Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. I... A... a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler l'arrêté du 6 septembre 2018 par lequel le maire d'Allier a délivré à M. H... un permis de construire en vue de l'édification d'un bâtiment collectif comportant dix logements.
Par une ordonnance n° 1900460 du 16 avril 2019, le président de la 2ème chambre du tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 23 avril 2019 et 16 mars 2020, M. A..., représenté par Me E..., demande à la cour :
1°) d'annuler cette ordonnance du président de la 2ème chambre du tribunal administratif de Pau du 16 avril 2019 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 6 septembre 2018 par lequel le maire d'Allier a délivré à M. H... un permis de construire en vue de l'édification d'un bâtiment collectif comportant dix logements ;
3°) de mettre à la charge de la commune d'Allier le paiement de la somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- il justifie d'un intérêt à agir en qualité de voisin immédiat ;
- le dossier de demande de permis de construire est incomplet dès lors qu'il ne permet pas de vérifier la conformité du projet aux dispositions des articles UA 4-3 et UA 11 du règlement du plan local d'urbanisme, que l'article R. 431-8 du code de l'urbanisme a été méconnu, que le projet architectural est insuffisant, que l'article R. 431-9 du code de l'urbanisme a été méconnu dès lors qu'aucun document ne renvoie au niveau du terrain naturel et qu'une prescription nécessite une cote de référence de + 0,50 mètre au-dessus de ce terrain naturel, que l'article R. 431-10 du code de l'urbanisme a été méconnu ;
- le projet autorisé méconnaît l'article UA-3-1 du règlement du plan local d'urbanisme, la modification de l'accès à l'ouest de la parcelle étant de nature à bouleverser l'économie du projet ;
- le projet autorisé méconnaît l'article UA-3-2 du règlement du plan local d'urbanisme ;
- le projet autorisé méconnaît l'article UA-4-2 du règlement du plan local d'urbanisme ;
- les travaux engagés ne sont pas conformes au projet.
Par un mémoire en défense, enregistré le 8 juillet 2019, la commune d'Allier, représentée par Me J..., conclut au rejet de la requête et, en outre, à ce qu'il soit mis à la charge de M. A... le paiement de la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la demande présentée par M. A... devant le tribunal est irrecevable ;
- les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020, et notamment son article 5 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. C... B...,
- et les conclusions de M. Romain Roussel, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. Par un arrêté du 6 septembre 2018, le maire d'Allier (Hautes-Pyrénées) a délivré à M. H... un permis de construire en vue de l'édification d'un bâtiment collectif comportant dix logements. M. A... relève appel de l'ordonnance du 16 avril 2019 par laquelle le président de la 2ème chambre du tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ce permis de construire.
Sur la régularité de l'ordonnance :
2. Aux termes de l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme : " Une personne autre que l'État, les collectivités territoriales ou leurs groupements ou une association n'est recevable à former un recours pour excès de pouvoir contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager que si la construction, l'aménagement ou les travaux sont de nature à affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance du bien qu'elle détient ou occupe régulièrement ou pour lequel elle bénéficie d'une promesse de vente, de bail, ou d'un contrat préliminaire mentionné à l'article L. 261-15 du code de la construction et de l'habitation. ".
3. Il résulte de ces dispositions qu'il appartient, en particulier, à tout requérant qui saisit le juge administratif d'un recours pour excès de pouvoir tendant à l'annulation d'un permis de construire, de démolir ou d'aménager, de préciser l'atteinte qu'il invoque pour justifier d'un intérêt lui donnant qualité pour agir, en faisant état de tous éléments suffisamment précis et étayés de nature à établir que cette atteinte est susceptible d'affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance de son bien. Il appartient au défendeur, s'il entend contester l'intérêt à agir du requérant, d'apporter tous éléments de nature à établir que les atteintes alléguées sont dépourvues de réalité. Le juge de l'excès de pouvoir apprécie la recevabilité de la requête au vu des éléments ainsi versés au dossier par les parties, en écartant le cas échéant les allégations qu'il jugerait insuffisamment étayées mais sans pour autant exiger de l'auteur du recours qu'il apporte la preuve du caractère certain des atteintes qu'il invoque au soutien de la recevabilité de celui-ci. Eu égard à sa situation particulière, le voisin immédiat justifie, en principe, d'un intérêt à agir lorsqu'il fait état devant le juge, qui statue au vu de l'ensemble des pièces du dossier, d'éléments relatifs à la nature, à l'importance ou à la localisation du projet de construction.
4. M. A... est propriétaire d'un bien immobilier, cadastré section A, n° 566 qui jouxte la parcelle d'assiette du projet litigieux, cadastrée section A, n° 465 et fait valoir qu'il subira nécessairement les conséquences de ce projet, s'agissant notamment de sa vue et de son cadre de vie. Il ressort des pièces du dossier, produites pour la première fois en appel, notamment du dossier de permis de construire, que la construction projetée comprenant dix logements pour une surface globale de plancher de 422 m² présente une hauteur, dans sa partie la plus haute, de 8,40 mètres et sera visible de la façade ouest de l'habitation du requérant. Ainsi, M. A... justifie d'un intérêt à agir contre le permis de construire litigieux. Il est, dès lors, fondé à soutenir que l'ordonnance attaquée du 16 avril 2019 par laquelle le président de la 2ème chambre du tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande au motif d'une irrecevabilité manifeste tenant au défaut d'intérêt à agir, est entachée d'irrégularité. Cette ordonnance doit, par suite, être annulée.
5. Il y a lieu pour la cour d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. A... devant le tribunal administratif de Pau.
Sur la légalité du permis de construire du 6 septembre 2018 :
6. En premier lieu, aux termes de l'article R. 431-8 du code de l'urbanisme : " Le projet architectural comprend une notice précisant : 1° L'état initial du terrain et de ses abords indiquant, s'il y a lieu, les constructions, la végétation et les éléments paysagers existants ; 2° Les partis retenus pour assurer l'insertion du projet dans son environnement et la prise en compte des paysages, faisant apparaître, en fonction des caractéristiques du projet : a) L'aménagement du terrain, en indiquant ce qui est modifié ou supprimé ; b) L'implantation, l'organisation, la composition et le volume des constructions nouvelles, notamment par rapport aux constructions ou paysages avoisinants ; c) Le traitement des constructions, clôtures, végétations ou aménagements situés en limite de terrain ; d) Les matériaux et les couleurs des constructions ; e) Le traitement des espaces libres, notamment les plantations à conserver ou à créer ; f) L'organisation et l'aménagement des accès au terrain, aux constructions et aux aires de stationnement. ". Aux termes de l'article R. 431-9 du même code : " Le projet architectural comprend également un plan de masse des constructions à édifier ou à modifier coté dans les trois dimensions. Ce plan de masse fait apparaître les travaux extérieurs aux constructions, les plantations maintenues, supprimées ou créées et, le cas échéant, les constructions existantes dont le maintien est prévu. / Il indique également, le cas échéant, les modalités selon lesquelles les bâtiments ou ouvrages seront raccordés aux réseaux publics ou, à défaut d'équipements publics, les équipements privés prévus, notamment pour l'alimentation en eau et l'assainissement. / Lorsque le terrain n'est pas directement desservi par une voie ouverte à la circulation publique, le plan de masse indique l'emplacement et les caractéristiques de la servitude de passage permettant d'y accéder. / Lorsque le projet est situé dans une zone inondable délimitée par un plan de prévention des risques, les cotes du plan de masse sont rattachées au système altimétrique de référence de ce plan. ". Enfin, l'article R. 431-10 de ce code dispose que : " Le projet architectural comprend également : a) Le plan des façades et des toitures ; lorsque le projet a pour effet de modifier les façades ou les toitures d'un bâtiment existant, ce plan fait apparaître l'état initial et l'état futur ; b) Un plan en coupe précisant l'implantation de la construction par rapport au profil du terrain ; lorsque les travaux ont pour effet de modifier le profil du terrain, ce plan fait apparaître l'état initial et l'état futur ; c) Un document graphique permettant d'apprécier l'insertion du projet de construction par rapport aux constructions avoisinantes et aux paysages, son impact visuel ainsi que le traitement des accès et du terrain ; d) Deux documents photographiques permettant de situer le terrain respectivement dans l'environnement proche et, sauf si le demandeur justifie qu'aucune photographie de loin n'est possible, dans le paysage lointain. Les points et les angles des prises de vue sont reportés sur le plan de situation et le plan de masse. ".
7. La circonstance que le dossier de demande de permis de construire ne comporterait pas l'ensemble des documents exigés par les dispositions du code de l'urbanisme, ou que les documents produits seraient insuffisants, imprécis ou comporteraient des inexactitudes, n'est susceptible d'entacher d'illégalité le permis de construire qui a été accordé que dans le cas où les omissions, inexactitudes ou insuffisances entachant le dossier ont été de nature à fausser l'appréciation portée par l'autorité administrative sur la conformité du projet à la réglementation applicable.
8. Il ressort des pièces du dossier que le dossier de permis de construire comporte notamment un plan de situation, un plan de masse coté, un plan de chaque niveau coté, des plans de façade, des plans de coupe, un descriptif du projet ainsi que quatre documents photographiques. Ces différents documents permettent de s'assurer de l'implantation du projet ainsi que de la nature, de la composition et du volume de la construction nouvelle, constituée de deux corps de bâtiment comprenant dix logements. La notice mentionne en particulier que les façades de l'immeuble seront enduites de couleur beige, proche de celle des bâtiments avoisinants, et que les toitures seront recouvertes d'ardoises sur charpente traditionnelle. Le dossier permet également d'apprécier l'insertion du projet dans son environnement. Il permet en outre d'identifier le raccordement de la construction aux différents réseaux publics ainsi que l'accès à la voie publique. Ainsi, contrairement à ce que soutient le requérant, l'autorité administrative était à même d'apprécier le projet au regard des dispositions réglementaires applicables, notamment celles des articles UA 4-3 et UA 11 du règlement du plan local d'urbanisme. Si les plans de coupes ne précisent pas la hauteur du plancher par rapport à celle du sol naturel, le permis de construire est assorti d'une prescription tenant à ce que cette hauteur soit au minimum de 0,50 mètre par rapport au sol naturel, de sorte que cette omission n'a pu fausser sur ce point l'appréciation du service instructeur. Il s'ensuit que le moyen tiré de l'incomplétude du dossier doit être écarté.
9. En deuxième lieu, aux termes de l'article UA 3-1 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune d'Allier : " accès - Pour être constructible, un terrain doit avoir accès à une voie publique ou privée, soit directement, soit par l'intermédiaire d'un passage aménagé sur le fonds voisin. (...) / Lorsque le terrain est riverain de plusieurs voies publiques, l'accès sur celles de ces voies qui présenteraient une gêne ou un risque pour la circulation publique peut être interdit. / Toute opération doit avoir un impact minimal sur la voie publique, en fonction des impératifs techniques / Les accès doivent être adaptés à l'opération et aménagés de façon à apporter la moindre gêne à la circulation publique. ".
10. Il ressort des pièces du dossier que l'arrêté portant permis de construire est assorti d'une prescription tenant à ce que, pour des raisons de sécurité routière, le projet soit doté d'un accès unique à la voie publique, situé au nord-est de la parcelle et non de deux accès comme prévus par le pétitionnaire. Il ne ressort pas de ces mêmes pièces que la suppression du second accès prévu initialement à l'ouest de la parcelle constituerait un bouleversement de l'économie du projet, contrairement à ce que soutient M. A..., dès lors notamment que les places de stationnement prévues au projet pourront être desservies par le seul accès autorisé. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions citées ci-dessus doit être écarté.
11. En troisième lieu, aux termes de l'article UA 3-2 du règlement du plan local d'urbanisme : " voirie nouvelle : concerne les voies publiques et privées : Les caractéristiques de ces voies et de ces accès doivent être adaptées aux usages qu'ils supportent ou aux opérations qu'ils doivent desservir et notamment permettre l'approche du matériel de lutte contre l'incendie et l'enlèvement des ordures ménagères. / Les voies se terminant en impasse doivent être aménagées de façon à permettre aux véhicules lourds de faire demi-tour. ".
12. M. A... ne peut utilement se prévaloir de ce que la voie de desserte créée à l'ouest de la parcelle d'assiette du projet ne permettrait pas un accès sécurisé des véhicules, notamment des engins de lutte contre l'incendie, dès lors qu'ainsi qu'il a été dit au point 10 ci-dessus, l'accès situé à l'ouest n'est pas autorisé par le permis de construire litigieux. Au demeurant, le seul accès situé au nord-est de la parcelle permet aux engins de lutte contre l'incendie d'accéder à l'immeuble projeté.
13. En quatrième lieu, aux termes de l'article UA 4-2 du règlement du plan local d'urbanisme : " (...) Eaux pluviales : Pour limiter l'imperméabilisation des sols, toutes les solutions susceptibles de favoriser le stockage et l'infiltration des eaux pluviales afin d'éviter la saturation des réseaux, doivent être mises en oeuvre. / En l'absence de réseau, ou en cas de réseau insuffisant, les aménagements nécessaires au libre écoulement des eaux pluviales (et éventuellement ceux visant à la limitation des débits évacués de la propriété) sont à la charge exclusive du propriétaire qui doit réaliser les dispositifs adaptés à l'opération et au terrain. ".
14. Il ressort des pièces du dossier, notamment des plans annexés au permis de construire litigieux, que les eaux pluviales seront gérées sur la parcelle par la mise en place de trois puisards situés à l'ouest, au nord et au sud de celle-ci. M. A... n'apporte pas d'éléments de nature à caractériser une insuffisance du dispositif ainsi autorisé par le permis de construire. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions citées ci-dessus doit être écarté.
15. En cinquième et dernier lieu, le permis de construire, qui est délivré sous réserve des droits des tiers, a pour seul objet d'assurer la conformité des travaux qu'il autorise avec la réglementation d'urbanisme. Ainsi, M. A... ne peut utilement se prévaloir de ce que les travaux entrepris par le pétitionnaire, postérieurement au permis de construire qui lui a été délivré, ne seraient pas conformes à ce dernier dès lors que cette circonstance est sans incidence sur la légalité du permis.
16. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à demander l'annulation du permis de construire délivré le 6 septembre 2018 à M. H... par le maire d'Allier.
Sur les frais liés au litige :
17. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune d'Allier, qui n'est pas partie perdante à l'instance, la somme que demande M. A... au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.
18. Il y a lieu, en revanche, dans les circonstances de l'espèce, en application des mêmes dispositions, de mettre à la charge de M. A..., partie perdante pour l'essentiel à l'instance, la somme de 1 500 euros à verser à la commune d'Allier au titre des frais qu'elle a exposés et qui ne sont pas compris dans les dépens.
DÉCIDE :
Article 1er : L'ordonnance du président de la 2ème chambre du tribunal administratif de Pau est annulée.
Article 2 : La demande présentée par M. A... devant le tribunal administratif de Pau ainsi que le surplus des conclusions de sa requête sont rejetés.
Article 3 : M. A... versera à la commune d'Allier la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. I... A..., à la commune d'Allier et à M. F... H....
Délibéré après l'audience du 29 avril 2021 à laquelle siégeaient :
Mme Marianne Hardy, président,
M. C... B..., président-assesseur,
Mme G... D..., première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 31 mai 2021.
La présidente,
Marianne Hardy
La République mande et ordonne au préfet des Hautes-Pyrénées en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 19BX01605