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28/02/2022 | FRANCE | N°20BX02797

France | France, Cour administrative d'appel de Bordeaux, 5ème chambre, 28 février 2022, 20BX02797


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par actions simplifiée unipersonnelle (SASU) Audit Action Plus a demandé au tribunal administratif de Toulouse de prononcer la décharge ou la réduction, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre des années 2013, 2014 et 2015 et de surseoir au paiement de l'impôt, en application des dispositions de l'article L. 277 du livre des procédures fiscales.

Par un jug

ement n° 1804276 du 28 janvier 2020, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par actions simplifiée unipersonnelle (SASU) Audit Action Plus a demandé au tribunal administratif de Toulouse de prononcer la décharge ou la réduction, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre des années 2013, 2014 et 2015 et de surseoir au paiement de l'impôt, en application des dispositions de l'article L. 277 du livre des procédures fiscales.

Par un jugement n° 1804276 du 28 janvier 2020, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 24 août 2020, la société Audit Action Plus, représentée par Me Carrere-Cretoz, demande à la cour de prononcer la nullité du contrôle et de la proposition de rectification du 20 décembre 2016, à défaut de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre des années 2013, 2014 et 2015.

Elle soutient que :

- la motivation du jugement est insuffisante pour caractériser l'acte anormal de gestion ;

- la procédure d'imposition est irrégulière dès lors que l'administration ne lui a pas transmis la charte des droits et obligations du contribuable vérifié en violation de l'article L. 10 du livre des procédures fiscales ;

- le contribuable faisant l'objet d'une vérification de comptabilité doit avoir la possibilité d'un débat oral et contradictoire ;

- c'est à tort que l'administration a refusé de faire droit à sa demande de saisine de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires à la suite d'un problème technique d'adresse électronique ;

- la reconstitution du chiffre d'affaires réalisée par l'administration est erronée dès lors qu'elle n'a pas pris en compte des factures constituant les charges déductibles des bénéfices et a retenu à tort dans les produits imposables, des recettes provenant de l'activité d'auto-entrepreneur de son dirigeant et des sommes qui ont été remboursées aux clients ; il appartient à l'administration d'apporter la preuve du caractère anormal de ces charges.

Par un mémoire en défense, enregistré le 22 février 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance, conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que :

- le moyen tiré de l'absence de débat oral et contradictoire est irrecevable dès lors qu'il est dépourvu de précision permettant d'en apprécier le bien-fondé et que la société requérante ne précise pas l'erreur qu'aurait pu commettre le tribunal en l'écartant ;

- aucun des moyens soulevés par la société requérante n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Birsen Sarac-Deleigne,

- et les conclusions de M. Stéphane Gueguein, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La SASU Audit Action Plus qui a pour objet social une activité de conseils comptable, fiscal et financier, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er mars 2013 au 31 décembre 2015, à l'issue de laquelle elle s'est vu notifier, par une proposition de rectification du 20 décembre 2016, des rehaussements d'impôt sur les sociétés et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre des années 2013 à 2015. La société dont M. A... est le président et l'associé unique, relève appel du jugement du 28 janvier 2020, par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à la décharge ou à la réduction des impositions mises à sa charge ainsi que des pénalités correspondantes.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Pour juger que l'administration avait à bon droit refusé de déduire un certain nombre de charges supplémentaires, notamment les factures émises par les sociétés Compagy Création et Cecorps Ltd, le tribunal a estimé qu'il n'était pas établi que ces dépenses aient été engagées dans l'intérêt direct de l'exploitation ou qu'elles se rattachaient à la gestion normale de l'entreprise. Le tribunal, qui n'était pas tenu de répondre à l'ensemble des arguments de la société requérante a ainsi suffisamment motivé son jugement sur ce point.

Sur la régularité de la procédure :

3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 10 du livre des procédures fiscales : " (...) / Les dispositions contenues dans la charte des droits et obligations du contribuable vérifié mentionnée au troisième alinéa de l'article L. 47 sont opposables à l'administration. ". Aux termes de l'article L. 47 du même livre, dans sa rédaction applicable au litige : " (...) une vérification de comptabilité ne peut être engagée sans que le contribuable en ait été informé par l'envoi ou la remise d'un avis de vérification. (...) / L'avis informe le contribuable que la charte des droits et obligations du contribuable vérifié peut être consultée sur le site internet de l'administration fiscale ou lui être remise sur simple demande. / (...) ".

4. Il ressort de l'avis de vérification adressé à la société requérante le 8 novembre 2016, en recommandé avec accusé de réception, qu'il comportait la mention de ce que la charte des droits et obligations du contribuable pouvait être consultée sur le site www.impots.gouv.fr sous la rubrique : Professionnels ) Vos droits ) La charte des droits et obligations du contribuable vérifié ou être remise sur simple demande. La société requérante qui ne justifie pas avoir demandé la communication de la charte du contribuable, laquelle n'avait pas à être jointe à l'avis de vérification, ne peut valablement reprocher à l'administration de ne pas la lui avoir adressée en méconnaissance des articles L. 10 et L. 47 du livre des procédures fiscales.

5. En deuxième lieu, aux termes du premier alinéa de l'article L. 13 du livre des procédures fiscales : " Les agents de l'administration des impôts vérifient sur place, en suivant les règles prévues par le présent livre, la comptabilité des contribuables astreints à tenir et à présenter des documents comptables ". Dans le cas où la vérification de la comptabilité d'une entreprise a été effectuée, comme il est de règle, dans ses propres locaux, c'est au contribuable qui allègue que les opérations de vérification ont été conduites sans qu'il ait eu la possibilité d'avoir un débat oral et contradictoire avec le vérificateur de justifier que ce dernier se serait refusé à un tel débat.

6. Il résulte de l'instruction que les opérations de vérification se sont déroulées dans les locaux de la société et que son dirigeant a rencontré à trois reprises le vérificateur. Il ne résulte d'aucun des éléments de l'instruction que le vérificateur se serait refusé à tout échange avec le représentant de la société durant les opérations de contrôle. Par ailleurs, aucune disposition législative ou réglementaire n'impose au vérificateur de donner au contribuable, avant l'envoi de la notification de redressements, une information sur les redressements qu'il pourrait envisager. La société Audit Action Plus n'est donc pas fondée à soutenir qu'elle aurait été privée d'un débat oral et contradictoire.

7. En troisième lieu, la société requérante reprend, dans des termes similaires et sans critique utile du jugement, le moyen invoqué en première instance et tiré du vice de procédure résultant de l'absence de saisine de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires prévue à l'article L. 59 du livre des procédures fiscales. Elle n'apporte aucun élément de droit ou fait nouveau, ni aucune pièce nouvelle à l'appui de ce moyen auquel le tribunal administratif de Toulouse a suffisamment et pertinemment répondu, en estimant que dès lors que le désaccord n'a pas été porté à la connaissance du service dans le délai requis et que l'erreur d'envoi du courriel est exclusivement imputable au contribuable, l'administration n'était pas tenue de faire droit à la demande de saisine de la commission départementale des impôts et des taxes sur le chiffre d'affaires, formée le 6 juin 2017. Il y a lieu, dès lors, d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus par les premiers juges.

Sur le bien-fondé des impositions en litige :

8. Aux termes de l'article R * 194-1 du livre des procédures fiscales : " Lorsque, ayant donné son accord à la rectification ou s'étant abstenu de répondre dans le délai légal à la proposition de rectification, le contribuable présente cependant une réclamation faisant suite à une procédure contradictoire de rectification, il peut obtenir la décharge ou la réduction de l'imposition, en démontrant son caractère exagéré. ". Il résulte de l'instruction que la société requérante n'a pas répondu à la proposition de rectification du 20 décembre 2016, qui a été remise en main propre, dans le délai de trente jours, prorogé de trente jours supplémentaires, qui lui était imparti. Par suite, la société requérante qui a tacitement accepté les rectifications, supporte, en application des dispositions de l'article R. 194-1 précité, la charge de la preuve du caractère exagéré des impositions supplémentaires en litige.

En ce qui concerne la reconstitution des recettes :

9. Il résulte de l'instruction que le vérificateur, après avoir rejeté la comptabilité de la société Audit Action Plus, a procédé à la reconstitution du chiffre d'affaires de la société, en se fondant notamment sur les éléments obtenus après l'exercice du droit de communication auprès de l'autorité judiciaire. L'examen des comptes personnels de M. A... a révélé l'encaissement de chèques et virements provenant de clients de la société Audit Action Plus, à hauteur de 40 660, 03 euros pour l'année 2013, 11 075 euros pour l'année 2014 et 12 112 euros pour l'année 2015 que l'administration a réintégrés aux résultats de la société.

10. Si la société conteste la réintégration d'une partie des recettes au motif qu'elle correspondrait à des recettes provenant de l'activité d'autoentrepreneur de M. A..., également dénommée Audit Action Plus, et dont l'activité aurait cessé en août 2013, elle ne verse aux débats aucun élément de justification à l'appui de ces affirmations alors qu'il n'est pas contesté que les encaissements enregistrés sur le compte personnel de M. A... sont essentiellement constitués de chèques libellés au nom de la société Audit Action Plus, mention à laquelle a été rajouté le nom de A..., qu'aucun bénéfice n'a été déclaré au titre de l'année 2013 à raison de l'activité d'autoentreprise de M. A... et que ces encaissements se sont poursuivis en 2013 mais également en 2014 et 2015, après la cessation de l'activité d'autoentrepreneur de M. A.... Par ailleurs, si la société requérante soutient que les principales sommes déposées sur le compte personnel de M. A... ont été remboursées à des clients, et notamment une somme de 5 500 euros, à la suite d'un projet de création d'une société à l'étranger qui n'aurait pas abouti, une somme de 4 700 euros correspondant à des honoraires du transfert d'un siège à Londres qui ne s'est pas effectué ainsi qu'une somme de 780 euros correspondant à un prêt familial, elle n'apporte, ainsi que le soutient l'administration, aucun justificatif à l'appui de ses allégations.

En ce qui concerne les charges :

11. Aux termes de l'article 39 du code général des impôts, applicable pour la détermination de l'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 du même code : " 1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant, sous réserve des dispositions du 5, notamment : 1° Les frais généraux de toute nature, les dépenses de personnel et de main-d'œuvre, le loyer des immeubles dont l'entreprise est locataire. (...) ". Pour être admis en déduction de l'impôt sur les sociétés, ces frais doivent être exposés dans l'intérêt direct de l'exploitation ou se rattacher à la gestion normale de l'entreprise, correspondre à une charge effective, être appuyés de justifications suffisantes et être compris dans les charges de l'exercice au cours duquel ils ont été engagés.

12. Il résulte de l'instruction que l'administration n'a pas remis en cause le montant des charges d'exploitation comptabilisées par la société requérante. Cette dernière sollicite toutefois la déduction de charges supplémentaire, non inscrites en comptabilité.

13. S'agissant des trois factures émises par la société marocaine S2A informatique pour la création de logiciels informatiques pour des montants de 11 970 euros, 5 980 euros et 5 680 euros, l'administration a refusé leur comptabilisation dans les charges au motif que la SASU Audit Action Plus n'a pas comptabilisé de logiciel informatique en cours de réalisation à l'actif du bilan et qu'en outre, l'ensemble des prestations a été facturé selon un forfait, pour des sommes importantes, sans aucune précision sur le temps passé et en l'absence de tout de contrat signé détaillant les modalités et les conditions d'intervention. La facture émise le 20 février 2013 par la Compagny Création Ldt pour un montant de 1 700 euros, relative à la création d'une société en Ecosse, a été rejetée par l'administration au motif que la société requérante n'établissait pas que cette dépense aurait été engagée dans l'intérêt direct de l'exploitation. Enfin, l'administration a refusé la déductibilité de la facture émise en mars 2013 par la société britannique Cecorps Limited, relative à une prestation de formation à la fiscalité anglo-saxonne au motif que la société appelante, qui ne justifie d'aucun client anglo-saxon, ne démontrait pas que cette formation était susceptible de répondre à ses besoins. La société requérante qui se borne à soutenir qu'elle sollicite toujours la déduction desdites factures, n'apporte aucun élément permettant de contredire l'appréciation de l'administration. Ainsi, il ne résulte pas de l'instruction que les factures invoquées correspondraient à des charges déductibles de la société Audit Action Plus.

14. Il résulte de tout ce qui précède que la société Audit Action Plus n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la société Audit Action Plus est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société Audit Action Plus et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Copie en sera adressée au directeur régional des finances publiques d'Occitanie et du département de la Haute-Garonne.

Délibéré après l'audience du 8 février 2022 à laquelle siégeaient :

Mme Elisabeth Jayat, présidente,

Mme Birsen Sarac-Deleigne, première conseillère,

Mme Laury Michel, première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 28 févier 2022.

La rapporteure,

Birsen Sarac-DeleigneLa présidente,

Elisabeth Jayat

La greffière,

Virginie Santana

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 20BX02797


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Bordeaux
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 20BX02797
Date de la décision : 28/02/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Règles générales - Impôt sur les bénéfices des sociétés et autres personnes morales.

Contributions et taxes - Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées - Taxe sur la valeur ajoutée.


Composition du Tribunal
Président : Mme JAYAT
Rapporteur ?: Mme Birsen SARAC-DELEIGNE
Rapporteur public ?: M. GUEGUEIN
Avocat(s) : CARRERE-CRETOZ

Origine de la décision
Date de l'import : 08/03/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.bordeaux;arret;2022-02-28;20bx02797 ?
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