Vu les ordonnances en date du 30 août 1999 par lesquelles le président de la cour administrative d'appel de Nancy a, en application du décret n 99-435 du 28 mai 1999 portant création d'une cour administrative d'appel à Douai et modifiant les articles R 5, R 7 et R 8 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel, alors applicables, transmis à la cour administrative d'appel de Douai la requête présentée par la société à responsabilité limitée Société clermontoise de constructions dont le siège social est à Clermont (Oise), ... ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ;
Vu 1 ) la requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Nancy le 4 décembre 1998, par laquelle la société à responsabilité limitée Société clermontoise de constructions demande à la Cour :
1 d'annuler le jugement n 941503 en date du 10 novembre 1998 par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande en décharge de l'imposition forfaitaire annuelle des sociétés à laquelle elle a été assujettie au titre des années 1990 et 1991 ;
2 de prononcer la décharge demandée ;
3 de condamner l'Etat à lui verser une somme de 10 000 F au titre de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu le code de justice administrative ;
Vu le décret n 99-435 du 28 mai 1999 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience,
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 avril 2002
le rapport de M. Nowak, premier conseiller,
et les conclusions de M. Michel, commissaire du gouvernement ;
Considérant que la requête de la société à responsabilité limitée société clermontoise de constructions et le recours du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie susvisés sont dirigés contre le même jugement et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour y être statué par une seule décision ;
Sur la régularité du jugement :
Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'en regardant la demande dont la société à responsabilité limitée société clermontoise de constructions l'avait saisi comme tendant à la décharge de cotisations supplémentaires à l'impôt sur les sociétés auxquelles elle aurait été assujettie au titre des années 1990, 1991, 1992 et 1993 par le moyen tiré de ce que ces impositions seraient indûment réclamées dès lors qu'il n'a pas été fait droit à la demande de la société d'imputation des impositions forfaitaires annuelles que celle-ci a acquittées au titre des années 1990, 1991 et 1992, le tribunal administratif a dénaturé tant les conclusions que les moyens de cette demande laquelle portait sur les impositions forfaitaires annuelles des sociétés assignées au titre des années 1990, 1991, 1992 et par deux moyens tirés de ce qu'il ne pouvait être réclamé à la société le paiement d'impositions qu'elle devait être regardée avoir déjà payées ; qu'eu égard à l'irrégularité dont il est ainsi entaché et tenant à une omission à statuer, le jugement du tribunal administratif d'Amiens en date du 10 novembre 1998 doit être annulé en tant qu'il a rejeté la demande en décharge de l'imposition forfaitaire annuelle des sociétés à laquelle la société clermontoise de constructions a été assujettie au titre des années 1990 et 1991 ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu pour la cour administrative d'appel de se prononcer immédiatement par voie d'évocation sur cette partie de la demande présentée par la société clermontoise de constructions devant le tribunal administratif d'Amiens et de statuer par l'effet dévolutif sur le recours du ministre de l'économie, des finances et de l'industrie ;
Sur la fin de non-recevoir opposée par la société à responsabilité limitée société clermontoise de constructions au recours du ministre :
Considérant que le recours du ministre a été enregistré au greffe de la cour dans le délai d'appel de deux mois qui commence à courir à compter de l'expiration du délai de deux mois imparti au service local pour lui transmettre le jugement attaqué et le dossier de l'affaire, en vertu des dispositions de l'article R 200-18 du livre des procédures fiscales ; que les dispositions de l'article R 200-18 de ce livre tiennent compte des nécessités particulières du fonctionnement de l'administration fiscale qui la placent dans une situation différente de celle des autres justiciables et justifient le délai complémentaire de deux mois accordé au ministre, délai dont les contribuables peuvent d'ailleurs, en provoquant eux-mêmes la signification du jugement au ministre, réduire la durée ; que lesdites dispositions ne confèrent pas au ministre, contrairement à ce que soutient la société clermontoise de constructions, un privilège qui serait de nature à porter atteinte au principe d'égalité ; que si la société clermontoise de constructions soutient également que les dispositions de cet article seraient contraires aux stipulations de l'article 6 de la convention européenne des droits de l'Homme et des libertés fondamentales, elle ne saurait, en tout état de cause, invoquer utilement lesdites stipulations dans un litige relatif à la contestation de la détermination de l'assiette d'un impôt direct, dès lors qu'elles ne visent que les procès portant sur des droits ou obligations de caractère civil ou sur des accusations en matière pénale ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
Considérant qu'étant passible de l'impôt sur les sociétés, la société clermontoise de constructions se trouvait, par voie de conséquence et quels que soient ses résultats déclarés, soumise à l'imposition forfaitaire annuelle mentionnée à l'article 223 septies du code général des impôts ; que cette imposition, qui doit être payée spontanément, peut, lorsqu'elle ne l'a pas été, être établie d'office ; que, dès lors, la mise en recouvrement de l'imposition n'est subordonnée ni à l'engagement d'une vérification de comptabilité ni à la notification préalable d'un redressement ; qu'il suit de là que le moyen tiré de ce que la notification de redressements qui lui a été adressée à l'issue de la vérification de comptabilité dont elle a fait l'objet en 1993 et portant sur les années 1990, 1991 et 1992 ne mentionnait aucun rappel de cette imposition et que, par suite, en ce qui concerne ces années qui auraient fait l'objet d'une nouvelle vérification, la procédure d'imposition serait irrégulière, n'est pas fondé ;
Sur le bien-fondé des impositions :
Considérant qu'aux termes de l'article 223 septies du code général des impôts : "Les personnes morales passibles de l'impôt sur les sociétés sont assujetties à une imposition forfaitaire annuelle ..." ; qu'aux termes de l'article 220 A du même code : "Le montant de l'imposition forfaitaire instituée par l'article 223 septies est déductible de l'impôt sur les sociétés dû pendant l'année de l'exigibilité de cette imposition et les deux années suivantes." ;
Considérant que la société clermontoise de constructions allègue et alléguait devant les premiers juges que, d'une part, les impositions en litige faisaient double emploi avec le montant total des acomptes qu'elle avait versés au cours des années dont s'agit au titre de l'impôt sur les sociétés supérieur à l'imposition forfaitaire annuelle et sur lesquels cette imposition est imputable en application de l'article 220 A du code général des impôts et que, d'autre part, les dispositions de l'article 1253 du code civil n'ouvraient pas à l'administration le choix d'affectation des sommes versées au règlement de différents impôts dus ; que de tels moyens qui ne concernent pas l'assiette de l'impôt mais ont trait aux modalités de son paiement sont, en tout état de cause, inopérant au soutien de conclusions en décharge de l'imposition forfaitaire annuelle ; que, par suite, la demande présentée par la société clermontoise de constructions devant le tribunal administratif d'Amiens doit être rejetée ; que, toutefois, le ministre de l'économie, des finances et de l'industrie est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a accordé à la société clermontoise de constructions la décharge de l'imposition forfaitaire annuelle des sociétés à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 1992 ; qu'il y a lieu, en conséquence, de remettre cette imposition à la charge de la société ;
Sur l'application de l'article L 761-1 du code de justice administrative :
Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la Cour ne peut pas faire bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge ; que les conclusions présentées à ce titre par la société clermontoise de constructions doivent, dès lors, être rejetées ;
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif d'Amiens en date du 10 novembre 1998 est annulé en ses articles 2, 3 et 4.
Article 2 : L'imposition forfaitaire annuelle de l'année 1992 est remise intégralement à la charge de la société à responsabilité limitée société clermontoise de constructions.
Article 3 : La demande présentée par la société à responsabilité limitée société clermontoise de constructions devant le tribunal administratif d'Amiens en tant qu'elle concernait l'imposition forfaitaire annuelle des sociétés des années 1990 et 1991 est rejetée.
Article 4 : La présente décision sera notifiée à la société à responsabilité limitée société clermontoise de constructions et au ministre de l'économie, des finances et de l'industrie. Copie sera transmise au directeur de contrôle fiscal Est.