Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. L... I... a demandé au tribunal administratif de la Guyane d'annuler l'arrêté du 3 juin 2020 par lequel le préfet de la Guyane a rejeté sa demande de titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours à destination de son pays d'origine.
Par un jugement n°2001267 du 5 mai 2022, le tribunal administratif de la Guyane a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 31 août 2022, M. I..., représenté par Me Pepin, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 5 mai 2022 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet de la Guyane du 3 juin 2020 ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Guyane de lui délivrer une carte de séjour temporaire mention " vie privée et familiale " et, dans l'attente, lui remettre une autorisation provisoire de séjour avec droit au travail sous huit jours, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ; à titre subsidiaire de réexaminer sa demande dans un délai de 2 mois et, dans l'attente de lui remettre une autorisation provisoire de séjour avec droit au travail sous huit jours, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
En ce qui concerne l'arrêté pris dans son ensemble :
- la compétence du signataire de cet arrêté n'est pas établie ;
En ce qui concerne le refus de titre de séjour ;
- cette décision est entachée d'erreur de fait en retenant qu'il ne réside pas avec ses enfants mineurs ;
- le tribunal a estimé à tort que sa concubine n'était pas en situation régulière ;
- cette décision est entachée d'erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article L.313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- cette décision a été prise en méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :
- elle est dépourvue de base légale en raison de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour ;
- elle a été prise en méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;
M. I... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 18 juillet 2022.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme J... K... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. I..., ressortissant haïtien né en 1993, déclare être entré sur le territoire français en 2014. Il a sollicité un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 3 juin 2020, le préfet de la Guyane a rejeté sa demande de titre de séjour et a prononcé à son encontre une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours à destination de son pays d'origine. M. I... fait appel du jugement du 5 mai 2022 par lequel le tribunal administratif de la Guyane a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
2. Par un arrêté du 31 décembre 2019 régulièrement publié au recueil des actes administratifs du 2 janvier 2020, le préfet de la Guyane a donné délégation à M. E... F..., directeur général de la sécurité, de la réglementation et des contrôles, à l'effet de signer les actes en matière d'accueil au séjour des étrangers, d'instruction des titres de séjour, d'éloignement et de contentieux. Par ce même arrêté, M. F... a été autorisé, sur ce point, à subdéléguer sa signature aux agents placés sous son autorité. Par un arrêté du 18 mars 2020, publié le 19 mars 2020 au recueil des actes administratifs de la préfecture de Guyane, M. F... a donné délégation à M. A... H..., chef du bureau de l'éloignement et du contentieux, signataire de l'arrêté attaqué, pour signer en cas d'absence ou d'empêchement de M. C... G..., directeur général adjoint de la sécurité, de la réglementation et des contrôles et directeur de l'immigration et de la citoyenneté, les décisions en matière d'éloignement et de contentieux. Ce même arrêté donne compétence à M. B... D..., chef du bureau et de l'accueil séjour et asile pour signer, en cas d'absence ou d'empêchement de M. C... G..., les décisions en matière d'accueil au séjour des étrangers et en matière d'asile. Il suit de là que M. H... n'était pas compétent pour signer la décision du 3 juin 2020 par laquelle il a refusé de délivrer un titre de séjour à M. I....
3. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de la requête, et en raison des effets qui s'attachent à l'annulation pour excès de pouvoir de la décision de refus de titre de séjour, que M. I... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de la Guyane a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 3 juin 2020.
Sur l'injonction :
4. Eu égard à ses motifs, le présent arrêt implique seulement que le préfet de la Guyane procède au réexamen de la situation de M. I.... Il y a lieu d'enjoindre au préfet de la Guyane de procéder à ce réexamen dans le délai de deux mois suivant la date de notification du présent arrêt et, dans l'attente, de le munir sans délai d'une autorisation provisoire de séjour. En revanche, n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte.
Sur les frais liés au litige :
5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'État le versement à Me Pépin d'une somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
DECIDE :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de la Guyane du 5 mai 2022 et l'arrêté du préfet de la Guyane du 3 juin 2020 sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet de la Guyane de procéder au réexamen de la situation de M. I... dans un délai de deux mois et, dans l'attente, de le munir d'une autorisation provisoire de séjour.
Article 3 : L'État versera à Me Pépin une somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Article 4 : Le surplus des conclusions de M. I... est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. L... I..., au préfet de la Guyane, au ministre de l'intérieur et des outre-mer et à Me Pépin.
Délibéré après l'audience du 2 mars 2023, à laquelle siégeaient :
M. Jean-Claude Pauziès, président,
Mme Christelle Brouard-Lucas, présidente-assesseure,
Mme Birsen Sarac-Deleigne, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 23 mars 2023.
La rapporteure,
Christelle K...Le président,
Jean-Claude Pauziès
La greffière,
Stéphanie Larrue
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 22BX02354