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09/03/2021 | FRANCE | N°20BX02551

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 5ème chambre, 09 mars 2021, 20BX02551


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme A... C... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 2 juillet 2019 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a refusé de lui délivrer le titre de séjour sollicité, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1904544 du 7 juillet 2020, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 10 août 2020,

Mme C..., représentée par Me G..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal admin...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme A... C... a demandé au tribunal administratif de Toulouse d'annuler l'arrêté du 2 juillet 2019 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a refusé de lui délivrer le titre de séjour sollicité, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1904544 du 7 juillet 2020, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 10 août 2020, Mme C..., représentée par Me G..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulouse du 7 juillet 2020 ;

2°) d'annuler l'arrêté susmentionné du préfet de la Haute-Garonne du 2 juillet 2019 ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Garonne de lui délivrer un titre de séjour " vie privée et familiale " à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, à défaut, de procéder au réexamen de sa situation dans le même délai sous la même astreinte avec délivrance d'une autorisation provisoire de séjour pendant la période transitoire ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à son conseil en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

En ce qui concerne la décision de refus de séjour :

- elle est insuffisamment motivée et révèle un défaut d'examen sérieux de sa situation ;

- elle méconnait les dispositions des articles L. 313-14 et L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- cette décision porte une atteinte disproportionnée au droit au respect de sa vie privée et familiale tel que protégé par les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des conséquences qu'elle emporte sur sa situation personnelle ;

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

- elle porte une atteinte disproportionnée au droit au respect de sa vie privée et familiale tel que protégé par les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense, enregistré le 18 décembre 2020, le préfet de la Gironde conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Par décision du 10 décembre 2020, le bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Bordeaux a admis Mme C... au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-tunisien en matière de séjour et de travail du 17 mars 1988 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative et le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de Mme E... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A... C..., née le 17 février 1990 à Kasserine (Tunisie), de nationalité tunisienne, déclare être entrée en France le 17 février 2012. Elle a sollicité le 22 août 2017 son admission exceptionnelle au séjour au titre de la vie privée et familiale sur le fondement des articles L. 313-14 et L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et en qualité de salarié sur le fondement de l'article 3 de l'accord franco-tunisien susvisé. Par un arrêté du 2 juillet 2019, le préfet de la Haute-Garonne a refusé de l'admettre au séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. Mme C... relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté.

Sur la légalité du refus de séjour :

2. En premier lieu, il ressort des termes de la décision de refus de séjour attaquée qu'elle mentionne les textes applicables et notamment l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988, le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et la convention internationale des droits de l'enfant et expose les éléments de la situation personnelle et familiale de Mme C... qui ont été pris en compte, notamment qu'elle peut rejoindre son pays d'origine avec son concubin et ses trois enfants et qu'il n'est pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée, compte tenu qu'elle n'est pas dépourvue d'attaches dans son pays d'origine et eu égard à l'absence d'obstacle à la poursuite de sa vie familiale hors de France. L'arrêté indique également que l'intéressée n'a aucune perspective professionnelle et qu'elle ne détient aucune promesse d'embauche. Dans ces conditions, cette décision qui n'avait pas à rappeler de manière exhaustive l'ensemble des éléments de la vie privée de l'intéressée, contient les motifs de droit et de fait sur lesquels elle se fonde. Par suite, elle est suffisamment motivée et révèle que sa situation a fait l'objet d'un examen approfondi par le préfet.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales stipule que " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes de l'article L. 313-11 du même code : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République. "

4. Mme C... fait valoir qu'elle vit en France avec son concubin, un compatriote avec lequel elle a eu trois enfants, âgés respectivement de 5 ans, 4 ans et 1 an, dont deux sont scolarisés en France, et fait état de son souhait de s'insérer professionnellement. Il ressort toutefois des pièces du dossier que Mme C... établit son ancienneté en France depuis 2015 seulement et qu'elle y réside irrégulièrement sans avoir demandé une régularisation de sa situation avant le 22 août 2017. Si son concubin, père de ses enfants, bénéficie d'un titre de séjour au titre du regroupement familial demandé par son père depuis 2010, il ressort toutefois des pièces du dossier qu'il est sans emploi et que la famille, sans ressource, est hébergée chez le beau-père de la requérante et celle-ci ne fait état d'aucune circonstance qui donnerait vocation à son compagnon à demeurer durablement en France et qui ferait obstacle à ce que le couple poursuive sa vie familiale hors de France. En outre, il ne ressort pas des pièces du dossier que Mme C... serait dépourvue d'attaches dans son pays d'origine dans lequel elle a vécu la plus grande partie de sa vie. Si elle fait état de la nécessité d'un suivi médico-psychologique pour ses enfants eu égard à des retards d'apprentissage, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'ils ne pourraient en bénéficier en Tunisie. Ainsi, et alors que rien ne fait obstacle à ce que la cellule familiale se reconstitue en Tunisie et que ses enfants puissent y poursuivre leur scolarité, Mme C..., quand bien même elle indique souhaiter s'intégrer professionnellement en France, n'est pas fondée à soutenir que l'arrêté attaqué porterait une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale et méconnaîtrait ainsi les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni les dispositions de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Dans ces circonstances, le préfet de la Haute-Garonne n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation.

5. Si Mme C... invoque également une méconnaissance de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, elle n'assortit ce moyen d'aucune précision permettant d'en apprécier le bien-fondé. Au surplus, sa situation, telle qu'exposée précédemment, ne présente pas le caractère de considérations humanitaires ou de motifs exceptionnels de nature à justifier une admission exceptionnelle au séjour au titre de sa vie privée et familiale. S'agissant d'une régularisation au titre du travail, dès lors que l'article 3 de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 prévoit la délivrance de titres de séjour au titre d'une activité salariée, un ressortissant tunisien souhaitant obtenir un titre de séjour au titre d'une telle activité ne peut utilement invoquer les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Si ces stipulations n'interdisent pas au préfet de délivrer un titre de séjour à un ressortissant tunisien qui ne remplit pas l'ensemble des conditions auxquelles est subordonnée sa délivrance de plein droit et dispose à cette fin d'un pouvoir discrétionnaire pour apprécier, compte tenu de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressé, l'opportunité d'une mesure de régularisation, Mme C..., qui ne justifie d'aucune perspective d'emploi, ne fait état, sur ce point non plus, d'aucun motif exceptionnel justifiant la régularisation de sa situation à raison de sa situation professionnelle.

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :

6. Les moyens tirés de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation au regard des conséquences que la décision attaquée emporte sur sa situation personnelle doivent être écartés eu égard aux circonstances exposées au point 4.

7. Il résulte de tout ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction, d'astreinte et de paiement des frais d'instance ne peuvent qu'être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... C... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de la Haute-Garonne.

Délibéré après l'audience du 9 février 2021 à laquelle siégeaient :

Mme F... B..., présidente,

M. Frédéric Faïck, président-assesseur,

Mme D... E..., première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 9 mars 2021.

La présidente,

Elisabeth B...

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

4

N° 20BX02551


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 20BX02551
Date de la décision : 09/03/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme JAYAT
Rapporteur ?: Mme Caroline GAILLARD
Rapporteur public ?: Mme PERDU
Avocat(s) : OUDDIZ-NAKACHE

Origine de la décision
Date de l'import : 16/03/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2021-03-09;20bx02551 ?
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