Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
Mme B... I... épouse A... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler la décision implicite par laquelle le préfet de la Gironde a rejeté sa demande de titre de séjour formulée le 31 janvier 2018 et réceptionnée le 2 février 2018 ainsi que les décisions expresses confirmatives des 9 et 24 août 2018.
Par un jugement n° 1902333 du 15 juillet 2020, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 27 novembre 2020, Mme I... épouse A..., représentée par Me D..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 15 juillet 2020 ;
2°) d'annuler les décisions susmentionnées du préfet de la Gironde ;
3°) d'enjoindre à la préfète de la Gironde de lui délivrer un titre de séjour mention vie privée et familiale dans le délai de deux mois suivant la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard, à défaut, de procéder au réexamen de sa demande sous la même astreinte et de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 200 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- sa requête est recevable ;
- la décision attaquée est entachée d'un vice d'incompétence ;
- le préfet a commis une erreur manifeste sur l'appréciation de sa situation personnelle et a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors qu'elle réside en France avec son époux, lequel est titulaire d'une carte de résident depuis 2014, qu'elle a entamé une procédure d'assistance médicale à la procréation qui nécessite sa présence en France aux côtés de son époux ; contrairement à ce qu'a retenu le tribunal, son époux a sollicité le regroupement familial en 2015, demande à laquelle le préfet a répondu négativement au motif qu'elle se trouvait déjà en France en situation irrégulière.
Par un mémoire en défense, enregistré le 22 mars 2021, la préfète de la Gironde conclut au rejet de la requête.
Elle soutient que la requérante ne justifie pas de la recevabilité de sa requête et subsidiairement, que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Par décision n° 2020/014891 du 5 novembre 2020, la demande d'aide juridictionnelle présentée par Mme I... épouse A... a été rejetée.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
- le code de justice administrative et le décret n°2020-1406 du 18 novembre 2020.
La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme F... G...,
- et les observations de Me D..., représentant Mme I... épouse A..., requérante.
Considérant ce qui suit :
1. Mme I... épouse A..., ressortissante turque née le 4 avril 1974, est entrée sur le territoire français le 15 octobre 2014 afin d'y retrouver son époux, actuellement titulaire d'une carte de résident valable jusqu'en 2027. Le 27 août 2015 elle a demandé un titre de séjour mention " vie privée et familiale " que le préfet de la Gironde a refusé de lui délivrer par un arrêté du 11 février 2016. Par une nouvelle demande présentée le 31 janvier 2016 et réceptionnée le 2 février suivant par la préfecture, elle a demandé le réexamen de sa demande de titre de séjour mention " vie privée et familiale ". En l'absence de réponse, une décision implicite de rejet est née le 2 juin 2018. Puis par lettres des 9 et 24 août 2018, le préfet de la Gironde a confirmé ce refus en explicitant les motifs de sa décision. Mme I... épouse A... a demandé au tribunal administratif l'annulation de la décision implicite par laquelle la préfète de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour ainsi que des décisions confirmatives des 9 et 24 août 2018. Elle relève appel du jugement par lequel le tribunal a rejeté sa demande.
2. En premier lieu, d'une part, par un arrêté du 29 mai 2018, régulièrement publié au recueil des actes administratifs n° 33-2018-052 de la préfecture de la Gironde le 30 mai 2018, le préfet de la Gironde a donné délégation à Mme H... E..., directrice des migrations et de l'intégration, en cas d'absence ou d'empêchement de M. Thierry Suquet, secrétaire général de la préfecture de la Gironde, pour signer notamment les décisions et correspondances prises en application des livres III et IV du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ainsi que toutes décisions d'éloignement et décisions accessoires prises en application du livre V du même code. D'autre part, par ce même arrêté du 29 mai 2018, le préfet de la Gironde a donné délégation à Mme J... C..., adjointe à la directrice de l'immigration et de l'intégration, en cas d'absence ou d'empêchement de Mme H... E..., à l'effet de signer notamment les décisions de refus de séjour. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence des auteurs des décisions du 9 août 2018 et du 24 août 2018 portant refus de séjour à l'encontre de Mme I... épouse A... signées respectivement par Mme C... et par Mme E... doit être écarté.
3. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".
4. Mme I... épouse A... est entrée sur le territoire français en 2014 afin de rejoindre son époux, devenu titulaire d'une carte de résident valable jusqu'en 2027. Il ressort toutefois des pièces du dossier que si elle justifie de quatre ans de vie commune avec son époux à la date du refus contesté, elle n'a jamais été en situation régulière sur le territoire et a d'ailleurs fait l'objet d'une décision d'éloignement le 11 février 2016 au motif notamment qu'elle entrait dans la catégorie de personnes pouvant bénéficier du regroupement familial, laquelle n'a pas été exécutée. En outre, si la requérante soutient qu'une demande de regroupement familial a été introduite en 2015, elle n'apporte aucun commencement de preuve de nature à l'établir. Par ailleurs, rien ne permet d'estimer qu'elle serait dépourvue d'attaches familiales dans son pays d'origine où elle a vécu la majeure partie de son existence. Enfin, la circonstance qu'elle suive actuellement une procédure de procréation médicalement assistée ne permet pas d'estimer qu'à la date du refus de titre de séjour contesté, le préfet aurait méconnu son droit au respect de sa vie privée et familiale dès lors que cette procédure n'a débuté qu'en 2020 soit postérieurement à ce refus. Dans ces conditions, la décision contestée n'a pas porté au droit de Mme I... épouse A... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée eu égard aux buts en vue desquels elle a été prise. Dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté, ce qui ne fait pas obstacle, si la requérante s'y croit fondée, à ce qu'elle présente une nouvelle demande en faisant état de sa situation actualisée quant au suivi médical dont elle pourrait bénéficier.
8. Il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée par le préfet de la Gironde, Mme I... épouse A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions des 9 et 24 août 2018 portant refus de séjour. Par voie de conséquence il y a lieu de rejeter ses conclusions à fins d'injonction, ainsi que celles présentées au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme I... épouse A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... I... épouse A... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée à la préfète de la Gironde.
Délibéré après l'audience du 4 mai 2021 à laquelle siégeaient :
Mme Brigitte Phémolant, présidente de la cour,
M. Frédéric Faïck, président-assesseur,
Mme F... G..., première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 1er juin 2021.
La présidente,
Brigitte Phémolant
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 20BX03874