2017 le tribunal administratif de Toulouse a annulé ce permis de construire et la décision du 25 mars 2015.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire enregistré le 6 décembre 2017 et le 22 février 2019, M. H... et Mme F..., représentés par Me R..., demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulouse du 3 octobre 2017 ;

2°) de rejeter les demandes présentées par M. E... P..., Mme D... P..., M. L... P..., Mme B... P..., Mme A... P..., M. K... P..., M. J... P... et Mme O... P... devant le tribunal administratif de Toulouse ;

3°) à titre subsidiaire, de les inviter à régulariser leur permis de construire en application des dispositions de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme ;

4°) de mettre la somme de 5 000 euros à la charge, personnelle voire in solidum, de M. E... P..., Mme D... P..., M. L... P..., Mme B... P..., Mme A... P..., M. K... P..., M. J... P... et Mme O... P... au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

Ils soutiennent que :

- les consorts P... ne justifiaient d'aucun intérêt à agir contre le permis de construire du 30 septembre 2014 ;

- le projet ne méconnaît pas les dispositions de l'article UA 6 du règlement du plan local d'urbanisme ;

- les dispositions de l'article UA 9 du règlement du plan local d'urbanisme n'ont pas non plus été méconnues car le projet de construction n'est pas une annexe ;

- les autres moyens tirés de la méconnaissance des articles R. 431-8, R. 431-9 et R. 431-10 du code de l'urbanisme et des dispositions des articles UA 11 et UA 13 du règlement du plan local d'urbanisme ne sont pas fondés ;

- à titre subsidiaire, le permis peut faire l'objet d'une régularisation dans le cadre des dispositions de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme contrairement à ce que retenu le tribunal administratif.

Par un mémoire en défense, enregistré le 1er mai 2018, M. E... P..., Mme D... P..., M. L... P..., Mme B... P..., Mme A... P..., M. K... P..., M. J... P... et Mme O... P..., représentés par Me I..., conclut au rejet de la requête et demande que la somme de 4 000 euros soit mise à la charge de M. H... et Mme F... au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Ils soutiennent que les moyens de la requête ne sont pas fondés et que le projet ne peut pas faire l'objet d'une régularisation.

Par un mémoire, enregistré le 14 février 2019, la commune de Laguiole, représentée par Me Q..., conclut à l'annulation du jugement du tribunal administratif de Toulouse du 3 octobre 2017, au rejet des demandes de Consorts P... et demande que la somme de 4 500 euros soit mise à la charge des Consorts P... au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

Elle soutient que :

- les conclusions présentées devant le tribunal administratif étaient irrecevables à défaut d'intérêt à agir des consorts P... ;

- les moyens retenus par les premiers juges et les autres moyens soulevés par les intimés ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 22 janvier 2019, la clôture d'instruction a été fixée au 22 février 2019 à 12h00.

Un mémoire, présenté pour les consorts P..., a été enregistré le 6 janvier 2020.

Vu :

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. N... M...,

- les conclusions de Mme Sabrina Ladoire, rapporteur public,

- et les observations de Me Q..., représentant la commune de Laguiole.

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 30 septembre 2014, le maire de Laguiole a délivré à Mme F... et M. H... un permis de construire un garage sur une parcelle située rue de la Pépinière sur le territoire de ladite commune et a rejeté, par décision du 25 mars 2015, le recours gracieux exercé à son encontre par les Consorts P.... M. H... et Mme F... interjettent appel du jugement en date du 3 octobre 2017 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a annulé le permis de construire du 30 septembre 2014 et la décision du 25 mars 2015.

Sur la recevabilité de la demande de première instance présentée par les consorts P... :

2. Aux termes de l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme dans sa version applicable : " Une personne autre que l'Etat, les collectivités territoriales ou leurs groupements ou une association n'est recevable à former un recours pour excès de pouvoir contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager que si la construction, l'aménagement ou les travaux sont de nature à affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance du bien qu'elle détient ou occupe régulièrement ou pour lequel elle bénéficie d'une promesse de vente, de bail, ou d'un contrat préliminaire mentionné à l'article L. 261-15 du code de la construction et de l'habitation ".

3. Il résulte de ces dispositions qu'il appartient, en particulier, à tout requérant qui saisit le juge administratif d'un recours pour excès de pouvoir tendant à l'annulation d'un permis de construire, de démolir ou d'aménager, de préciser l'atteinte qu'il invoque pour justifier d'un intérêt lui donnant qualité pour agir, en faisant état de tous éléments suffisamment précis et étayés de nature à établir que cette atteinte est susceptible d'affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance de son bien. Il appartient au défendeur, s'il entend contester l'intérêt à agir du requérant, d'apporter tous éléments de nature à établir que les atteintes alléguées sont dépourvues de réalité. Le juge de l'excès de pouvoir apprécie la recevabilité de la requête au vu des éléments ainsi versés au dossier par les parties, en écartant le cas échéant les allégations qu'il jugerait insuffisamment étayées mais sans pour autant exiger de l'auteur du recours qu'il apporte la preuve du caractère certain des atteintes qu'il invoque au soutien de la recevabilité de celui-ci. Eu égard à sa situation particulière, le voisin immédiat justifie, en principe, d'un intérêt à agir lorsqu'il fait état devant le juge, qui statue au vu de l'ensemble des pièces du dossier, d'éléments relatifs à la nature, à l'importance ou à la localisation du projet de construction.

4. Il ressort des pièces du dossier que les consorts P... sont les voisins immédiats de la construction projetée. Compte tenu de la taille de cette construction, qui consiste en un garage de 8,60 mètres sur 8 mètres, de 7 mètres au faîtage, et auquel seront adjoints deux abris ouverts de chaque côté de 2,50 et 1 mètres, ainsi que de l'implantation du bâtiment en limite de la propriété des intimés, les premiers juges ont estimé à bon droit qu'ils justifiaient d'un intérêt suffisant pour contester la légalité du permis de construire en litige.

Sur la légalité de l'arrêté du 30 septembre 2014 :

5. En premier lieu, aux termes de l'article UA 6 du règlement du plan local d'urbanisme : " Implantation des constructions par rapport aux voies et emprises publiques - Les constructions doivent s'implanter au ras de l'alignement ou à la limite qui s'y substitue sauf : - si le projet de construction jouxte une construction existante qui serait implantée en retrait, la construction à édifier pourra alors s'aligner sur celle qui existe dans la mesure ou cela ne porte pas atteinte à la sécurité publique (visibilité dans un carrefour notamment). - le projet de construction concerne une d'opération groupée de l'habitat. Dans ce cas, certaines parties de l'opération pourront être implantées en retrait. - si la parcelle est "traversante" et s'ouvre sur deux voies publiques. Dans ce cas, le projet respectera en priorité l'alignement jugé le plus important. Un retrait pourra être autorisé sur la façade arrière sous conditions. ·/ En aucun cas, le recul n'autorise une hauteur supplémentaire du bâtiment. / Ces règles peuvent ne pas être exigées dans le cadre d'un projet d'équipement nécessitant une implantation différente de manière à lui permettre de jouer son rôle de repère urbain ".

6. En l'absence de toute prescription concernant les débords de toiture, ces dispositions doivent être interprétées comme imposant, en ce qui concerne l'implantation des constructions par rapport aux voies ou aux emprises publiques, une prise au sol de l'immeuble au ras de l'alignement ou à la limite qui s'y substitue, sous réserve des dérogations prévues.

7. Il ressort des pièces du dossier que le projet de construction prévoit que la prise au sol du garage doit être réalisée à une distance de 2,50 mètres de la limite de la voie publique. Dès lors que ce projet ne peut bénéficier des dérogations prévues par les dispositions précitées de l'article UA 6 du règlement du plan local d'urbanisme, les premiers juges ont retenu à bon droit que le permis méconnaissait celles-ci.

8. Il ressort des pièces du dossier que M. H... et Mme F... résident dans une maison implantée sur la parcelle cadastrée L n° 1417 et ont demandé à être autorisés à construire un bâtiment à usage de garage et d'abris à bois, pour leur usage personnel, sur la parcelle cadastrée L. 1567, attenante à la parcelle L. n° 1417. Dans ces conditions, la construction projetée peut être regardée comme ayant le caractère d'une annexe à l'habitation des pétitionnaires, quand bien même celle-ci se situe dans une copropriété et la parcelle cadastrée L n° 1567 appartenait encore à la mère de Mme F... à la date du permis en litige.

9. En second lieu, les dispositions de l'article UA 9 du règlement du plan local d'urbanisme limitent à 40 m² l'emprise au sol des annexes.

10. Il ressort des pièces du dossier que l'emprise au sol de la construction, même en excluant les abris prévus, excède déjà 60 m². Le tribunal a ainsi retenu à bon droit que le projet méconnaissait les dispositions de l'article UA 9 du règlement du plan local d'urbanisme.

Sur la régularisation du projet :

11. Aux termes de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme : " Sans préjudice de la mise en oeuvre de l'article L. 600-5, le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager ou contre une décision de non-opposition à déclaration préalable estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés, qu'un vice entraînant l'illégalité de cet acte est susceptible d'être régularisé, sursoit à statuer, après avoir invité les parties à présenter leurs observations, jusqu'à l'expiration du délai qu'il fixe pour cette régularisation, même après l'achèvement des travaux. Si une mesure de régularisation est notifiée dans ce délai au juge, celui-ci statue après avoir invité les parties à présenter leurs observations. Le refus par le juge de faire droit à une demande de sursis à statuer est motivé. ".

12. Il résulte de ces dispositions que, lorsque le juge estime que le permis de construire, de démolir ou d'aménager qui lui est déféré est entaché d'un vice entraînant son illégalité mais susceptible d'être régularisé par la délivrance d'un permis modificatif, il peut, de sa propre initiative ou à la demande d'une partie, après avoir invité les parties à présenter leurs observations sur le principe de l'application de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, constater, par une décision avant-dire droit, que les autres moyens ne sont pas fondés et surseoir à statuer jusqu'à l'expiration du délai qu'il fixe pour permettre, selon les modalités qu'il détermine, la régularisation du vice qu'il a relevé. Le juge peut mettre en oeuvre les pouvoirs qu'il tient de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme pour la première fois en appel, alors même que l'autorisation d'urbanisme en cause a été annulée par les premiers juges.

13. Il résulte de ce qui précède que, compte tenu des vices dont le projet est entaché, le permis de construire ne peut être régularisé sans remettre en cause l'économie générale et la conception de la construction dont notamment l'emprise au sol doit être considérablement réduite. Il s'ensuit que les conclusions des appelants à fin de sursis à statuer en vue de la délivrance d'un permis modificatif doivent être rejetées.

14. Il résulte de ce qui précède que M. H... et Mme F..., et en tout état de cause la commune de Laguiole, ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a annulé l'arrêté du maire de Laguiole du 30 septembre 2014 accordant un permis de construire ainsi que la décision du 25 mars 2015 rejetant le recours gracieux formé par les consorts P... et a exclu de faire application de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme.

Sur les conclusions présentées au titre de l'article L 761-1 du code de justice administrative :

15. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. H... et de Mme F... une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par les consorts P... et non compris dans les dépens. En revanche les conclusions présentées à ce titre par la commune de Laguiole, Mme F... et M. H..., à l'encontre des consorts P... qui n'ont pas la qualité de partie perdante à l'instance, doivent être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. H... et de Mme F... est rejetée.

Article 2 : M. H... et Mme P... verseront la somme globale de 1 500 euros aux consorts P... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Les conclusions présentées par la commune de Laguiole au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. G... H..., à Mme C... F..., à Mme A... P..., représentante unique des consorts P..., et à la commune de Laguiole.

Délibéré après l'audience du 9 janvier 2020 à laquelle siégeaient :

M. Philippe Pouzoulet, président,

M. Dominique Ferrari, président-assesseur,

M. N... M..., premier conseiller,

Lu en audience publique, le 6 février 2020.

Le rapporteur,

Stéphane M... Le président,

Philippe PouzouletLe greffier,

Sylvie Hayet La République mande et ordonne au préfet de l'Aveyron en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 17BX03824


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 17BX03824
Date de la décision : 06/02/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-03-03-02-02 Urbanisme et aménagement du territoire. Permis de construire. Légalité interne du permis de construire. Légalité au regard de la réglementation locale. POS ou PLU (voir supra : Plans d`aménagement et d`urbanisme).


Composition du Tribunal
Président : M. POUZOULET
Rapporteur ?: M. Stéphane GUEGUEIN
Rapporteur public ?: Mme LADOIRE
Avocat(s) : PETITJEAN

Origine de la décision
Date de l'import : 11/02/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2020-02-06;17bx03824 ?
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