Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de La Réunion, d'une part, d'annuler la décision implicite née le 20 août 2012 du silence gardé par le maire de Saint-Philippe sur sa demande présentée le 20 juin 2012 et tendant au versement d'une somme de 9 881,52 euros au titre de l'indemnité d'administration et de technicité (IAT) pour la période de janvier 2007 à juin 2012 et, d'autre part, de condamner la commune de Saint-Philippe à lui verser ladite somme ainsi qu'une somme de 1 000 euros au titre des troubles dans ses conditions d'existence du fait du refus de versement de l'IAT.
Par un jugement n° 1300032 du 28 mai 2015, le tribunal administratif de La Réunion a rejeté sa demande.
Par un arrêt n° 15BX02987 du 19 juin 2017, la cour a annulé ce jugement, condamné la commune de Saint-Philippe à verser à M. A... la somme de 9 881,52 euros au titre de l'indemnité d'administration et de technicité pour la période de janvier 2007 à juin 2012 ainsi que la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et rejeté le surplus de la demande.
Procédure devant la cour :
M. A... a présenté, le 12 février 2019, une demande en vue d'obtenir l'exécution de l'arrêt n° 15BX02987 rendu par la cour le 19 juin 2017.
Par une ordonnance du 22 juin 2020, la présidente de la cour administrative d'appel de Bordeaux a décidé l'ouverture d'une procédure juridictionnelle.
Par deux mémoires, enregistrés les 24 août 2020 et 9 mars 2021, M. A... demande à la cour de prescrire par voie juridictionnelle les mesures d'exécution de l'arrêt du 19 juin 2017 afin que la commune de Saint-Philippe lui verse la somme de 1 000 euros due au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que les intérêts de retard au taux majoré sur les sommes qu'elle a été condamnées à verser par cet arrêt.
Il soutient que si la somme de 9 881,52 euros due au titre de l'indemnité d'administration et de technicité lui a été versée le 9 mai 2019, il n'en va pas de même de la somme de 1 000 euros due au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et des intérêts moratoires qui s'élèvent à la somme de 2 777,22 euros.
Par un mémoire en défense enregistré le 21 janvier 2021, la commune de Saint-Philippe, représentée par le cabinet Vedesi (SCP), conclut au rejet de la requête.
Elle fait valoir que le juge de l'exécution n'est pas compétent en matière d'intérêts de retard et que la requête est irrecevable dès lors que le fondement juridique invoqué est erroné.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code civil,
- le code monétaire et financier,
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Olivier Cotte,
- les conclusions de M. Axel Basset, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. Par un arrêt n° 15BX02987 du 19 juin 2017 réformant partiellement le jugement n° 1300032 du 28 mai 2015 du tribunal administratif de La Réunion, la cour administrative d'appel de Bordeaux a condamné la commune de Saint-Philippe à verser à M. A... la somme de de 9 881,52 euros au titre de l'indemnité d'administration et de technicité (IAT) pour la période de janvier 2007 à juin 2012 ainsi que la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Le 12 février 2019, M. A... a saisi la cour d'une demande d'exécution de cet arrêt pour obtenir le versement de la somme due au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que les intérêts au taux légal sur les sommes dues.
Sur la somme due au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
2. Aux termes de l'article L. 911-4 du code de justice administrative : " En cas d'inexécution d'un jugement ou d'un arrêt, la partie intéressée peut demander à la juridiction, une fois la décision rendue, d'en assurer l'exécution. (...) ".
3. Il résulte de l'instruction que la commune de Saint-Philippe a versé à M. A... la somme de 1 000 euros due au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative le 4 octobre 2021. Par suite, il n'y a pas lieu pour la cour de prescrire des mesures pour obtenir l'exécution de l'arrêt du 19 juin 2017 sur ce point.
Sur les intérêts de retard :
En ce qui concerne la recevabilité de la demande d'exécution :
4. Aux termes de l'article L. 911-9 du code de justice administrative : " Lorsqu'une décision passée en force de chose jugée a prononcé la condamnation d'une personne publique au paiement d'une somme d'argent dont elle a fixé le montant, les dispositions de l'article 1er de la loi n° 80-539 du 16 juillet 1980, ci-après reproduites, sont applicables. / " Art. 1er.- (...) II. - Lorsqu'une décision juridictionnelle passée en force de chose jugée a condamné une collectivité locale ou un établissement public au paiement d'une somme d'argent dont le montant est fixé par la décision elle-même, cette somme doit être mandatée ou ordonnancée dans un délai de deux mois à compter de la notification de la décision de justice. A défaut de mandatement ou d'ordonnancement dans ce délai, le représentant de l'Etat dans le département ou l'autorité de tutelle procède au mandatement d'office (...) ". Alors même qu'une partie a la faculté de solliciter le mandatement d'office de la somme qu'une collectivité locale ou un établissement public a été condamné à lui payer et même dans l'hypothèse où elle n'aurait pas sollicité ce mandatement, elle est recevable, lorsque la décision juridictionnelle qui, selon elle, est inexécutée ne fixe pas précisément le montant de la somme due ou lorsque le calcul de celle-ci soulève une difficulté sérieuse à demander que soit ordonné, le cas échéant sous astreinte, le versement de la somme due.
5. Si M. A... a la faculté de solliciter le mandatement d'office de la somme que la commune de Saint-Philippe a été condamnée à lui payer, il résulte de l'instruction que l'exécution de l'arrêt de la cour pose une difficulté sérieuse. Il s'ensuit que les conclusions de M. A... sont recevables.
En ce qui concerne le bien-fondé de la demande d'exécution :
6. Aux termes du premier alinéa de l'article 1231-7 du code civil : " En toute matière, la condamnation à une indemnité emporte intérêts au taux légal même en l'absence de demande ou de disposition spéciale du jugement. Sauf disposition contraire de la loi, ces intérêts courent à compter du prononcé du jugement à moins que le juge n'en décide autrement. ". Aux termes de l'article L. 313-3 du code monétaire et financier : " En cas de condamnation pécuniaire par décision de justice, le taux de l'intérêt légal est majoré de cinq points à l'expiration d'un délai de deux mois à compter du jour où la décision de justice est devenue exécutoire, fût-ce par provision. Cet effet est attaché de plein droit au jugement d'adjudication sur saisie immobilière, quatre mois après son prononcé. (...) ". En application de l'article L. 313-2 de ce code, le taux est fixé semestriellement par arrêté du ministre chargé de l'économie.
7. Il résulte des dispositions précitées que même en l'absence de demande tendant à l'allocation d'intérêts, toute décision de justice prononçant une condamnation à une indemnité fait courir les intérêts du jour de son prononcé jusqu'à son exécution, au taux légal puis, en application des dispositions de l'article L. 313-3 du code monétaire et financier, au taux majoré s'il n'est pas exécuté dans les deux mois de sa notification.
8. En outre, même lorsque la décision juridictionnelle ne le prévoit pas explicitement, les sommes allouées au titre des frais non compris dans les dépens sont productives d'intérêts dans les conditions fixées par les dispositions de l'article 1231-7 du code civil.
9. Par l'arrêt de la cour du 19 juin 2017 dont il demande l'exécution, M. A... a obtenu la condamnation de la commune de Saint-Philippe à lui verser la somme de 9 881,52 euros au titre de l'indemnité d'administration et de technicité (IAT) pour la période de janvier 2007 à juin 2012. Cette décision a le caractère d'une condamnation à une indemnité, au sens de l'article 1231-7 du code civil, et d'une condamnation pécuniaire au sens de l'article L. 313-3 du code monétaire et financier. Dès lors, sans qu'il fût nécessaire de le prévoir explicitement, la somme allouée par l'arrêt de la cour était productive d'intérêts. Il en va de même de la somme due au titre des frais non compris dans les dépens. Il est constant que ces intérêts n'ont pas été réglés.
S'agissant des intérêts de retard dus sur la somme au principal :
10. Il résulte de l'instruction que M. A... a perçu le 9 mai 2019 la somme correspondant à l'indemnité d'administration et de technicité (IAT) que la commune de Saint-Philippe a été condamnée à lui verser. En application des dispositions et principes précédemment rappelés, il était en droit de percevoir des intérêts au taux légal à compter du 19 juin 2017, date du prononcé de l'arrêt, jusqu'au 9 mai 2019, date à laquelle le règlement de la somme est effectivement intervenu. L'arrêt ayant été notifié à la commune de Saint-Philippe le 23 juin 2017, la majoration d'intérêt prévue à l'article L. 313-3 du code monétaire et financier était applicable à compter du 23 août 2017. Il s'ensuit que la somme due au titre des intérêts de retard s'élevait, compte tenu des taux fixés semestriellement par le ministre chargé de l'économie, à 1 534,12 euros.
S'agissant des intérêts de retard relatifs à la somme due au titre des frais liés à l'instance :
11. Il résulte de l'instruction que M. A... a perçu le 4 octobre 2021 la somme correspondant aux frais exposés dans l'instance n° 15BX02987 et non compris dans les dépens. En application des dispositions et principes précédemment rappelés, il était en droit de percevoir des intérêts au taux légal pour la période du 19 juin 2017 au 4 octobre 2021, tenant compte d'une majoration d'intérêt applicable deux mois après la notification de l'arrêt. Dans ces conditions, le montant des intérêts sur la somme due au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative s'élève à 351,83 euros.
12. Il résulte de tout ce qui précède que la commune de Saint-Philippe devait à M. A... la somme totale de 1 885,95 euros au titre des intérêts au taux légal. Il y a lieu d'enjoindre à la commune de procéder au paiement de cette somme dans un délai maximal d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.
DECIDE :
Article 1er : Il est enjoint à la commune de Saint-Philippe de verser, dans un délai maximal d'un mois à compter de la notification du présent arrêt, la somme de 1 885,95 euros à M. A....
Article 2 : Les conclusions de M. A... sont rejetées pour le surplus.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et à la commune de Saint-Philippe. Copie en sera transmise au ministre des Outre-mer.
Délibéré après l'audience du 29 novembre 2021 à laquelle siégeaient :
Mme Karine Butéri, présidente,
Mme Sylvie Cherrier, première conseillère,
M. Olivier Cotte, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 17 décembre 2021.
Le rapporteur,
Olivier Cotte
La présidente,
Karine Butéri
La greffière,
Catherine Jussy
La République mande et ordonne au préfet de la Réunion en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 20BX01906