Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
L'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) a demandé au tribunal administratif de Bordeaux de condamner solidairement le centre hospitalier universitaire (CHU) de Bordeaux et la Société hospitalière d'assurances mutuelles (SHAM), assureur de l'établissement de santé, à lui verser la somme de 178 349,44 euros en remboursement de l'indemnisation qu'il a versée à M. I... D..., avec intérêts au taux légal à compter du 13 janvier 2016 et capitalisation annuelle des intérêts, de condamner solidairement le CHU de Bordeaux et la SHAM à lui verser une pénalité à hauteur de 15 % des sommes mises à sa charge, soit la somme de 26 752,42 euros, et de mettre à la charge solidaire du CHU de Bordeaux et de la SHAM les entiers dépens en ce compris les frais d'expertise à hauteur de la somme de 1 750 euros.
Par un jugement n° 1600510 du 7 novembre 2017, le tribunal administratif de Bordeaux a condamné le CHU de Bordeaux et la SHAM à verser solidairement à l'ONIAM la somme de 178 349,44 euros ainsi que les intérêts au taux légal sur cette somme à compter du 14 janvier 2016 et leur capitalisation à compter du 14 janvier 2017 et à chaque échéance annuelle ultérieure, a condamné le CHU de Bordeaux et la SHAM à verser solidairement à l'ONIAM la somme de 8 917,47 euros à titre de pénalité en application de l'article L. 1142-15 du code de la santé publique, a mis à la charge solidaire du CHU de Bordeaux et de la SHAM le paiement à l'ONIAM de la somme de 1 750 euros au titre des frais d'expertise, a condamné le CHU de Bordeaux et la SHAM à verser solidairement à la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de la Vienne une somme en capital de 90 406,75 euros et à lui rembourser ses dépenses futures de santé sur présentation de justificatifs dans la limite d'un montant de 13 388,63 euros par an ainsi que la somme de 1 055 euros sur le fondement de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, et a condamné le CHU de Bordeaux et la SHAM à verser solidairement à la Caisse des dépôts et consignations, intervenant pour le compte de la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales (CNRACL), la somme de 130 553,48 euros en réparation de son préjudice.
Procédure devant la cour :
Par une requête sommaire et des mémoires complémentaires, enregistrés le 8 janvier 2018, 19 février 2018 et 25 février 2019, le CHU de Bordeaux et la SHAM, représentés par Me H..., demandent à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 7 novembre 2017 ;
2°) de rejeter les conclusions présentées par l'ONIAM et la CPAM de la Vienne.
Ils soutiennent que :
- le jugement du tribunal administratif est insuffisamment motivé au regard des conclusions dont il était saisi ; il n'a, ainsi, pas été tenu compte du rapport d'analyse critique de l'expertise, rédigé à leur demande par le Pr Rousseau, dont il n'est pas même fait mention dans le jugement ;
- c'est à tort que le tribunal a estimé que la méthode opératoire retenue par les praticiens du CHU, lors de la première intervention, n'était pas adaptée au tableau clinique de canal lombaire étroit associé à une hernie discale présenté par M. D... et qu'il a regardé l'acte chirurgical pratiqué comme non conforme aux règles de l'art ; le rapport d'expertise sur lequel s'est appuyé le tribunal n'apporte aucun élément d'explication, notamment bibliographique, sur l'origine de la faute commise et le phénomène physiologique qui aurait provoqué le syndrome dit de la queue de cheval, alors que les troubles en lien avec ce syndrome et dont souffre M. D... ne sont apparus qu'après la deuxième intervention réalisée le lendemain de l'intervention initiale ; or, au cours de cette seconde intervention, le chirurgien n'est pas intervenu sur le canal rachidien ; le syndrome de la queue de cheval ne saurait donc être imputé à la stratégie opératoire retenue mais constitue un accident médical non fautif, un aléa thérapeutique ; celui-ci résulte probablement de la blessure d'une artère radiculaire atypique vascularisant le cône terminal, lors de la seconde intervention de repositionnement d'une vis, blessure qui était imprévisible, invisible et exceptionnelle ; en outre, il ne résulte pas de l'instruction que la première intervention aurait accentué la lordose lombaire dans la mesure où les clichés radiologiques ne montrent pas d'aggravation malgré l'ostéosynthèse réalisée ; les signes cliniques présentés à la suite de la première intervention ne sont pas évocateurs du syndrome de la queue de cheval ;
- c'est également à tort que le tribunal a regardé comme fautive la circonstance que M. D... n'a pas pu bénéficier d'un examen d'imagerie par résonance magnétique (IRM) au décours des deux premières interventions chirurgicales qu'il a subies ;
- en outre, le tribunal aurait dû faire droit à sa demande d'expertise avant dire droit et ne pouvait regarder la faute comme engageant l'entière responsabilité de l'établissement, notamment au regard de l'état antérieur du patient, de sorte qu'il ne lui appartenait pas de réparer la totalité du préjudice subi ;
- au surplus, le tribunal a procédé à une évaluation excessive des préjudices mis à sa charge ; le taux de déficit fonctionnel permanent de 38 % qui a été retenu ne tient pas compte de l'état antérieur de M. D... ; le préjudice d'agrément n'est pas établi ; la Caisse des dépôts et consignations n'ayant pas justifié le calcul ni la revalorisation du montant annuel de base servant au calcul des arrérages de pension échus, c'est à tort que les premiers juges ont mis à la charge du CHU la somme demandée par la Caisse, sans répondre aux objections du centre hospitalier et de la SHAM ; l'établissement s'oppose également à la demande de la caisse primaire d'assurance maladie de la Vienne tendant au versement d'un capital ; de plus, la caisse ne saurait solliciter le remboursement de frais qu'elle aurait dû engager de toute façon ou de frais calculés sur la base de prévisions annuelles non vérifiées, s'agissant en particulier du nombre annuel de consultations chez le médecin généraliste ou des frais paramédicaux de surveillance spécifique urinaire et d'appareillage, ou encore des frais pharmaceutiques alors que certains médicaments ne bénéficient que d'un remboursement à taux réduit et que les décomptes comportent des erreurs en termes de posologies médicamenteuses ;
- enfin, l'ONIAM n'est pas fondé à demander l'infliction d'une pénalité à hauteur de 15 % du montant des préjudices indemnisés dès lors que la faute imputable à l'établissement n'est pas évidente et qu'il existe un doute tant sur l'existence de la faute que sur le montant de l'indemnisation susceptible d'être allouée ;
- la CNRACL ne justifie pas du calcul de la rente dont elle demande le remboursement, en modifiant au demeurant le montant présenté devant le tribunal.
Par un mémoire en défense, enregistré le 17 avril 2018, la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de la Vienne, représentée par Me F..., conclut à la réformation du jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 7 novembre 2017 et à ce que le CHU de Bordeaux et la SHAM soient condamnés solidairement à lui verser les sommes de :
- 90 406,75 euros au titre des frais qu'elle a engagés avant consolidation de l'état de santé de M. D... ;
- 113 714,40 euros au titre des frais futurs échus à la date du 31 décembre 2017 ;
- 299 087,12 euros au titre des frais futurs liés à l'accident médical subi par M. D..., cette somme étant due en capital à titre principal et, subsidiairement, à hauteur de 13 867,17 euros par an.
La caisse fait valoir que :
- l'attestation d'imputabilité détaille l'ensemble des frais liés à l'accident litigieux et engagés par la caisse ;
- elle prend acte de la non prise en compte par le tribunal des frais qui auraient dû être engagés au titre de l'intervention initiale ;
- le taux de rente indiqué, au titre des frais futurs à échoir à compter du 1er janvier 2018, était erroné en première instance et doit être porté de 13,975 euros à 21,568 euros.
Par un mémoire en défense et un mémoire complémentaire, enregistrés le 14 mai 2018 et le 14 mars 2019, la Caisse des dépôts et consignations (CDC), gestionnaire de la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales (CNRACL), représentée par Me A..., conclut :
1°) au rejet de la requête du CHU de Bordeaux et de la SHAM ;
2°) à ce que soit mis à la charge in solidum du CHU de Bordeaux et de la SHAM le paiement de la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
La CDC fait valoir que :
- la responsabilité du CHU de Bordeaux et de la SHAM a été à bon droit engagée par les premiers juges ;
- la pension anticipée à laquelle M. D... a droit s'établit à 56 133,42 euros au titre des arrérages échus et à 74 420,06 euros au titre des arrérages à échoir ; la créance tient compte de la revalorisation des arrérages et de l'actualisation au 1er mai 2016 du montant annuel de base de la pension concédée par rapport à 2011, attestée par le directeur général de la Caisse sur la base d'un prix de l'euro de rente de 8,618460 et d'une limite d'âge au 9 septembre 2026; cette pension ayant été concédée définitivement, elle est en droit d'obtenir le versement d'une somme unique, en application du II de l'article 3 de l'ordonnance n° 59-76 du 7 janvier 1959 modifiée.
Par un mémoire en défense et un mémoire complémentaire, enregistrés le 18 mai 2018 et le 21 mars 2019, l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM), représenté par Me B..., conclut :
1°) au rejet de la requête du CHU de Bordeaux et de la SHAM ;
2°) à la réformation du jugement du tribunal administratif de Bordeaux en ce qu'il a limité le montant de la pénalité infligée au CHU de Bordeaux et à la SHAM à hauteur de 5 % des condamnations prononcées à leur encontre, et à ce que le CHU de Bordeaux et la SHAM soient condamnés à lui verser une pénalité à hauteur du montant maximal de 15 % des montants mis à leur charge, en application de l'article L. 1142-15 du code de la santé publique, soit la somme de 26 752,42 euros ;
3°) à ce qu'il soit mis à la charge solidaire du CHU de Bordeaux et de la SHAM le paiement de la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les entiers dépens.
L'Office fait valoir que :
- c'est à bon droit que le tribunal a retenu d'une part que la méthode opératoire employée le 26 mars 2007 n'était pas adaptée au tableau clinique de M. D..., d'autre part le caractère anormal de l'absence d'examen d'IRM au décours des deux premières interventions ;
- le tribunal a expliqué sa position ;
- l'absence de réalisation, lors de la première intervention, d'une discectomie herniaire, alors que le rachis lombaire a été " lordosé " du fait de l'ostéosynthèse, a rétréci encore plus le canal lombaire et entraîné une aggravation de la compression sur les racines et le fourreau dural ; la technique chirurgicale n'était donc pas adéquate et il aurait été nécessaire de retirer la volumineuse hernie diagnostiquée en préopératoire ; le Pr Litré, neurochirurgien expert consulté par l'ONIAM, conclut dans le même sens que les experts ; la stratégie chirurgicale adoptée n'est pas conforme aux règles de l'art et s'avère être directement à l'origine du syndrome de la queue de cheval ; la note technique réalisée par le Pr Rousseau pour le compte du CHU ne repose que sur des allégations et affirmations inexactes ; M. D... était porteur d'une hernie et a présenté des signes neurologiques évocateurs du syndrome de la queue de cheval dès la première intervention ; l'apparition de ce syndrome dans les suites du repositionnement d'une vis lors de l'intervention du 27 mars 2007 n'est nullement étayée ;
- la demande de nouvelle expertise n'est pas fondée, celle ordonnée par la CRCI ayant été effectuée au contradictoire du CHU ;
- les montants indemnitaires alloués en première instance devront être confirmés ; les frais d'assistance lors de l'expertise devant la CRCI devront en outre être indemnisés à hauteur de 700 euros ;
- la fixation à 15 % du montant de la pénalité prévue à l'article L. 1142-15 du code de la santé publique est également justifiée dès lors que l'assureur du CHU a refusé de faire une offre d'indemnisation à deux reprises.
Par une ordonnance du 25 mars 2019, la clôture d'instruction a été fixée au 25 avril 2019.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code civil ;
- le code de la santé publique ;
- le code de la sécurité sociale ;
- l'ordonnance n° 59-76 du 7 janvier 1959 modifiée ;
- l'arrêté du 27 décembre 2019 relatif aux montants de l'indemnité forfaitaire de gestion prévue aux articles L. 376-1 et L. 454-1 du code de la sécurité sociale ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. C... ;
- les conclusions de Mme Chauvin, rapporteur public ;
- et les observations de Me G... représentant l'ONIAM, de Me E... représentant la Caisse des dépôts et consignations, et de Me F... pour la CPAM de la Vienne.
Considérant ce qui suit :
1. M. D..., agent des services hospitaliers dans un établissement public d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD), qui présentait une hernie discale au niveau des lombaires L2-L3 associée à un canal étroit a subi, le 26 mars 2007, au sein du centre hospitalier universitaire (CHU) de Bordeaux une première intervention chirurgicale consistant en une ostéosynthèse postérieure de la colonne vertébrale grâce à des vis pédiculaires au niveau de L2-L4, ainsi qu'une greffe cortico-spongieuse iliaque. Dans les suites de l'intervention, M. D... a notamment ressenti des douleurs intenses dans le quadriceps gauche. Les radiographies postopératoires de la face ont mis en évidence une malposition de la vis inférieure gauche. Une nouvelle intervention chirurgicale a alors été réalisée en urgence, le 27 mars 2007, afin de procéder au repositionnement de la vis. A l'issue de cette seconde intervention, l'intéressé a présenté des signes évocateurs du syndrome dit de la queue de cheval. L'intervention de laminectomie réalisée dès le lendemain, 28 mars 2007, n'a pas apporté d'amélioration notable de l'état du patient en dépit d'une libération partielle du canal rachidien. Une quatrième opération a été nécessaire le lendemain, 29 mars 2007, pour évacuer un hématome sous-cutané, ce qui a conduit le chirurgien à élargir la lamino-arthrectomie en L2-L3. L'intéressé a ensuite bénéficié d'une admission dans un service de rééducation du 23 avril 2007 au 7 septembre 2007.
2. Le 27 février 2008, M. D... a saisi la commission régionale de conciliation et d'indemnisation (CRCI) d'Aquitaine d'une demande d'indemnisation dirigée contre le CHU de Bordeaux. Au regard des conclusions des experts qu'elle a désignés, qui ont déposé leur rapport le 5 novembre 2008 et ont notamment conclu que l'état de santé de l'intéressé n'était pas consolidé, la CRCI a, le 18 mars 2009, estimé que le dommage subi par M. D... trouvait son origine dans l'existence d'un manquement aux règles de l'art en matière de méthode opératoire et a invité le CHU, en application du I de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique, à formuler une offre d'indemnisation provisionnelle à M. D... en réparation des préjudices énumérés dans l'avis. La SHAM, assureur de l'établissement, ayant refusé toute indemnisation, M. D... a, par lettre du 15 novembre 2009, sollicité la substitution de l'ONIAM à l'assureur du centre hospitalier. L'ONIAM y a fait droit et a adressé à M. D... une offre provisionnelle d'un montant de 7 550 euros, acceptée le 2 avril 2010. Compte tenu des conclusions des experts qu'elle a désignés une seconde fois aux fins d'examiner les préjudices indemnisables de la victime, la CRCI a émis, le 16 juin 2010, un avis favorable à l'indemnisation de M. D... par le CHU de Bordeaux et a invité l'établissement de santé à formuler une offre à l'intéressé. Par lettre du 19 novembre 2010, la SHAM a réitéré son refus d'indemniser M. D.... L'ONIAM s'est à nouveau substitué à l'assureur du CHU et a adressé un protocole d'indemnisation transactionnelle définitive pour un montant total de 170 799,44 euros, accepté par M. D... le 24 février 2013. L'ONIAM a ensuite adressé, le 13 janvier 2016, une demande de régularisation amiable au CHU de Bordeaux, qui l'a implicitement rejetée. L'ONIAM, se prévalant de sa qualité de subrogé dans les droits de la victime à concurrence des sommes versées, a alors sollicité du tribunal administratif de Bordeaux la condamnation solidaire du CHU de Bordeaux et de la SHAM à lui rembourser la somme globale de 178 349,44 euros, ainsi que la somme de 26 752,42 euros à titre de pénalité à hauteur de 15 % du montant des indemnités mises à sa charge, en application de l'article L. 1142-15 du code de la santé publique, et la somme de 1 750 euros correspondant aux frais d'expertises exposés.
3. Dans la présente instance, le CHU de Bordeaux et la SHAM relèvent appel du jugement du 7 novembre 2017 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux les a solidairement condamnés à verser, d'une part, à l'ONIAM la somme de 178 349,44 euros au titre de la subrogation de cet établissement public dans les droits de M. D..., les intérêts au taux légal sur cette somme à compter du 14 janvier 2016 et leur capitalisation, ainsi que la somme de 8 917, 47 euros à titre de pénalité, représentant 5% des sommes allouées, et la somme de 1 750 euros au titre des frais d'expertise, d'autre part, à la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de la Vienne une somme en capital de 90 406,75 euros en remboursement de ses débours ainsi que le paiement de ses débours futurs, sur présentation de justificatifs, dans la limite de 13 388,63 euros par an et l'indemnité forfaitaire de gestion à hauteur de 1 055 euros, de troisième part, à la Caisse des dépôts et consignations pour le compte de la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales (CNRACL) la somme de 130 553,48 euros en remboursement des prestations versées à M. D....
Sur la régularité du jugement du 7 novembre 2017 :
4. Dans leur requête introductive d'instance, le CHU de Bordeaux et la SHAM ont semblé soutenir que le jugement est insuffisamment motivé au regard des conclusions dont le tribunal était saisi. Toutefois, la seule circonstance que les premiers juges n'ont pas fait état dans les motifs de leur jugement de la note d'analyse critique du rapport d'expertise que la SHAM avait fait établir, le 23 janvier 2017, par le professeur Rousseaux, médecin consultant en neurochirurgie, n'est pas de nature à entacher d'insuffisance de motivation le jugement contesté. Le tribunal, qui a analysé l'ensemble des moyens de défense du CHU et de son assureur et qui n'était pas tenu de répondre à l'ensemble des arguments développés à l'appui, a pu ainsi estimer à bon droit, dans le cadre de son office de juge du plein contentieux, que ce document, qui a été soumis au débat contradictoire des parties, n'apportait pas d'éléments utiles à la solution du litige s'agissant notamment de la détermination de l'imputabilité du dommage dont M. D... a été victime. A cet égard, le jugement expose clairement les raisons pour lesquelles les premiers juges ont retenu l'existence d'une faute de nature à engager la responsabilité du centre hospitalier.
Sur la détermination de la personne publique chargée de l'indemnisation des préjudices :
5. En vertu des dispositions combinées des articles L. 1142-1, L. 1142-14 et L. 1142-15 du code de la santé publique, il incombe au juge, saisi d'une action de l'ONIAM subrogé, à l'issue d'une transaction, dans les droits d'une victime à concurrence des sommes qu'il lui a versées, de déterminer si la responsabilité du professionnel ou de l'établissement de santé est engagée et, dans l'affirmative, d'évaluer les préjudices subis afin de fixer le montant des indemnités dues à l'Office. Pour procéder à cette évaluation, le juge n'est pas lié par le contenu de la transaction intervenue entre l'ONIAM et la victime.
6. Il résulte de l'instruction, notamment de l'expertise contradictoire diligentée par la CRCI, dont le rapport a été déposé le 5 novembre 2008 et qui avait été confiée à deux praticiens hospitaliers respectivement spécialisés en neurochirurgie et en médecine légale que, lors de l'intervention initiale du 26 mars 2007, les tiges d'ostéosynthèse ont été cintrées en lordose et qu'une compression du montage s'est produite. Selon les experts, l'ostéosynthèse alors pratiquée en vue de traiter la hernie discale de M. D... a eu pour effet de " lordoser le rachis lombaire ", autrement dit d'accentuer la courbure de la colonne vertébrale au niveau des lombaires L2-L4 et, par ailleurs, de rétrécir d'autant plus un canal lombaire déjà étroit, sans pour autant que la hernie ne soit opérée. Tant les experts désignés par la CRCI que le Pr Litré, neurochirurgien au CHU de Reims sollicité par l'ONIAM dans le cadre d'une analyse critique du rapport d'expertise, soulignent que la méthode opératoire retenue consistant en un recalibrage en L2-L3 et L3-L4 et en une arthrodèse L2-L4 n'était pas adaptée au tableau clinique de canal lombaire étroit associé à une hernie discale que présentait alors M. D.... Ils ajoutent que la technique opératoire retenue, sans herniectomie préalable et sans franche libération durale et alors que le patient était en situation d'hyperlordose, a eu pour effet d'entraîner inévitablement une aggravation de la compression sur les racines et le fourreau dural. Les experts en concluent que le choix de la méthode opératoire est à l'origine de l'apparition du syndrome de la queue de cheval, que cet état ne correspond pas à l'évolution normale et prévisible de la pathologie initiale et que le mode opératoire choisi constitue un manquement aux règles de l'art, alors qu'il eût fallu réaliser, au préalable, une discectomie herniaire. Le Pr Lapierre et le Dr Fontaine qui avaient été consultés par l'assureur de l'établissement dès le mois de décembre 2007, dans le cadre d'une expertise non contradictoire, avaient eux-mêmes souligné qu'" il aurait pu cependant être tenté une discectomie dans un premier temps qui aurait pu soulager le malade ".
7. Si le CHU de Bordeaux et la SHAM soutiennent que le syndrome de la queue de cheval n'est pas apparu dans les suites immédiates de la première intervention, mais uniquement à l'issue de la seconde intervention réalisée le lendemain et consistant en la reprise de la vis mal positionnée, il résulte toutefois de l'instruction, et notamment de l'analyse précise du dossier médical de M. D... à laquelle se sont livrés les experts, que celui-ci a présenté, dès après la première intervention, des signes neurologiques et physiologiques évocateurs de ce syndrome : difficultés à uriner la nuit nécessitant un sondage vésical et une tentative de miction en position assise, voire debout, impossible, et difficultés de mobilisation des membres inférieurs. En outre, il ne résulte pas de l'instruction et n'est évoqué par aucun des médecins spécialistes et experts s'étant prononcés après une analyse de l'entier dossier médical du patient, que la deuxième intervention du 27 mars 2007 puisse être directement à l'origine de l'apparition du syndrome, la seule circonstance que le diagnostic de ce syndrome n'a été posé que le 27 mars, au regard de l'aggravation des signes neurologiques qu'avait présentés M. D... dès l'issue de la première intervention, n'étant pas de nature à remettre en cause l'origine du dommage. Le Pr Rousseaux, consulté par la SHAM, se borne, à cet égard, à évoquer l'hypothèse d'un aléa résultant d'une blessure d'une artère passant par la racine L4 gauche, dont le positionnement atypique était indécelable, tout en soulignant d'ailleurs que la probabilité de survenance de ce type d'accident, consistant en une lésion radiculo-médullaire à la suite du repositionnement d'une vis d'ostéosynthèse lombaire, est " totalement exceptionnelle " (0,00075 %). En outre, le Pr Litré indique clairement, à la lecture du dossier, que le patient, qui a fait l'objet de quatre interventions successives, a vu son état de santé " aggravé dès la première intervention ".
8. Dans ces conditions, c'est à bon droit que les premiers juges ont, à la suite de la CRCI, estimé que l'acte chirurgical réalisé le 26 mars 2007 n'a pas été conforme aux règles de l'art et révèle l'existence d'un manquement fautif en matière de choix de méthode opératoire, directement à l'origine du dommage subi par M. D... et sans qu'il puisse être retenu, en l'absence de tout élément en ce sens au dossier, l'existence d'un aléa thérapeutique ou de circonstances exonératoires. Il suit de là que le CHU de Bordeaux et la SHAM, qui ont eu la possibilité de discuter les éléments du débat médical au cours de l'expertise ordonnée par la CRCI, ne sont fondés ni à demander une nouvelle expertise, ni à contester que la faute ainsi commise lors de la prise en charge initiale du patient est de nature à engager la responsabilité de l'établissement. Dès lors que les experts ont expressément écarté tout antécédent neurologique de nature à influer sur les séquelles que présente M. D..., la faute commise implique l'indemnisation de l'entier préjudice en lien avec cette faute. Ainsi que l'ont justement rappelé les premiers juges, l'ONIAM, dont il est établi qu'il a versé à M. D... la somme de 178 349,44 euros en se substituant à la SHAM dans l'indemnisation du préjudice de la victime, est dûment subrogé dans les droits de cette dernière en application des articles L. 1142-14 et L. 1142-15 du code de la santé publique. C'est par suite à bon droit que les premiers juges ont condamné le CHU de Bordeaux et la SHAM à l'indemniser dans la limite des sommes versées.
Sur les droits de l'ONIAM :
9. Il résulte de l'instruction et notamment du rapport d'expertise complémentaire, déposé le 17 février 2010 devant la CRCI, que la date de consolidation de l'état de santé de M. D... peut être fixée au 30 juin 2009.
S'agissant des frais de conseil au cours de la phase amiable devant la CRCI :
10. Contrairement à ce qu'a pu juger le tribunal administratif et ainsi que le sollicite l'ONIAM, les frais d'avocats exposés lors de la procédure amiable de règlement d'un litige peuvent donner lieu à indemnisation s'ils ont été utiles. En l'espèce, il n'est pas contesté que ces frais ont été utiles à la défense des intérêts de M. D... devant la CRCI, alors que le CHU de Bordeaux et la SHAM contestaient l'imputabilité du dommage à l'établissement. En outre, contrairement à ce qu'indiquent les défendeurs, l'ONIAM a produit à l'instance la facture correspondant aux frais de conseil engagés par M. D... lors de cette phase précontentieuse, pour un montant TTC de 837,20 euros. Il suit de là que l'ONIAM est fondé à solliciter le remboursement de la somme de 700 euros qu'il a versée à M. D....
S'agissant du déficit fonctionnel permanent :
11. Il résulte de l'instruction que M. D... demeure atteint, depuis la consolidation de son état de santé, acquise le 30 juin 2009 alors qu'il était âgé de 44 ans, d'un déficit fonctionnel permanent de 38 %, en lien direct et exclusif avec la faute commise, du fait notamment d'une paraparésie avec déficit neurologique distal des membres inférieurs et de troubles urinaires. Dans ces conditions, compte tenu de l'âge de l'intéressé et du taux d'incapacité retenu, il y a lieu de fixer le montant de ce préjudice à la somme de 70 000 euros.
S'agissant du préjudice d'agrément :
12. Si M. D... a indiqué avoir dû renoncer à certaines activités de loisir du fait de son handicap, et notamment à la pratique de la moto, il n'a apporté aucun élément à l'appui de cette simple allégation de sorte que, comme le soulignent les appelants, ce préjudice ne peut être regardé comme établi.
S'agissant des autres chefs de préjudice :
13. Le CHU de Bordeaux et la SHAM ne contestent pas, par ailleurs, l'évaluation des préjudices faite par le tribunal au titre de la perte de gains professionnels actuels et futurs, du déficit fonctionnel temporaire, des souffrances endurées et du préjudice esthétique, de sorte qu'il y a lieu de retenir les montants pertinemment fixés à ces différents titres.
14. Il résulte de tout ce qui précède que les préjudices de M. D... s'élèvent à un montant supérieur à la somme de 178 349,44 euros qui lui a été allouée par l'ONIAM. Par suite, en application de l'article L. 1142-15 précité du code de la santé publique, les appelants ne sont pas fondés à se plaindre de ce que les premiers juges ont accordé à l'Office le remboursement de l'indemnité de 178 349,44 euros qu'il a versée à M. D....
En ce qui concerne les frais des expertises demandées par la CRCI d'Aquitaine :
15. Aux termes de l'article L. 1142-12 du code de la santé publique : " La commission régionale désigne aux fins d'expertise un collège d'experts choisis sur la liste nationale des experts en accidents médicaux, en s'assurant que ces experts remplissent toutes les conditions propres à garantir leur indépendance vis-à-vis des parties en présence. Elle peut toutefois, lorsqu'elle l'estime suffisant, désigner un seul expert choisi sur la même liste. (...) L'Office national d'indemnisation prend en charge le coût des missions d'expertise, sous réserve du remboursement prévu aux articles L. 1142-14 et L. 1142-15 ".
16. Il résulte de ces dispositions que, lorsque la CRCI désigne dans le cadre de la procédure amiable un expert, l'ONIAM prend en charge le coût des missions d'expertise, sous réserve du remboursement prévu aux articles L. 1142-14 et L. 1142-15. Ce dernier article prévoit que l'Office subrogé dans les droits de la victime contre la personne responsable du dommage ou son assureur, " peut obtenir remboursement des frais d'expertise ". En l'espèce, l'ONIAM, qui a réglé les honoraires des experts à hauteur de la somme totale de 1 750 euros était, dès lors, bien fondé à en obtenir le remboursement par le CHU et son assureur, ainsi que l'a relevé le tribunal.
En ce qui concerne les intérêts et la capitalisation des intérêts :
17. Comme l'a indiqué le tribunal, l'ONIAM a droit aux intérêts au taux légal sur la somme de 178 349,44 euros à compter du 14 janvier 2016, date de réception de sa demande d'indemnisation préalable par le CHU de Bordeaux, ainsi que la capitalisation de ces intérêts, à compter du 14 janvier 2017, date à laquelle était due, pour la première fois, une année d'intérêts, ainsi qu'à chaque échéance annuelle ultérieure à compter de cette date.
En ce qui concerne la pénalité prévue par l'article L. 1142-15 du code de la santé publique :
18. Aux termes de l'article L. 1142-14 du code de la santé publique : " Lorsque la commission régionale de conciliation et d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales estime qu'un dommage relevant du premier alinéa de l'article L. 1142-8 engage la responsabilité d'un professionnel de santé, d'un établissement de santé (...), l'assureur qui garantit la responsabilité civile ou administrative de la personne considérée comme responsable par la commission adresse à la victime ou à ses ayants droit, dans un délai de quatre mois suivant la réception de l'avis, une offre d'indemnisation visant à la réparation intégrale des préjudices subis dans la limite des plafonds de garantie des contrats d'assurance. (...) ". Aux termes de l'article L. 1142-15 du même code : " En cas de silence ou de refus explicite de la part de l'assureur de faire une offre (...), l'office institué à l'article L. 1142-22 est substitué à l'assureur. (...) / L'acceptation de l'offre vaut transaction au sens de l'article 2044 du code civil. La transaction est portée à la connaissance du responsable et, le cas échéant, de son assureur (...). / L'office est subrogé, à concurrence des sommes versées, dans les droits de la victime contre la personne responsable du dommage ou, le cas échéant, son assureur (...). En cas de silence ou de refus explicite de la part de l'assureur de faire une offre, (...), le juge, saisi dans le cadre de la subrogation, condamne, le cas échéant, l'assureur ou le responsable à verser à l'office une somme au plus égale à 15% de l'indemnité qu'il alloue. / Lorsque l'office transige avec la victime, ou ses ayants droit, en application du présent article, cette transaction est opposable à l'assureur (...) ou au responsable des dommages sauf le droit pour ceux-ci de contester devant le juge le principe de la responsabilité ou le montant des sommes réclamées. Quelle que soit la décision du juge, le montant des indemnités allouées à la victime lui reste acquis ".
19. Il résulte de l'instruction que la SHAM, assureur du CHU de Bordeaux, a refusé, à deux reprises, d'indemniser M. D... en dépit des avis de la CRCI d'Aquitaine et des rapports d'expertise établis à son contradictoire. L'ONIAM s'est ainsi trouvé dans l'obligation de se substituer à lui. En condamnant le CHU de Bordeaux et la SHAM à verser à l'ONIAM une pénalité de 8 917,47 euros, sur la base d'un taux de 5 % de l'indemnité allouée, le tribunal n'a pas fait une inexacte appréciation des circonstances de l'espèce. Par suite, ni le CHU ni l'ONIAM ne sont fondés à demander la réformation du jugement sur ce point.
Sur les droits de la caisse primaire d'assurance maladie de la Vienne :
En ce qui concerne la créance de la caisse :
20. D'une part, la CPAM de la Vienne fait valoir que le montant de ses débours s'est élevé à 126 100,75 euros au titre des frais hospitaliers, médicaux, pharmaceutiques, d'appareillage et de transport de M. D.... Elle a produit, à l'appui de sa demande, un relevé des débours exposés et une attestation d'imputabilité du médecin-conseil du service médical de la CPAM. Il convient toutefois, ainsi qu'y ont justement procédé les premiers juges, de déduire les frais hospitaliers correspondant à l'intervention chirurgicale initiale, laquelle aurait nécessité une hospitalisation d'une durée de dix jours, indépendamment de la faute commise, comme l'avaient souligné les experts devant la CRCI. En outre, si le CHU de Bordeaux conteste certains montants sollicités au titre des frais pharmaceutiques au motif que certains médicaments ne bénéficieraient pas d'une prise en charge à 100 %, il n'apporte aucun commencement de preuve à l'appui de ces allégations. Dans ces conditions, la CPAM de la Vienne est seulement fondée à obtenir le remboursement par le CHU et son assureur de la somme de 90 406,75 euros.
21. D'autre part, s'il résulte de l'instruction et notamment de la note de frais futurs actualisée le 5 avril 2018 produite en appel, que la CPAM de la Vienne sera amenée à exposer dans le futur, de manière certaine, en raison de l'état de santé de M. D... qui n'est pas susceptible d'amélioration, des frais médicaux, pharmaceutiques et d'appareillage, elle n'apporte toutefois pas de justifications des montants actualisés qu'elle sollicite, au titre des frais futurs, au-delà de ce qui lui a été alloué par les premiers juges, à concurrence d'un montant annuel de 13 388,63 euros. Eu égard aux dispositions de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale qui limitent le recours subrogatoire des caisses de sécurité sociale à l'encontre du responsable d'un accident corporel aux préjudices qu'elles ont pris en charge, le remboursement des prestations qu'une caisse sera amenée à verser à l'avenir, de manière certaine, prend normalement la forme du versement d'une rente et ne peut être mis à la charge du responsable sous la forme du versement immédiat d'un capital représentatif qu'avec son accord. Le CHU de Bordeaux n'ayant, en première instance comme en appel, pas donné son accord au versement d'un capital pour ces frais futurs, la somme demandée par la caisse ne peut donc pas lui être accordée sous cette forme. Dès lors, la CPAM de la Vienne a droit au remboursement de ces dépenses de santé futures au fur et à mesure de ses débours dans la limite du montant précité de 13 388,63 euros par an. A cet égard, si le CHU et la SHAM persistent à contester certains montants prévisionnels de prestations annuelles évalués par la caisse, il résulte de ce qui vient d'être dit que le montant des prestations futures sera remboursé à la caisse au regard de ses débours effectifs, dont elle devra justifier de la réalité et du quantum.
22. Il résulte de ce qui précède que c'est à bon droit que le tribunal a fixé la somme totale que le CHU de Bordeaux et son assureur doivent verser à la CPAM de la Vienne à 90 406,75 euros au titre des créances échues. La caisse a également droit, sur présentation de justificatifs, au remboursement des dépenses futures de santé, dans la limite de la somme à 13 388,63 euros par an.
En ce qui concerne l'indemnité prévue par les dispositions de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale :
23. Dès lors que le présent arrêt n'a pas pour effet d'augmenter les droits de la caisse au titre de ses débours, elle n'est pas fondée à solliciter le versement de l'indemnité forfaitaire de gestion actualisée au regard du montant qu'elle a déjà perçu en première instance.
Sur le remboursement de la pension versée par la caisse des dépôts et consignations, gestionnaire de la caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales :
24. Il résulte de l'instruction que M. D... perçoit de la CNRACL une pension anticipée d'un montant total de 130 553,48 euros correspondant aux arrérages échus et à échoir, jusqu'à la date anniversaire de ses 62 ans. Si le CHU de Bordeaux et la SHAM contestent l'actualisation à laquelle le directeur général de la CDC a procédé le 26 avril 2016, ils n'apportent aucun élément à l'appui de cette simple allégation et ne contestent pas sérieusement le fait que le prix de l'euro de rente et, par suite, le montant annuel de base servant au calcul des arrérages échus et à échoir, doit être actualisé au regard de la revalorisation intervenue entre 2011, date de la première évaluation effectuée, et le 26 avril 2016, date à laquelle la CDC a fait état de sa créance définitive, cette valeur actualisée à hauteur de + 4,15 % étant fondée sur les tables de mortalité TH00-02 réglementaires applicables au titre des rentes viagères versées aux individus de sexe masculin par les institutions de prévoyance, les mutuelles et les organismes d'assurance, ainsi que cela figure dans l'attestation produite par la CDC, et sur l'actualisation du montant annuel de base des pensions d'invalidité servies par la CNRACL. Par suite, c'est à bon droit que les premiers juges, qui n'étaient pas tenus de détailler les modalités du calcul, ont accordé à la CDC le remboursement par le CHU et la SHAM in solidum de cette pension anticipée versée à M. D... depuis le 25 septembre 2009, à hauteur de la somme totale de 130 553,48 euros.
Sur les frais exposés par les parties à l'occasion du litige :
25. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du CHU de Bordeaux et de la SHAM le versement, respectivement à l'ONIAM et à la Caisse des dépôts et consignations, d'une somme de 1 500 euros chacun au titre des frais qu'ils ont exposés et non compris dans les dépens.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête du CHU de Bordeaux et de la SHAM est rejetée.
Article 2 : Le CHU de Bordeaux et la SHAM verseront, d'une part à l'ONIAM, d'autre part à la Caisse des dépôts et consignations, la somme de 1 500 euros chacun en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au centre hospitalier universitaire de Bordeaux, à la Société hospitalière d'assurances mutuelles, à l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales, à la caisse primaire d'assurance maladie de la Vienne, à l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes " Théodore Arnault " de Mirebeau et à la Caisse des dépôts et consignations.
Délibéré après l'audience du 28 janvier 2020 à laquelle siégeaient :
Mme Catherine Girault, président,
Mme Anne Meyer, président-assesseur,
M. Thierry C..., premier conseiller.
Lu en audience publique, le 25 février 2020.
Le rapporteur,
Thierry C...Le président,
Catherine Girault
Le greffier,
Vanessa Beuzelin
La République mande et ordonne au ministre des solidarités et de la santé en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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No 18BX00078