Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société anonyme (SA) Merim services a demandé au tribunal administratif de Limoges, à titre principal, d'annuler la décision du 7 juillet 2015 et de faire droit à sa demande de désignation d'un expert et, à titre subsidiaire, de prononcer le dégrèvement de l'imposition correspondant au solde dû d'impôt sur les sociétés au titre de l'année 2012 et des pénalités y afférentes, ainsi que le remboursement du solde de crédit d'impôt recherche auquel elle peut bénéficier au titre de cette même année, pour un montant de 154 638 euros.
Par un jugement n° 1501478 du 23 novembre 2017, le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 16 janvier 2018, la SA Merim services, représentée par Me C..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Limoges du 23 novembre 2017 ;
2°) de prononcer la décharge de la cotisation d'impôt sur les sociétés à laquelle elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2012 et le remboursement du solde du crédit impôt recherche sollicité au titre de ce même exercice pour la part excédant le montant de cette cotisation d'impôt sur les sociétés.
Elle soutient que :
- ses projets de recherche sont éligibles au crédit d'impôt recherche sur le fondement du c de l'article 49 septies F de l'annexe III au code général des impôts ;
- le projet " Daisy " a donné lieu à la réalisation d'une étude de faisabilité avec des essais sur un dessiccateur qui ont permis de comprendre les principales problématiques de ce sujet, d'un plan d'essai sur divers aliments et, à partir de ces travaux, à la réalisation de calculs, plans et conception pour mettre au point un prototype en 2013 ;
- le projet HAU a donné lieu au dépôt d'un brevet ;
- s'agissant du projet Interactive 2.0, et plus particulièrement s'agissant du sous-projet K-Bin, son travail a permis la dissipation d'incertitudes scientifiques et techniques et constitue une nouveauté technique indéniable, et a donné lieu au dépôt d'un brevet ;
- s'agissant du projet Blender, les travaux de recherche et développement ont consisté à réaliser et tester divers prototypes.
Par un mémoire en défense, enregistré le 20 juillet 2018, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête et fait valoir que les moyens ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 30 août 2019, la clôture d'instruction a été fixée au 30 septembre 2019 à 12 heures.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme E...,
- et les conclusions de M. A... B....
Considérant ce qui suit :
1. La société anonyme Merim services, qui a pour activité la conception, la réalisation et l'installation d'équipements de communication et d'équipements de cuisine, a souscrit la déclaration 2069-A de crédit d'impôt en faveur de la recherche au titre de dépenses engagées en 2012, faisant apparaître un montant de crédit d'impôt recherche de 209 259 euros. Elle en a sollicité la restitution à hauteur de 156 238 euros, après imputation, à concurrence de 53 021 euros, sur la cotisation d'impôt sur les sociétés à laquelle elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2012. Le 7 juillet 2015, l'administration a pris une décision d'admission partielle de cette réclamation, en accordant le crédit d'impôt demandé à concurrence d'une somme de 11 125 euros, correspondant au crédit calculé sur les seules dépenses de prise de brevet.
2. La société Mérim services relève appel du jugement du 23 novembre 2017 par lequel le tribunal administratif de Limoges a rejeté sa demande tendant à la décharge de la cotisation d'impôt sur les sociétés à laquelle elle a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2012 et au remboursement du solde du crédit impôt recherche sollicité au titre de ce même exercice pour la part excédant le montant de cette cotisation d'impôt sur les sociétés.
Sur l'application de la loi fiscale :
3. Aux termes du I de l'article 244 quater B du code général des impôts, dans sa rédaction applicable à l'année en cause, " Les entreprises industrielles et commerciales ou agricoles imposées d'après leur bénéfice réel (...) peuvent bénéficier d'un crédit d'impôt au titre des dépenses de recherche qu'elles exposent au cours de l'année (...) ".
4. Aux termes de l'article 49 septies F de l'annexe III au même code : " Pour l'application des dispositions de l'article 244 quater B du code général des impôts, sont considérées comme opérations de recherche scientifique ou technique : / (...) / c. Les activités ayant le caractère d'opérations de développement expérimental effectuées, au moyen de prototypes ou d'installations pilotes, dans le but de réunir toutes les informations nécessaires pour fournir les éléments techniques des décisions, en vue de la production de nouveaux matériaux, dispositifs, produits, procédés, systèmes, services ou en vue de leur amélioration substantielle. Par amélioration substantielle, on entend les modifications qui ne découlent pas d'une simple utilisation de l'état des techniques existantes et qui présentent un caractère de nouveauté ".
5. Il appartient au juge de l'impôt de constater, au vu de l'instruction dont le litige qui lui est soumis fait l'objet, qu'une entreprise remplit ou non les conditions lui permettant de se prévaloir de l'avantage fiscal institué par l'article 244 quater B du code général des impôts.
6. Il résulte de l'instruction que la SA Merim services a sollicité le bénéfice d'un crédit d'impôt au titre des dépenses de recherche engagées au cours de l'exercice 2012 pour quatre projets de recherche et développement, dits " Daisy ", " HAU ", " interactive 2.0 " et " Blender ". Le 6 avril 2014, l'expert de la délégation régionale à la recherche et à la technologie de la région Centre a rendu un avis défavorable s'agissant de l'éligibilité de ces projets au crédit d'impôt.
7. En premier lieu, il résulte de l'instruction, et notamment de l'avis de l'expert de la délégation régionale à la recherche et à la technologie de la région Centre, que le projet " Daisy " avait pour objet la réalisation d'une machine de recyclage de déchets organiques issus de la restauration, sous forme de bio-déchets déshydratés compostables. L'avis de l'expert mentionne que " L'obtention de l'homologation de bio-déchets comme matière fertilisante suppose l'élimination des micro-organismes pathogènes contenus dans ces déchets. Les techniques mises en place aujourd'hui ne répondent pas à ce critère qui constitue un verrou technique à lever ". Toutefois, l'expert relève que si la société a procédé à une étude des différents procédés existants, et constaté l'existence, notamment, d'une machine commercialisée en Corée du Sud et d'un certain nombre de brevets déposés dans le monde, elle n'a effectué aucun autre travail et aucune réalisation de recherche et développement. Si la société soutient qu'elle a réalisé une étude de faisabilité avec des essais sur un dessiccateur qui ont permis de comprendre les principales problématiques de ce sujet, a conduit un plan d'essai sur divers aliments et, à partir de ces travaux, a effectué les calculs, plans et conception pour réaliser un prototype en 2013, aucun des éléments qu'elle produit ne vient corroborer ces affirmations.
8. En deuxième lieu, s'agissant du projet " HAU ", portant sur l'étude du comportement des huiles alimentaires usagées et le développement de systèmes de collecte favorisant leur valorisation, l'avis de l'expert relève que, si des études ont été menées autour de systèmes de mesure et de transbordement, " l'approche scientifique et technique est complètement absente du dossier, qui mentionne cependant que, in fine, les dispositifs obtenus s'avèrent d'une trop importante complexité pour être satisfaisants. ". Si la société requérante soutient que ces travaux ont donné lieu au dépôt d'un brevet, il résulte toutefois de l'instruction, et notamment du " dossier d'éligibilité des dépenses de recherches réalisées en 2012 " qu'elle produit, que ce brevet a été déposé en 2011. Si elle affirme que les travaux se sont poursuivis en 2012 " sur les aspects suivants : - La mesure de température en continu ; - Les procédés d'auto-nettoyage, qui est une problématique critique ; - Les mesures de niveau ; - La sécurité anti-débordement ", elle n'apporte aucun élément au soutien de ces allégations.
9. En troisième lieu, le projet " Interactive 2.0 " a pour objet le développement et la mise au point d'interfaces numériques multimodales et interactives, et comporte quatre sous-projets : le sous-projet HPM (Hôpitaux Privés de Metz), qui répond à un appel d'offres et dont l'objectif est de concevoir un pilotage à distance de la gestion des salles et d'un système d'affichage correspondant ; le sous-projet K-Bin, mené dans le cadre d'un projet de développement d'une nouvelle génération de cabines d'essayage dans les magasins de prêt-à-porter, la société requérante ayant assuré le développement matériel et logiciel des solutions informatiques ; le sous-projet Take et watch, portant sur le développement pour des points de vente destinés au grand public d'une interface de présentation de produits "high-tech" configurable facilement ; enfin, le sous-projet Pixity-led, en collaboration avec la société Pixity, consistant dans le développement d'une technologie de totems à écrans LED et dont le système de gestion de l'affichage est directement connecté à l'annonceur. Dans son avis, l'expert de la délégation régionale à la recherche et à la technologie de la région Centre a relevé que l'entreprise s'était largement appuyée sur son savoir-faire et qu'elle n'établissait pas avoir produit de nouveaux procédés ou apporté aux dispositifs existants des améliorations substantielles. Si la société soutient que, s'agissant du sous-projet K-Bin, son travail a permis la dissipation d'incertitudes scientifiques et techniques, constitue une nouveauté technique indéniable et a donné lieu au dépôt d'un brevet, elle n'apporte aucun élément au soutien de ces allégations.
10. En quatrième et dernier lieu, il résulte de l'instruction, et notamment de l'avis de l'expert du 6 avril 2014, que, s'agissant du projet " Blender ", qui porte sur la mise au point d'un nouvel équipement servant à distribuer les desserts glacés au sein d'une grande marque de restauration rapide, plus léger et moins volumineux que le modèle existant dans ces restaurants, le résultat a été atteint grâce au savoir-faire de l'entreprise, sans aucun élément de nouveauté. Si la société appelante soutient que les travaux de recherche et développement ont consisté à réaliser et tester divers prototypes, elle n'apporte aucun élément au soutien de ces allégations.
Sur le bénéfice de la doctrine administrative :
11. La société appelante, à supposer qu'elle puisse être regardée comme ayant entendu se prévaloir de la garantie offerte aux contribuables par l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, ne peut utilement se prévaloir de l'instruction du 2 novembre 2016, référencée BOI-IS-RICI-10-10-10-20, qui est postérieure aux années d'imposition en litige et, du reste, ne comprend pas d'interprétation de la loi fiscale différente de celle dont il est fait application dans le présent arrêt.
12. Il résulte de tout ce qui précède que la SA Merim services n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté sa demande.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la SA Merim services est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société anonyme Merim services et au ministre de l'action et des comptes publics.
Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal sud-ouest.
Délibéré après l'audience du 6 février 2020 à laquelle siégeaient :
M. Éric Rey-Bèthbéder, président,
Mme D..., présidente-assesseure,
M. Manuel Bourgeois premier-conseiller.
Lu en audience publique, le 12 mars 2020.
La rapporteure,
E...Le président,
Éric Rey-Bèthbéder
La greffière,
Camille Péan
La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
N° 18BX00195 4