Vu les ordonnances en date du 30 août 1999 par lesquelles le président de la cour administrative d'appel de Nancy a, en application du décret n 99-435 du 28 mai 1999 portant création d'une cour administrative d'appel à Douai et modifiant les articles R 5, R 7 et R 8 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, transmis à la cour administrative d'appel de Douai la requête présentée par la société anonyme Auchan-France dont le siège social est à Croix (Nord), ... ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ;
Vu 1 ) la requête, enregistré au greffe de la cour administrative d'appel de Nancy le 24 juin 1998, par laquelle la société anonyme Auchan-France demande à la Cour :
1 d'annuler le jugement n 95-120 en date du 26 mars 1998 par lequel le tribunal administratif de Lille a rejeté la demande en réduction des cotisations supplémentaires de taxe professionnelle auxquelles la société anonyme des marchés usines Auchan, aux droits et obligations de laquelle elle se trouve, a été assujettie au titre des années 1990, 1991, 1992 et 1993 dans les rôles de la commune d'Escaudoeuvres ;
2 de prononcer la réduction demandée ; ---- ---- -- Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu l'ordonnance n 86-1134 du 21 octobre 1986 ;
Vu la loi n 87-1127 du 31 décembre 1987 ;
Vu le décret n 99-435 du 28 mai 1999 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience,
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 31 octobre 2000
- le rapport de M. Nowak, premier conseiller,
- et les conclusions de M. Mulsant, commissaire du gouvernement ;
Considérant que la requête de la société anonyme des marchés usines Auchan et le recours du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie sont dirigés contre le même jugement et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour y être statué par une seule décision ;
Sur le recours du ministre :
Considérant que, d'une part, postérieurement à l'introduction du recours formé par le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie contre le jugement en date du 26 mars 1998 par lequel le tribunal administratif de Lille a accordé à la société anonyme des marchés usines Auchan la réduction de la cotisation supplémentaire de taxe professionnelle à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 1993, la société anonyme Auchan-France, qui vient aux droits et obligations de celle-ci, a, dans son mémoire en défense, confirmé n'avoir pas contesté devant les premiers juges le redressement à raison duquel cette réduction lui a été accordée et indiqué que les observations du ministre quant à l'erreur commise par le tribunal administratif n'appelait pas de sa part de plus amples commentaires ; que la société Auchan-France devant ainsi être regardée comme ayant renoncé au bénéfice de la chose jugée par le jugement attaqué, ce jugement n'est plus susceptible d'exécution ; que les conclusions du ministre tendant à l'annulation dudit jugement sont, dans cette mesure, devenues sans objet ;
Considérant, d'autre part, que, pour demander la décharge du complément de taxe professionnelle auquel elle a été assujettie au titre de l'année 1990, la société anonyme des marchés usines Auchan demandait que, dans la mesure où elle avait reçu l'avis d'imposition le 18 janvier 1994 soit après l'expiration du délai de reprise prévu à l'article L 174 du livre des procédures fiscales, une expertise soit ordonnée "afin de déterminer si l'homologation du rôle est régulièrement et effectivement intervenue avant l'expiration" de ce délai ; que le ministre est, dès lors, fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif s'est fondé pour faire droit à ces conclusions de la société sur un moyen, ainsi que l'admet la société Auchan-France, qui n'était pas soulevé devant lui et tiré de ce que l'administration n'apportant pas la preuve que la lettre du 29 octobre 1993, par laquelle elle informait la société des marchés usines Auchan des rehaussements des bases d'imposition à la taxe professionnelle, aurait été reçue avant le 1er janvier 1994, le complément de taxe dont s'agit était prescrit ;
Considérant toutefois qu'il appartient à la cour administrative d'appel, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner le moyen soulevé par la société anonyme des marchés usines Auchan devant le tribunal administratif de Lille ;
Considérant qu'aux termes de l'article 1658 du code général des impôts : "Les impôts directs sont recouvrés en vertu de rôles rendus exécutoires par arrêté du préfet. Pour l'application du premier alinéa, le représentant de l'Etat dans le département peut déléguer ses pouvoirs au directeur des services fiscaux et aux collaborateurs de celui-ci ayant au moins le grade de directeur divisionnaire. " et qu'aux termes du premier alinéa de l'article 1659 du même code : "La date de mise en recouvrement des rôles est fixée par l'autorité compétente pour les homologuer en application de l'article 1658, d'accord avec le trésorier-payeur général. Cette date est indiquée sur le rôle ainsi que sur les avis d'imposition délivrés aux contribuables." ; qu'aux termes de l'article L 174 du livre des procédures fiscales : "Les omissions ou les erreurs concernant la taxe professionnelle peuvent être réparées par l'administration jusqu'à l'expiration de la troisième année suivant celle au titre de laquelle l'imposition est due." ;
Considérant que, par l'extrait certifié conforme du rôle qu'elle produit énonçant qu'il avait été mis en recouvrement le 31 décembre 1993, l'administration n'établit pas, ainsi que, au demeurant, elle reconnaît n'être plus en mesure de le faire, que la décision portant homologation de ce rôle et fixant à cette date la mise en recouvrement du complément de taxe professionnelle auquel la société anonyme des marchés usines Auchan a été assujettie au titre de l'année 1990 a été prise avant l'expiration du délai de reprise prévu à l'article L 174 du livre des procédures fiscales, soit le 31 décembre 1993 ; qu'ainsi, la société Auchan-France est fondée à soutenir que l'imposition pour le recouvrement de laquelle elle a reçu un avis d'imposition le 18 janvier 1994 était prescrite ; que le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie n'est, dès lors, pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a accordé à la société des marchés usines Auchan la décharge de ce complément de taxe professionnelle ;
Sur la requête de la société anonyme Auchan-France :
En ce qui concerne l'application de la loi fiscale :
Considérant qu'aux termes de l'article 1467 du code général des impôts : "La taxe professionnelle a pour base 1 ... b) les salaires, au sens de l'article 231-1 ..., à l'exclusion des salaires versés aux apprentis sous contrats et aux handicapés physiques ..." ; que "les salaires, au sens de l'article 231-1", s'entendent, selon cet article, des "sommes payées à titre de traitements, salaires, indemnités, émoluments, y compris la valeur des avantages en nature" ; que doivent être incluses dans les bases de cette taxe au titre du b) de l'article 1467 précité les compléments de rémunération constitués par les sommes qui sont versées par une entreprise à ses salariés en application d'un accord d'intéressement ; que les sommes versées à ses salariés par la société anonyme des magasins usines Auchan au cours des années 1988, 1989, 1990 et 1991 en application d'un accord d'intéressement mis en uvre dans les conditions de l'ordonnance susvisée du 21 octobre 1986 dans sa partie relative à l'intéressement aux résultats d'une entreprise, devaient ainsi être comprises dans les bases de la taxe professionnelle dont elle était redevable au titre des années 1990, 1991, 1992 et 1993 à raison de l'établissement qu'elle exploite dans la commune d'Escaudoeuvres ;
En ce qui concerne l'application de l'article L 80 A du livre des procédures fisca les :
Considérant, d'une part, que l'instruction du 29 novembre 1996 publiée au bulletin officiel des impôts sous la référence 6 E-9-96 dont fait état la société Auchan-France est postérieure aux mises en recouvrement des impositions contestées ; qu'ainsi, en tout état de cause, la société requérante ne peut utilement, sur le fondement de l'article susvisé, se prévaloir de l'interprétation du texte fiscal qu'elle pourrait comporter ;
Considérant, d'autre part, que si cette instruction mentionne qu'"il conviendra donc de dégrever les impositions déjà mises en recouvrement à ce titre et d'abandonner les redressements en cours", elle définit ainsi sa propre applicabilité dans le temps et, dès lors, ne peut être regardée comme interprétant le texte fiscal qui constitue le fondement légal des impositions en litige ; que, par suite, elle ne peut être valablement invoquée sur le fondement de l'article susindiqué ;
Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société anonyme Auchan-France n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lille a rejeté la demande de la société anonyme des marchés usines Auchan ;
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions du recours du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie dirigées contre le jugement en date du 26 mars 1998 par lequel le tribunal administratif de Lille a accordé à la société anonyme des marchés usines Auchan la réduction du complément de taxe professionnelle auquel elle a été assujettie au titre de l'année 1993.
Article 2 : Le surplus des conclusions du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie est rejeté.
Article 3 : La requête de la société anonyme Auchan-France est rejetée
Article 4 : La présente décision sera notifiée à la société anonyme Auchan-France et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie.