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11/02/2021 | FRANCE | N°20BX02519

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 7ème chambre (formation à 3), 11 février 2021, 20BX02519


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Toulouse l'annulation de l'arrêté du 10 décembre 2019 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a refusé son admission au séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1907464 du 28 février 2020, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregi

strée le 28 juillet 2020 sous le n° 20BX02519, M. B..., représenté par Me C..., demande à la cour :
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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Toulouse l'annulation de l'arrêté du 10 décembre 2019 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a refusé son admission au séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1907464 du 28 février 2020, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 28 juillet 2020 sous le n° 20BX02519, M. B..., représenté par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 28 février 2020 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse ;

2°) d'annuler l'arrêté du 10 décembre 2019 du préfet de la Haute-Garonne ;

3°) d'enjoindre à l'État de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de quinze jours sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, à défaut, de procéder au réexamen de sa situation ;

4°) de mettre à la charge de l'État les entiers dépens de l'instance ainsi que la somme de 1 800 euros à verser à son conseil sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

En ce qui concerne l'arrêté contesté dans son ensemble :

- il est entaché d'un défaut de motivation ;

- il est entaché d'un vice de procédure en l'absence de procédure contradictoire et porte atteinte à son droit d'être entendu ;

En ce qui concerne la décision portant refus de titre de séjour :

- elle est entachée d'un vice de procédure dès lors que l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) ne comporte ni la signature lisible et le nom D... ni le nom du médecin ayant établi le rapport médical et qu'il n'a pas été rendu à l'issue d'une délibération collégiale ;

- elle est entachée d'un défaut d'examen de sa situation personnelle ;

- le préfet s'est estimé à tort en situation de compétence liée par rapport à l'avis du collège de médecins de l'OFII ;

- elle méconnaît les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du même code ;

- elle porte atteinte à son droit au respect de sa vie privée et familiale tel qu'il est garanti par les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des conséquences d'une exceptionnelle gravité qu'elle emporte sur sa situation personnelle ;

- le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation en ne faisant pas usage de son pouvoir discrétionnaire compte tenu des circonstances humanitaires exceptionnelles qui caractérisent sa situation ;

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- elle est dépourvue de base légale en raison de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour ;

- elle porte atteinte à son droit au respect de sa vie privée et familiale tel qu'il est garanti par les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

En ce qui concerne la décision fixant le délai de départ volontaire :

- elle est dépourvue de base légale ;

- elle est entachée d'un défaut d'examen sérieux de sa situation personnelle ;

- le préfet s'est estimé à tort en situation de compétence liée ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors qu'il aurait dû bénéficier d'un délai de départ supérieur à trente jours ;

En ce qui concerne la décision fixant le pays de renvoi :

- elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense, enregistré le 10 novembre 2020, le préfet de la Haute-Garonne conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.

M. B... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision n° 2020/006098 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Bordeaux du 16 juillet 2020.

Par une ordonnance du 16 octobre 2020, la clôture d'instruction a été fixée au 18 décembre 2020 à 12 heures.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée relative à l'aide juridique ;

- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique, le rapport de M. Rey-Bèthbéder, président-rapporteur.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant guinéen, déclare être entré en France le 12 décembre 2016. Sa demande d'asile a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 25 mai 2018, confirmée par une décision de la Cour nationale du droit d'asile du 13 février 2019. Le 25 juin 2019, il a sollicité un titre de séjour en qualité d'étranger malade. Par un arrêté du 10 décembre 2019, le préfet de la Haute-Garonne a refusé de faire droit à sa demande, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. M. B... relève appel du jugement du 28 février 2020 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en litige.

2. En premier lieu, M. B... reprend en appel le moyen tiré du défaut de collégialité de l'avis du collège des médecins de l'OFII au soutien duquel il fait valoir que le tampon apposé sous le nom D... est illisible et que la signature n'apparaît pas de manière claire. Toutefois, l'intéressé ne produit aucun élément de nature à établir que l'avis du collège de médecins de l'OFII du 13 novembre 2019 n'aurait pas été signé par le docteur Candillier. Par suite ce moyen doit être écarté.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : / (...) 11° À l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié (...) La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'État (...) ". Aux termes de l'article R. 313-22 du même code : " Pour l'application du 11° de l'article L .313-11, le préfet délivre la carte de séjour au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé (...) ".

4. Il appartient à l'autorité administrative, lorsqu'elle envisage de refuser la délivrance d'un titre de séjour à un ressortissant étranger qui en fait la demande au titre des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 précitées, de vérifier, au vu de l'avis émis par le collège de médecins mentionné à l'article R. 313-22 du même code, que cette décision ne peut avoir de conséquences d'une exceptionnelle gravité sur l'état de santé de l'intéressé et, en particulier, d'apprécier, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, la nature et la gravité des risques qu'entraînerait un défaut de prise en charge médicale dans le pays de renvoi. Lorsque le défaut de prise en charge risque d'avoir des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur la santé de l'intéressé, l'autorité administrative ne peut légalement refuser le titre de séjour sollicité que s'il existe des possibilités de traitement approprié de l'affection en cause dans son pays d'origine.

5. Pour prendre sa décision, le préfet de la Haute-Garonne s'est appuyé sur l'avis du 13 novembre 2019 par lequel le collège de médecins de l'OFII a estimé que l'état de santé de M. B... nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut ne devrait pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité. Pour remettre en cause cette appréciation, l'intéressé produit un certificat médical du 10 janvier 2019 du docteur Saadi, psychologue clinicienne du centre de santé et pôle santé droits de " La Case de Santé " qui le suit en consultation psychologique depuis le 27 juillet 2017, selon lequel il souffre " d'un syndrome psycho-traumatique, accompagné d'éléments dépressifs avec des reviviscences, cauchemars, insomnies " en raison des traumatismes résultant des conditions de son voyage pour arriver en France. Le certificat médical du docteur De Lassat du 4 décembre 2019 précise également que son état de santé " nécessite un suivi spécialisé et un traitement médicamenteux " et fait état de plusieurs consultations au cours des années 2018 et 2019. En outre, l'intéressé produit un certificat médical du 24 janvier 2020 du docteur Chaaban du centre de santé et pôle santé droits de " La Case de Santé ", qui fait part de son désaccord avec l'avis du collège de médecins de l'OFII au vu de son " état de sidération suite à des traumatismes vécus en Guinée, à l'origine d'un passage à l'acte auto-agressif et prise médicamenteuse avec intention de se donner la mort " et de " son état de stress post-traumatique sévère avec composante affective grave, à type de velléités suicidaires " pour lequel il est suivi depuis 2017. Le docteur Chaaban précise encore qu'une rupture du suivi de son état de santé pourrait " conduire à la mise en jeu de son pronostic vital à très court terme, comme nous le rappelle ses antécédents ". Toutefois, les certificats médicaux produits par l'intéressé, qui se bornent à reprendre ses récits relatifs à l'origine de ses troubles, ne sont pas de nature à établir qu'il souffre d'une pathologie dont le défaut de prise en charge entraînerait des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé. En outre, l'intéressé ne produit aucun élément de nature à établir la réalité de ses antécédents et de ses velléités suicidaires. Dès lors, ces éléments ne sont pas de nature à remettre en cause l'avis du collège de médecins de l'OFII. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.

6. En troisième lieu, M. B... reprend, dans des termes similaires et sans critique utile du jugement, les autres moyens invoqués en première instance visés ci-dessus. Il n'apporte aucun élément de droit ou de fait nouveau, ni aucune pièce nouvelle à l'appui de ces moyens auxquels le premier juge a suffisamment et pertinemment répondu. Il y a lieu, dès lors, d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus par ce dernier.

7. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 10 décembre 2019. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction, celles tendant à la condamnation de l'État au paiement des entiers dépens de l'instance, laquelle, au demeurant, n'en comporte aucun, ainsi que celles tendant à l'application combinée des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de la Haute-Garonne.

Délibéré après l'audience du 14 janvier 2021 à laquelle siégeaient :

M. Éric Rey-Bèthbéder, président-rapporteur,

Mme E..., présidente-assesseure,

Mme Florence Madelaigue, premier-conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 11 février 2021.

Le président-rapporteur,

Éric Rey-Bèthbéder

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

5

N° 20BX02519


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 7ème chambre (formation à 3)
Numéro d'arrêt : 20BX02519
Date de la décision : 11/02/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. REY-BETHBEDER
Rapporteur ?: M. Eric REY-BETHBEDER
Rapporteur public ?: Mme CHAUVIN
Avocat(s) : LASPALLES

Origine de la décision
Date de l'import : 16/03/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2021-02-11;20bx02519 ?
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