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03/10/2024 | FRANCE | N°23BX00970

France | France, Cour administrative d'appel de BORDEAUX, 2ème chambre, 03 octobre 2024, 23BX00970


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler la décision du 7 décembre 2020 par laquelle le directeur général de l'agence régionale de santé (ARS) Nouvelle-Aquitaine a modifié la décision d'attribution de la part fonctionnelle de sa prime de fonctions et de résultats pour 2020.



Par un jugement n° 2100596 du 6 mars 2023, le tribunal administratif de Bordeaux

a rejeté sa demande.



Procédure devant l

a cour :



Par une requête et un mémoire, enregistrés les 6 avril et 14 novembre 2023, M. B..., représenté pa...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler la décision du 7 décembre 2020 par laquelle le directeur général de l'agence régionale de santé (ARS) Nouvelle-Aquitaine a modifié la décision d'attribution de la part fonctionnelle de sa prime de fonctions et de résultats pour 2020.

Par un jugement n° 2100596 du 6 mars 2023, le tribunal administratif de Bordeaux

a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 6 avril et 14 novembre 2023, M. B..., représenté par Me Le Baut, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 6 mars 2023 ;

2°) de renvoyer l'affaire devant le tribunal ou, à titre subsidiaire, d'annuler la décision du directeur général de l'ARS Nouvelle-Aquitaine du 7 décembre 2020 ;

3°) de mettre à la charge de l'ARS Nouvelle-Aquitaine la somme de 1 560 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement est irrégulier en ce qu'il ne comporte pas les signatures requises par l'article R. 741-7 du code de justice administrative ;

- les premiers juges ont entaché leur jugement de contradiction de motifs, d'une part en tenant compte des périodes de suspension et d'exclusion de fonctions pour apprécier le calcul de la part fonctionnelle de la prime tout en refusant d'apprécier la légalité de telles décisions, et, d'autre part, en considérant que la contestation de ces décisions n'était pas assortie des précisions suffisantes pour en apprécier le bien-fondé tout en jugeant que la modification de sa part fonctionnelle était justifiée par ses absences ;

- le jugement est entaché d'une omission de répondre à des moyens, lorsque les premiers juges ont considéré comme irrecevable l'exception d'illégalité des décisions de suspension et d'exclusion, et lorsqu'ils écartent le moyen tiré de l'incompétence de la directrice départementale de l'ARS de Dordogne sans vérifier la date de publication de la délégation de signature et donc son opposabilité ;

- le contradictoire n'a pas été respecté par les premiers juges, dès lors que postérieurement à la clôture d'instruction, ils ont demandé des pièces à l'ARS et les ont communiquées en ne rouvrant l'instruction que sur ces productions ; cette communication, dès lors qu'elle n'était assortie d'aucune prétention particulière, ne permettait pas d'assurer un contradictoire utile ; en outre, le jugement s'est fondé dessus sans procéder à leur analyse dans les visas et alors qu'il n'est pas démontré que l'ARS était dans l'impossibilité de communiquer ces pièces avant clôture ;

- la procédure de première instance a méconnu le principe du droit à un procès équitable, dans un délai raisonnable, compte tenu des délais écoulés pour la production du mémoire en défense et des pièces demandées par le tribunal ;

- l'arrêté est signé par une autorité incompétente, puisque l'article 65-2 de la loi

du 9 janvier 1986 a été abrogé par l'article 27 de la loi du 6 août 2019, excluant la compétence de l'ARS ; en outre, il n'est pas démontré que la directrice déléguée pour la Dordogne aurait reçu une délégation de signature du directeur général de l'ARS régulièrement publiée ;

- la part fonctionnelle de la prime de fonctions et de résultats a pour objet de tenir compte des sujétions liés au grade et elle est sans lien avec l'appréciation de la manière de servir de l'agent, prise en compte dans la part " résultats " ; cette part ne peut être modulée pour prendre en compte les absences de l'agent, elle revêt un caractère forfaitaire ;

- cette part lui a été retirée en méconnaissance de l'article L. 242-1 du code des relations entre le public et l'administration, dès lors que le droit acquis à la rémunération découle du bulletin de paie et que les arrêtés de suspension et d'exclusion n'ont, en tout état de cause, pas mentionné l'exclusion du versement de cette part de la prime ;

- les deux décisions de suspension et d'exclusion, contestées dans des instances distinctes, ne sont pas revêtues de l'autorité de chose décidée, puisqu'une partie des faits qui lui étaient reprochés dans la première décision a été abandonnée dans la seconde et que cette dernière a fait l'objet d'un contentieux devant le tribunal ;

- pour apprécier le bien-fondé de la décision, il ne pouvait être tenu compte de la décision de licenciement prise postérieurement.

Par un mémoire en défense enregistré le 22 septembre 2023, l'ARS

Nouvelle-Aquitaine conclut au rejet de la requête.

Elle fait valoir que :

- seule la minute du jugement doit être revêtue des signatures requises par

l'article R. 741-7 du code de justice administrative ;

- le jugement est suffisamment motivé et n'est entaché d'aucune contradiction de motifs, notamment lorsqu'il tient compte des décisions de suspension et d'exclusion des fonctions tout en jugeant insuffisamment précise l'argumentation développée au soutien de l'exception d'illégalité ;

- il n'est entaché d'aucune omission à statuer ; l'exception d'illégalité n'a pas été déclarée irrecevable, elle a été écartée comme n'étant pas assortie des précisions suffisantes pour en apprécier le bien-fondé ; en tout état de cause, l'illégalité, soulevée par voie d'exception, des décisions d'avril et septembre 2020,ne pouvait plus être invoquée après l'expiration des délais de recours; les premiers juges ont en outre bien répondu sur la publication de la délégation de signature ;

- le contradictoire n'a pas été méconnu, le tribunal ayant seulement fait application des dispositions de l'article R. 613-1-1 du code de justice administrative ; en outre, pour écarter le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté, les premiers juges se sont fondés sur une pièce produite avant la clôture ; régulièrement avertis du jour de l'audience, M. B... et son conseil ne s'y sont pas présentés pour formuler d'éventuelles observations ;

- le licenciement de 2021 n'a été évoqué qu'à titre d'élément d'éclairage et ne sert pas de fondement à la décision prise par les premiers juges ;

- le droit à un procès équitable a été respecté, M. B... ayant bénéficié d'un délai suffisant pour être en mesure de produire un mémoire en réplique et choisi de ne pas se rendre à l'audience pour présenter d'ultimes observations ;

- l'abrogation de l'article 65-2 de la loi du 9 janvier 1986 n'a pris effet que

le 1er janvier 2021, et l'ARS était bien compétente pour évaluer les directeurs d'établissement en application des dispositions combinées de l'article 65 de cette loi et de l'article 12 du décret du 12 juin 2020 ; la délégation de signature visée dans la décision en litige a été régulièrement publiée et n'avait pas à être jointe ;

- la proratisation de la part fonctionnelle de la prime au regard des absences ne constitue pas une appréciation de la manière de servir ; cette part, comme son nom l'indique, est liée à l'exercice effectif des fonctions.

Par une ordonnance du 29 mai 2024, la clôture d'instruction a été fixée

au 28 juin 2024.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de la santé publique ;

- la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 ;

- la loi n° 2019-828 du 6 août 2019 ;

- l'ordonnance n° 2017-10 du 5 janvier 2017 ;

- le décret n° 2007-1930 du 26 décembre 2007 ;

- le décret n° 2012-749 du 9 mai 2012 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Antoine Rives,

- les conclusions de Mme Charlotte Isoard, rapporteure publique,

- et les observations de Me Le Baut, représentant M. B....

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., titularisé dans le corps des directeurs d'établissements sanitaires, sociaux et médico-sociaux à compter du 1er janvier 2018, a été affecté, le 1er septembre 2019, sur le poste de directeur du centre hospitalier de Nontron (Dordogne). Par une décision du 7 décembre 2020, le directeur général de l'ARS Nouvelle-Aquitaine a modifié la part fonctionnelle de la prime de fonctions et de résultats attribuée à M. B... pour l'année 2020 afin de tenir compte d'une suspension de ses fonctions pendant une durée de 142 jours et d'une exclusion temporaire de quinze jours. M. B... a saisi le tribunal administratif de Bordeaux afin de contester cet arrêté. Par la présente requête, il relève appel du jugement n° 2100596 du 6 mars 2023 par lequel le tribunal a rejeté sa demande.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier de première instance que la minute du jugement du 6 mars 2023 a été signée par le président de la formation de jugement, la rapporteure et le greffier d'audience, conformément aux dispositions de l'article R. 741-7 du code de justice administrative. La circonstance que l'ampliation qui a été notifiée aux parties ne comporte pas ces signatures manuscrites est sans incidence sur la régularité du jugement.

3. En deuxième lieu, si M. B... invoque la contradiction de motifs dont serait entaché le jugement attaqué, un tel moyen ne relève pas de la régularité du jugement mais de son bien-fondé. En tout état de cause, en considérant, au point 12 de leur jugement, que la prime de fonctions et de résultats des corps ou emplois fonctionnels des personnels de direction et des directeurs des soins de la fonction publique hospitalière, instituée par le décret du 9 mai 2012, présentait le caractère d'une indemnité liée à l'exercice effectif des fonctions et que, pour cette raison, l'ARS pouvait tenir compte, dans le calcul de son montant, des périodes d'absence de l'intéressé, puis en écartant au point suivant l'illégalité, soulevée par la voie de l'exception, des décisions du 10 avril 2020 et 25 septembre 2020 prononçant la suspension de M. B... et son exclusion temporaire pour une durée de 15 jours, en estimant ce moyen non assorti des précisions suffisantes pour en apprécier le bien-fondé, les premiers juges n'ont, contrairement à ce qu'il est soutenu, pas entaché leur décision d'une contradiction de motifs.

4. En troisième lieu, contrairement à ce qu'il est soutenu, et ainsi qu'il a été dit au point précédent, les premiers juges n'ont pas écarté l'exception d'illégalité comme irrecevable, mais comme n'étant pas assortie des précisions suffisantes pour en apprécier le bien-fondé. Ils ont également écarté le moyen tiré de l'incompétence de la signataire de la décision attaquée après avoir vérifié la date de publication de la délégation dont elle bénéficiait. Par suite, M. B... n'est pas fondé à soutenir que le jugement serait entaché d'une omission de répondre à un moyen.

5. En quatrième lieu, aux termes de l'article R. 613-1-1 du code de justice administrative : " Postérieurement à la clôture de l'instruction ordonnée en application de l'article précédent, le président de la formation de jugement peut inviter une partie à produire des éléments ou pièces en vue de compléter l'instruction. Cette demande, de même que la communication éventuelle aux autres parties des éléments et pièces produits, n'a pour effet de rouvrir l'instruction qu'en ce qui concerne ces éléments ou pièces. ".

6. Il ressort des pièces du dossier de première instance que les premiers juges ont demandé, le 2 février 2023, à l'ARS Nouvelle-Aquitaine, sur le fondement des dispositions précitées, la production de diverses pièces. Celles-ci ont été reçues par le tribunal

le 6 février 2023 et communiquées le jour même au conseil de M. B.... Ainsi que le précisait le courrier de transmission, celui-ci était en mesure de présenter des observations sur ces pièces, conformément à ce que prévoient les dispositions de l'article R. 613-1-1. Par suite, M. B... n'est pas fondé à soutenir que le contradictoire n'aurait pu être assuré du fait de l'absence d'écritures de l'ARS accompagnant ces pièces, ni que ce principe aurait été méconnu dès lors qu'il n'est pas démontré que l'ARS était dans l'impossibilité de communiquer ces pièces avant clôture. Par ailleurs, les premiers juges, qui ont visé cette production, n'étaient pas tenus, s'agissant de pièces, de procéder à leur analyse dans leur décision.

7. En dernier lieu, la circonstance que l'ARS a produit son mémoire en défense trois mois après la saisine du tribunal par M. B..., puis, à la demande du tribunal, des pièces complémentaires postérieurement à la clôture de l'instruction, dans le cadre de la procédure prévue à l'article R. 613-1-1 du code de justice administrative, n'est pas de nature à caractériser une irrégularité du jugement attaqué.

Sur la légalité de l'arrêté du 7 décembre 2020 :

8. Aux termes de l'article 65-2 de la loi du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière, dans sa rédaction issue de l'ordonnance du 5 janvier 2017 relative à la mise à jour de la liste des établissements figurant à l'article 2 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière : " Par dérogation aux dispositions de l'article 65, l'évaluation des personnels de direction et des directeurs des soins des établissements mentionnés à l'article 2 et la détermination de la part variable de leur rémunération sont assurées :/ - par le directeur général de l'agence régionale de santé pour les directeurs d'établissements mentionnés aux 1°, 3° et 5° de l'article 2, après avis du président de l'assemblée délibérante ; (...) ". Aux termes de l'article 2 de cette loi : " Les dispositions du présent titre s'appliquent aux personnes qui, régies par les dispositions du titre premier du statut général, ont été nommées dans un emploi permanent à temps complet ou à temps non complet dont la quotité de travail est au moins égale au mi-temps, et titularisées dans un grade de la hiérarchie des établissements ci-après énumérés : 1° Etablissements publics de santé relevant du titre IV du livre Ier de la sixième partie du code de la santé publique ; (...) 3° Etablissements publics locaux accueillant des personnes âgées relevant du 6° du I de l'article L. 312-1 du code de l'action sociale et des familles, à l'exclusion de ceux rattachés au centre communal d'action sociale de la ville de Paris ; (...) ".

9. Il résulte des dispositions précitées que le directeur général de l'ARS Nouvelle-Aquitaine était compétent pour procéder à l'évaluation de M. B..., directeur du centre hospitalier de Nontron, ainsi que pour déterminer la part variable de sa rémunération. Si les dispositions précitées de l'article 65-2 de la loi du 9 janvier 1986 ont été abrogées par l'article 27 de la loi du 6 août 2019 de transformation de la fonction publique, cette abrogation n'a pris effet que le 1er janvier 2021, conformément aux dispositions du VII de l'article 94 de cette loi.

10. Mme D... C..., directrice de la délégation départementale de la Dordogne de l'ARS Nouvelle-Aquitaine, a reçu, par une décision du 8 octobre 2020 régulièrement publiée au recueil des actes administratifs spécial n° R75-2020-146 du 9 octobre 2020, délégation permanente à l'effet de signer " les actes, décisions, circulaires, rapports, correspondances et documents relevant, en application de l'article 6 de la décision du 1er janvier 2016 portant organisation de l'agence régionale de santé, de la compétence des délégations départementales " parmi lesquels figurent, notamment, " la gestion (vacances de postes, décisions d'intérim) et l'évaluation des directeurs des établissements médico-sociaux et, sur décision du directeur général, de certains établissements sanitaires de la fonction publique hospitalière (...) ". Dans ces conditions, le moyen tiré de ce que la décision en litige aurait été signée par une autorité incompétente doit être écarté.

11. Aux termes de l'article 1er du décret du 9 mai 2012 relatif à la prime de fonctions et de résultats des corps ou emplois fonctionnels des personnels de direction et des directeurs des soins de la fonction publique hospitalière : " Les fonctionnaires appartenant aux corps, d'une part, des personnels de direction des établissements mentionnés à l'article 2 de la loi du 9 janvier 1986 susvisée et, d'autre part, des directeurs des soins de la fonction publique hospitalière ou détachés dans l'un de ces corps ou sur un emploi fonctionnel, relevant des décrets du 2 août 2005 et du 9 mai 2012 susvisés, perçoivent une prime de fonctions et de résultats, dans les conditions fixées par le présent décret. (...) ". Aux termes de l'article 2 de ce décret : " La prime de fonctions et de résultats comprend deux parts : - une part tenant compte des responsabilités, du niveau d'expertise et des sujétions spéciales liées aux fonctions exercées ; - une part tenant compte des résultats de la procédure d'évaluation individuelle prévue par la réglementation en vigueur et de la manière de servir. " Aux termes de l'article 5 du même décret : " Les montants individuels de la part fonctionnelle et de la part liée aux résultats de l'évaluation et à la manière de servir sont respectivement déterminés comme suit : 1° Pour la part fonctionnelle, l'attribution individuelle est déterminée par application au montant de référence d'un coefficient multiplicateur compris dans une fourchette de 1 à 6 au regard des responsabilités, du niveau d'expertise et des sujétions spéciales liés à la fonction exercée. / Les personnels mentionnés à l'article 1er logés par nécessité absolue de service, ou qui bénéficient de l'indemnité compensatrice de logement en application de l'article 3 du décret du 8 janvier 2010 susvisé, perçoivent une part liée aux fonctions exercées affectée d'un coefficient compris dans une fourchette de 1 à 3 ; (...) ". Aux termes de l'article 6 : " La prime de fonctions et de résultats est exclusive de toutes autres indemnités liées aux fonctions, à la manière de servir et à la performance individuelle, à l'exception de celles énumérées par un arrêté conjoint des ministres chargés de la santé, du budget et de la fonction publique. "

12. Il résulte de ces dispositions que la part fonctionnelle de la prime de fonctions et de résultats est liée aux sujétions spéciales liées aux fonctions exercées, et donc corrélée à l'exercice effectif de ces fonctions. Par suite, le directeur général de l'ARS Nouvelle-Aquitaine a pu, sans commettre d'erreur de droit ni porter d'appréciation sur la manière de servir de l'intéressé, tenir compte de ses absences pour en fixer le montant.

13. Aux termes de l'article L. 242-1 du code des relations entre le public et l'administration : " L'administration ne peut abroger ou retirer une décision créatrice de droits de sa propre initiative ou sur la demande d'un tiers que si elle est illégale et si l'abrogation ou le retrait intervient dans le délai de quatre mois suivant la prise de cette décision. ". Aux termes de l'article L. 242-2 du même code : " Par dérogation à l'article L. 242-1, l'administration peut, sans condition de délai : 1° Abroger une décision créatrice de droits dont le maintien est subordonné à une condition qui n'est plus remplie ; (...) ".

14. Il ressort des pièces du dossier que, par une décision du 26 décembre 2019, le directeur général de l'ARS Nouvelle-Aquitaine a attribué à M. B..., bénéficiaire d'une indemnité compensatrice de logement, une part fonctionnelle de la prime de fonctions et de résultats pour 2020 affectée d'un coefficient de 3, pour un montant annuel de 13 680 euros. La décision en litige n'a ni pour objet ni pour effet d'abroger cette décision créatrice de droits, mais a seulement pour but de tirer les conséquences des périodes d'absence de M. B... au stade de la liquidation de cette prime et ainsi de répéter la part fonctionnelle de la prime de fonctions et de résultat indument perçue, comme le permet l'article 37-1 de la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations, selon lequel : " Les créances résultant de paiements indus effectués par les personnes publiques en matière de rémunération de leurs agents peuvent être répétées dans un délai de deux années à compter du premier jour du mois suivant celui de la date de mise en paiement du versement erroné, y compris lorsque ces créances ont pour origine une décision créatrice de droits irrégulière devenue définitive. " La circonstance que les arrêtés de suspension et d'exclusion temporaire des fonctions n'aient pas mentionné cette faculté est sans incidence sur les modalités de liquidation de la prime, et notamment sur la possibilité d'ajustement de son montant à l'exercice effectif des fonctions. Par suite, M. B... n'est pas fondé à soutenir que la décision en litige méconnaîtrait les dispositions de l'article L. 242-1 du code des relations entre le public et l'administration.

15. Par un jugement n° 2004088 du 5 mai 2022, devenu définitif, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté la demande de M. B... d'annulation de l'arrêté

du 10 avril 2020 par lequel la directrice générale du centre national de gestion des praticiens hospitaliers et des personnels de direction de la fonction publique hospitalière l'a suspendu de ses fonctions. En revanche, par un arrêt de ce jour n° 23BX01795, la cour a annulé l'arrêté

du 25 septembre 2020 prononçant à son encontre une exclusion temporaire de fonctions de quinze jours. Par suite, cet arrêté est illégal seulement en tant qu'il a pris en compte cette période de quinze jours pour réduire le montant de la part fonctionnelle de la prime de fonctions et de résultats pour 2020 attribuée à M. B....

16. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 7 décembre 2020 en tant qu'il a pris en compte la période de quinze jours d'exclusion temporaire des fonctions.

Sur les frais liés au litige :

17. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de l'ARS Nouvelle-Aquitaine la somme demandée par M. B... sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : L'arrêté du 7 décembre 2020 est annulé en tant qu'il a tenu compte de la période d'exclusion temporaire des fonctions de quinze jours pour réduire le montant de la part fonctionnelle de la prime de fonctions et de résultats pour 2020 attribuée à M. B....

Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 6 mars 2023 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : Le surplus des conclusions de M. B... est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et à la ministre de la santé et de l'accès aux soins. Copie en sera adressée à l'agence régionale de santé de Nouvelle-Aquitaine et au centre national de gestion des praticiens hospitaliers et des personnels de direction de la fonction publique hospitalière.

Délibéré après l'audience du 10 septembre 2024 à laquelle siégeaient :

Mme Catherine Girault, présidente,

Mme Anne Meyer, présidente assesseure,

M. Antoine Rives, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 3 octobre 2020.

Le rapporteur,

Antoine Rives

La présidente,

Catherine Girault

Le greffier,

Fabrice Benoit

La République mande et ordonne à la ministre de la santé et de l'accès aux soins en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 23BX00970


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de BORDEAUX
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 23BX00970
Date de la décision : 03/10/2024
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme GIRAULT
Rapporteur ?: M. Antoine RIVES
Rapporteur public ?: Mme ISOARD
Avocat(s) : LE BAUT

Origine de la décision
Date de l'import : 13/10/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-10-03;23bx00970 ?
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