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18/01/2022 | FRANCE | N°21BX01690

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 4ème chambre, 18 janvier 2022, 21BX01690


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F... A... B... a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté du 3 mars 2021 par lequel la préfète de la Vienne l'a assigné à résidence.

Par un jugement n° 2100582 du 9 mars 2021, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour administrative d'appel :

Par une requête, enregistrée le 8 avril 2021, M. A... B..., représenté par Me Lelong, demande à la cour :

1°) d'annuler l

e jugement n° 2100582 du magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Poitiers du 9 ma...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F... A... B... a demandé au tribunal administratif de Poitiers d'annuler l'arrêté du 3 mars 2021 par lequel la préfète de la Vienne l'a assigné à résidence.

Par un jugement n° 2100582 du 9 mars 2021, le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour administrative d'appel :

Par une requête, enregistrée le 8 avril 2021, M. A... B..., représenté par Me Lelong, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2100582 du magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Poitiers du 9 mars 2021 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 3 mars 2021 de la préfète de la Vienne ;

3°) de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle à titre provisoire et de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 1 500 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ou, à défaut, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement est irrégulier en ce que, en méconnaissance du principe du contradictoire, le magistrat désigné n'a pas sollicité les observations des parties avant de procéder d'office à une substitution de base légale ;

- l'arrêté attaqué a été signé par une autorité incompétente ; la publication du recueil des actes administratifs de la préfecture sur son site internet ne constitue pas une publication régulière ;

- la préfète de la Vienne ne pouvait l'assigner à résidence sur le fondement du 1° du I de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la mesure d'assignation à résidence ne se justifie pas dès lors qu'il présente des garanties de représentation suffisantes ; les mesures auxquelles il est soumis sont, pour les mêmes motifs, excessives ;

- sa convocation, le 6 mai 2021, en vue d'une comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité, qui nécessite sa présence physique, constitue une circonstance nouvelle faisant obstacle à l'exécution de la mesure d'éloignement et entraîne nécessairement l'illégalité de la décision d'assignation à résidence.

Par un mémoire en défense, enregistré le 6 décembre 2021, la préfète de la Vienne conclut au rejet de la requête en faisant valoir que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

M. A... B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 20 mai 2021 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judicaire de Bordeaux.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. D... E..., a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A... B..., ressortissant portugais né le 9 janvier 1988, est entré en France, selon ses déclarations, au cours du mois de février 2009 et a fait l'objet, le 17 mai 2020, d'une décision portant obligation de quitter le territoire français sans délai à destination de son pays d'origine. Pour la mise en œuvre de cette mesure, la préfète de la Vienne, par un arrêté du 3 mars 2021, l'a assigné à résidence pour une période de quarante-cinq jours. L'intéressé relève appel du jugement du 9 mars 2021 par lequel le magistrat désigné par la présidente du tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la demande d'admission provisoire à l'aide juridictionnelle :

2. Aux termes de l'article 20 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique : " Dans les cas d'urgence, (...) l'admission provisoire à l'aide juridictionnelle peut être prononcée par la juridiction compétente ou son président. (...) ".

3. M. A... B... a été admis à l'aide juridictionnelle totale par une décision n° 2021/009606 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judicaire de Bordeaux du 20 mai 2021. Il n'y a donc pas lieu de l'admettre provisoirement au bénéfice de l'aide juridictionnelle.

Sur la régularité du jugement attaqué :

4. Les motifs exposés au point 7 du jugement attaqué répondent au moyen soulevé par le requérant tiré de ce que la mesure d'assignation à résidence qui lui a été notifiée est entachée d'une erreur de droit dès lors que la préfète de la Vienne ne pouvait fonder cette décision sur le 1° de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et indiquent que, contrairement à ce qui est soutenu, la décision litigieuse a été prise sur le fondement des 5° et 6° de cet article. Ce faisant, le magistrat désigné n'a aucunement procédé à une substitution de la base légale de la mesure d'assignation à résidence. Par suite, le moyen tiré de ce que le premier juge, en procédant d'office à une substitution de base légale sans avoir invité le requérant à présenter des observations sur ce point, a méconnu le principe du contradictoire, doit être écarté.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

5. En premier lieu, M. C..., sous-préfet, secrétaire général de la préfecture de la Vienne, qui a signé la décision attaquée, bénéficiait à cet effet d'une délégation de signature accordée par arrêté de la préfète de la Vienne n° 2020-SG-DCPPAT-072 du 27 novembre 2020, publié au recueil des actes administratifs spécial n° D86-2020-155 de la préfecture du même jour. Contrairement à ce que soutient M. A... B..., une telle publication, effectuée dans un recueil légal et publié en ligne sur un site aisément accessible au public, est régulière. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté du 3 mars 2021 doit être écarté.

6. En deuxième lieu, à l'appui du moyen tiré de ce que la mesure d'assignation à résidence litigieuse est entachée d'une erreur de droit dès lors que la préfète de la Vienne ne pouvait fonder cette décision sur le 1° du I de l'article L. 561-2, M. A... B... ne se prévaut devant la cour d'aucun élément de fait ou de droit nouveau par rapport à l'argumentation développée en première instance. Par suite, il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs pertinemment retenus par le premier juge.

7. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors en vigueur : " I.- L'autorité administrative peut prendre une décision d'assignation à résidence à l'égard de l'étranger qui ne peut quitter immédiatement le territoire français mais dont l'éloignement demeure une perspective raisonnable, lorsque cet étranger : / (...) 5° Fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français prise moins d'un an auparavant et pour laquelle le délai pour quitter le territoire est expiré ou n'a pas été accordé ; (...) L'article L. 551-1 est applicable lorsqu'un étranger assigné à résidence en application du présent article : a) Ne présente plus de garanties de représentation effectives propres à prévenir le risque mentionné au 3° du II de l'article L. 511-1 ; (...) ". Aux termes de l'article L. 551-1 du même code, dans sa rédaction applicable : " I.- Dans les cas prévus aux 1° à 7° du I de l'article L. 561-2, l'étranger qui ne présente pas de garanties de représentation effectives propres à prévenir le risque mentionné au 3° du II de l'article L. 511-1 peut être placé en rétention par l'autorité administrative dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire (...) ".

8. D'une part, il résulte de ces dispositions que, dans les cas qu'elles énumèrent, l'assignation à résidence de l'étranger doit être privilégiée à celle de son placement en rétention administrative lorsqu'il présente des garanties de représentation effectives propres à prévenir un risque de soustraction à la mesure d'éloignement dont il a fait l'objet. Dès lors, la décision en litige assignant M. A... B... à résidence, le moyen tiré de ce qu'il présenterait de telles garanties doit être écarté comme inopérant.

9. D'autre part, il ressort des termes de l'arrêté attaquée qu'à compter du 3 mars 2021 et pour une durée de quarante-cinq jours, M. A... B... est assigné à résidence dans le département de la Vienne et a l'obligation de se présenter trois fois par semaine, les lundi, mercredi et vendredi au commissariat de Poitiers. Si l'intéressé soutient que ces mesures sont excessives, il n'assortit ce moyen d'aucune précision permettant d'en apprécier le bien-fondé.

10. En dernier lieu, il appartient à l'administration de ne pas mettre à exécution l'obligation de quitter le territoire français si un changement dans les circonstances de droit ou de fait a pour conséquence de faire obstacle à la mesure d'éloignement. Dans pareille hypothèse, l'étranger peut demander au président du tribunal administratif, sur le fondement du III de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors en vigueur, l'annulation de la décision l'assignant à résidence dans les quarante-huit heures suivant sa notification. S'il n'appartient pas à ce juge de connaître de conclusions tendant à l'annulation de l'obligation de quitter le territoire français après que le juge saisi sur le fondement du I de l'article L. 512-1 de ce code a statué ou que le délai pour le saisir a expiré, il lui est loisible, le cas échéant, d'une part, de relever, dans sa décision, que l'intervention de nouvelles circonstances de fait ou de droit fait obstacle à l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français et impose à l'autorité administrative de réexaminer la situation administrative de l'étranger, d'autre part, d'en tirer les conséquences en suspendant les effets de l'obligation de quitter le territoire français devenue, en l'état, inexécutable.

11. L'arrêté attaqué du 3 mars 2021 n'a ni pour objet ni pour effet d'éloigner le requérant du territoire français et, eu égard à sa durée et aux mesures rappelées au point 9, ne l'empêchait nullement de satisfaire à sa convocation du 6 mai 2021 devant le tribunal judiciaire de Poitiers en vue d'une comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité. En outre, contrairement à ce que soutient M. A... B..., cette convocation n'emporte pas, en tant que telle, autorisation de séjourner sur le territoire français jusqu'à la date qu'elle mentionne et ne fait pas obstacle à l'exécution de la mesure d'éloignement dont il a fait l'objet le 17 mai 2020. Par suite, le requérant n'est pas fondé à soutenir que l'impossibilité d'exécuter cette dernière mesure entraîne nécessairement l'illégalité de la décision d'assignation à résidence.

12. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande. Il y a lieu de rejeter, par voie de conséquence, les conclusions tendant à l'application combinée des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

DECIDE :

Article 1er : M. A... B... n'est pas admis à titre provisoire au bénéfice de l'aide juridictionnelle.

Article 2 : La requête de M. A... B... est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. F... A... B... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée à la préfète de la Vienne.

Délibéré après l'audience du 17 décembre 2021 à laquelle siégeaient :

Mme Evelyne Balzamo, présidente,

M. Dominique Ferrari, président-assesseur,

M. Michaël Kauffmann, premier conseiller,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 18 janvier 2022.

Le rapporteur,

Michaël E...La présidente,

Evelyne BalzamoLe greffier,

André Gauchon

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

N° 21BX016903


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 21BX01690
Date de la décision : 18/01/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-04-01 Étrangers. - Séjour des étrangers. - Restrictions apportées au séjour. - Assignation à résidence.


Composition du Tribunal
Président : Mme BALZAMO
Rapporteur ?: M. Michaël KAUFFMANN
Rapporteur public ?: Mme CABANNE
Avocat(s) : LELONG

Origine de la décision
Date de l'import : 25/01/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2022-01-18;21bx01690 ?
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