Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C... B... a demandé au tribunal administratif de Bordeaux d'annuler l'arrêté du 27 juillet 2023 par lequel le préfet de la Gironde a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.
Par un jugement n° 2304326 du 23 novembre 2023, le tribunal a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 11 mars 2024, M. B..., représenté par Me Pardoe, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet de la Gironde du 27 juillet 2023 ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Gironde de lui délivrer un titre de séjour, ou, à défaut, de procéder au réexamen de sa situation, dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et de le munir, dans cette attente, d'une autorisation provisoire de séjour avec autorisation de travail, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à son conseil au titre des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
Il soutient que :
En ce qui concerne le refus de titre de séjour :
- la décision est entachée d'une erreur de fait dès lors qu'elle indique que
Mme D..., de nationalité portugaise, est sa concubine, alors qu'il s'agit en réalité de son épouse ;
- elle méconnaît les dispositions des articles L 233-1, L 233-2 et R 233-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; pour l'application de l'article L. 233-2, il doit être considéré comme membre de famille d'une citoyenne de l'Union européenne, Mme D..., laquelle bénéficie d'un droit au séjour sur le fondement du 1° des dispositions de l'article L. 231-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; cette dernière, en dépit de l'interruption de son activité professionnelle pour quatre accidents du travail, conserve son droit au séjour en application de l'article R. 233-7 dudit code ; elle peut en outre se prévaloir d'un droit au séjour permanent, en raison de son séjour de manière légale et ininterrompue en France pendant cinq années, en application de l'article R. 233-7 ;
- la décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; il justifie de diplômes attestant sa qualification dans le bâtiment, d'une intégration professionnelle en France avec le soutien de son employeur dans un métier en tension, ainsi qu'y avoir établi le centre de ses attaches familiales ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :
- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 251-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'il bénéficie d'un droit au séjour dérivé de celui de son épouse ;
- elle est illégale en raison de l'illégalité de la décision de refus de séjour qui la fonde ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense enregistré le 17 juillet 2024, le préfet de la Gironde conclut au rejet de la requête.
Il soutient qu'aucun des moyens soulevés par le requérant n'est fondé.
M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision
du 16 janvier 2024.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. A... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. C... B..., ressortissant béninois né en 1983, déclare être entré en France le 24 février 2019. Le 18 novembre 2019, il s'est vu délivrer un titre de séjour en raison de son état de santé, valable jusqu'au 17 mai 2020, puis en a sollicité le renouvellement
le 25 février 2020. Par arrêté du 30 avril 2021, le préfet de la Gironde a rejeté sa demande de renouvellement et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours. Par un jugement n° 2104469 du 2 décembre 2021, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté la requête de M. B... tendant à l'annulation de cet arrêté. Le 27 octobre 2022, il a sollicité auprès du préfet de la Gironde son admission exceptionnelle au séjour, sur le fondement des stipulations de l'article 14 de l'accord franco-béninois du 28 novembre 2007 et des dispositions de l'article L. 421-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 27 juillet 2023, le préfet de la Gironde a refusé de faire droit à cette demande, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. M. B... relève appel du jugement du 23 novembre 2023 par lequel le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
2. Pour refuser de délivrer un titre de séjour à M. B..., le préfet de la Gironde a considéré que " la circonstance que sa concubine réside légalement en France n'est pas de nature à lui ouvrir un quelconque droit au séjour ". Toutefois, les pièces versées au dossier établissent qu'à la date de la décision contestée, M. B... n'était pas en situation de concubinage mais marié depuis plus de trois mois avec Mme D..., ressortissante portugaise. M. B... est dès lors fondé à soutenir que cet arrêté est entaché d'une erreur de fait, laquelle ne peut, en l'espèce, être regardée comme ayant été sans incidence sur le sens de la décision contestée.
3. Il en résulte que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bordeaux a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 27 juillet 2023 par lequel le préfet de la Gironde a refusé de l'admettre au séjour, lui fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.
Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :
4. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (...) prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. / La juridiction peut également prescrire d'office cette mesure. ". Selon l'article L. 911-2 du même code : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public (...) prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé. (...) ".
5. Eu égard au motif d'annulation retenu, l'exécution du présent arrêt implique seulement que le préfet de la Gironde d'une part, réexamine la situation de M. B... et se prononce à nouveau sur sa demande de titre de séjour dans un délai de trois mois à compter de sa notification et, d'autre part, lui délivre sans délai une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler dans l'attente de ce réexamen. Il n'y a pas lieu en revanche d'assortir cette injonction d'une astreinte.
Sur les frais liés au litige :
6. M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale. Ainsi, son avocat peut se prévaloir des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat à une somme de 1 200 euros à verser à Me Pardoe, avocat de M. B..., au titre de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement du 23 novembre 2023 et l'arrêté du 27 juillet 2023 sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet de la Gironde de réexaminer la situation de M. B... et de se prononcer à nouveau sur sa demande de titre de séjour dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt et de lui délivrer sans délai une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler dans l'attente de ce réexamen.
Article 3 : L'Etat versera Me Pardoe, avocat de M. B..., la somme de 1 200 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 alinéa 2 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B..., au préfet de la Gironde, au ministre de l'intérieur et à Me Maïwenn Pardoe.
Délibéré après l'audience du 8 octobre 2024 à laquelle siégeaient :
Mme Catherine Girault, présidente,
Mme Anne Meyer, présidente-assesseure,
M. Antoine Rives, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 31 octobre 2024.
Le rapporteur,
Antoine A...
La présidente,
Catherine GiraultLa greffière,
Virginie Guillout
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 24BX00614