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23/12/2024 | FRANCE | N°23BX00659

France | France, Cour administrative d'appel de BORDEAUX, 3ème chambre, 23 décembre 2024, 23BX00659


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Mme D... B... a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler le certificat d'urbanisme tacite ainsi que le certificat d'urbanisme du 25 février 2020 par lequel le maire d'Aureilhan a décidé que la parcelle cadastrée section AM n° 112 ne pouvait être utilisée en vue de la création de huit lots à bâtir pour des maisons individuelles.



Par un jugement n° 2001034 du 30 décembre 2022, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande.


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Par une requête enregistrée le 10 mars 2023, Mme B..., représenté...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... B... a demandé au tribunal administratif de Pau d'annuler le certificat d'urbanisme tacite ainsi que le certificat d'urbanisme du 25 février 2020 par lequel le maire d'Aureilhan a décidé que la parcelle cadastrée section AM n° 112 ne pouvait être utilisée en vue de la création de huit lots à bâtir pour des maisons individuelles.

Par un jugement n° 2001034 du 30 décembre 2022, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 10 mars 2023, Mme B..., représentée par Me Marcel, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 30 décembre 2022 du tribunal administratif de Pau ;

2°) d'annuler le certificat d'urbanisme du 25 février 2020 ;

3°) d'enjoindre à la commune d'Aureilhan de lui délivrer le certificat sollicité dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt ;

4°) de mettre à la charge de la commune d'Aureilhan la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le certificat d'urbanisme du 25 février 2020 a été pris par une autorité incompétente ; la délégation de signature est trop imprécise et générale ; elle ne concerne pas les certificats d'urbanisme ; la commune ne démontre pas que l'arrêté portant délégation ait été affiché ;

- c'est à tort que le tribunal a estimé que ce certificat d'urbanisme n'était pas entaché d'une erreur de fait, sur le fondement de l'article L. 111-11 du code de l'urbanisme, alors qu'il appartenait au maire de solliciter des informations sur le délai d'exécution des travaux d'extension capacitive ;

- le classement en zone AUo de la parcelle cadastrée section AM n° 112 est illégal.

Par un mémoire en défense et une pièce complémentaire, enregistrés les 6 et 14 avril 2023, la commune d'Aureilhan, représentée par Me Soulié, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 2 500 euros soit mise à la charge de Mme B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la demande de première instante était irrecevable, dès lors qu'elle était tardive ;

- les moyens de la requête sont infondés.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Vincent Bureau,

- les conclusions de M. Julien Dufour, rapporteur public,

- et les observations de Me Marcel, représentant Mme B....

Considérant ce qui suit :

1. Mme B... est propriétaire de la parcelle cadastrée section AM n° 112 sur le territoire de la commune d'Aureilhan. Le 18 octobre 2019, elle a déposé une demande de certificat d'urbanisme pour un projet de création de huit lots à bâtir pour des maisons individuelles sur la parcelle cadastrée section AM n° 112. Le silence gardé par le maire de la commune d'Aureilhan pendant une période de deux mois suivant la date de dépôt de la demande de certificat d'urbanisme a fait naître un certificat d'urbanisme tacite. Par un arrêté du 25 février 2020, le maire d'Aureilhan a délivré un certificat d'urbanisme négatif. Mme B... relève appel du jugement du 30 décembre 2022 par lequel le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions.

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 410-1 du code de l'urbanisme : " (...) Le certificat d'urbanisme est délivré dans les formes, conditions et délais déterminés par décret en Conseil d'Etat par l'autorité compétente mentionnée au a et au b de l'article L. 422-1 du présent code. ". Aux termes de l'article L. 422-1 du même code : " L'autorité compétente pour délivrer le permis de construire, d'aménager ou de démolir et pour se prononcer sur un projet faisant l'objet d'une déclaration préalable est : a) Le maire, au nom de la commune, dans les communes qui se sont dotées d'un plan local d'urbanisme (...) ". Aux termes de l'article L.2122 18 du code général des collectivités territoriales : " Le maire est seul chargé de l'administration, mais il peut, sous sa surveillance et sa responsabilité, déléguer par arrêté une partie de ses fonctions à un ou plusieurs de ses adjoints et, en l'absence ou en cas d'empêchement des adjoints ou dès lors que ceux-ci sont tous titulaires d'une délégation, à des membres du conseil municipal. ". Aux termes de l'article L. 2131-1 du code général des collectivités territoriales, alors applicable : " Les actes pris par les autorités communales sont exécutoires de plein droit dès qu'il a été procédé à leur publication ou affichage ou à leur notification aux intéressés ainsi qu'à leur transmission au représentant de l'Etat dans le département ou à son délégué dans l'arrondissement. Pour les décisions individuelles, cette transmission intervient dans un délai de quinze jours à compter de leur signature. (...) Le maire peut certifier, sous sa responsabilité, le caractère exécutoire de ces actes. ". Aux termes de l'article R. 2122-7 du même code : " La publication des arrêtés du maire peut être constatée par une déclaration certifiée du maire (...) ".

3. Il ressort des pièces du dossier que le certificat d'urbanisme du 25 février 2020 a été signé par M. C... A..., adjoint au maire délégué. Par un arrêté du 8 avril 2014, M. A... a reçu délégation de fonctions en matière d'urbanisme, notamment pour assurer " l'instruction et la délivrance des autorisations d'occupation des sols et des demandes de renseignements d'urbanisme " et a reçu délégation de signature à l'effet notamment de signer tous les documents relatifs à ce domaine, " dont les autorisations d'urbanisme diverses ". Contrairement à ce que soutient Mme B..., une telle délégation n'est ni trop générale, ni trop imprécise. Par ailleurs, il ressort des mentions de cet arrêté qu'il a été transmis à la préfecture des Hautes-Pyrénées le 10 avril 2014. En outre, la commune d'Aureilhan a produit en défense un certificat établi par son maire le 7 avril 2023 attestant que l'arrêté du 9 juin 2015 a été affiché en mairie du 14 avril 2014 au 16 mai 2014. Mme B... ne fait état d'aucun élément de nature à contredire les mentions figurant sur le certificat du 7 avril 2023, lesquelles font foi jusqu'à preuve du contraire. Par suite, Mme B... n'est pas fondée à soutenir que M. A... était incompétent pour signer le certificat d'urbanisme attaqué.

4. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 410-1 du code de l'urbanisme : " Le certificat d'urbanisme, en fonction de la demande présentée : / a) Indique les dispositions d'urbanisme, les limitations administratives au droit de propriété et la liste des taxes et participations d'urbanisme applicables à un terrain ; / b) Indique en outre, lorsque la demande a précisé la nature de l'opération envisagée ainsi que la localisation approximative et la destination des bâtiments projetés, si le terrain peut être utilisé pour la réalisation de cette opération ainsi que l'état des équipements publics existants ou prévus. / (...) ".

5. En l'espèce, le certificat d'urbanisme du 25 février 2020 se fonde sur un double motif tiré, d'une part, de ce que l'autorité compétente n'est pas en mesure d'indiquer si les réseaux publics de distribution d'électricité sont présents au droit du terrain ou dans quel délai des travaux portant sur ces réseaux pourront être exécutés, et, d'autre part, de ce que le classement de la parcelle cadastrée section AM n° 112 en zone AUo n'autorise l'urbanisation que sous réserve d'une modification ou d'une révision du plan local d'urbanisme.

6. D'une part, aux termes de l'article L. 111-11 du code de l'urbanisme : " Lorsque, compte tenu de la destination de la construction ou de l'aménagement projeté, des travaux portant sur les réseaux publics de distribution d'eau, d'assainissement ou de distribution d'électricité sont nécessaires pour assurer la desserte du projet, le permis de construire (...) ne peut être accordé si l'autorité compétente n'est pas en mesure d'indiquer dans quel délai et par quelle collectivité publique ou par quel concessionnaire de service public ces travaux doivent être exécutés (...) ". Aux termes de l'article R. 410-10 du code de l'urbanisme : " (...) L'autorité compétente recueille l'avis des collectivités, établissements publics et services gestionnaires des réseaux mentionnés à l'article L. 111-11 ainsi que les avis prévus par les articles R. 423-52 et R. 423-53. (...) ". Ces dispositions poursuivent notamment le but d'intérêt général d'éviter à la collectivité publique ou au concessionnaire d'être contraints, par le seul effet d'une initiative privée, de réaliser des travaux d'extension ou de renforcement des réseaux publics, sans prise en compte des perspectives d'urbanisation et de développement de la collectivité, et de garantir leur cohérence et leur bon fonctionnement. Un permis de construire doit être refusé lorsque, d'une part, des travaux d'extension ou de renforcement de la capacité des réseaux publics de distribution d'eau, d'assainissement ou d'électricité sont nécessaires à la desserte de la construction projetée et que, d'autre part, l'autorité compétente n'est pas en mesure d'indiquer dans quel délai et par quelle collectivité publique ou par quel concessionnaire de service public ces travaux doivent être exécutés, après avoir, le cas échéant, accompli les diligences appropriées pour recueillir les informations nécessaires à son appréciation.

7. Il ressort des pièces du dossier, et notamment de l'avis émis le 12 décembre 2019 par la société Enedis, que si la distance entre le réseau existant et la parcelle de Mme B... permet son raccordement au réseau public de distribution d'électricité avec un simple branchement, des travaux de renforcement capacitaire de ce réseau sont en revanche indispensables, afin de faire évoluer la puissance de 250 kVA à 400 kVA. Cet avis précise par ailleurs que la contribution à ces travaux sera à la charge de la collectivité sans indiquer toutefois ni le coût estimé, ni le délai prévisible de la réalisation de ces travaux. Or, il n'apparaît pas que le maire d'Aureilhan, avant d'opposer à Mme B... les dispositions de l'article L. 111-11 du code de l'urbanisme, ait effectué des diligences quelconques auprès du gestionnaire du réseau pour disposer de ces informations, qui étaient nécessaires à son appréciation. Il ne pouvait dans ces conditions fonder le certificat d'urbanisme négatif sur ces dispositions.

8. D'autre part, aux termes de l'article R. 151-20 du code de l'urbanisme : " Les zones à urbaniser sont dites " zones AU ". Peuvent être classés en zone à urbaniser les secteurs destinés à être ouverts à l'urbanisation. / Lorsque les voies ouvertes au public et les réseaux d'eau, d'électricité et, le cas échéant, d'assainissement existant à la périphérie immédiate d'une zone AU ont une capacité suffisante pour desservir les constructions à implanter dans l'ensemble de cette zone et que des orientations d'aménagement et de programmation et, le cas échéant, le règlement en ont défini les conditions d'aménagement et d'équipement, les constructions y sont autorisées soit lors de la réalisation d'une opération d'aménagement d'ensemble, soit au fur et à mesure de la réalisation des équipements internes à la zone prévus par les orientations d'aménagement et de programmation et, le cas échéant, le règlement. / Lorsque les voies ouvertes au public et les réseaux d'eau, d'électricité et, le cas échéant, d'assainissement existant à la périphérie immédiate d'une zone AU n'ont pas une capacité suffisante pour desservir les constructions à implanter dans l'ensemble de cette zone, son ouverture à l'urbanisation est subordonnée à une modification ou à une révision du plan local d'urbanisme comportant notamment les orientations d'aménagement et de programmation de la zone. ". Aux termes du règlement du plan local d'urbanisme de la commune d'Aureilhan : " Zone AUo : il s'agit des secteurs ouverts à l'urbanisation sous réserve de modification/révision du PLU. Pour ces secteurs, la commune souhaite que les porteurs de projets présentent des projets réfléchis et cohérents avant toute ouverture de secteur à l'urbanisation. / L'ouverture à l'urbanisation des secteurs AUo est conditionnée par une modification ou une révision du PLU. ".

9. Il appartient aux auteurs d'un plan local d'urbanisme de déterminer le parti d'aménagement à retenir pour le territoire concerné par le plan, en tenant compte de la situation existante et des perspectives d'avenir, et de fixer en conséquence le zonage et les possibilités de construction. Leur appréciation sur ces différents points ne peut être censurée par le juge administratif qu'au cas où elle serait entachée d'une erreur manifeste ou fondée sur des faits matériellement inexacts.

10. Il ressort des pièces du dossier que la zone AUo dans laquelle est classée la parcelle de la requérante correspond à une zone à urbaniser dans laquelle le réseau d'électricité n'a pas une capacité suffisante pour desservir les constructions à implanter, au sens du dernier alinéa de l'article R. 151-20 du code de l'urbanisme. Ainsi qu'il a été dit au point 7, le réseau électrique existant n'est en l'état pas en mesure d'assurer une desserte de cette parcelle compatible avec son ouverture à la construction. En outre, ainsi que l'a relevé le tribunal, le classement en zone AU de cette parcelle n'implique que le caractère différé de son urbanisation et la requérante ne peut utilement, eu égard à ce classement, invoquer le caractère enclavé du terrain en zone densément urbanisée, ni l'objectif de lutte contre l'étalement urbain figurant dans le projet d'aménagement et de développement durables du plan local d'urbanisme de la commune d'Aureilhan. Dans ces conditions, la délibération du 2 mai 2017 par laquelle le conseil municipal a approuvé la révision du plan local d'urbanisme de la commune d'Aureilhan, en tant qu'elle classe en zone AUo la parcelle cadastrée section AM n° 112, n'est pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation. Par suite, Mme B... n'est pas fondée à invoquer son illégalité par voie d'exception.

11. Par suite, le maire d'Aureilhan a pu légalement opposer à Mme B... que le secteur dans lequel se situe la parcelle considérée n'est pas constructible en l'absence d'une modification ou d'une révision du PLU. Il ressort par ailleurs des pièces du dossier que le maire aurait pris la même décision s'il s'était fondé sur ce seul motif, qui suffit à justifier la délivrance d'un certificat d'urbanisme négatif.

12. Il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée par la commune d'Aureilhan, Mme B... n'est pas fondée à se plaindre que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande tendant à l'annulation du certificat d'urbanisme du 25 février 2020.

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

13. L'exécution du présent arrêt n'implique aucune mesure d'exécution. Dès lors, les conclusions de la requête aux fins d'injonction doivent être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

14. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme B... la somme de 1 500 euros à verser à la commune d'Aureilhan au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. En revanche, ces dispositions font obstacle à ce qu'une somme soit mise, à ce titre, à la charge de la commune d'Aureilhan, qui n'est pas la partie perdante.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Mme B... versera à la commune d'Aureilhan la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... B... et à la commune d'Aureilhan.

Délibéré après l'audience du 3 décembre 2024, à laquelle siégeaient :

M. Laurent Pouget, président,

Mme Marie-Pierre Beuve Dupuy, présidente-assesseure,

M. Vincent Bureau, conseiller,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 23 décembre 2024.

Le rapporteur,

Vincent Bureau

Le président,

Laurent Pouget

Le greffier,

Christophe Pelletier

La République mande et ordonne au préfet des Hautes-Pyrénées en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

2

N° 23BX00659


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de BORDEAUX
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 23BX00659
Date de la décision : 23/12/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. POUGET
Rapporteur ?: M. Vincent BUREAU
Rapporteur public ?: M. DUFOUR
Avocat(s) : CABINET D'AVOCATS MAUVEZIN SOULIE

Origine de la décision
Date de l'import : 29/12/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-12-23;23bx00659 ?
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