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29/04/2003 | FRANCE | N°00DA01147

France | France, Cour administrative d'appel de Douai, 1ere chambre, 29 avril 2003, 00DA01147


Vu la requête, enregistrée le 2 octobre 2000 au greffe de la cour administrative d'appel de Douai, présentée par la société Gagneraud, dont le siège est 10, place Léon Meyer BP 62 (76050) Le Havre ; la société Gagneraud demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 96-1578 en date du 27 juin 2000 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté la requête de la société SEE Gagneraud Père et Fils tendant à la condamnation du port autonome du Havre à lui payer la somme de 311 443,60 francs en paiement des prestations réalisées en qualité de sous-traitante

de la société Millier Pesage ;

2°) de condamner le port autonome du Havre...

Vu la requête, enregistrée le 2 octobre 2000 au greffe de la cour administrative d'appel de Douai, présentée par la société Gagneraud, dont le siège est 10, place Léon Meyer BP 62 (76050) Le Havre ; la société Gagneraud demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 96-1578 en date du 27 juin 2000 par lequel le tribunal administratif de Rouen a rejeté la requête de la société SEE Gagneraud Père et Fils tendant à la condamnation du port autonome du Havre à lui payer la somme de 311 443,60 francs en paiement des prestations réalisées en qualité de sous-traitante de la société Millier Pesage ;

2°) de condamner le port autonome du Havre au paiement de ladite somme ;

3°) de condamner le port autonome du Havre à lui payer la somme de 8 000 francs sur le fondement de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

Code C Classement CNIJ : 39-05-01-01-03

Elle soutient que le jugement est entaché de contradiction de motifs ; que l'action qui n'avait pas été engagée sur le fondement des dispositions de la loi de 1975 mais celui de la responsabilité délictuelle du port Autonome était recevable ; que le port autonome du Havre qui était informé de l'intervention de l'entreprise Gagneraud et qui a payé l'entrepreneur en difficulté en lieu et place du sous-traitant a commis une faute de nature à engager sa responsabilité ; que le moyen tiré de l'inexistence d'une mise en demeure adressée à la société Millier Pesage est inopérant ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 26 décembre 2000, présenté pour le port autonome du Havre, par Me X..., avocat, qui conclut au rejet de la requête et à la condamnation de la société SEE Gagneraud Père et Fils à lui verser la somme de 10 000 francs sur le fondement des dispositions de l'article L. 8-1 du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ; elle soutient que la demande présentée par la requérante qui a modifié en appel le fondement juridique de son action est irrecevable et mal fondée ; que la société Gagneraud qui ne remplit pas les conditions lui ouvrant droit au paiement direct ne peut recourir à l'action directe par voie de substitution ; que la requérante n'a pas régulièrement mis en demeure la société Millier Pesage, entreprise principale ; que la déclaration de créance de la société Gagneraud ne lui a jamais été dénoncée dans le respect de l'article 12 de la loi du 31 décembre 1975 ; que la société Gagneraud ne s'est jamais manifestée auprès du port autonome du Havre ; que la somme de 368 736 francs réclamée a été réglée dès le 17 juin 1994 à la société Millier Pesage ; que la requérante n'établit pas que le port autonome du Havre aurait eu connaissance de sa présence sur le chantier pendant l'exécution du marché et qu'elle aurait collaboré de façon effective et entretenu des relations directes avec le port autonome ; que la demande de paiement direct est intervenue alors que les travaux avaient été entièrement exécutés et payés et où la défaillance de l'entreprise principale était acquise ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 16 février 2001, présentée pour la société Gagneraud qui conclut aux mêmes fins par les mêmes moyens ;

Vu le mémoire complémentaire, enregistré le 19 avril 2001, présenté pour le port autonome du Havre qui conclut aux mêmes fins par les mêmes motifs ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 75-13354 du 31 décembre 1975 relative à la sous-traitance ;

Vu le code des marchés publics ;

Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience,

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 avril 2003 où siégeaient Mme Sichler, président de chambre, Mme Merlin-Desmartis, président-assesseur et M. Quinette, premier conseiller :

- le rapport de M. Quinette, premier conseiller,

- les observations de Me Y..., avocat, membre de la SCP Roussel Sagon Lasne, pour la société Gagneraud,

- et les conclusions de M. Yeznikian, commissaire du gouvernement ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

Considérant qu'il résulte de l'examen du jugement que le tribunal administratif n'a pas entaché sa décision d'une contradiction de motifs ;

Sur les conclusions à fin d'indemnité :

Considérant qu'en application des dispositions combinées des articles 3 et 6 de la loi n° 75-1334 du 31 décembre 1975 susvisée, le paiement direct du sous-traitant par le maître d'ouvrage pour la part du marché dont il assure l'exécution est subordonné à la double condition que, sur demande de l'entrepreneur principal, le sous-traitant ait été accepté par le maître de l'ouvrage et que les conditions de paiement du contrat de sous-traitance aient été agréées par le maître de l'ouvrage ; qu'il résulte de l'instruction que la société Millier Pesage, titulaire d'un marché de travaux passé le 9 février 1994 avec le port autonome du Havre en vue de la réalisation d'un nouveau pont-bascule a sous-traité l'exécution d'une partie de ces travaux à la société SEE Gagneraud Père et Fils sans que ce sous-traitant ait été accepté par le port autonome du Havre dans les conditions prévues à l'article 3 de la loi du 31 décembre 1975 et sans que les conditions de paiement aient été agréées ;

Considérant qu'il résulte des stipulations du cahier des clauses administratives et du cahier des clauses techniques particulières du marché conclu entre le port autonome du Havre et la société Millier Pesage que la maîtrise d'oeuvre des travaux serait assurée par cette dernière et la réalisation de ces derniers confiée à un entrepreneur qui serait notamment chargé de dresser un programme d'exécution détaillé assorti du projet des installations de chantier et du plan de sécurité et d'hygiène ; qu'en vue de l'exécution de ce marché, une réunion d'ouverture du chantier a été organisée le 11 mars 1994 à laquelle participaient le port autonome du Havre, la société Millier Pesage et la société Gagneraud ; qu'en réponse à une demande du port autonome du Havre en date du 22 mars 1994, la société Gagneraud a communiqué à ce dernier le plan de prévention dont la fourniture avait été prévue au cours de la réunion de chantier du

11 mars 1994 ; qu'il résulte ainsi de l'instruction que le port autonome du Havre connaissait l'existence du contrat de sous-traitance conclu entre la société Millier Pesage et la société Gagneraud ; qu'en s'abstenant de provoquer la régularisation de la situation du sous-traitant, le port autonome du Havre a méconnu les dispositions susrappelées des articles 3 et 6 de la loi du 31 décembre 1975 et commis une faute de nature à engager sa responsabilité ; que cette faute est à l'origine du dommage subi par la société Gagneraud qui n'a pas été payée par la société Millier Pesage pour les travaux qu'elle a exécutés en application du contrat de sous-traitance ; que la responsabilité du port autonome du Havre est toutefois atténuée par les fautes qu'ont commises tant la société Millier Pesage en ne soumettant pas la société Gagneraud à l'agrément du maître d'ouvrage que la société requérante elle-même à qui il appartenait de demander la régularisation de la situation ; qu'il sera fait une juste appréciation des circonstances de l'affaire en mettant à la charge du port autonome du Havre le tiers du préjudice subi par la requérante ;

Considérant que la société Gagneraud est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a refusé de faire droit à ses conclusions indemnitaires dirigées contre le port autonome du Havre ; qu'il y a lieu d'annuler ce jugement ;

Considérant qu'il appartient à la cour administrative d'appel saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel de statuer sur les conclusions de la requérante aux fins d'octroi d'une indemnité ;

Considérant qu'il résulte de l'instruction que les sommes perdues par la société Gagneraud se sont élevées à 47 479,33 euros ; que celle-ci est par suite fondée à demander que le port autonome du Havre soit condamné à lui allouer une indemnité de 15 826,44 euros ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la société Gagneraud qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante soit condamnée à payer au port autonome du Havre la somme qu'elle demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de condamner le port autonome du Havre à payer à la société Gagneraud une somme de 1 200 euros au titre des frais qu'elle a exposés et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Rouen en date du 27 juin 2000 est annulé.

Article 2 : Le port autonome du Havre est condamné à verser 15 826 euros à la société Gagneraud.

Article 3 : Le port autonome du Havre versera à la société Gagneraud la somme de 1200 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à la société Gagneraud, au port autonome du Havre et au ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer.

Copie sera transmise au préfet de la région Haute-Normandie, préfet de la Seine-Maritime

Délibéré à l'issue de l'audience publique du 3 avril 2003 dans la même composition que celle visée ci-dessus.

Prononcé en audience publique le 29 avril 2003.

Le rapporteur

Signé : J. A...

Le président de chambre

Signé : F. B...

Le greffier

Signé : M. Z...

La République mande et ordonne au ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme

Le greffier

Muriel Z...

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N°00DA01147


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Douai
Formation : 1ere chambre
Numéro d'arrêt : 00DA01147
Date de la décision : 29/04/2003
Sens de l'arrêt : Satisfaction partielle
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme Sichler
Rapporteur ?: M. Quinette
Rapporteur public ?: M. Yeznikian
Avocat(s) : SCP ROUSSEL-SAGON-LASNE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.douai;arret;2003-04-29;00da01147 ?
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